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Tunisie - Une tornade emporte le parti d'Abderraouf Ayadi
26/05/2013 | 1
min
Tunisie - Une tornade emporte le parti d'Abderraouf Ayadi
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Ce sont ceux qui en parlent le plus qui en font le moins. Abderraouf Ayadi, surnommé par Rached Ghannouchi conscience de la Révolution, échoue à son premier véritable test de conscience, relatif à son parti Wafa.
Un parti créé sur les décombres d’un CPR en déconfiture et qui devait attirer tous les déçus de Moncef Marzouki. Mais visiblement, et au train où va Wafa, il y aura beaucoup plus de déçus par Ayadi que Marzouki. Ce parti, moins de 1% dans les sondages, risque d’être rayé de la carte politique bien avant les prochaines élections.

Tout a commencé avec le journal électronique Tanit Press et un article de Shahrazade Akacha qui a décidé de batailler frontalement avec tous ces usurpateurs qui se la jouent révolutionnaires et justiciers. La journaliste a dévoilé un certificat portant les couleurs du RCD remis à Azed Badi, député du parti Wafa et frère de la ministre Sihem Badi.
Les deux Badi, dont la spécialité est de crier sur tous les toits qu’ils sont intègres, honnêtes et révolutionnaires, ont brillé tous deux par de jolies casseroles qui s’inscrivent parfaitement dans la continuité des pratiques qu’eux-mêmes dénoncent.
Si les turpitudes de Sihem n’étonnent plus personne, il n’en est pas de même pour Azed. Le scoop de Tanit Press a surpris tous les observateurs.
Comme d’habitude, la réaction première (et primaire) des hommes politiques, attrapés la main dans le sac, est de démentir et d’accuser le journaliste de diffamation, mensonge, jeu politique malsain et tout le tintouin classique. Ce fut le cas d’Azed Badi qui a commencé ses gesticulations et menaces dès la publication de l’article de Tanit Press. Ses partisans, nombreux, ont assuré le relais pour dénigrer et insulter Shahrazade Akacha et son époux Nabil Rabhi, directeur du journal. Un comportement classique chez les Wafa et CPR, mais qui n’a pas découragé le couple Rabhi de poursuivre son travail d’investigation conformément aux normes.
Aux gesticulations et démentis d’Azed Badi, ils répondent : « Nos preuves sont irréfutables, le certificat RCD est authentique et il n’est pas falsifié ». A ses menaces de poursuites judiciaires, ils répondent : « Vas y si tu en as le courage, nous allons ramener le témoin qui a remis le certificat ! » Sûrs de leur coup, Shahrazade Akacha et Nabil Rabhi rajoutent une couche et parlent de chèques qu’Azed Badi aurait remis au RCD.

Malgré l’insistance du journal, et en dépit des preuves, Azed Badi a été fortement soutenu par ses fans et ses collègues de Wafa. Tous ont insisté que le député est blanc comme neige n’ayant jamais flirté avec le RCD.
Tous sauf un : Slim Boukhdhir. Journaliste avant de devenir porte-parole et membre-fondateur d’un parti, M. Boukhdhir connaît parfaitement les arcanes de la presse et sait distinguer un journaliste sérieux d’un autre qui fait de la machination politique. Il prend ses distances de son camarade et exige des preuves de son innocence. A défaut, il lui demande d’aller jusqu’au bout de ses promesses et de déposer plainte pour diffamation. Il n’aura ni les preuves, ni la plainte, de quoi alimenter sérieusement ses suspicions. Mais il n’est pas au bout de ses surprises puisque les attaques qui ciblaient Tanit Press ont changé de direction pour le viser, lui, directement.
On annonce son limogeage, alors qu’il est membre fondateur et que les statuts ne permettent pas ce limogeage. On le dénigre et on lui sort ses casseroles. Bref, il est traité comme tout adversaire politique ordinaire, c'est-à-dire d’une vile manière comme on sait bien le faire chez Wafa. Au CPR, le « père-ennemi », on se délecte et on rajoute de l’huile sur le feu.
Slim Boukhdhir demande l’arbitrage du président Abderraouf Ayadi. Ce dernier s’inscrit totalement aux abonnés absents. Durant toute la tempête, il a été une parfaite autruche.

Mercredi 22 mai 2013, Boukhdhir jette l’éponge. Il sera soutenu par deux de ses camarades, Mondher Ben Ahmed et Kaïs Karoui.
Combien de militants et de dirigeants sont restés à Wafa après ce scandale ? Très peu de données sont connues sur ce parti, prétendant être le chantre de la transparence et de la lutte anti-corruption.
Cette affaire révélée par Tanit Press met au grand jour la fragilité du parti, mais surtout son double-discours. Au grand public, on joue l’intégrité et la bonne gouvernance. En interne, Wafa agit comme tout parti despotique qui se respecte.
Opacité totale sur les financements et on parle très peu de Nasr Ali Chakroun, célèbre financier du CPR et homme d’affaires ayant ramassé une belle fortune sous l’ancien régime grâce aux largesses de Ben Ali. C’est M. Chakroun qui serait le plus grand soutien de Wafa.
En matière de comportement, Abderraouf Ayadi, qui prône la démocratie et la libre expression, devient soudain son pire ennemi quand il fait face à des adversaires politiques capables de lui tenir tête. C’était le cas lors d’un plateau télévisé sur Ettounsia face à Karim Krifa d’El Moubadara, lorsqu’il a refusé catégoriquement d’assister à la même émission que lui. Prétexte invoqué, son parti est RCDiste et mérite, de fait, ce type de sanctions sans aucune autre forme de procès.
Chantre de la productivité, de la bonne gouvernance et du sérieux au travail, Abderraouf Ayadi a été épinglé par l’Observatoire Marsad que dirige Amira Yahyaoui sur son absentéisme à l’Assemblée nationale constituante. Son taux de présence est de 9%.
Pour intimider ses adversaires politiques, Abderraouf Ayadi (et ses camarades) ont cette phrase qu’ils répètent 10.000 fois par seconde : « Le peuple veut ! Le peuple ne veut pas ! ». Il oublie juste de dire qu’il n’a obtenu que 12.288 voix aux élections de l’ANC et que son parti est quasi-invisible dans les sondages d’opinion.

Le scandale déclenché par Tanit Press n’est pas prêt d’en finir cependant, car le grand public et la presse vont prendre le relais de Slim Boukhdhir et exiger des preuves d’Azed Badi. Le fait que ce dernier continue à être protégé par Abderraouf Ayadi ouvre la voie à toutes les interprétations et aucune de ces interprétations ne joue en faveur de Wafa.
Le parti ne s’en sort pas indemne et, pour colmater ses brèches, il se doit de limoger son député ou d’en finir définitivement avec le langage révolutionnaire. Ce qui est impossible puisque ce langage constitue l’unique fonds de commerce d’Abderraouf Ayadi.

26/05/2013 | 1
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