La goutte qui a fait déborder le vase…
Loin de la polémique de l’élection présidentielle et au-delà des pronostics autour des chances des différents candidats, les Tunisiens ont été préoccupés ces derniers jours par la célébration de l’Aïd El Idha. Une célébration qui a viré au cauchemar pour plusieurs familles qui se sont trouvées sans eau potable. Retour sur une situation, pour le moins, désastreuse.
Des protestations à Ennahli, des routes coupées et des manifestations. Pour cause, la coupure d’eau dans cette région très proche de la capitale le jour de l’Aïd. Plus de 400 familles se sont trouvées sans eau potable le jour où elles en ont eu le plus besoin pour les rituels de l’Aïd, en terme de nettoyage et de préparations. Les citoyens pris de colère ont manifesté, et ont coupé les routes engendrant des embouteillages monstres et de longues files d’attente.
Sauf que les perturbations n’étaient pas limitées à une zone restreinte. Elles ont touché plusieurs régions, notamment, le gouvernorat de Sfax, plusieurs villes au Sud et au Nord-Ouest. Un disfonctionnement qui a affecté de près le quotidien des citoyens, engendrant un ras-le-bol général et plusieurs manifestations.
La polémique a nécessité l’intervention des hauts responsables de la Sonede qui ont tenté tant bien que mal d’absorber la colère générale et d’expliquer la réalité des faits. Dans ce contexte, le PDG de la Sonede, Mosbah Helali a indiqué que la Tunisie a connu un pic de consommation exceptionnel dû à la vague de chaleur, qui fût accentuée par la grande demande le premier jour de l’Aïd. « Dans tous les cas, la Sonede regrette les coupures d’eau, mais ceci est dû à des circonstances qui échappent à notre contrôle », a-t-il dit.
Il a ajouté que les coupures n’ont pas touché toutes les régions. « En effet, il y a plusieurs facteurs à prendre en considération. Les villes situées sur les hauteurs subissent, par exemple, les coupures en premier. Le débit de l'eau dépend aussi de l’offre et de la demande, dans certains cas la demande dépasse largement l’offre. Cela dit, nous avons augmenté les réserves en eau de 20% par rapport à la même période de l’année dernière ».
Mosbah Helali a affirmé qu’il faut prendre en considération les changements climatiques, soulignant les efforts déployés par la Sonede malgré les grandes difficultés rencontrées sur le plan logistique et naturel.
Quant au directeur central d’exploitation à la Sonede, Abdessalem Saidi, il a, lui aussi, réitéré que les perturbations ont été enregistrées à la suite des pics de consommation, ayant coïncidé avec le jour de l’Aïd et la grande vague de chaleur qui, elle, dure depuis plusieurs semaines. « Il y a des gens qui pensent que la Sonede procède à la coupure de l’eau. Or, ce n’est pas vrai. Il y a une rupture d’approvisionnement à cause de la pression et la grande demande. C’est en dehors de notre volonté ».
Le responsable a précisé que des perturbations sont enregistrées chaque année le jour de l’Aïd, soulignant que ces perturbations auraient pu être plus graves s’il n’y avait pas eu une prévision préalable de la Sonede. Et d’ajouter que la Sonede a, déjà, publié un communiqué pour mettre en garde les citoyens contre les éventuelles perturbations, assurant que plusieurs d’entre eux ont pris leurs précautions puisqu’un pic de consommation a été enregistré la veille de l’Aïd. Il affirme, également, que les perturbations seront constatées les prochaines années puisque l’Aïd El Idha coïncidera, encore, avec les grandes vagues de chaleur.
Sauf qu’en pleine période électorale, cette crise ne pouvait passer inaperçue. C’est dire que certains candidats à la présidentielle, à l’instar de Mohsen Marzouk, ou encore Saïd Aïdi ont fermement critiqué la gestion de la crise des coupures d’eau, qui a concerné de nombreuses régions du pays ces deux derniers jours, en mettant l’accent sur échec et la défaillance du gouvernement et de sa gouvernance.
« Les coupures d’eau dans de nombreuses régions du pays pendant l’aïd dénotent d’un échec de planification, de préparation et d’anticipation. Les responsables doivent être identifiés et des mesures doivent être prises à leur encontre. Toutes les excuses pour justifier cela sont inacceptables… c’est pour cela que nous avons inclus dans nos programmes électoraux les sujets de l’eau et des énergies alternatives », a déclaré Mohsen Marzouk, candidat et président de Machroû Tounes.
Le parti Afek Tounes a, également, dénoncé les coupures d’eau potable appelant les autorités de tutelle à intervenir d’urgence et à recourir à tous les moyens possibles pour rétablir l’eau potable dans les régions concernées. Le parti a, également, demandé des explications à propos les circonstances ayant conduit à ces coupures, tout en appelant à déterminer les responsabilités et à poursuivre les personnes impliquées dans ce manquement. Le parti a fait porter la responsabilité au gouvernement « à cause de la déficience de ses politiques » l'accusant d'être « préoccupé par la campagne électorale au lieu de concentrer ses efforts sur le service public ».
Il va sans dire que la crise enregistrée au niveau de l’approvisionnement en eau potable a touché de près le quotidien du citoyen, sauf qu’elle nous renvoie vers la réalité et la nécessité de réviser la gestion des ressources hydriques. Les changements climatiques, et la politique adoptée par la Sonede doivent être revues, outre la nécessité d’accélérer les projets en cours. Toutefois, la récupération et l’exploitation politique de ce genre de crise sont inévitables en ces temps précis, en pleine période électorale.
Sarra HLAOUI