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Les exportations tunisiennes à l’épreuve du Covid-19
14/05/2020 | 17:59
5 min
Les exportations tunisiennes à l’épreuve du Covid-19

 

L’année 2020 sera inscrite dans les annales. La récession guette le monde entier, notamment les principaux partenaires de la Tunisie, ce qui impactera l’export, l’emploi et les recettes en devises. Les chiffres publiés la veille par l’INS sont très éloquents et démontrent cette tendance baissière, qui touche des secteurs exportateurs comme celui des composants automobiles. Sont-ils prophétiques ?

 

L'Institut national de la statistique (INS) a publié mercredi 13 mai 2020, les indicateurs du commerce extérieur à prix courant et ils sont très parlants. Les exportations pour le mois d’avril sont en baisse de 48,9% en glissement annuel. «La plus forte contraction dans l’histoire économique récente», indique l’institut. La diminution a touché principalement les secteurs off-shore, à savoir le secteur du textile, habillement et cuirs (-83,5%) et le secteur des industries mécaniques et électriques (-62,1%).

 

 

La répartition par pays dénote des baisses remarquables des ventes vers les principaux partenaires européens, essentiellement la France (-64%), l’Allemagne (-61%) et l’Italie (-47%).

Même constat pour les quatre mois de 2020, des exportations en baisse pour le secteur du textile, habillement et cuirs (-33,6%) et pour les industries mécaniques et électriques de (-25%). En outre, les exportations vers l’Union européenne, qui représentent 72% du total des exportations, ont diminué de 22,9%. La baisse a touché plusieurs marchés phares de la Tunisie : la France de 36,4%, l’Allemagne de 27,1% et l’Italie de 17,2%.

 

Ces chiffres sont alarmants s’ils persistent, la situation économique était déjà assez délicate avant la pandémie du coronavirus. 2019 a été une année difficile et 2020 lui a emboité le pas. En 2019, l’économie a enregistré une croissance d’à peine 1%. Avec la crise Covid-19, on s’accorde sur le fait que la récession en Tunisie serait de l’ordre de 4% mais le coût en termes d’emplois serait beaucoup plus important.

Autre consensus, les experts pensent que les exportations tunisiennes seront impactées. Le Fonds monétaire international (FMI) prévoit que les exportations à prix constants vont afficher un nouveau recul de 14,2% en 2020 après les -5,1% enregistrés en 2019.

La Banque européenne pour la reconstruction et le développement (Berd) estime, pour sa part, dans son rapport "Regional Economic Prospects" que «les chaînes d'approvisionnement pour les industries du textile et de l'habillement et des composants automobiles peuvent être affectées». Mohamed Damak, responsable notation des banques au Moyen Orient et Afrique chez Standard & Poor's, considère, pour sa part, que «l’année 2020 sera difficile et que la crise du Covid-19 induira un choc macroéconomique d’une ampleur très importante, 2 fois plus important que le choc de 2011». Selon lui, la crise touchera principalement le tourisme et les secteurs liés, les industries exportatrices, le secteur du commerce hors alimentaire et l’immobilier. Elle entrainera également une augmentation du chômage.

En effet, l’Europe notre principal partenaire est touché de plein fouet par la crise Covid-19. Selon les prévisions du FMI, la France enregistrera en 2020 une contraction de 7,2%, l’Allemagne de 7% (la «pire récession» économique la Seconde Guerre mondiale, ndlr) et l’Italie de 9,1%.

 

 

La crise impactera donc les exportations et donc, par extension, l’équilibre de la balance commerciale qui sera flagrant dès la reprise d’une activité normale et, en parallèle, les entrées en devises.

En première ligne, le secteur des composants automobiles qui représente à lui seul environ 40% des exportations tunisiennes, sera touché par un effet domino. La pandémie a impacté le pouvoir d’achat dans tous les pays touchés. La vente de nouveaux véhicules sera surement impactée et décision d’achat temporisée. La demande en termes de véhicules neufs baissera. Idem, pour celle des composants.

Or le secteur des composants automobiles représente plus de 80.000 emplois directs, 7,5 milliards de dinars d’exportation et aux alentours de 3 à 4% du PIB.

 

Dans un communiqué, la Tunisian Automotive Association (TAA) expliquait que «les sociétés du secteur se battent pour sauvegarder leurs marchés et par là-même les emplois, dans un contexte imprévisible où les chaînes d’approvisionnement, les clients et les fournisseurs connaissent aussi de très grandes difficultés».

Autre secteur touché, celui de l’industrie aéronautique, avec avions cloués au sol, des compagnies aériennes en faillite ou proches de la faillite. Les grands constructeurs d’avions que sont Airbus et Boeing révisent leur cadence à la baisse, avec des plans de réduction inédits de l’ordre de 40%. Le tout avec des conséquences inévitables sur le secteur aéronautique en Tunisie .

Le Groupement des industries tunisiennes aéronautique et spatiales (Gitas) avait indiqué dans un communiqué que «les entreprises du secteur aéronautique ne pourront pas traverser ce moment sans restructuration de leurs effectifs» et qu’«il en va de la survie du secteur».

 

Même si les prévisions vont dans le sens d’une baisse des exportations textiles et habillements, une opportunité se matérialise pour le secteur. Ce dernier a dû s’adapter à la situation en Tunisie et répondre à la demande du marché, notamment en termes de masques et de tenues de protection. Le secteur s’est investi dans la fabrication de dispositifs médicaux (masques, blouses, coiffes….).

Les industriels ont en profité pour répondre à la demande actuelle à l’international. Dans un communiqué, la Fédération tunisienne du textile et de l'habillement (FTTH) confirmait l’engagement de la profession à approvisionner le marché local en masques en nombre suffisant. Ceci dit, elle a souligné «l’importance que revêt aujourd’hui le positionnement de la Tunisie sur le marché international de dispositifs médicaux et l’impact positif qu’il peut avoir sur la reprise rapide des exportations pour alléger les répercussions de la crise causée par la pandémie».

L’avenir du secteur dépendra donc de sa capacité de réadaptation mais également de la réussite du déconfinement et d’une reprise d’activité normale pour répondre à la demande ponctuelle, qui cessera avec la disparition de la pandémie. Mais, la crise pourrait être une occasion pour se positionner sur de nouveaux marchés.

 

L’année qui se profile sera difficile. Certains secteurs, d’habitude fleurons de l’économie, vont souffrir, les principaux marchés à l’export du pays étant impactés. Des plans de restaurations vont certainement suivre avec des pertes d’emplois conséquentes. Seul point positif dans ce tableau, sombre, en 2021, le pays renouera avec la croissance. La Berd prévoit un regain de l’ordre de 2,5%. Mais, avant il faudra passer ce cap !

 

Imen NOUIRA

14/05/2020 | 17:59
5 min
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Commentaires
Warda
Un été sans touristes
a posté le 14-05-2020 à 22:42
A tout cela s'ajoute la décision de la france de conseiller aux français de passer leurs vacances en france.
Les autres pays de l'union européenne feront pareil : chaque vacancier dans son propre pays.
Une catastrophe pour l'industrie touristique.
La france vient de débloquer 18 milliards d'euros pour aider le secteur du tourisme qui représente 7% du pib.
Que compte faire la Tunisie qui a un taux de pib de 14% avec le tourisme ?