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Tunisie : La révolution culturelle n'est pas pour demain !
02/09/2014 | 1
min
Tunisie : La révolution culturelle n'est pas pour demain !
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Le secteur culturel et artistique en Tunisie a longtemps souffert de la marginalisation, alors que la culture est en soi un vecteur essentiel du progrès d’un pays et reflète son niveau d’avancement. Tributaires des subventions étatiques, les activités culturelles font face aujourd’hui à de sérieuses difficultés. Le secteur de la culture va mal et en temps de récession économique, la situation n’est pas prête de s’améliorer. Un tel constat a poussé le gouvernement provisoire à revoir le rôle qui pourrait être dévolu au mécénat privé, en intégrant dans la Loi de finances complémentaire de 2014, des mesures allant dans ce sens.

En effet, pour encourager le mécénat culturel, la mesure intégrée par la LFC permettra désormais, une déduction fiscale qui touchera les sociétés soutenant des activités culturelles. Ainsi, cette déduction se fait sur la base de la recette fiscale sur le revenu ou de l’impôt sur les entreprises. Les ministres de la Culture et des Finances sont revenus, lors d’une conférence de presse tenue au musée du Bardo, sur la portée de ces mesures et ont annoncé le lancement de la campagne de sensibilisation visant à solliciter la participation active des entreprises dans le mécénat culturel.

Mourad Sakli a exposé la stratégie mise en place par le gouvernement afin de restructurer et de donner de l’essor au secteur culturel. Prônant la liberté des activités culturelles, le ministre assume son idée selon laquelle le secteur devrait acquérir plus d’indépendance par rapport au ministère de la Culture. Tout le monde sait, selon lui, que si un jour l’Etat arrêtait ses subventions au domaine culturel et artistique, il est probable que 80% de la vie culturelle cessera d’exister. Cependant, il affirme qu’il ne s’agit en aucun cas, comme il a été insinué, d’un désistement du ministère, au contraire. L’encouragement du mécénat est en soi une solution pour endiguer le déclin du secteur.

Effectivement, préparer le terrain au mécénat culturel et au sponsoring générera plus de possibilités aux artistes et aux activités culturelles, et ce en comptant en plus sur les subventions étatiques. En 2014, la subvention a été revue à la hausse entre 10% et 40%. Toutefois, il ne faudrait pas que le soutien de ces activités culturelles et artistiques soit monopolisé par l’Etat. D’un autre côté, le ministère de la Culture est arrivé au constat selon lequel, en dépit des augmentations des subventions étatiques directes ou indirectes, il serait tout de même insuffisant pour que le secteur culturel soit remis. La solution est qu’il faudrait d’autres sources de financement : « On n’invente rien, ces mécanismes sont mis en œuvre dans tous les pays du monde ».

Il faut dire qu’aujourd’hui la plupart des artistes dépendent des subventions du ministère de la Culture. Pour y remédier et relancer le secteur, il serait donc nécessaire de passer par le mécénat. Le travail sur la législation et la fiscalité facilitera donc dorénavant une telle action. Les maisons de culture, les associations à caractère culturel ou les artistes en bénéficieront. Mourad Sakli indique que les sommes accordées à des projets culturels seront déduit automatiquement à 100% des impôts, ce qui est une avancée majeure, alors qu’un pays comme la France n’en déduit que 60%.

Le ministre de la Culture précise qu’il est nécessaire d’octroyer au secteur culturel en Tunisie une véritable dynamique et en particulier dans les régions. Le ministère de la Culture dispose d’un réseau de plus de 700 établissements publics, entre maisons de culture et bibliothèques : « En toute franchise, le diagnostic est négatif, vu que les budgets de ces institutions souffrent d’une insuffisance importante ». D’ailleurs, en coordination avec le ministère des Finances, il a été convenu une hausse de 50% des budgets des bibliothèques publiques et des maisons de culture. Mais si on aspire à une culture effective et réelle, ces mesures ne seront pas suffisantes pour endiguer les déficits. « Notre stratégie à long terme, est qu’il y ait un mécène pour chaque institution culturelle. On est entrain de restructurer tout le secteur touchant les maisons de culture ou les événements artistiques, avec par exemple la création d’un nouveau cahier des charges. Tout cela doit être concrétisé, nécessitant en effet un soutien financier ».

Il s’agira donc de susciter une nouvelle dynamique afin que la production culturelle ne dépende plus uniquement des subventions accordées par le ministère de la Culture. Faudrait-il rappeler que grand nombre de maisons de culture tunisiennes, d’une région à une autre, ne disposent pas du minimum requis d’équipements ou de commodités, entravant la plupart du temps, avec en plus le manque budgétaire, l’organisation d’événements culturels.

Pour sa part, le ministre de l’Economie et des Finances, Hakim Ben Hammouda a assuré qu’il part d’une conviction personnelle : celle de l’importance de la culture, en particulier dans les périodes de changements historiques dans lequel s’inscrit la Tunisie. « La culture aide à la prise de conscience de la citoyenneté, des pratiques démocratiques. De ce fait, on a tenu à concrétiser des mesures qui amélioreront la situation délicate du secteur culturel et artistique dans le pays. Les budgets de tous les ministères ont été revus à la baisse de 20% hormis la Défense, l’Intérieur et la Culture. Ces ministères participent grandement à lutter contre le terrorisme. On a perdu une génération ! La notre avait des activités culturelles riches, malheureusement cela n’a pas été vrai pour la suivante : une génération perdue qui part en Syrie ou en Libye pour le djihad… ».

Présentée comme la mesure la plus avant-gardiste pour encourager le sponsoring et le mécénat culturel, il est à espérer que le secteur s’en trouve revigoré. Le pari d'un modèle de financement s'appuyant en partie sur le privé est à relever, d’autant plus qu’il constituera une aide vitale pour résister à la crise économique.

Ikhlas Latif
02/09/2014 | 1
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