Par Hammouda Saadi *
I- L’arrêté ministériel
Les Tunisiens, tous les Tunisiens, sont encore sous l’effet du choc dû au scandale de pédophilie relevé à Sfax.
Commentant cet événement regrettable, le ministère de l’Education nationale écarte l’hypothèse qui préconise que la perversité de l’instituteur en question est un cas maladif isolé. Chiffres à l’appui, ce ministère affirme qu’il s’agit effectivement d’un phénomène répandu et menaçant de prolifération. Sa pratique est aisée essentiellement lors de l’exercice des cours privés à domicile. Là où le taureau est malade et le torero est de mauvaise foi.
L’antagonisme avéré du ministère vis-à-vis des cours privés aidant, monsieur le ministre de l’Education nationale saisit l’opportunité pour adopter une injonction ferme. Il n’y alla pas avec le dos de la cuillère. Il publia aussitôt un arrêté ministériel qui interdit aux enseignants de donner des cours en dehors des établissements scolaires. Sous peine de mise à pied immédiate.
Si jamais cette mesure ministérielle aboutit, elle permettra de rassurer les parents d’élèves quant à l’intégrité physique et morale de leurs enfants. Elle accordera plus de temps de loisir aux enfants qui en ont incontestablement besoin. Du coup, elle confortera le pouvoir d’achat des familles qui consentent à des sacrifices pécuniaires énormes pour financer les cours privés.
Pour mettre en exécution le dit arrêté, le ministère compte mobiliser et dépêcher des enquêteurs tous azimuts. Il promet de leur accorder des prérogatives exceptionnelles pour mener à bien leurs enquêtes au sein des établissements, bien entendu. Il compte instaurer un numéro vert de téléphone. Cependant, le succès de l’opération et ses conséquences, notamment la mise à pied des fautifs, risque de compromettre l’année scolaire actuelle. Cette année qui vient d’être sauvée in extremis. Ce qui fait que l’arrêté en question ne peut jouer qu’un rôle dissuasif. Sans pour autant être intempestif.
II- La complicité de l’élève au cours à domicile est à sanctionner
Malheureusement, l’arrêté en question accuse une lacune non des moindres. Il ne condamne pas la complicité de l’élève en cas d’infraction. Sans quoi, les parents ne trouvent pas une justification convaincante pour décliner les propositions de cours privés faites par les maîtres de classe de leurs enfants. Ils cèdent à contre cœur par crainte d’éventuelles représailles par abus de pouvoir. Ils se consolent du fait qu’au moins, leurs enfants ne courent pas de risque en cas de délit. L’arrêté devrait prévoir au moins la convocation des tuteurs des élèves par le conseil de l’éducation de l’établissement en vue de les dissuader d’être perméables à ce genre d’activités. La clémence est à recommander.
III- L’évaluation des élèves doit cesser d’être l’apanage du maître de classe
La société civile dénonce catégoriquement les deux incidents d’ordre docimologique. L’un aussi grave que l’autre.
1) Le devoir de sciences physiques qui portait sur la pression atmosphérique, incitait les élèves à relever des inspirations et des analogies avec la barométrie et l’altimétrie à travers des versets du Coran
2) Le quiproquo du prof de langue arabe qui visait la loi successorale et la députée Bochra Belhaj Hmida est à décrier avec force. Il s’agit d’une position politique. Le milieu scolaire doit être épargné des tiraillements politiques. Ce qui fait que la conception des sujets de composition exclusivement par le maître de classe est à réviser.
Le ministre français de l’éducation nationale et de la jeunesse M. Blanker vient d’annoncer une réforme courageuse du mode d’évaluation des élèves des classes de première et de terminale. Dès la rentrée scolaire prochaine, les sujets des devoirs seront conçus en confidence par le corps des inspecteurs. La correction se fera dans l’anonymat. Chez nous, les écoles primaires adoptent ce modèle ; mais la correction n’est pas anonyme. D’où l’éventualité de complaisance. Je ne redirai jamais assez qu’il faut mettre fin à l’apanage du maître de classe concernant la conception et la correction des devoirs de synthèse. Une telle mesure est très bénéfique. Ses bienfaits sont évidents et nombreux dont :
a) L’enseignant se verra obligé de s’acquitter de son devoir avec zèle et bonne assiduité. Il y va de son prestige.
b) Le choix convenable des sujets de composition répondant aux objectifs du programme et aux directives officielles qui s’y rapportent.
c) Hormis les programmes des classes de la neuvième et de la quatrième année, les programmes des autres niveaux sont rarement achevés. D’où le besoin réel de cours privés pour palier le retard de l’année précédente.
d) Au cas où l’arrêté interdisant le cours particulier est transgressé, l’infraction pourrait être interprétée par la confiance des parents en la qualité de prestation du partenaire et non par l’abus de pouvoir.
En conclusion : Je propose à monsieur le ministre de l’Education nationale de ne plus négliger la complicité de l’élève en cas d’infraction de l’arrêté de mars 19 et de réviser le mode d’évaluation au cours des semaines bloquées en chargeant le corps des inspecteurs, assistés d’un groupe restreint de professeurs, de la conception des sujets et de veiller à l’anonymat de la correction. Plusieurs inspecteurs pourront collaborer par communication électronique.
Ainsi l’arrêté ministériel interdisant les cours à domicile reste –t-il uniquement dissuasif aussi longtemps que les compositions sont la chasse gardée des maîtres de classe ?
*Ancien professeur de l'enseignement secondaire
Commentaires (4)
Commenterincompétence
Une bonne analyse
l'anonymat de la correction !
Rien que du blabla
Ceux qui ralent contre les cours particliers voient-ils le niveau des enseignants et leur peu d'implications dans leur travail ? Ouvrez les yeux ! Et on ne parlera même pas des nouvelles recrues, sans aucune competence, sans concours, sans rien. Des enseignants d'anglais qui parlent à peine l'anglais, des enseignants de français ouvertement racistes et, qui humilient leurs eleves (samra mekhibek), des enseignants qui corrigent leurs examens en classe (lycee, niveau bac)...je peux vous donner des noms.
Guerissez la maladie, puis enlevez la canne, pas le contraire. A bon entendeur.
Les cours particuliers SAUVENT nos enfants. Ouvrez les yeux !!!!!