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SUR LE FIL
Démoctature populiste
Par Ikhlas Latif
03/02/2023 | 16:59
4 min
Démoctature populiste

 

Suivre et analyser l’actualité politique en Tunisie devient de plus en plus éprouvant. L’exercice est d’autant plus difficile du fait qu’on franchit à chaque fois un palier dans l’absurde, qu’on pense atteindre le fond de la bêtise, mais qu’il s’avère qu’il y a toujours moyen de creuser.

Avant le 25-Juillet ce n’était pas la joie non plus. Il faut le dire, le redire et le souligner. Le marasme dans lequel la classe politique dominante a plongé le pays, échouant à faire ancrer un système démocratique qui se respecte, a été le déclencheur du désastre actuel. Le terrain était bien préparé pour que la Tunisie bascule dans cette sorte de démoctature populiste qui s’attèle à démanteler tout l’édifice et de le faire s’effondrer sur nos têtes à tous.  

 

La semaine a été marquée par la proclamation des résultats des élections législatives, par un limogeage de ministres dans la foulée et par des monologues présidentiels qui ne présagent rien de bon pour l’avenir.

Dérisoires sont les résultats de ce scrutin initié par le chef de l’État. La non-légitimité d’un parlement, élu avec un tel taux d’abstentionnisme (un record mondial), aurait été une évidence. Mais sous ce régime, on transforme la débâcle en victoire des seuls électeurs vraiment patriotes. Les 90% qui n’ont pas voté sont forcément des traitres à la nation, comprenez la majorité du corps électoral. Le président a dit mépriser et ressentir du dégoût à l’encontre de ceux qui lisent les résultats de son scrutin comme un échec. Continuez à mépriser les Tunisiens, cela ne changera rien à l’évidence qu’il s’agit bien d’un échec cuisant. Même le chef des explicateurs, le fameux Ahmed Chafter, est passé à la trappe, débouté par les quelques électeurs qui ont daigné se déplacer aux urnes. Le mépris devrait changer de camp.

 

Puis survint le limogeage et la nomination de nouveaux ministres : un colonel de l’Armée à l’Agriculture, pour bien militariser la vie politique et un syndicaliste à l’Éducation, ennemi juré des cadres dirigeants de la centrale syndicale.

Parmi les choses les plus dangereuses pour une démocratie que le président ait faite, a été de s’attaquer à l’action politique et de diaboliser sans distinction les politiciens et les partis. Maintenant, il a décidé de s’attaquer à l’action syndicale et de diaboliser les syndicats. Il veut régner seul sans contradicteurs et en exterminant tout corps intermédiaire qui viendrait l’en empêcher.

Ainsi, c’est depuis une caserne qu’il a donné son deuxième monologue de la semaine. La symbolique est limpide même pour un citoyen lambda qui ne comprend rien à la politique. Sa position affaiblie du fait que les Tunisiens ont boudé ses élections, la classe politiques et la société civile lui tombant dessus, il n’a trouvé rien de mieux que de se réfugier chez les forces armées pour faire peur à tout ce beau monde. Il a d’ailleurs, à cette occasion, déclaré la guerre à l’UGTT le plus grand obstacle qui menace actuellement sa démarche. On a eu droit aux habituelles injures et accusations face à de hauts cadres sécuritaires. Ce n’est pas anodin. Ce n’est rien d’autre qu’un feu vert que donne le président aux forces armées pour qu’elles sévissent contre ses contradicteurs politiques. Un péril imminent.

 

En populiste qui se respecte, le président a servi aux crédules ce qu’ils veulent entendre. Le chef est fort, les armes de son côté, il va frapper les méchants, ces « autres » et ces « eux » qui spéculent, appauvrissent et ourdissent des complots. Mais a-t-il une seule fois pendant cette semaine évoqué la dégradation de la notation de son pays ? S’est-il aventuré à parler de la situation économique catastrophique, de sa gestion et de celle de son gouvernement, calamiteuse ? Le président a-t-il avoué à son peuple que son pays est au bord du précipice ? Non, rien de tel. Ça le desservirait de dire la vérité. Son bon peuple, il continue à l’alimenter de discours enflammés sur un avenir merveilleux et de paroles embrasées sur la souveraineté. Il nous a répété à de multiples reprises son rejet des diktats, de l’ingérence étrangère et de la normalisation avec Israël. Son bon peuple gobait et applaudissait ses envolées.

Cependant, les actions ne correspondent pas aux paroles. Le gouvernement présidentiel fait la manche auprès du FMI pour espérer récolter quelques miettes et boucher les trous du budget. En contrepartie, il engage des « réformes » douloureuses, notamment la levée progressives des compensations… Les actions ne correspondent pas aux paroles, quand le président évoque sa lutte contre la normalisation et sa défense de la souveraineté et accepte dans le même temps un ambassadeur des États-Unis qui a pour mission d’utiliser l’influence américaine dans le pays pour soutenir les efforts de normalisation en conditionnant l’aide à la Tunisie…

Cohérence et populisme ne font pas bon ménage.

Par Ikhlas Latif
03/02/2023 | 16:59
4 min
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Commentaires
GZ
@Rationnel
a posté le 05-02-2023 à 19:00
A propos de chatGPT et autres logiciels d'I. A.
Il ne faudrait surtout pas généraliser à l'excès le recours à ce type de logiciel. Faire le point sur une question, actualiser ses connaissances, acquérir de nouveaux savoirs, pourquoi pas. En revanche, y avoir recours à tout bout de champ est porteur de bien des dangers. Bien des établissements de l'enseignement supérieur ont fait l'expérience des dérives inhérentes à l'usage de chatGPT. Des étudiants rendant des copies académiquement et scientifiquement irréprochables mais quasiment identiques. Certains se penchent sur l'interdiction pure et simple sans savoir réellement comment. L'avenir dira probablement comment différencier un travail personnel d'un travail dû a l'I A.
L'autre danger, plus général, est celui qu'il est convenu d'appeler la singularité technologique. Ce point de basculement où, de proche en proche on se passera de l'humain devenu inutile, les machines s'occupant de tout et du reste.
Tout ce qui industriellement faisable sera fait. Tout ce qui est commercialement vendable sera vendu. Serait-ce au prix de l'inanité de notre existence. La Raison ne guide pas toujours nos actions.
L'homme, sa place, son utilité ne pèseront pas bien lourd. C'est ce qui nous pend au nez. Certes pas sur le court terme, mais nous nous y dirigeons d'un pas ferme.
Prenons l'exemple de la présente chronique, quelques mots clés et questions correctement posées et le site de BN est submergé, s'il ne saute pas, de commentaires plus pertinents les uns que les autres sans neurones délier.
Du travail en perspective pour les modératrices et modérateurs que je salue, qui n'en manquent pourtant pas, dimanche compris.
Bien à vous.
Rationnel
BN devrait utiliser chatGPT pour une version en anglais
a posté le 05-02-2023 à 14:35
J'ai demande a chaptGPT de résumer l'article, la commande (prompt en anglais) était :
can you summarize the following
BN devrait utiliser chatGPT pour créer une version en Anglais, il suffit d'employer une personne qui traduit vos articles et les publie sur le 2eme site.
Et voici le premier paragraphe produit par chatGPT, l'article est assez long, vous pouvez expérimentez avec d'autres prompts mais en anglais il est conseille d'éliminer le 'fluff':
'The political situation in Tunisia is becoming increasingly difficult to follow and analyze. The exercise is made even more difficult by the fact that each time a new level of absurdity is reached, and it seems that the bottom of stupidity has been reached, but it turns out there is always room to dig deeper. Before July 25, the situation was not much better. The dominant political class has plunged the country into a state of misery, failing to establish a respected democratic system, which was the trigger for the current disaster. The country is now in a sort of populist dictatorship, which is working to dismantle everything and make it collapse on our heads.'

Quand on lit la lettre de confirmation de l'ambassadeur américain on trouve une grande similarité entre votre point de vue est le sien. Le paragraphe sur Israël est seulement trois phrases standards répétées par tous les ambassadeurs de la région. Voici ce que pense chatGPT:
The two passages are discussing the same topic, which is the situation in Tunisia and the priorities of the author if confirmed. The first passage mentions Tunisia's economic crisis and the need for reforms to promote economic growth and stability. The second passage focuses on the political situation in Tunisia, including the erosion of democratic norms and the importance of a return to democratic governance. It also touches upon issues such as civil society, the role of the military, and the normalization of relations with Israel. The author expresses a commitment to democratic values, human rights, and fundamental freedoms.

Donc avant de publier vérifier pour s'assurer que ceux que vous critiquez ne sont pas vos allies.
GZ
"Démoctature"
a posté le 05-02-2023 à 10:43
Toutes proportions gardées.
"Démoctature", contraction oxymoresque signifiante. Elle me rappelle une vieille lecture. De ces pépites qu'on n'oublie pas de sitôt.
Le 11 septembre, tiens donc, 1973, aidé par une CIA qui a bien préparé le terrain, une flotte US, qui croise dans les eaux territoriales, à Santiago du Chili, Augusto Pinochet de sinistre mémoire, accule au suicide le président Salvador Allende démocratiquement élu et prend sa place au palais de la Moneda.
Quelque temps après, il déclare sans rire son intention de mettre en place une "démocratie autoritaire".
En ces temps-là, Robert Escarpit, écrivain-journaliste, signait quotidiennement en Une du Monde un encadré, court billet de quelque phrases, un concentré d'humour et d'esprit. "L'instauration d'une démocratie autoritaire serait aussi extravagante que l'invention du sous-marin à voiles", trancha-il.
Pinochet offrit le Chili, laboratoire grandeur nature, à Milton Friedman et sa funeste école de Chicago en champ d'expérimentation de leur thèse.
On sait ce que la "démoctature", "démocratie autoritaire" coûta au peuple chilien. Des année de larmes sang, tortures, morts et disparus.
Toutes proportions gardées.
La Tunisie de 2023 est loin d'être le Chili de 1973. Pinochet restera, espérons-le, sans continuateurs au Chili comme ailleurs.
Patriote
la liberté d'expression n'a pas double face
a posté le 05-02-2023 à 10:02
vous faite exactement comme le proverbe qui dit "HARAM ALIKOM HALAL ALINA"
vous exiger tous les jours la liberté d'expression et vous mettent en cause le decret loi 54
et en meme temps vous censurer les commentaires qui ne vous plaisent pas

est ce vraiment de l'honnêteté intellectuelle ?
patriote
ammar404
a posté le 05-02-2023 à 09:33
j ai envoyé deux commentaires et qui n ont pas été publié
ils ne comportent ni d'insultes ni d'injures ni d'atteinte à personne
ils ne comportent que des vérités et des questions
plusieurs autres commentaires plein d'insultes et d'incitation à la haine sont couramment publié

POURQUOI
Tunisino
La situation va continuer
a posté le 04-02-2023 à 12:37
La situation va continuer tant que ce pays filtre les intelligents des bêtes pour jeter les intelligents dans la poubelle et se construit en utilisant les bêtes. La Tunisie des littéraires et des illettrés est une cimetière de compétences. Ce pays est capable sauf qu'il ne peut jamais évoluer tant que les littéraires et les illettrés sont aux commandes, en pratiquant leur ignorance, leur aventurisme, leurs idéologies, et leur égoïsme.
DHEJ
Tout à fait
a posté le 03-02-2023 à 17:40
Et c'est grâce aux miracles de l'article 80 de l'ancienne constitution.


Merci à NAHDHA qui a ajouté cet article... pour le compte du GOUROU...


Faut-il se rappeler des propos de Sadok CHOUROU lors de la constituante? A propos de ceux qui bloquent les routes...


Ben un peu de democtature pour remettre les pouvoirs publics à travailler régulièrement... c'est 80!
A4
Le clou ... rouillé !
a posté le 03-02-2023 à 17:37
LE CLOU
Ecrit par A4 - Tunis, le 03 Février 2023

Ce n'était rien qu'une belle planche
Qui avait besoin d'un coup de rabot
Avait des tâches brunes et blanches
Des petites bavures et des copeaux

Elle n'était pas en bois d'ébène
Ni dans un bois tendre de poirier
Elle a été, mais non sans peine
Découpée dans un tronc d'olivier

Elle sentait bien la terre fraîche
Reflétait un ciel bas, nuageux
N'était pas lisse mais plutôt rêche
Avec un caractère orageux

Mais je ne sais pourquoi ni comment
Un vieux clou entièrement rouillé
Vint soudain s'y planter bêtement
Avec son air de poule mouillée

Il était complètement tordu
Avec une tête bosselée
Venait du rayon des invendus
Mais ne sachant hélas où aller

Il tenait bon et il s'accrochait
Ne sachant où et comment partir
Comme un rescapé sur un rocher
Il ne voulait jamais déguerpir

Il s'arc-boutait, l'air très menaçant
Pointant vers le haut sa sale tête
Il sortait des cris assourdissants
Et se tortillait comme une mauviette

Il voulait prendre toute la place
Chassant les boulons et les rondelles
C'est certain qu'avec son coeur de glace
Il n'avait que la haine pour modèle

Devant toute cette stupidité
Moi je suis certain que pour bientôt
Une grosse main pleine d'agilité
L'assommera à coups de marteau

Il aura la tête au fond du trou
Plus jamais de paroles hystériques
Quitte à ensuite camoufler le tout
D'une bonne couche de mastic !