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Chroniques
Les meilleures intentions ne suffisent pas
Par Houcine Ben Achour
08/08/2024 | 19:44
3 min
Les meilleures intentions ne suffisent pas

 

On peut toujours être animé par les meilleures intentions. Mais que valent-elles si, dès le départ, elles s’avèrent irréalisables en raison d’une approche suspicieuse dans sa mise en œuvre totalement à rebours de l’objectif. Le gouvernement navigue dans ces eaux-là. Et l’exemple de l’accord de financement d’un montant de 170 M€, soit un peu plus de 570 MD, conclu entre la Tunisie et la Banque européenne d’investissement (BEI) est, à cet égard, édifiant.

À première vue, l’initiative du gouvernement est louable dès lors que cette enveloppe va servir à soutenir les entreprises qui traversent de graves difficultés mais sont susceptibles de reprendre du poil de la bête. En d’autres termes, une ligne de financement est mise à la disposition de ces entreprises pour éviter que leurs difficultés conjoncturelles ne prennent un caractère structurel, menant inéluctablement à la cessation d’activité. Elle l’est d’autant plus compte tenu de la nature de cet accord, inédit. Habituellement, la BEI prête à l’État pour financer ses investissements en infrastructures de base et équipements collectif et négocie directement avec les banques pour leurs fournir des lignes de financement. Cette fois-ci, première du genre, c’est l’État qui prend en charge la ligne de financement et c’est à lui de la gérer. Est-ce que le gouvernement a forcé la main à la BEI ou est-ce la BEI qui a imposé cette démarche faisant de l’État le seul garant de cette ligne de financement ? La question demeure posée.

 

Quoiqu’il en soit, pour les entreprises concernées, cela constitue une excellente nouvelle d’autant qu’elles n’ont pas eu la chance, en 2022, de bénéficier du soutien nécessaire pour faire face à l’impact du Covid-19 et aux bouleversements de conjonctures car la liste était très longue et le montant mobilisé bien trop maigre pour satisfaire tout le monde : 450 MD ou 120 M$, soit 0,4% du PIB fournit alors par la Banque internationale pour la reconstruction et le développement (BIRD), filiale du Groupe de la Banque mondiale sous forme de prêt. Ailleurs, c’est l’équivalent de 3% du PIB qui a été mobilisé pour venir en aide aux entreprises sinistrées et pas tout sous forme d’emprunt extérieur. Tel le cas du Maroc, par exemple.

Cette fois-ci, heureusement, l’État n’empruntera pas. C’est déjà çà de gagner. Cinq banques de la place géreront au départ l’équivalent de 10 M€ chacune et deux sociétés de leasing 5M€ chacune. La ligne de financement a une durée de vie de trois ans. Ainsi, avis est affiché aux entreprises en besoin pressant de financement pour redresser leur situation. En 2022, près de 900 entreprises ont bénéficié d’un soutien. Cependant, elles seraient plus de 9.000 à connaître des difficultés de trésorerie selon le recensement effectué par le centrale des risques de la Banque centrale de Tunisie.

Cependant, pour espérer bénéficier de cette manne de la BEI, les entreprises concernées doivent montrer pattes blanches. Devront-elles passer par la Commission de suivi des entreprises en difficultés et se soumettre aux dispositions de la loi sur les procédures collectives relatives aux indicateurs d’alerte d’une entreprise en difficulté ? La logique l’impose de fait.

Jusque là, tout semble parfait. Sauf que certaines conditions d’éligibilité à cette ligne de financement rendent son objectif illusoire. Certes, la priorité sera donnée aux entreprises employant moins de 250 salariés, ou aux entreprises implantées dans des zones de développent régional. Cependant, est-ce une raison d’imposer aux entreprises concernées d’avoir au moins 30% de femmes au sein du staff d’encadrement de l’entreprise ou qu’elle ait recruté au moins cinq jeunes dans l’entreprise au moins six mois avant l’accord d’octroi de soutien ? Dans ces conditions, certaines entreprises devront-elles licencier des cadres masculins pour atteindre le taux d’encadrement féminin souhaité ou d’autres obliger de recruter des jeunes au risque de s’enfoncer davantage dans les difficultés ? Sur cette base, il est évident qu’un large pan des 9.000 entreprises susceptibles de soutien se retrouve hors course pour des raisons aussi futiles, n’ayant d’autre perspective que la cessation d’activité.

On peut toujours être animé des meilleures intentions….

Par Houcine Ben Achour
08/08/2024 | 19:44
3 min
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Commentaires
'Gardons un minimum d'honnêteté!
La priorité devrait être donnée plutôt aux entreprises employant le maximum de salariés. Pourquoi?
a posté le 09-08-2024 à 09:52
Introduction: Il est très important d'avoir d'abord la répartition du risque de faillite des 9000 PME en fonction du nombre de salariés (notre Ministre, Madame Feryel Ouerghi, parlait de 9805 PME risquant la faillite).

Je m'explique:
- on ne pourrait pas tirer des implications (conclusions) utiles / intelligentes à partir d'une information incomplète. Il faudrait nous donner d'abord la répartition du risque de faillite des 9805 PME en fonction du nombre de salariés, comme suit
-->
1 à 3 salariés : nombre de PME risquant la faillite
4 à 9 salariés : nombre de PME risquant la faillite
10 à 49 salariés: nombre de PME risquant la faillite
50 à 249 salariés : nombre de PME risquant la faillite
de 250 à 499 salariés : nombre de PME risquant la faillite
- etc.
-->
la somme totale devrait être égale à 9805 PME.

- la priorité est d'abord aux PME avec un grand nombre de salariés où une injection de capital ferait beaucoup plus de sens. En effet, ce sont les relativement grandes PME qui seraient capables de rationaliser la production, d'augmenter la productivité tout en diminuant le prix de revient --> ce qui nous rendrait encore plus compétitifs à l'échelle internationale. Elles sont le moteur du développement socio-économique d'un pays, elles sont les seules qui pourraient soutenir nos exportations...
- Le plus important est le remboursement des créanciers de la grande PME en difficulté afin d'éviter l'effet domino qui est une réaction en chaîne qui peut se produire lorsqu'un changement mineur provoque un changement comparable à proximité, qui provoquera un autre changement similaire...

- Par contre les PME de 1 à 5 salariés disparaissent et réapparaissent quotidiennement et il ne faut pas en faire un drame national ou leur accorder de petites sommes gratuites qui ne serviraient qu'à la dispersion inutile des 170 Millions d'euros accordés par la Banque européenne d'investissement (BEI).
-->
de ce fait, il est très important d'avoir la répartition du risque de faillite des 9805 PME en fonction du nombre de salariés


- Je cite l'article ci-dessus: "la priorité sera donnée aux entreprises employant moins de 250 salariés, ou aux entreprises implantées dans des zones de développent régional." --> moi, je dirais plutôt "la priorité sera donnée aux entreprises employant le maximum de salariés"


- En Allemagne la répartition des PME en fonction du nombre de salariés est disponible sur le web. Les plus grandes PME industrielles allemandes constituent le moteur de l'économie allemande (Cf. IfM-Bonn). Elles se développent très vite et exportent 55% de leur fabrication.


Bonne journée

PS: Je me demande, pourquoi le gouvernement tunisien ne s'engagerait pas à effectuer un volume de 30% de la commande publique auprès des petites PME afin de leur permettre de s'agrandir. La commande publique est un formidable levier afin de motiver nos petites entreprises à s'agrandir. L'achat public représente plus que 8 milliards de dinars par an pour l'Etat et ses différentes institutions (je n'ai pas de données exactes). Ainsi le Pacte national pour la création de l'emploi serait de mobiliser l'achat public afin d'accompagner le développement des petites PME. Pourquoi, effectuer les commandes publiques auprès de nos milliardaires entrepreneurs et ignorer toutes ces petites PME pleines d'énergie et qui voudraient produire plus et s'agrandir (oui, "s'agrandir" est le mot magique) si seulement elles avaient les moyens. Oui, je propose de mettre en place un partenariat couvrant l'achat public des produits, services ou travaux auprès des petites PME sans qu'il soit nécessaire de procéder à une mise en concurrence ou d'injection gratuite d'argent public.
Gardons un minimum d'honnêteté!
J'optimise le titre de mon commentaire ci-dessus.
a posté le à 11:15
La priorité devrait être donnée plutôt aux entreprises employant les plus grands nombres de salariés. Pourquoi?

Il faut revoir la définition du "maximum" afin de comprendre pourquoi j'ai fait cette rectification. --> cette rectification devrait être faite dans tout mon commentaire ci-dessus.