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Chroniques
Chronique non-validée par Ridha Jaouadi
19/02/2017 | 18:00
3 min

 

Le syndicat des imams a envoyé un huissier notaire au cours de la semaine dernière à la troupe « Le Théâtre national » la sommant de changer le nom de sa dernière création « Alhakomou attakathorou » jugé blasphématoire et touchant au sacré d’une manière inconvenable et inconcevable pour ces imams.

Cette initiative a vite fait son effet, puisqu’il n’a pas fallu beaucoup de temps aux artistes et aux créateurs pour faire marche arrière et ôter le nom en arabe de leur pièce de théâtre, comme il n’a pas fallu beaucoup de temps au pays pour retrouver ses vieux démons et les risques rampants d’une société, toujours divisée hélas, entre ses désirs d’émancipation et de modernité d’une part, et ses réflexes d’archaïsme et de passéisme teintés d’ignorance et de fausse religiosité d’autre part.

 

Mais comme préambule, deux mots à l’adresse de Fadhel Jaibi, directeur du Théâtre national en sa qualité de producteur de l’œuvre « Alhakomou attakathorou » et de Néjib Khalfallah, réalisateur de la pièce : l’art et la création artistique sont par essence le domaine de la liberté, de l’insoumission et du non-conformisme.

Pour ce faire, l’artiste doit être courageux, capable de bousculer les tabous et faire reculer les lignes rouges. Seul ce courage lui permet d’accepter de partager, d’étaler sa douleur créatrice et puis de se soumettre aux regards extérieurs. Seulement le courage a deux caractéristiques. La première c’est qu’il est inné. Il ne s’apprend pas dans les écoles et ne s’achète pas dans le commerce. La seconde caractéristique du courage, c’est qu’il est intermittent selon l’âge, les circonstances, les intérêts, la position sociale et le degré d’engagement. Rares sont ceux qui sont courageux d’une manière continue et permanente. On les appelle les héros.

 

Pour revenir à l’initiative malheureuse du syndicat des imams, notons que ces prédicateurs  ont stigmatisé l’affiche de la pièce de théâtre avant même de voir le contenu de la pièce. Cela rappelle étrangement le comportement de l’un de leurs aînés, cheikh Salah Ben Mrad, qui avait écrit un livre pour dénigrer l’œuvre de Tahar Haddad en faveur de l’émancipation de la femme, avant même d’avoir eu connaissance de son contenu.

 

Cela démontre que les imams du 21ème  siècle n’ont pas progressé d’un iota par rapport aux prédicateurs des siècles obscurs de l’islam, responsables du déclin de la civilisation arabo-musulmane.

Le salafisme et le fondamentalisme dont ils se réclament n’est autre que la pire forme d’un savoir momifié et archaïque qui a servi uniquement les intérêts des imams et des califats ignorants et despotiques. Les phases reluisantes de l’histoire politique de l’islam sont liées aux moments de grande liberté de pensée, de tolérance et de cohabitation pacifique entre les ethnies et les religions. Elles ont permis de nous faire parvenir les œuvres universelles d’Abou Nawas, d’Al Hallaj ou d’Abou Atahya et Al Maârri.  

 

L’initiative de ce syndicat guidé par l’imam Ridha Jaouadi dépasse la simple réaction face à une affiche. C’est une tentative, qui n’est pas la première, d’imposer une mainmise du religieux sur les différentes sphères de la vie publique.

Il y a quelques années, ils ont essayé en saccageant des salles de cinéma, en interdisant des films ou en détruisant des œuvres d’art. Ils avaient trouvé une résistance de la part de la société civile. Ils ne font aujourd’hui que revenir à la charge. Ce sont ces mêmes illuminés qui se sont prononcés, il y a deux semaines, contre les droits des femmes et contre l’approche genre au cours d’une conférence de presse qui a tourné vers une représentation tragi-comique.

 

Si on les laisse faire, ces charlatans au nom de Dieu, ces templiers autoproclamés s’immisceront dans les détails de notre vie quotidienne : ils interdiront aux femmes maquillées et aux hommes qui ne font pas la prière d’invoquer le nom d’Allah. Ils nous indiqueront comment nous devons manger, nous habiller ou nous aimer. Ils contrôleront jusqu’à nos écrits et nos lectures. Ces imams sont autant, sinon plus dangereux que Hizb Ettahrir ou Daech. Eux au moins, ils annoncent qu’ils veulent notre peau. Ceux du syndicat des imams sont trop lâches pour le dire.  

19/02/2017 | 18:00
3 min
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Commentaires (14)

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Dr. Jamel Tazarki
| 23-02-2017 12:33
La Tunisie a besoin d'un théâtre à la Bertolt Brecht! Un théâtre qui traite les problèmes réels de la société tunisienne.


La Tunisie nécessite une réforme en profondeur de son théâtre, oui il nous faut un théâtre capable de porter la réalité tunisienne sur la scène et de l'interroger. Il faut mettre fin au théâtre dramatique à l'égyptienne où il s'agit souvent d'affrontement entre deux principaux personnages et où à la fin le sort de l'un ou de l'autre se détermine.

La place du Tunisien a changé dans la société tunisienne et dans le monde, Et ainsi, Il nous faut un théâtre capable de nous montrer en quoi la place du Tunisien a changé. ==> La place du Tunisien doit aussi changer sur la scène de théâtre. Le théâtre tunisien, s'il veut pouvoir penser le Tunisien actuel, il doit le représenter dans son environnement social, dans le monde dans lequel il s'inscrit.

Nous vivons dans une société des contradictions (exemple: une ex-troïka islamiste qui se laissait élire par la masse pauvre mais qui par contre donnait aux riches afin qu'ils s'enrichissent encore plus et qui prenait au pauvre afin qu'ils s'appauvrissent encore plus) et ainsi il nous faut un théâtre capable de mettre en scène cette contradiction flagrante de notre société afin que le spectateur prenne conscience de sa situation et afin qu'il fasse aux prochaines élections législatives un meilleur choix politique.


La tâche du Théâtre tunisien serait de présenter les contradictions socio-économiques et politiques en toute objectivité. Exemple: Le gouvernement de Mr. Essid offre 6000 Millions de dinars à un système bancaire oligarque tunisien et en contrepartie ce dernier prête 167 Millions de dinars à l'Etat tunisien pour l'achat de quelques locomotives. Oui, la contradiction devrait devenir l'objet du théâtre tunisien en exposant avec toute rationalité objective la réalité du Tunisien et de sa possible transformation/amélioration.


Très Cher Mr. Fadhel Jaibi, je vous propose de reprendre votre pièce la Noce, que vous avez écrite d'après "La Noce chez les petits bourgeois" de Bertolt Brecht. Oui, Très Cher Mr. Fadhel Jaibi, la Tunisie a besoin d'un théâtre à la Brecht afin de remuer le Tunisien de son sommeil et afin de le rendre conscient de sa situation socio-politique et économique!

Très Cordialement

Jamel Tazarki


PS: mon résumé de "la Noce chez les petits bourgeois" de Bertolt Brecht: l'importance donnée à des riens (réputation, apparence, argent, propriété) est pour une bonne part responsable des souffrances des uns et des autres...

takilas
| 21-02-2017 20:37
Ce fut mosquée et les Ulemats émérites, il ne reste plus que l'obscurantisme et l'intégrisme que leurs ne connaissent de l'islam que des"m'as tu vu ? "qui improvisent des prêches et du sikh dans les cafés après avoir discuté du ma tv club africain espérances, et de critiquer les voisins et les passants devant le "café théâtre " dont les sont étalées tout au long du mur longeant sa devanture ; un spectacle gratuit favorable à la paresse à l'inactivité et à l'analphabétisme.la min guarra là min warra sobhan rabbi aatahom elfihm, tels sont ceux qui apprennent la fausse culture, la fausse histoire, la fausse science, la faux art, le faux savoir en Tunisie et ce dans les cafés en ingurgitant un narguilé aux frais de.l'État et de des biens de l'État comme les produits subventionnés par l'état et les propriétés de l'État comme les terres domaniales de l'état, dont San or Ettaieb prend les directives de Ghannouchi bêtement à la lettre.inoubliable mot de Ghannouchi lors de sa réunion de cirque avec sa secte, et en parlant des terres domaniales qu'il veut utiliser cet ignorant pour son populisme en disant : DISTRIBUEZ,DISTRIBUEZ à la manière de Issam Chaouali : ouazzaa, Ouazzaa Rizk obbayou ce pauvre ghannouchi comme s'il s'agit d'une propriété paternelle et non de terres défendues par de centaines de générations durant des siècles et dont il n'a aucune idée de l'histoire de La Tunisie. Il n'espère que "la chaise "surtout qu'il est détenteur de plusieurs nationalités, celle tunisienne vient en dernier lieu bien évidemment.

Tunisienne
| 20-02-2017 19:09



Quel intérêt aurait eu cette chronique si elle avait été validée par Ridha Jaouadi ? Elle aurait perdu sa crédibilité, sa liberté et sa subtilité !


Merci, Monsieur Ben Hamida, de rappeler avec votre sobriété habituelle, que dans toutes les tentatives d'imposer la mainmise du religieux sur les différentes sphères de la vie publique, il y a toujours deux parties : celle qui tente le coup et essaie d'imposer, et celle qui se laisse intimider (par convictions vacillantes, par lâcheté ou par facilité, pour éviter les prises de têtes). C'est comme ça que les islamo-illuminés grignotent du terrain tous les jours.


Certes, le courage n'est pas un attribut indéfectible tout le temps et chez tous. Mais il y a des moments-clés où il faut engager certaines batailles. Pour ne pas perdre la guerre ou, au moins, pour la perdre dignement.





TeTeM
| 20-02-2017 16:54
Il y avait bien trop longtemps qu'on avait pas entendu parlé du sinistre Ex-Imam de la mosquée Sidi Lakhmi de Sfax. Décidément, cet empêcheur de tourner en rond ne peut pas rester tranquille 5 minutes...

Mohamed Aloulou
| 20-02-2017 16:19
Les "bigots patentés" veulent nous forcer à accepter leur censure pour nous conditionner et nous habituer ainsi à nous soumettre à leur esprit totalitaire. Force est de constater que dans ce sens ils gagnent du terrain. En effet, dans le dialogue téléphonique (sur Mosaïque-fm) avec l'imam inquisiteur, l'artiste s'est confondu en excuses et rappelé sa "bonne foi" de musulman pratiquant dès sa tendre enfance. Il eut été préférable qu'il ne s'aventure jamais là où il n'est pas sûr de pouvoir tenir et une telle reculade est particulièrement lourde de sens et de conséquences.

déja-vu
| 20-02-2017 10:45
Ca viendra...Vous devrez obtenir le coup de tampon céleste un de ces jours...

Relisez votre constitution. C'est légal. Ils ne veulent pas trop serrer, c'est tout.
Ils vous laissent respirer encore un peu...
S'ils se fâchent...grlllll...

Et l'aut qui parle d'un "code des libertés individuelles" à l'aut Sofiane...

héhéhé...s'que j'me marre...

Jilani
| 19-02-2017 23:20
Quand on voit l'imagination des Arabes avec l'histoire d'Aladdin et de mille nuits. Ceux qui ont créés des taxis drones se sont inspirés du tapis d'Aladdin.les Arabes au lieu de mettre en valeur les poésies de moutanbi Abou nawes et mille autres, ils ont laisse leur avenir entre ces religieux rétrogrades et néfastes.

tounsia2
| 19-02-2017 21:55
Une chronique courageuse qui contraste vivement avec l'attitude frileuse de Fadhel Jaibi qui nous a habitué à plus d'audace et de courage au temps où la liberté d'expression était considérée comme un luxe qu'on ne pouvait se permettre. Cet incident nous met en face de la triste réalité et prouve que les islamistes continuent à avoir main mise sur notre société et que la démocratie n'est pas encore bien assimilée !

ali
| 19-02-2017 19:50
Cher Sofiane il semble que tu as oublié les mois qui ont précédé les élections de 2011, les mêmes senari les mêmes imams perturbateurs lâches par les islamistes. Ces derniers manipulateurs à merveille sont entrain de préparer les élections
municipales. Les républicains democrates doivent tirer les leçons
sinon longue vie pour l'anarchie.

Hocine
| 19-02-2017 19:29
Monsieur Ben Hamida,je suis algerien et il m'arrive de vous lire(mon interet s'explique par le fait que suis marie a une de vos compatriotes depuis 35 ans).Pour vous dire que,non seulement vos idees et positions sont les mienne,la chronique d'aujourd'hui,je signe des deux mains,mais egalement vous ecrivez dans un francais qui entre vos mains prend tout son sens de "butin de guerre" pour les maghrebins que somme.Bien le bonjour et bonne continuation.