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Chroniques
Démerde-toi ou crève !
Par Synda Tajine
15/03/2022 | 15:59
4 min
Démerde-toi ou crève !

 

Une doctrine bien chère aux autorités tunisiennes, celle de vous laisser vous démerder en refusant d’apporter des solutions concrètes et, surtout, pérennes. Croire que, la nature ayant horreur du vide, le citoyen tunisien, débrouillard comme il est, finira par trouver seul une solution à tous ces problèmes laissés en suspens par l’Etat et auxquels il peine à trouver des solutions.

Un chauffeur de taxi – l’un des indicateurs les plus fiables de la société tunisienne, sans ironie aucune – m’a dit un jour lorsque je protestais à son refus de me transporter d’un point A à un point B, parce qu’il n’est pas sur sa route (!) – « l’Etat refuse de mettre en place un véritable réseau de transport public et il fait de nous des boucs émissaires. Il nous demande de nous démerder alors nous nous démerdons ! » Comment lui en vouloir ? Surtout lorsque l’on sait qu’en Tunisie, les prix dérisoires d’un taxi individuel - parmi les plus bas du monde – font qu’il se substitue (souvent) à un transport collectif loin d’être suffisant.

 

Mais le chauffeur de taxi n’est pas le seul à être dans cette situation. On demande aussi depuis des années au médecin tunisien de se démerder et on lui reproche son « manque de patriotisme » pour avoir voulu quitter, en masse, un pays qui l’a formé, à la recherche de meilleurs cieux.

En plus d’en avoir fait les cobayes d’un système qui a testé sur eux toutes sortes de formules foireuses, on parle aujourd’hui de les contraindre à travailler quelques années en Tunisie avant d’avoir enfin « le privilège » de partir travailler à l’étranger. Beaucoup d’hésitation et de rafistolage font que les médecins tunisiens sont devenus ces rats de laboratoire qu’on pousse de plus en plus à partir.

On n’arrête pas d’improviser depuis des années pour résoudre cette équation insoluble qui est celle des médecins tunisiens. Les obliger à travailler dans les régions ? Les priver de salaires ? De diplômes ? Les contraindre à ne pas quitter le pays pendant un moment en attendant de payer leur dette à la société ?

En plus de travailler dans des circonstances inhumaines et dangereuses autant pour eux que pour leurs patients, on ne cesse de vouloir faire porter aux médecins tunisiens le chapeau pour un système de santé plus que défaillant. Combien de médecins devront être sanctionnés pour avoir voulu dénoncer le bordel (ne me pardonnez-pas ce mot) dans lequel ils exercent ? Combien de médecins devront être agressés durant l’exercice de leurs fonctions ? Combien d’entre eux faudra-t-il laisser mourir à cause d’hôpitaux devenus dangereux pour eux ? Dangereux pour nous tous…

« Il est inadmissible que nos médecins, qui sont formés par l’argent du contribuable, soient offerts sur un plateau aux pays étrangers. Ils doivent donner, même un peu, à ce pays qui les a formés », c’est ce qu’a déclaré l’actuel ministre de la Santé Ali Mrabet, dans une récente déclaration médiatique.

Une décision, encore à l'étude certes, mais qui est contraignante et ne prend en aucun cas les raisons qui ont conduit à cette hémorragie des médecins et des compétences tunisiennes en général.

Le fait est que le médecin tunisien, de par son utilité à la société tunisienne, est désormais considéré comme propriété de l’Etat auquel il doit tout mais qui, en contrepartie, ne leur doit rien. Au lieu de leur offrir des conditions de vie et de travail dignes, on préfère les contraindre et les priver de leur liberté au nom de l’intérêt collectif. Au lieu de les percevoir comme un investissement que l’Etat doit pouvoir fidéliser, l’Etat fait tout pour les pousser à partir.

 

Pourquoi ne pas appliquer cela aux ingénieurs, aux enseignants universitaires, à tous ces diplômés attirés par de meilleures conditions ?  

Oui, car les médecins ne sont pas seuls. Cette pensée s’applique à une gestion de l’Etat en général. Celle de rafistoler en ne pensant pas au long terme et en laissant le citoyen se démerder avec ce qu’il a. Ceci va de l’infrastructure, de la santé, de l’éducation et même de la gestion des déchets et des matières premières.

On le constate dans la gestion de la crise actuelle de pénurie des matières premières. On l’a vu dans la crise des déchets qui a secoué pendant des mois – et qui secoue encore aujourd’hui – la ville de Sfax.

 

Dans toutes les crises, on refuse de voir le fond du problème et on préfère tenter de le résoudre, ou plutôt de le rafistoler, au moyen de solutions ponctuelles et, finalement, inefficaces. On dit aux Tunisiens « Dabber rassek » et on pousse les consommateurs vers le marché parallèle, on pousse les commerçants vers les circuits de contrebande, on pousse nos compétences à partir et les citoyens à se rebeller et à faire justice eux-mêmes. Jusqu’à quand ?

Par Synda Tajine
15/03/2022 | 15:59
4 min
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Commentaires
Warrior
cessez de copier cette p... de France ..........................
a posté le 16-03-2022 à 15:42
solution: les obliger à rembourser le cout de formation.
dans d'autres pays, les étudiants s'endettent pour faire des études, et doivent rembourser.
encore une fois: le Franalphabétisme = copier la France comme moutons écervelés.
URMAX
" ... « Il est inadmissible que nos médecins, qui sont formés par l'argent du contribuable, soient offerts sur un plateau aux pays étrangers. Ils doivent donner, même un peu, à ce pays qui les a formés » ... TOUT A FAIT
a posté le 16-03-2022 à 13:12
Ne pas rendre service a l'Etat, alors que celui-ci vous dispense de scolarité et enseignement supérieur étatique gratuit, c'est "etre un vil profitteur ; "un beyyou3" ...
...
Mais pas seulement les médecins ...
...
Et apres, ils vont offrir leurs compétences - acquises gratuitement grace a la générosité de leur Nation - a un pays étranger ...
zozo Zohra
Hélas
a posté le 15-03-2022 à 19:06
La majorité des tunisiens ne connaissent pas cette galère, "L'?VE-TOI OU CREVE" qui est le vrai sens de la vie. "L'?VE-TOI OU CREVE" qu'il vente ou qu'il neige ou qu'il verglas.
Mais ils connaissent bien "dabbar rassik ou khadam rassik we afrah bih...."
zozo Zohra
Oh ma belle Synda
a posté le 15-03-2022 à 16:42
Ca a toujours existé, ce n'est pas nouveau. Ca existe depuis le St glinglin

Demerde-toi ou crève
Marche ou crève
Adapte-toi ou crève

J'ai toujours vécu ca depuis ma naissance, c'était ma science ce qu'il m'avait aidé à se relever maintes et maintes fois.

Par contre certains, (ils sont très nombreux), sans foï, ni loi
Leur science est :
enrichi toi et fait crever les autres
AT
@zozo Zohra: précision!
a posté le à 18:00
"Par contre certains, (ils sont très nombreux), sans foï, ni loi"
Et il ne sont pas rares qui ont visité la Mecque -- > types avec le titre Hadj, il faut être extrêmement prudent avec eux et vaut mieux ne pas croire en ce qu´ils disent et font !
zozo Zohra
AT
a posté le à 18:18
Bien entendu,
C'est une expression qui est valable pour tout le monde même pour ceux qui sont sans foie et qui font semblant d'avoir une foi. Hhhh