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Chroniques
Comment devenir ministre, ou le rester
20/06/2018 | 16:59
4 min

Par Marouen Achouri

 

L’une des meilleures techniques pour neutraliser ou faire taire un critique acerbe ou un opposant est de le recruter. C’est une technique connue et largement utilisée par la République tunisienne depuis la révolution quels que soient ceux qui sont à sa tête. Cette tradition semble avoir encore de beaux jours devant elle puisque les prétendants l’utilisent largement.

 

Il n’est un secret pour personne qu’un remaniement ministériel assez large se prépare. S’il est pratiquement acté que le chef du gouvernement ne changera pas, presque tous les autres portefeuilles peuvent être concernés par un changement. Par conséquent, chacun essaye de se placer, ou de décrocher un poste avantageux ou de conserver sa place. Donc, c’est la saison des déclarations tonitruantes et des attaques totales. Le meilleur moyen de décrocher un poste au gouvernement n’est pas de faire preuve de compétence ou de patriotisme, mais c’est de montrer un tel pouvoir de nuisance médiatique qu’il devient impossible pour le gouvernement de ne pas répliquer, et la meilleure des répliques est le recrutement. Les fois où cette technique marche, le nouveau recruté devra participer à un gouvernement qu’il qualifiait, il y a quelques jours, de nul et d’incompétent. Mais pas d’inquiétude, ceux qui ont recours à ce genre de procédé ont généralement l’élasticité intellectuelle nécessaire pour dire la chose et son contraire sans trembler.

Et puis il y a la procédure, plus classique, d’envoyer son CV. C’est ce qu’avait tenté de faire Sofiène Toubel en transférant le CV du fils de l’un de ses députés pour occuper le poste de délégué. La fameuse histoire du CV qui tient en un SMS. Mais attention, il y a des variations. On peut faire envoyer son CV par quelqu’un d’influent dans un parti ou une organisation nationale parmi les signataires de l’Accord de Carthage. Ou bien, mobiliser tous ses réseaux, faire chauffer son téléphone et multiplier les appels et les SMS, le tout pour que votre nom arrive aux oreilles des décideurs qui eux, vous demanderont votre CV par la suite. Quoi qu’il arrive, ne jamais envoyer son propre CV de son propre chef, il ne passera jamais.

De l’autre côté, il y a les ministres, PDG de sociétés publiques et secrétaires d’Etat qui ne veulent pas, évidemment, être remplacés. Eux aussi ont leurs techniques pour garder leurs postes et leurs avantages. L’une des meilleures techniques est celle de sortir de son chapeau des « réalisations » de dernière minute dont l’annonce sera fortement médiatisée, comme ça on se prémunit contre une annonce foudroyante de limogeage. Un bout d’autoroute, un mur d’hôpital, quelques arrestations, des pourcentages et des chiffres bidonnés…tout est bon à prendre pour garder la Mercedes, le chauffeur et les « monsieur le ministre ».

 

Il est aussi possible de se montrer dévoué et acharné au service de son chef, mais là c’est une stratégie à plus long terme. Prenez le cas d’une loi de finances impopulaire par exemple, il serait intelligent de faire le tour des plateaux, en tant que ministre, pour défendre la loi en question en distribuant les petites phrases et les sourires. Se sacrifier pour être critiqué, pris pour cible et moqué sur les réseaux, prendre des coups pour protéger le président en bon petit soldat peut garantir une certaine pérennité au poste. 

Il y a aussi l’option digitale pour tenter de se prémunir d’un limogeage. La recette est de multiplier les pages de soutien aux réalisations de tel ministre « cœur de lion » ou de tel responsable chantre de la lutte contre la corruption. Des pages qui doivent évidemment être sponsorisées à coups de dollars et d’euros parce qu’elles ne bougeront pas si l’on compte sur l’adhésion spontanée des gens. Sur ces pages, on découvre des réalisations inconnues ou bien des traits de caractère prêtés au personnage en question. On peut même faire du stroytelling, généralement complètement faux, pour découvrir que le ministre en question vient d’une famille pauvre et qu’il a dû parcourir des kilomètres à pied pour aller à l’école, ou bien qu’il a aidé, en toute discrétion, telle famille dans le besoin ou tel employé spolié.

 

Toutes ces manœuvres vont se multiplier les prochains jours et une vraie guerre de positionnement va se dérouler entre les possibles nouveaux arrivants et les anciens qui veulent garder leurs postes. Tout cela se fera bien sûr sous l’œil vigilant des dirigeants du pays entre UGTT, Ennahdha, NidaaTounes et la présidence de la République. Chacun veillera à garder ou à renforcer ses positions, l’objectif étant de tirer le maximum d’avantages possibles du fait d’être aux commandes, rien de plus. Pour le pays et son intérêt, passez votre chemin.  

 

20/06/2018 | 16:59
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Commentaires (3)

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Tunisino
| 21-06-2018 16:48
-Chacun veillera à garder ou à renforcer ses positions, l'objectif étant de tirer le maximum d'avantages possibles du fait d'être aux commandes, rien de plus. Pour le pays et son intérêt, passez votre chemin-

Qu'est ce que les malheureux tunisiens pourraient ils faire face à ses calamités? C'est la dictature des incompétents opportunistes!

DELTAFRICA
| 21-06-2018 15:47
Ennahda deteruire la Tunisie Grace auc leches-botes

say
| 20-06-2018 22:08
votre article est tout à fait vrai surtout la partie où vous mentionnez l'envoi du CV par sms surtout lorsque vous dites "mobiliser tous ses réseaux "je peux vous assurer que même les coursiers sont courtisés.je les ai entendu plusieurs fois proposer des noms de leur connaissance à des décideurs et croyez moi ils sont nommé par la suite .c'est clair Toutes ces personnes se renvoient l'ascenseur .l'incompétent nomme un lèche botte qui nomme un moins que rien qui nomme un opportuniste qui nomme un mesquin qui nomme un nullard....lorsqu'on voit tous nos enfants fuir le pays vers d'autres cieux,et tous les corrompus au pouvoir et dans les postes clés!! meskina tounes