L'autre revers de la médaille démocratique est ce manque de respect des candidats les uns envers les autres et envers les médias.
Une belle campagne, vraiment ! La Tunisie vit des moments historiques avec cette campagne électorale et cette course à la présidentielle. A deux semaines du scrutin, la bataille est rude et on ne sait pas encore qui va l’emporter. C’est agréable à voir, c’est une chance pour notre génération de vivre ces moments. La Tunisie est l’unique pays arabe et un des rares pays africains à les vivre. On dirait un pays occidental, le développement et le civisme en moins.
Tout n’est cependant pas beau en démocratie, car le revers de la médaille est un peu trop risqué. Au train où vont les choses, le Tunisien risque de ne pas avoir beaucoup de choix le 15 septembre 2019 avec tous ces mafieux, évadés fiscaux, islamistes et populistes qui se présentent. Les très rares candidats valables ne semblent pas avoir beaucoup de chances de passer. Ceux qui en ont, sont soit des mafieux, soit des despotes en herbe (donc capables de tout, y compris du pire), soit des faucons islamistes (pléonasme) avec un masque d’ange, soit des populistes dont la culture politique est comparable aux connaissances philosophiques d’un enfant de six ans.
L’autre revers de la médaille démocratique est ce manque de respect des candidats les uns envers les autres et envers les médias. Aucune éthique, aucune morale, aucun sens des responsabilités. Des candidats qui dénigrent leurs adversaires et les médias avec un verbiage de hooligan, ça ne passe pas. Entre les accusations mensongères grotesques et la manipulation de l’appareil de l’Etat, c’est tout sauf respectable. Quant aux médias, les différents candidats et leurs fans doivent savoir que nous sommes en train de faire notre travail, point ! Les médias sont le quatrième pouvoir et un des piliers de la démocratie. Les intimider, les accuser, les dénigrer, les injurier, c’est tout sauf respectable. Elyes Gharbi a lancé un joli message dans ce sens, mais je doute qu’il y ait des candidats suffisamment sensés pour le comprendre. Ils sont tous dans la mouise et tiennent à nous salir pour espérer glaner quelques centièmes de points.
Pour qui voter, pour qui ne pas voter ? Qui se distingue ? Quel candidat a laissé une marque derrière lui pour que l’on se rappelle de son numéro le jour du vote ? Telles sont les questions de tous les électeurs qui envisagent d’aller aux urnes dimanche 15 septembre, sauf que l’indécision est celle qui prévaut le plus pour le moment.
S’il fallait résumer chaque candidat par « une phrase », « un paragraphe », voici ce que l’on pourrait dire de ceux qu’on pense être favoris et « dignes » de la fonction présidentielle.
Nabil Karoui : De manipulateur à mafieux, son image s’est transformée en victime d’une cabale politico-judiciaire orchestrée par I Watch, financée par l’Union européenne, et exécutée par Youssef Chahed. Nabil Karoui n’est même pas mis en examen, mais il est sous écrou depuis une dizaine de jours et c’est depuis sa cellule de prison qu’il doit faire sa campagne, alors que ses adversaires ont le droit d’aller sur le terrain et d’apparaitre dans les médias. Il y a un principe de droit quasi-universel qui dit que toute personne est innocente tant que sa culpabilité n’a pas été légalement démontrée. Ce principe s’appelle la présomption d’innocence et, en Tunisie, il est bafoué pour le favori de la présidentielle 2019. Grâce ou à cause de Youssef Chahed, il est devenu un Robin des bois, un voleur sympathique. Hélas.
Youssef Chahed : Il aurait pu être un bon président s’il était un peu plus patient. On le pensait démocrate, on l’a soupçonné d’être despote, il a démontré un peu tôt qu’il est un futur dictateur non éclairé. Non seulement il n’est pas (plus) rassurant, mais les deux derniers mois ont prouvé qu’il peut être dangereux.
Kais Saïd : Enseignant universitaire, arabophone littéraire, proche des milieux islamisto-révolutionnaires, il ne connait rien de la politique et encore moins aux choses de l’Etat, de l’administration, de l’armée ou de la diplomatie.
Abdelkarim Zbidi : Il refuse toujours de parler pour qu’on puisse le juger. On ne sait toujours rien de lui à part le fait qu’il soit un bon médecin francophone et avoir été un bon ministre de la Défense (CQFD) qui a réussi brillamment les funérailles de feu Béji Caïd Essebsi. Si Abdelkrim, parlez svp pour que l’on vous entende !
Mehdi Jomâa : Quand il était à la Kasbah, il a bien brillé et a commencé à mettre la Tunisie sur les rails. Sa vision stratégique pour la Tunisie 2024 a de quoi rassurer, son programme est sensé et faisable. Il a le grand avantage d’avoir bien réussi dans le privé, ce qui lui donne une expérience inégalable en matière de flexibilité, efficacité et optimisation du temps et des ressources. Une expérience qu’il cumule avec celle de son passage à la Kasbah qui lui a appris ce qu’est l’administration et sa raideur. Son programme est d’huiler avec les méthodes du privé les rouages de l’administration afin que cette dernière (re)trouve l’efficacité requise, telle qu’il l’a observé dans l’expérience chinoise.
Ses deux défauts sont cependant majeurs : il a un gros déficit en communication et une quasi-absence de sens politique. Résultat, le public ne sait quasiment rien de lui, ne comprend pas ce qu’il dit et l’oublie rapidement. Ajoutons à cela sa position pour la peine de mort et Mehdi Jomâa finit par dégager une impression négative.
Abdelfattah Mourou : Son image de papy tunisois fait sourire. Il rassure et inspire confiance. Ses paroles sont belles et apaisantes. Son plus grand défaut est cependant qu’il soit islamiste et l’expérience exige que l’on ne doive jamais faire confiance à un islamiste. Avec eux, par quelque manière que ce soit, la Tunisie reculera dix siècles en arrière. Abdelfattah Mourou précisément, car ces dernières années ont démontré que ses couleurs font envier les mieux racés des caméléons. Il rappelle, par moments, le loup du « Petit chaperon rouge ».
Abir Moussi : Avocate de talent, loyale, battante, dynamique, offensive, active, courageuse. Elle aurait pu faire une excellente femme d’Etat, une véritable première dans le monde arabe. Sauf que l’homme d’Etat (ou femme) qui se respecte est celui (ou celle) qui pense aux futures générations et rassemble tous ses citoyens. Abir Moussi est polarisante, elle veut écarter une partie non négligeable de la population (les islamistes) de la chose politique et ceci est inacceptable. Cette politique de l’ancien régime a démontré ses limites et il fallait tirer les conséquences de cette politique, ce que Me Moussi refuse de faire. Tôt ou tard, elle fera comme Marine Le Pen et se pliera à la réalité.
Moncef Marzouki : Il a été incapable d’être président pendant ses trois ans à Carthage. Il a été incapable de diriger son parti et d’imposer ses choix à ses propres fidèles. Il est tellement polarisant qu’il a réussi à faire éclater son parti en mille morceaux. Marzouki ne réussit qu’une chose : insuffler la haine et diviser les Tunisiens. Et même quand il se rend compte des limites et du rejet de sa politique et décide de mettre le holà, les quelques fidèles qui lui restent se chargent de nous les rappeler avec leurs insultes et invectives quotidiennes contre les adversaires politiques et les médias qui les dénoncent.
Mohamed Abbou : Séducteur, charmeur, bel orateur, ses belles paroles pourraient convaincre un procureur, un juge d’instruction ou carrément un tribunal, mais pas un électeur avisé. Si son progressisme réel et affiché (notamment sa position courageuse en faveur de l’égalité de l’héritage) nous font oublier son passé islamiste à l’UGTE, on ne peut pas pardonner sa politique de justice révolutionnaire et vengeresse au lendemain du 14-Janvier à l’époque où il était encore au CPR. La justice doit rester au dessus de tout, c’est un principe immuable, et Mohamed Abbou l’a mise au service de ces principes dit révolutionnaires qui ont tant divisé les Tunisiens. C’est lui qui a été à l’origine de la confiscation et du gel des avoirs de plusieurs personnalités de l’ancien régime, parmi lesquelles figurent plusieurs personnes qui ont servi le pays et l’Etat et freiné la dictature. Il a été dans les coulisses pour manœuvrer en faveur de plusieurs injustices. Et puis, on connait ses limites. Mohamed Abbou est du type qui jette rapidement l’éponge quand il y a de la tension et que ça le dépasse. Il a démissionné du gouvernement Jebali rapidement et a quitté aussi rapidement le CPR de Marzouki. Quelqu’un qui ne réussit pas à s’imposer dans sa propre famille, que dire alors quand il s’agit d’imposer sa politique sur tout un pays dans un environnement international nettement plus hostile ? Et puis, son sens de la démocratie demeure sujet à caution, car sa pratique sur terrain est contraire à ses belles paroles. S’il était vraiment démocrate, il n’aurait pas quitté le CPR et aurait accepté les décisions de la majorité de son parti. Et s’il était vraiment démocrate, il n’aurait pas fait ce tour de passe-passe avec Ghazi Chaouachi à la tête d’Attayar, le même tour de passe-passe entre Vladimir Poutine et Dmitri Medvedev. Les démocraties de façade, ça suffit !
Saïd Aïdi : On l’a presque oublié tellement il n’apparait nulle part. Il aurait été un excellent président pour des Suédois vivant en Suède (et pas ailleurs), mais pas pour la Tunisie. Dommage pour nous. Dans un siècle peut-être ?
Commentaires (52)
Commenterles propos du journaliste très respectueux et qui reproche aux autres de ne pas l'être
L'autre revers de la médaille démocratique est ce manque de respect des candidats les uns envers les autres et envers les médias.
des fléaux et des calamités qui ont trop durés et qui exigent.........
Le classement de Nizar Bahloul est-il un pronostic prémonitoire
Les naufragés.
Le problème qui sera causé par le nombre excessif des candidats
Bref, je comprends que la (e) moins pire
Et bannir un pan de la société
Je pense que c est trop vite parler car dans la société les bons musulmans, une bonne partie ont tourné le dos à Ennahdha ( voir les dernières élections) à cause tout simplememt de leur incompétence et surtout leur fourberie et de leur passé
Ensuite il.faut faire attention! Est ce que l" Islam politique est viable en Tunisie? ? Est ce que vous voulez in régime Dae-Chien basé sur la Charia?
Ultimement n est ce pas leur but?
Est ce qu ils ont renoncé à recourir à la religion comme critère de base de leur charte politique
NON.!
Abir Moussi et à raison considère que les islamistes, frères musulmans de la confrérie internationale sont Le mal ultime qui fera reculer la Tunisie de 10 siècles!!
Vous le.dites vous même!!!
Alors pourquoi vous traitez une patriote visionnaire qui, maintenant se fait copier par les autres candidats en reprenant ses thèmes De modifier la loi électorale et la constitution bâtarde Dont profitent pleinement au contraire les islamistes, car il veulent changer la société par la force en prenant tout leur temps.. Qui est le fasciste totalitaire!
Je pense que vous allez trop loin en comparant Abir à marine le Pen! vous donnez de l eau au moulin de eux, les islamistes fascistes qui veulent une société à leur image !!
Abir Moussi est une femme forte. C ' est ce dont on a besoin. Des principes basés sur la loi! '?gale pour tous!
Les traîtres et les corrompus seront juges dans la cadre de la loi.. Et mettre le holà à la culture du consensus du marchandage politique
Abir Moussi est de Loin, là meilleure représentante pour la Tunisie..
Vous avez éclairé, sans avoir éclairé, il aurait fallu que vous vous prononciez plus explicitement..
Mais les citoyens ont compris entre les lignes.
Fausse analyse
Ou sont les autres?
les autres bien entendu Lotfi Mrayhi, Mohsen Marzouk,
...
Une question
résumer les candidats
Mourou: orange trop sanguine, pas assez de jus
Karoui: gros mot, maigre personnage
Zbidi: pas de quoi faire un fromage
etc.....