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Constitution : Sérieux risques sur l'aspect civil de l'Etat tunisien
16/01/2013 | 1
min
Constitution : Sérieux risques sur l'aspect civil de l'Etat tunisien
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‘Le projet actuel de la Constitution représente une plateforme acceptable de discussion, suite aux modifications introduites au premier brouillon’, pense le Professeur Yadh Ben Achour, dans son rapport introductif de la journée d’études Abdelfattah Omar, organisée hier à la Bibliothèque nationale de Tunis sur le thème ‘Lecture de l’avant-projet de Constitution’.
La journée a été organisée par l’Association tunisienne de droit constitutionnel et de l’Association pour la recherche sur la transition démocratique en partenariat avec la Fondation allemende Hanns Seidel.


Experts, membres de la l’Assemblée nationale constituante (ANC) et universiataires sont depuis plus d’un mois au chevet de la deuxième mouture de la Constitution pour pointer ses imperfections et combler, autant que possible, ses défaillances. La société civile a, également, mis la main à la pâte. Plusieurs séances de débat ont été également organisées dans les régions.

Présent à la journée d’études, Habib Khedher, le rapporteur général de la Constitution, a promis de prendre en considération ces remarques, si elles s’avèrent en harmonie avec les orientations des choix adoptés au sein de l’Assemblée. ‘Ces débats et ces examens sont d’ordre consultatif’, a-t-il notamment rappelé. Habib Khedher a présidé la séance d’ouverture de la journée d’études.
Dans le rapport introductif, le Professeur Ben Achour n’a pas manqué d’adresser de nombreuses critiques au projet soumis à l’examen des experts. Il a notamment critiqué l’article 148 qui stipule, entre autres, que ‘l’islam est la religion de l’Etat’. Yadh Ben Achour a émis de sérieuses réserves sur une telle affirmation.

‘De tels propos peuvent s’interpréter de diverses manières, pouvant aller jusqu’à la considération de l’Islam comme unique source de la législation, avec toutes les conséquences pouvant en découler’. Il a surtout mis à l’index ‘la possibilité de parvenir à des interprétations wahabites de l’Islam ou abolir le Code de statut personnel’ si l’on ‘n’élimine pas le flou qui accompagne tous ces textes’, a-t-il attiré l’attention.
Dans la conclusion de son intervention, Yadh Ben Achour a insisté sur le fait que le terme ‘Etat civil’ énoncé dans le troisième paragraphe du préambule a été vidé de sa substance par l’article 148 qui annonce ‘l’Islam comme religion de l’Etat’, deux dispositions considérées comme étant contradictoires.

En plus, M. Ben Achour a attiré l’attention sur plusieurs autres défaillances dont plus particulièrement l’absence de référence à la Déclaration universelle des droits de l’Homme et à la liberté de conscience, les signaux à répétition à la religion et à la protection du champ religieux, la considération du champ d’atteinte aux libertés comme une loi non-fondamentale, etc.
Pour Yadh Ben Achour, l’accumulation des ces manquements laisse la possibilité à la Chariaâ de porter atteinte à la liberté. Plus encore, il y a même une possibilité que le totalitarisme refasse surface sous forme d’une théocratie religieuse. Le juriste ne perd, toutefois, pas son optimisme quant aux rectifications de ces imperfections.
Suite au rapport introductif, ce fut au trio Slim Laghmani, Salsabil Klibi et Saloua Hamrouni de faire un check-up du préambule, principes généraux et du champ des droits et des libertés. L’examen a permis de déceler des problèmes de méthodologie, de synchronisation entre les chapitres, et de désordre au sein d’un même chapitre.

Intervenant sur la question de l’aspect civil de l’Etat, Ghazi Gherairi a rappelé que la Tunisie était, déjà et de longue date, l’unique Etat civil dans le Monde arabe. ‘Or, le troisième paragraphe du préambule parle de l’Etat civil comme objectif’, ce qui fragilise ce concept, puisqu’il ‘passe du statut d’acquis à celui d’objectif’.
L’article 148 donne l’estocade finale à cet ‘aspect civil de l’Etat’ en proclamant ‘l’Islam, comme étant la religion de l’Etat’, car un Etat civil n’a pas de religion, relève M. Gherairi qui s’interroge, également, sur le Conseil supérieur islamique, comme étant une éventuelle institution de l’Etat alors que ‘toutes les structures devraient être élues dans un Etat civil’.
Ghazi Gherairi a rappelé que les députés d’Ennahdha ont ajourné la question du Conseil supérieur islamique aux débats finaux en plénière, lorsqu’ils ont été en minorité dans les commissions. Il faut donc s’attendre à un retour sur cette question dans les prochaines semaines.

Le Professeur Farhat Horchani a évoqué, quant à lui, la question du droit international dans la Constitution, en considérant qu’il y a encore des passages pouvant faire paraître des équivoques et des réserves sur cette question de droit international qui, a-t-il rappelé, ‘protège les Etats et les personnes’.
M. Horchani a attiré l’attention sur le fait que ‘l’Etat de Droit n’existe pas, en tant que concept, dans le préambule du projet en examen. Il a également demandé d’inclure un article dans la Constitution signifiant l’attachement de la Tunisie aux principes du droit international. ‘Un tel article serait une incitation pour les investisseurs s’intéressant à la Tunisie car ils regardent à leurs droits en cas de contentieux, et l’attachement de la Tunisie aux conventions internationales les tranquillise’, a dit Pr Horchani.

Prévu pour être présent à la séance d’ouverture de cette journée, le président de l’ANC, Mustapha Ben Jaâfar, est venu avec une heure en retard, ‘à cause de l’embouteillage’, s’est-il lamenté. Pour le président de l’ANC, ‘la Tunisie a choisi la voie la plus difficile en élisant une Constituante qui a choisi, à son tour, l’option la plus radicale à savoir la feuille blanche’. Il n’empêche que, selon lui, les choses avancent.
‘Nous sommes en train d’édifier ce qui nous unit. Ce n’est pas facile. Mais c’est irrévocable et ce sera un grand acquis pour la nouvelle Tunisie’, relève-t-il avec satisfaction.
Toutes les séances de la journée ont été dirigées par des membres de l’ANC. Habib Khedher, Fadhel Moussa, Noômane Fehri et Zied Laâdhari se sont succédé pour diriger les quatre séances. Habib Khedher a proposé aux organisateurs de transmettre les remarques soulevées pendant les débats à l’ANC pour s’en inspirer lors de la prochaine rédaction.

Mounir Ben Mahmoud
16/01/2013 | 1
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