Par Yassine Brahim*
Nous nous apprêtons à vivre un événement important dans le pays, la Conférence internationale sur l'investissement, Tunisia 2020. L'objectif de cette manifestation est de promouvoir les réalisations et le potentiel de notre pays.
L'échéance a été retardée à cause des péripéties vécues en 2015, mais aussi à cause de l’avancée insuffisante des réformes de fond du climat des affaires, amorcées depuis plus de 3 ans. Il nous est possible aujourd'hui d'affirmer que le rythme des réformes s'est accéléré.
En l’espace de 18 mois, la Tunisie a adopté les lois sur la concurrence, les faillites, le partenariat public-privé, la loi bancaire, le statut de la banque centrale, la loi sur les terres collectives, la loi sur l'expropriation et enfin la nouvelle loi d’investissement votée en Septembre lors d'une séance exceptionnelle de notre assemblée. En Juin dernier, au cours d'un séminaire de travail à Tunis, la Banque mondiale a reconnu que peu de pays ont adopté autant de lois structurelles en si peu de temps. Le pays profitera du fruit de ces réformes au bout d’une ou deux années d’application de ces lois.
Premier message pour nos invités internationaux, qu'ils soient leaders politiques, décideurs au sein des institutions financières internationales ou encore investisseurs : la Tunisie est engagée dans un programme de réforme du climat des affaires, déjà bien avancé et qui s'est accéléré ces deux dernières années.
Par ailleurs les réformes de l’enseignement supérieur, de la formation professionnelle et du système éducatif ont été entamées. L’objectif est que nos jeunes citoyens soient mieux formés, plus épanouis et mieux préparés pour construire une plateforme socio-économique accueillante et compétitive dans notre espace naturel euro-méditerrano-arabo-africain.
Enfin, la mère des réformes, celle de l’administration, a aussi démarré, comme nous l'avons mentionné au sein de la vision stratégique, la note d’orientation, publiée en septembre 2015, et détaillé ensuite dans le plan stratégique 2016-2020 soumis à l'Assemblée au mois de mai 2016. Une accélération est cependant nécessaire surtout avec l'établissement du statut de la haute fonction publique dans les plus brefs délais. Un pays fortement administré comme la Tunisie, devant se transformer et décentraliser a besoin de locomotives de haut niveau à la tête de son administration. Ce nouveau statut permettra de conserver les meilleurs et d'attirer des compétences ayant une expérience dans le secteur privé en Tunisie ou à l’étranger.
Le plan stratégique 2016-2020 a détaillé toutes les réformes adoptées et à adopter d'une part, mais aussi l'ensemble des projets publics programmés pour les années à venir. Ce plan est le fruit d’un travail minutieux qui a impliqué plus de 25 000 cadres et experts dans toutes les régions et tous les ministères pendant quasiment un an. Il a permis d’allier la vision stratégique avec les priorités régionales exprimées par les représentants régionaux des citoyens, élus, activistes de la société civile ou des partis politiques ou encore experts des administrations régionales ou centrales.
Ce n'est donc pas un hasard qu'un grand nombre de projets d'infrastructure présentés à cette conférence, concerne la liaison à travers les autoroutes, les routes express et le rail des régions de l'ouest et du sud avec les régions côtières et les ports. Notre économie étant une économie de flux, le coût logistique étant un facteur de compétitivité, les investisseurs ne seront encouragés à investir dans l'ouest et le sud du pays que si les durées de transport sont réduites grâce à cette infrastructure. Par ailleurs, la Tunisie se doit de prendre le train de la digitalisation, dans les premiers wagons. L’Etat et le secteur privé vont pouvoir montrer leur travail collaboratif sur "Tunisie Digitale 2020". Enfin, nos ressources naturelles sont rares et le virage de l'économie verte est en train d'être pris, un grand nombre de projets publics ou en PPP seront présentés autour de la gestion de l'eau, de l'énergie renouvelable, de l'agriculture ou encore du traitement des déchets.
Chez Afek Tounes, nous espérons que cette conférence sera un grand succès.
L'image de la Tunisie auprès des investisseurs internationaux est négative aujourd'hui. Pays en transition, instable, risques sécuritaires, etc. Au bout des quelques jours chez nous, les visiteurs pourront se rendre compte des efforts et des résultats obtenus en terme de maîtrise de la question sécuritaire, et évaluer l'opportunité d'investir dans notre pays. S'ils repartent avec une image plus positive du pays, un premier objectif important aura été atteint.
L'image de la Tunisie auprès des décideurs politiques internationaux est positive. Notre transition est considérée comme une réussite relative dans le monde arabe.
Cependant, sans amélioration sensible des conditions de vie de nos jeunes et sans nouvel espoir pour un avenir meilleur, grâce à une économie créatrice d'emplois et de richesse soigneusement répartie, cette transition restera fragile. Si les décideurs politiques des pays amis repartent de cette conférence avec cette prise de conscience, ils demanderont à accentuer le soutien au niveau de leurs pays, de leurs conseils régionaux supranationaux, et au sein des conseils d'administration des institutions financières internationales, et donc le deuxième objectif important de notre conférence aura été atteint.
Pour conclure, notre destin est entre nos mains. Notre travail, notre persévérance et notre détermination, à consolider notre démocratie naissante, à libéraliser notre économie de la bureaucratie et des rentes corruptrices, feront reprendre espoir à nos jeunes et combleront de bonheur leurs familles.
La Conférence internationale est un acte marketing majeur de notre projet pour notre Tunisie.
* Yassine Brahim, ancien ministre du Développement, de l'Investissement et de la Coopération internationale, sous le gouvernement Habib Essid.
