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Chroniques
Youssef Chahed a payé le prix, mais il n'obtiendra pas la paix
26/09/2016 | 15:59
5 min

 

A l’actualité cette semaine, l’assassinat de l’écrivain jordanien Nahed Hattar pour avoir partagé sur les réseaux sociaux une caricature de l’au-delà où l’on voit un daechien au milieu de ses houris en train de donner des ordres à Dieu. Après la polémique, suite à ce partage d’une caricature dont il n’est même pas l’auteur, Nahed Hattar a dû se rétracter et présenter ses excuses. N’empêche ! Il sera traduit en justice. Elle n’a rien à faire d’autre la justice en Jordanie que de rendre justice à un bon Dieu qu’on a jugé incapable de se défendre lui-même. Faut-il faire confiance à cette justice qui prétend défendre le bon Dieu ? Nahed Hattar a estimé que oui et allait se présenter devant elle. Le problème, c’est que les défenseurs de Dieu deviennent nombreux et chacun prétend le défendre mieux que tous. L’un d’eux a été plus rapide que les autres. Il a prononcé le verdict et exécuté la sentence avant même que l’écrivain n’entre au palais de Justice. Nahed Hattar est mort, l’honneur de Dieu est sauf ! On ne verra plus de mécréants partager sa caricature ! Le hic, c’est que la caricature n’est pas morte. Celle-ci en particulier. Elle a été bien partagée hier dans les réseaux sociaux et devrait continuer à être partagée ad vitam æternam. Paix à ton âme, Nahed Hattar ! On ne te connaissait pas avant, mais grâce à ton assassin daechien, tu es devenu célèbre dans le monde entier !

 

La caricature en question sera-t-elle publiée sur Business News ? Non ! C’est une censure vicieuse et silencieuse que nous pratiquons, sans que personne ne la dénonce. Nous censurons un dessin de presse et nul ne crie ou criera au scandale. Peut-être même qu’on nous applaudira ce coup de ciseaux.

La semaine dernière, c’est le film iranien « Mohamed, le messager de Dieu » de Majid Majidi qui a été censuré, alors qu’il devait être projeté dans une salle de cinéma de Tunis. Motif de la censure du film : on y aurait représenté le prophète. Cette décision de censure a été prise par le ministère tunisien de la Culture. Oui, vous lisez bien ministère de la Culture et non ministère des Cultes.

Personne n’a dénoncé cette censure, non plus. Même pas ceux qui prétendent être défenseurs de la liberté d’expression et ennemis farouches de la censure. Ceux-là mêmes qui disaient un jour qu’il vaut mieux laisser ce type de caricaturistes en prison, pour leur sécurité. Ceux-là mêmes qui gesticulaient autour de la censure d’une interview à la télé et font les morts quand on tue un écrivain pour le censurer. 

En attendant de se rendre compte que la censure ne résout aucun problème, le partage (discret) des caricatures moquant Dieu et l’islam continue et la vision (en catimini) du film se poursuit. Le public a même augmenté grâce à la censure. 

 

L’autre actualité de la semaine, c’est la publication de la résolution du Parlement européen relative aux relations de l’Union avec la Tunisie. En 70 points, le parlement énonce à la Tunisie ce qu’elle devrait faire et ne pas faire pour obtenir son statut de partenaire privilégié avec l’Europe avec le Plan Marshall pour la sauver qui va avec. Le document est à lire. Le mot révolution est écrit zéro fois, mais le mot liberté est énoncé à treize reprises. Sur les 70 points de la résolution, il y en a cinq relatives aux libertés fondamentales et d’expression.

Vous voulez le développement, vous voulez le Plan Marshall, vous voulez la croissance, vous voulez vous en sortir ? Continuez à censurer et à prétendre être des défenseurs du bon Dieu !

 

A Kerkennah, une solution à la crise Petrofac a été trouvée. L’accord concerne la régularisation de la situation de 266 chômeurs diplômés, sur une durée de 3 ans, avec un taux de 30% la première année. Le ministre a, par ailleurs, confirmé le financement par Petrofac et l’ETAP, à hauteur de 2,5 millions de dinars, des projets de développement dans la région ainsi que l'amélioration de la situation sécuritaire.

En faisant signer cet accord, Youssef Chahed espère enfin retrouver la paix. Winston Churchill disait : « Vous avez voulu éviter la guerre au prix du déshonneur. Vous avez le déshonneur et vous aurez la guerre ».

La première grosse erreur de son prédécesseur Habib Essid a été de signer début 2015, sous la contrainte, un accord abracadabresque avec l’un des syndicats de l’enseignement. Depuis, l’Etat n’a jamais pu imposer ses décisions.

Avec la signature de l’accord de Kerkennah, Youssef Chahed cède devant un collectif de prétendus chômeurs  dirigés par un président qui n’en est pas un et devant un parti islamiste radical qui n’a jamais caché son mépris de la loi et sa haine de la République.

Ici et là, on se félicite de l’accord et on moque les médias qui exagéraient la menace du parti islamiste sur l’île. Ils disaient que tout allait bien sur une île où l’on compte des rentiers par centaines (venus d’ailleurs, même pas autochtones) et où il n’y avait aucun agent des forces de l’ordre ! L’île et ses habitants étaient livrés à eux-mêmes, mais tout allait bien, selon les « politologues » patentés par George Soros and co.

Maintenant que l’accord est signé, allez expliquer au reste de la population qu’il y a quelque part à Kerkennah des personnes qui vont obtenir des rentes sans travailler et qu’il y a une entreprise semi-publique qui va essayer de dégager du bénéfice avec une production plus coûteuse et un management plus fragile.

C’est le prix de la paix sociale, pourrait dire Youssef Chahed. Cher Youssef, tu auras payé le prix et tu n’obtiendras pas la paix. Revois ce qu’ont fait les Américains, les Asiatiques et les Européens par le passé. Si cette politique était efficace, cela se saurait ! Le dernier à s’être entêté pour aller contre vents et marées s’appelle Hugo Chavez. Lui est parti sous terre pour laisser son peuple s’entretuer et mourir de faim

26/09/2016 | 15:59
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Commentaires (26)

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RODIN
| 28-09-2016 14:50
Le Paon ne cherche qu'a plaire et tenter de séduire.En revanche LE pédant ne cherche qu'à vous éblouir en faisant étalage de son érudition!Il peut se permettre la mauvaise foi,le mensonge et vous asséner des contre-vérités criantes,sans vergogne...il peut...il peut l'érudit sans contradicteur!Il peut jusqu'à l'oppression...
Pauvre Hugo..il parait que même les Castro disent du mal de vous...enfin selon les biens informés!
ah,j'allais oublier!Hugo:il parait que ton successeur ne vaut qu'un infini pourcentage de l'ex-tartour!Oui,oui Hugo,c'est toujours selon...

Kairouan
| 28-09-2016 08:11

Cher @Professeur de droit,

C'est tellement rafraichissant de lire des avis eclaires, une reflexion coherence et informee, et des arguments objectifs telque les votres sur les subjets souleves par les journalistes de BN. C'est rare, tres rare sur ce site.
Merci de partager votre experience et votre sagesse.

Cordialement.

Professeur de droit
| 27-09-2016 16:22
Hugo Chavez n'a pas eu besoin des USA pour appauvrir son pays : Il a nationalisé l'exploitation du pétrole, c.à.d. qu'il l'a confié aux fonctionnaires de l'Etat et aux syndicats!!! Et ce qui devait arriver, arriva : le pétrole vénézuelien a été vendu pendant 20 ans à perte, suite aux embauches et charges excessifs et mal maitrisées, et à toutes sortes de fraudes. 20 ans de misère et de pauvreté pour le peuple "le plus riche" d'Amérique latine. Les tunisiens voudraient-ils que l'UGTT gère tous les hotels de Tunisie, et le phosphate? C'est ce que chavez a fait, chez lui.Et c'est ce qu'à continuer l'ouvrier non qualifié Maduro qui n'a meme pas 5% des capacités et de l'expérience politique de Marzouki! Chers tunisiens, c'est beau d'aimer chez les autres ce que vous n'acceptez pas chez vous!Vous ne respectez meme pas le fait que PLUS PERSONNE, dans cette région, ne dit du bien de Chavez ou de Maduro, meme pas leurs amis Lula ou Castro. Vous, à 10.000 KM , vous pensez mieux connaître la situation.

sss
| 27-09-2016 15:31
Je n'y crois pas trop ! je ne sais pas ! mais on verra!!!

khNeji
| 27-09-2016 12:54
Cher NIZAR .j'ai bien lu les conditions d'utilisation et je ne trouve pas que j'ai violé l'une de ces conditions!Permettez moi si NIZAR de vous dire que votre réponse ne m'a pas convaincu.Mr Nizar je pense qu'un bouquet de fleurs est beaucoup plus joli quand il renferme toutes les couleurs.Merci

B.N : Cher lecteur, merci d'éviter les accusations, la censure n'a jamais été notre priorité, et personne n'est systématiquement censuré.

Khneji
| 27-09-2016 11:53
Monsieur Nizar B: j'aimerai bien savoir pourquoi je suis tjs censuré! certainement j'ai un point de vue qui diverge avec la votre mais ceci n'explique pas votre réaction.Merci si NIZAR.



B.N : Cher lecteur, la rubrique commentaires a justement été créée pour vous permettre de vous exprimer sur nos colonnes, et un service de modération s'en occupe.
Veuillez relire nos règles de modération, merci pour votre compréhension et bonne lecture.

G&G
| 27-09-2016 11:49
Pourquoi vous exigez l'impossible d'une personne limitée très limitée même.
Youssef et mille fois ignorant devant le bagage que vous possédez. Il est out. Toute son équipe est un epsilon devant un seul ministre d'El3ahd Elbayed.
Quant à la censure est une pratique de la race arabe. Elle à un gène dans notre sang. Le Tunisien aime la censure. Il s'en fantasme. Il l'applique pour tous. Sauf pour lui. Une pratique qui fait jouir le "censureur". Je me rappelle en 1990 les responsables visionnaient en cachette une vidéo sur des scènes drôles et anti morales pratiquées par des militants d'Ennahdha.
Tout ce qui est Hram à l'exterieur chez le nakbaoui devient Hlal à l'intérieur.
D'Après mes contacts avec le public je peux avouer que les plus grands consommateurs des films pornos sont les religieux.
Aujourd'hui nous ne possédons plus de ceinture pour nos culotte. Elle sont en élastiques facile à faire tomber.
Adieu Bourguiba
Adieu Ben Ali
Adieu Churchill

G&G
rcdiste pour la vie
Adieu Churchill

saz
| 27-09-2016 10:20
On peut donc dans certains pays, le notre compris, sans porter atteinte à la liberté ou à l'intégrité physique d'autrui se retrouver soit en prison, soit menacé de mort, soit assassiné soit obligé de quitter son pays et ce pour le simple motif d'avoir exprimé une opinion contraire à la croyance collective.
Contraire oui, mais comporte t'elle pour autant une entrave ou un danger à cette croyance ou aux pratiques qui en découlent? Comme si le châtiment de Dieu (tant est qu'il existe) ne suffisait pas dans l'au delà, il fallait en rajouter une couche ici bas.
Je remarque au passage que le premier à dégainer pour condamner l'assassinat du journaliste jordanien est Ennahdha et je l'en félicite. Al Massar viens de se réveiller. Je souhaite bonne sieste au gouvernement, à la LTDH, Marzouki; SBH , Nasraoui et le reste de la classe politique.

Bach
| 27-09-2016 08:17
Mr. Nizar Bahloul, pourquoi vous tutoyez le premier ministre ? C'est peut être un ami à vous, dans ce cas tutoyez le en privé, un minimum de respect quand même. Tout part en vrille dans ce pays !!!!

B.N : Nous vous remercions pour votre pertinente remarque, mais l'auteur cherchait cet effet de style dans ce contexte bien déterminé et il n'y voit aucun manque de respect.

CONQUERANT
| 27-09-2016 07:33
« Il faut se méfier d'un excès de lucidité et de bon sens : la vie y laisse quelquefois ses plus belles plumes » a écrit Romain Gary. C'est ce que doit se dire Nahed Hattar, journaliste et écrivain jordanien de confession chrétienne qui vient d'être abattu ce dimanche 25 septembre sur les marches du Palais de justice d'Amman par un ex-imam islamiste.
Le journaliste se rendait au tribunal qui devait le juger pour « atteinte à l'essence divine » d'Allah.
Il avait en effet publié cette caricature sous le titre de « L'Allah des Dawa'ech » (c'est-à-dire le Dieu des affidés de l'Etat Islamique).
Cette caricature n'était pas la sienne et il l'avait retirée de son blog. Mais, c'était trop tard, la fatwa a déjà été ordonnée et elle fut exécutée sans état d'âme.

On tue encore au nom d'un Dieu lointain, fantasmé et invisible. Ses lieutenants autoproclamés sur terre, eux, ne sont pas invisibles, ils agissent en toute impunité au grand jour.
Voilà, où en est l'islam aujourd'hui.
Vivre et prospérer par et pour le sang répandu. Manier le glaive comme autrefois ou le fusil-mitrailleur et le pistolet aujourd'hui ; seule la technique diffère. A y regarder de près, rien n'a changé dans la genèse de cette hystérie collective qui se distinguait déjà à sa naissance par l'usage de la terreur contre celles et ceux qui refusaient son hégémonie et récusaient sa matrice meurtrière, devenue horizon indépassable auquel elle se référait en extrapolant et en gommant le temps et l'espace.

Ils ne changeront pas ? Le monde non plus.

Pour combattre cette folie meurtrière qui, sans juger, condamne et exécute sans coup férir, il ne faut pas céder une seule once de ses convictions. Car, c'est commettre une erreur que d'opposer radicalement le temporel et le spirituel. Le manichéisme des catégories pures échoue toujours à saisir la résonance des phénomènes. Dieu, au nom duquel des hordes sauvages, tuent et assassinent pour sa gloire flétrie se reconnaîtrait-il dans ces horreurs perpétrées ?
Il est permis d'en douter. Parce que la sainteté est un don qui peut être partagé par les hommes et par les lieux, l'horreur aussi manifestement.
En guise de clap de fin j'adresse mes remerciements à monsieur Bahloul qui n'a pas couvert du voile de l'oubli ce crime abject en y consacrant un beau paragraphe.