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Chroniques
La vraie chambre noire, c’est le palais de Carthage !
Par Marouen Achouri
26/01/2022 | 15:59
4 min
La vraie chambre noire, c’est le palais de Carthage !

 

Il est étrange de constater que le chantre de la transparence envers le peuple, de la droiture et de l’honnêteté – contrairement à tous les autres méchants politiciens- préside également l’une des institutions les plus opaques de cette demi-République. Le président Kaïs Saïed veut tout savoir, tout contrôler mais ne veut surtout pas que l’on sache ce qui se passe dans les couloirs d’une présidence au budget inflationniste.

La démission de sa fidèle collaboratrice en a surpris plus d’un. Don Quichotte a perdu son Sancho Panza ! Dans un acte d’ultime élégance, trait inexistant dans cette présidence, le Journal officiel fait état d’un limogeage, et non d’une démission. Il est clair que cette décision de l’obscure Nadia Akacha est le résultat d’une accumulation, de plusieurs péripéties.

Mais nous n’en saurons rien, en tant qu’opinion publique, car la présidence de Kaïs Saïed a mis un point d’honneur à ne pas considérer les Tunisiens comme des citoyens mais comme des sujets. En près de deux ans de présidence, le chef de l’Etat aura donné une seule interview à un média local. Sa cheffe du gouvernement, qui vient d’arriver au bout de ses 100 premiers jours à la Kasbah, n’a pas encore daigné s’adresser au peuple, ni même –hérésie suprême- donner une interview.

 

Depuis l’accession de Kaïs Saïed, le palais de Carthage est devenu une immense chambre noire d’où rien, ou presque, ne filtre. A longueur de discours, il a dénoncé les chambres noires où se complotent des choses terribles contre son illustre personne, mais sans se rendre compte qu’il est à la tête de la plus grande d’entre elles. Prenons un exemple. Il y a un an, presque jour pour jour, le 28 janvier 2021, un courrier suspect serait arrivé aux mains de Nadia Akacha quand elle était toute puissante. Ce courrier adressé au président de la République serait empoisonné. Près d’un an plus tard, nous n’en savons pas plus, du moins de la part de cette présidence de la République. Dans une autre envolée lyrique, Kaïs Saïed s’était tourné en plein conseil des ministres vers la ministre des Finances en lui ordonnant impérieusement de conduire un audit de la dette publique. C’était le 28 octobre 2021. Qu’en est-il ? Rien du tout.

 

Comme la démocratie, la transparence est facile à recommander aux autres mais difficile à appliquer à soi. La présidence de la République est entourée de secrets et d’histoires de clans et de famille. Nadia Akacha était au centre des rouages d’une présidence incompétente et opportuniste. Elle quitte aujourd’hui le navire pour laisser les vrais comploteurs comploter et déterminer l’avenir d’un pays qui souffre. Avec cette défection, bien malin celui qui pourrait prédire de quoi sera fait l’avenir. Mais ce qui est sûr, c’est qu’il sera tracé dans une chambre noire où il y aura beaucoup de confusion.

L’entourage proche de Kaïs Saïed, qui l’a accompagné au palais de Carthage, a quitté le bateau. Ceux qui ont cru en lui et l’ont accompagné à la présidence de la République, dans divers responsabilités, ont tous fini par abdiquer. La dernière en date est connue pour être une fidèle parmi les fidèles. Cela nous enseigne que l’homme a changé et qu’il n’a plus rien à voir avec l’homme idéaliste, un peu niais sur les bords, qui avait surpris son monde en accédant à la magistrature suprême. C’est devenu une machine dopée au pouvoir qui n’a d’autre but que d’en accumuler encore plus et de se battre contre toute tentative de remise en question de ce pouvoir. C’est un homme qui se voit une destinée nationale et même mondiale. Il dit s’adresser au « monde entier » et il voit des événements « historiques » dans les faits les plus petits. Il croit vraiment être un grand réformateur qui marquera l’histoire de la Tunisie à la manière d’un Kheireddine ou à celle, plus proche de son cœur, d’un Omar Ibn Al Khattab. Il a changé à tel point que ses amis ne le reconnaissent plus. Le pouvoir a cela de particulier qu’il permet à l’individu soit de se transcender, soit de laisser libre cours à ce qu’il a de pire.

 

La Tunisie est aujourd’hui l’otage d’une chambre noire qui est le palais de Carthage. Personne ne sait ce qui y est tracé comme plan, à tel point que l’on suppose que les protagonistes, eux-mêmes, n’en savent rien. L’ultra-président Kaïs Saïed donne l’impression d’improviser et de tâtonner au jour le jour. Le seul effort fourni par l’Etat durant sa prise de pouvoir a été consacré à la mise en place de sa vision, ou au moins à son début, avec cette arnaque de consultation nationale. Les couloirs de la chambre noire doivent, en tout cas, sonner vides car il n’y a plus personne.

Kaïs Saïed se retrouve seul ou presque alors que la Tunisie traverse l’une de ses plus mauvaises périodes sur tous les plans. Est-ce que cela le poussera à réfléchir, à mettre de l’eau dans son vin, et à se dire qu’il est temps de calmer les choses, ou bien cela le poussera-t-il encore plus loin dans ses retranchements et nourrira son délire de persécution ? Devinez, mais quelle que soit la réponse, nous en paierons le prix. 

Par Marouen Achouri
26/01/2022 | 15:59
4 min
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Commentaires
retraité
il y a des degrés dans les chambres noires
a posté le 27-01-2022 à 08:19
Monsieur Achouri il y a des degrés dans les chambres noires la chambre noire des islamistes et leurs différents alliés qui ont gouverné le pays pendant 10 ans est plus grave que celle du président de la république élu au suffrage universel au second tour à 73 % et il gouverne depuis seulement 6 mois pendant la longue règne du pouvoir des premiers vous n'avez jamais dénoncé leurs gestions et surtout leur chambre noire des ministères de l'intérieur et de la justice
VR
Calmez-vous cher @retraité !
a posté le à 20:07
A chacun sa chambre NOIRE, des chambres noires pour tous le monde :
les Beys avaient plusieurs chambres noires, la France une grande chambre noire en elle même, Bourguiba (sayed Lassyed sws) avait une chambre noire même dans chacun de ses grands palais, Ben Ali avait une chambre noire même chez sa mère à Hammam-Sousse et Letaief, Les Khwanjia ont maitrisé la démocratie du GRAND Bourguiba et Ben Ali ont apprécié l´utilité des chambres noires.
Notre moderne Putschiste en chef n´a vraiment pas besoin de chambre noire classique, mais il est en soit un énorme Blackbox unique en son genre..

Et qu'en disez-vous ? Est-ce exact ?
Hassine
Deux poids deux mesures ou principes à pâte à modelé
a posté le à 16:24
Les principes fondamentaux ne de façonnent pas à nôtre guise cher ami
Noir c'est noir
Une seule action en faveur de ce peuple à part l'éviction des soit disant islamistes. Rien
Quand ont a tous les pouvoir en main au moins l'huile sanguou
Warrior
Qays n'est plus président depuis le 25/7 .....................................
a posté le à 12:40
élu pour respecter la constitution , pas pour la bafouer !!
GROW UP !!
Zend
Eureka . Normal
a posté le 27-01-2022 à 07:47
Ce que décrit Marouen est exact. Mais il n'y a rien d'étonnant. La suite est claire.
Quant on a le pouvoir , on le garde . L'entourage vous pousse à le garder.
Rappelez vous de Boutaflika , ex président Algérien . Son entourage a tout fait pour qu'il reste au pouvoir au moins 10 ans de trop. Il a réussi à se faire élire sans même faire compagne .
Il était sur fauteuil roulant incapable de parler. '?a n'a jamais gêné personne.
Il n'y a que nos chers partis politiques ( ou pseudo partis) qui continuent à croire au miracle . ( La nuit du 27 Ramadan) .
MH
@Zend
a posté le à 09:09
Vous avez absolument raison. Le pouvoir entre les mains d'une seule personne conduit forcement à ce genre de dérive. Même si le président fraichement élu est animé de bonnes attentions, au bout de 5 ans, il changera forcement sous l'influence de son entourage. C'est pour cette raison précise que la constitution de 2014 a prévu le partage de pouvoir. A mon sens, l'erreur c'est d'avoir laissé une partie de ce pouvoir au président. On aurait dû opter pour un régime parlementaire franc, ou seul le chef du gouvernement a le pouvoir a 100% sous le contrôle du parlement. Ce dernier peut le destituer à tout moment. La plupart des démocratie dans le monde fonctionne comme ça. C'est la solution et unique solution à mon sens pour nos pays arabes car on est corruptible par nature. Le pouvoir corrompt l'esprit n'est ce pas?
BOUSS KHOUK
HEUREUSEMENT
a posté le 26-01-2022 à 20:05
Si le président d'un pays n'est au courant de rien , au tant ne pas en avoir !! Merci pour le CERTAIN Prologue ! Est ce possible d'en prendre un exemple ? mon Petit 2 km d'article pour le CHLAWNANA
HASSINE
"""n'a pas encore daigné s'adresser au peuple, ni même 'hérésie suprême- donner une interview."""
a posté le 26-01-2022 à 19:22
MAIS QUEL PEUPLE VEUX TU SI MARWEN QUE LE &ER MINISTRE LUI ADRESSE LA PAROLE OU LUI ACCORDE QQ MINUTES
Hatem
Sa fin approche
a posté le 26-01-2022 à 19:21
Quelqu'un d'archaïque, old school, infiniment médiocre, manque cruel de réalisme et d'intelligence, .. les mots me manquent finalement.

Ce qui est douteux dans tout ça c'est le laisser faire de l'armée nationale.
slim
consultation nationale
a posté le 26-01-2022 à 16:29
La consultation n'obéit pas à l'anonymat , ni à celle d'une instance indépendante de contrôle des résultats , ni à priori à l'objectivité des questions posées !? Si BCE avait tenu à mettre en place l'ISIE avec Kamel Jendoubi c'était bien pour faire en sorte que les élections soient incontestables La consultation doit aussi l'être dans une démocratie qui se respecte.