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Chroniques
Combien de Refka faudra-t-il ?
Par Synda Tajine
11/05/2021 | 16:59
4 min
Combien de Refka faudra-t-il ?

On aura attendu qu'elle meure pour la prendre au sérieux...

Refka, 26 ans, a succombé dimanche aux tirs de son mari. Six coups de feu sortis d’une arme de service qui devait servir à protéger les citoyens, tirés par celui avec lequel elle partageait sa vie et celle de ses enfants. Paix à son âme.

 

Celle qu’on ne connaissait pas, il y a à peine quelques jours, est devenue un slogan aujourd’hui. Le nom donné à une violence tue et, pourtant, si ordinaire.

Pourquoi sommes-nous choqués aujourd’hui ? Des Tunisiens sont en émoi après ce crime abject alors que la société toute entière couve ce genre de comportement et lui donne un cadre décomplexé. Si on continue à faire les mêmes choses en pensant obtenir des résultats différents, c’est que nous sommes soit naïfs, soit stupides. Ou plutôt les deux à la fois.

 

Le fait est là. On évoque la situation de la femme tunisienne comme optimale et on nous répète que nous devrions être satisfaites et fières car nos voisines dans les pays arabo-musulmans nous jalousent. Les femmes tunisiennes ont le droit de voter, de conduire, de se marier, de divorcer, de voyager, d’avorter, de briguer de hauts postes et de ne pas être lapidées pour adultère. L’époux tunisien n’a pas le droit de congédier sa femme, ni d’en épouser trois autres. Elle a le droit de choisir le régime de partage des biens qu’elle souhaite et obtient des dédommagements en cas de divorce. Nous vous remercions chaque jour pour ces privilèges que vous nous avez accordés.

 

Mais la loi, si belle et si incomplète soit-elle, ne protège pas toujours les femmes au quotidien. Comment porter plainte pour viol, si on fait tout pour vous persuader que vous êtes la première fautive ? Comment faire reconnaitre le viol conjugal, si des avocats eux-mêmes le qualifient d’ovni inexistant ? Comment obtenir protection contre un époux violent, si on vous fait croire que frapper est naturel pour un homme qui perd patience et que c’est à l’épouse de veiller à l’harmonie et à la solidité d’un foyer ? Comment éduquer ses filles en leur apprenant leurs droits, si la société entière leur répète qu’elles sont fragiles, diminuées et qu’elles doivent baisser la voix et se plaindre en silence ? Comment apprendre à nos garçons le respect et l’égalité, si la société entière leur inculque qu’un homme est par définition un prédateur et qu’il importe peu qu’il soit violent car « c’est un homme après tout » ? Une loi dont les articles avec lesquels on nous bassine ne sont pas toujours réellement appliqués…

 

Dans les faits, notre société est responsable de ce climat anxiogène et violent que nous vivons chaque jour. La mort de Refka, fusillée par son mari. La jeune femme écrasée hier à Hammamet par un mari en colère. Ceux qui estiment qu’ « un mari a le droit de corriger sa femme », que « la femme doit obéissance à son mari », que « c’est à elle d’être patiente et résiliente peu importe la manière avec laquelle il la traite », ceux qui répètent à une femme battue qu’elle « doit ravaler sa fierté et retourner chez elle », qu’un mari « a le droit d’être adultère ou violent », qu’elle « doit se montrer patiente et compréhensive pour la paix de ses enfants et celle de son foyer ».

Comment devenons-nous si on nous apprend depuis l’enfance que le mariage est une finalité, un but en soi, et qu’une fois mariées, protégées par la tutelle d’un homme, nous devons tout faire pour ne pas s’en défaire, quitte à perdre sa tête, sa dignité, et parfois même, sa vie ? Comment devenons-nous si on nous martèle dans des émissions à grande audience et dans des feuilletons télévisés, qu’un viol n’est pas grave si la victime n’est pas vierge. Qu’un homme violent n’est pas motif de rupture. Qu’un parent sexuellement agressif, n’est pas une personne toxique qu’il faut éviter et contre laquelle il faut porter plainte.  

On devrait apprendre à nos filles et à nos garçons qu’une main aux fesses dans la rue ou dans les transports n’est pas un geste anodin. Que les femmes ne sont pas des "hystériques" si elles réclament des droits et que les hommes ne sont pas virils s’ils s’expriment par la violence. Qu’être féministe n’est pas un gros mot, qu’il ne s’agit pas de dénigrer l’homme mais de le considérer comme un partenaire, qui a lui aussi ses faiblesses et sa fragilité, qui peut demander de l’aide et se faire épauler et qu’il n’a pas besoin d’user de testostérone pour se faire entendre.

 

Refka est plus qu’un nom, elle est devenue tout un slogan. Celui de toutes celles à qui on a demandé de se taire et qui l’ont payé de leurs vies. Celui de toutes celles à qui on a martelé qu’elles avaient de la chance et qu’elles devaient, ainsi, fermer les yeux sur les gifles qu’elles prennent et les yeux au beurre noir qu’elles essayent de cacher.

Refka n’est pas la première et elle ne sera certainement pas la dernière si nous continuons à agir tel que nous le faisons chaque jour…parfois même sans nous en rendre compte…

Par Synda Tajine
11/05/2021 | 16:59
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Commentaires
Nephentes
Une descente aux enfers prévisible
a posté le 12-05-2021 à 16:31
Bourguiba Tahar Haddad et le mouvement des Jeunes Tunisiens avaient des l'orée du siècle dernier trace la voie de l'émancipation d'une femme tunisienne en relative avance sur son temps.

Mais l'effondrement moral et sociétal de cette population depuis 40 ans - 40 ans, deja- a coduit a la clochardisation de la Femme Tunisienne, qui aurait du être a l'heure actuelle, avec l'Education, le plus grand succès de la Tunisie a l'échelle mondiale

Que s'est il passe ?

le phagocytage de l'héritage rationaliste et moderniste bourguibien : sous l'effet conjugue de

l'exode rural massif avec des schèmes mentaux et des praxis reléguant la femme a un être inferieur corvéable et violentée a merci,

et l'effet de la dictature benaliste ou le modèle de la femme leader était une coiffeuse indic au jean moule adepte de partouzes avec la flicaille

l'image et le statut de la femme bourguibiste cultivée intègre et inspirante se sont littéralement liquéfiés

Place a une caricature obscène ou la laideur bédouine maquillee par des heures "d'embellissement" lifting se dispute avec une inculture et une vulgarite quasi-comique

qu'on est loin aujourd'hui de la Tunisoise de la Sfaxienne de la Monastirienne de la Bizertine qui vous laissait beat d'admiration superbes yeux verts peau de lait et qui vous citait les poemes de Rene Char ou d'Aragon recueil par recueil

La descente aux enfers de la femme tunisienne découle directement du nivellement atroce de notre société de sa deshumanisation de la perte de sens de respect d'autrui de la généralisation de l'inculture et de l'aliénation collective

Et avec l'islamisation de pacotille qui a pollue chaque recoin de notre societe cette descente aux enfers ne fera que s'accentuer
DIEHK
Laa "Refka" wala "Coran"
a posté le 12-05-2021 à 14:27
Juste en lisant cet article gente dame:
Je me suis précipité sur mon "coran" qui est toujours à portée de main sur le bureau et j'ai cherché la page 77 de mon St-Coran :
Sourate AN-NISA' / LES FEMMES en français | Sourate 4
AN-NISA' · 176 versets

V1) '? hommes ! Craignez votre Seigneur qui vous a créés d'un seul être, et a créé de celui-ci son épouse, et qui de ces deux-là a fait répandre (sur la terre) beaucoup d'hommes et de femmes. Craignez Allah au nom duquel vous vous implorez les uns les autres, et craignez de rompre les liens du sang. Certes Allah vous observe parfaitement
V2) Et donnez aux orphelins leurs biens ; n'y substituez pas le mauvais au bon. Ne mangez pas leurs biens avec les vôtres : c'est vraiment un grand péché.
V3) Et si vous craignez de n'être pas justes envers les orphelins,... Il est permis d'épouser deux, trois ou quatre, parmi les femmes qui vous plaisent, mais, si vous craignez de n'être pas justes avec celles-ci, alors une seule, ou des esclaves que vous possédez. Cela, afin de ne pas faire d'injustice (ou afin de ne pas aggraver votre charge de famille).
V4) Et donnez aux épouses leur mahr, de bonne grâce. Si de bon gré, elles vous en abandonnent quelque chose, disposez-en alors à votre aise et de bon c'?ur.
V13) Tels sont les ordres d'Allah. Et quiconque obéit à Allah et à Son messager, Il le fera entrer dans les Jardins sous lesquels coulent les ruisseaux, pour y demeurer éternellement. Et voilà la grande réussite.
V14) Et quiconque désobéit à Allah et à Son messager, et transgresse Ses ordres, Il le fera entrer au Feu pour y demeurer éternellement. Et celui-là aura un châtiment avilissant.
V15) Celles de vos femmes qui forniquent, faites témoigner à leur encontre quatre d'entre vous. S'ils témoignent, alors confinez ces femmes dans vos maisons jusqu'à ce que la mort les rappelle ou qu'Allah décrète un autre ordre à leur égard.
V16) Les deux d'entre vous qui l'ont commise [la fornication], sévissez contre eux. S'ils se repentent ensuite et se réforment, alors laissez-les en paix. Allah demeure Accueillant au repentir et Miséricordieux.
Et le show continue jusqu'au verset 25 et +

nazou de la chameliere
le coran pour les nuls ?
a posté le à 19:31
en meme temps ,les gens qui trompent leurs maris ou leurs femmes ,ne le font généralement pas devant 4 témoins !!! ou alors y-avait nephente ,pour voir des ***
Dommage nephente ,vous avez flingué votre com; avec cette phrase .vous voilà gardien(ne) de la morale !
mdrrr ,
Essia
Stoppons la violence
a posté le 11-05-2021 à 22:29
Moi j ai eu mal et j en ai même pleuré allah yarhamha refka la pauvre elle a payé de sa vie pour un mari malade qu il finisse sa vie derriere les barreaux et quant je pense qu il y a des cons et des connes qui encouragent des gestes de ce genre c est dégoutant Bourguiba s en retournerai ds sa tombe
DHEJ
Atteinte à l'intégrité physique
a posté le 11-05-2021 à 21:43
Pire l'atteinte à l'intégrité morale...

Comme l'atteinte à l'honneur...
Gg
Ironie!
a posté le 11-05-2021 à 19:41
J'adore cette phrase ironique : "Nous vous remercions chaque jour pour ces privilèges que vous nous avez accordés".
Jilani
Des tunisiens sont en emoi
a posté le 11-05-2021 à 19:14
C'est qq tunisiens pour bien préciser. Dans le milieu rural on a appris aux filles qu'un homme qui frappe sa femme c'est qu'il l'aime. Et d'ailleurs dans le Coran dit que si elles desobeissent il faut les frapper avec doucement. Dans le milieu urbain c'est devenu courant surtout dans les quartiers populaires. Et maintenant avec les islamistes machistes nous sommes repartis 14 siècles en arrière. KS ne veut pas parler d'égalité homme femme un sujet trop dur pour lui qui risque de lui perdre au moins 40 % de son électorat. Comment donner la moitié de l'héritage à une femme hram !!!
Alya
L entourage familial
a posté le 11-05-2021 à 18:22
Madame Tajine, pour avoir souvent accompagné, ces jeunes femmes, je vous vous assure que le grand obstacle est leur famille. Le circuit des plaintes est très correct. Le seul danger est que la femme retire sa plainte. C est rare qu ellecle fasse pour faire plaisir à la belle famille. La demande de retrait est souvent formulée par les parents de la victime
Warda
Hommage à toutes ces femmes
a posté le 11-05-2021 à 18:04
Dans quel monde vivons-nous. C'est terrifiant.. Chahinez en France à Mérignac près de bordeaux a été brûlée vive en pleine rue par son mari algérien qui ne voulait pas qu'elle vive comme une française en portant un jeans.
Tout cela est scandaleux