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Chroniques
Un gouvernement quand le bon Dieu le décidera
Par Ikhlas Latif
13/12/2019 | 16:59
4 min
Un gouvernement quand le bon Dieu le décidera

 

Le premier round du « tachkil » ou formation du gouvernement a échoué (le terme a une double connotation en dialectal tunisien qui pourrait se traduite par racoler ou draguer). Le deuxième round du « tachkil » se soldera-t-il par un nouvel échec ? Rien n’est moins sûr surtout que l’idée que le président de la République entre dans le jeu et soit le décideur dans cette affaire n’enchante personne. Rien n’est moins sûr quand la menace d’élections législatives anticipées se profile. Cela n’arrangerait personne non plus.

Quatre semaines n’ont pas suffi à Habib Jamli pour rendre sa copie après une centaine de rencontres et tout autant de litres de thé gaspillés et, avec, un temps précieux perdu pour le pays. Le candidat désigné a demandé une rallonge, la dernière selon la constitution. Deux mois et demi après les élections législatives, nous sommes toujours dans le flou et la situation risquerait de s’éterniser si monsieur Jamli venait à déclarer forfait.

 

Petit rappel et résumé de ce qui pourrait advenir dans ce cas : au terme du nouveau mois accordé à Jamli, si le gouvernement n’est pas formé, c’est au chef de l’Etat de chapeauter de nouvelles consultations avec les partis pour charger un autre candidat. Se rajoutent dans ce cas un mois et dix jours. Si cette entreprise échoue dans les quatre mois suivant la première désignation, c’est encore au président de la République d’intervenir pouvant dissoudre le Parlement et convoquer des élections législatives anticipées. Se rajoutent quatre-vingt-dix jours (délai maximum) en plus du temps que prendra la proclamation des résultats et la désignation d’un nouvel individu… On en aura pour au moins 10 mois.

Qui sait ce que décidera, pendant ce temps, le chef de l’Etat qui avait clairement présenté ses visées pour changer le système politique. Des visées explicitées récemment par l’un des architectes de sa campagne explicative, on nommera Ridha Lénine. Tout ce cafouillage ne pourrait que servir ses théories ayant pour point de départ l’échec du système instauré par la constitution de 2014. On commence aussi à évoquer ce qu’on appelle « le gouvernement du président » comme solution immédiate au blocage.

 

Tout ça reste bien évidemment de l’ordre de la politique-fiction, du moins pour le moment. A l’heure actuelle Habib Jamli tente de sortir de l’impasse. Ennahdha et son chef ne lui facilitent pas la tâche. Ils jouent et se jouent de lui. Il pense détenir les clés de la demeure, sauf que tout est télécommandé à distance. Mais Ennahdha et son chef n’ont pas intérêt à ce que tout parte en vrille. Les divergences au sein du parti islamiste quant à la démarche à suivre pour la formation du gouvernement, ont mis Habib Jamli dans une situation intenable. D’un côté, certains poussent vers un renouvellement des négociations avec Attayar et Echaâb. L’idée est de ne pas perdre la face devant un électorat auquel on a promis un gouvernement « révolutionnaire » et une non-alliance avec le grand méchant Qalb Tounes. D’autres, veulent éviter le risque qu’Ennahdha soit tributaire à Attayar et Echaâb. Les deux partis pouvant lui filer du fil à retordre.  

La source du problème s’articule principalement autour de deux facteurs. Ennahdha qui a désigné Habib Jamli, pensant au départ s’appuyer sur sa position de premier de la classe pour capter rapidement des alliances. Le parti se retrouve au final avec un seul allié affiché : la Coalition Al Karama. Ennahdha n’a pas de ce fait réussi à défricher le terrain à son candidat en lui présentant une majorité confortable sur laquelle il puisse se reposer pour former son équipe. Cela nous amène au deuxième facteur qu’est la configuration de l’Assemblée des représentants du peuple avec des blocs éparpillés qui affichent volontiers leurs antagonismes, pas seulement politiques, mais notamment en ce qui concerne les programmes socio-économiques. Toute cette situation a mis Habib Jamli en difficulté. Un candidat qui, de surcroît, ne fait pas montre de leadership et ne donne pas l’image d’une personnalité qui pourrait en imposer.   

 

Les facteurs de l’échec sont encore à l’ordre du jour, mais en dépit des antagonismes entre les acteurs politiques, tous se refusent à aller vers des élections anticipées. Si Habib Jamli arrive à former une équipe et à décrocher la confiance, relative, des députés, son gouvernement sera fragilisé et instable. Le risque est de le voir laisser la place à d’autres gouvernements qui seront tout aussi fragiles et instables. En attendant, on n’apercevra la fumée blanche émanant de Dar Dhiafa que quand le bon Dieu le décidera. Ce n’est pas moi qui le dis, c’est le futur chef de l’un des pôles de l’exécutif de la République tunisienne.

Par Ikhlas Latif
13/12/2019 | 16:59
4 min
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Commentaires (2)

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DHEJ
| 14-12-2019 16:39
Ou le Gouvernement sui va commander le peuple de dieu ?

SOUSSI
| 13-12-2019 17:47
APRES MOI LE DELUGE
CE qui CE PASSE EN TUNISIE C EST L irresponsabilité TOTALE DES HOMMES POLITIQUES CHOISIT PAR LES TUNISIENS
INCHALLAH ILS VERRONT LA LUMIERE