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Success Story - Adnen Chaouachi : Le Mojo, c'est l'avenir du journalisme citoyen !
02/07/2017 | 15:59
10 min
Success Story - Adnen Chaouachi : Le Mojo, c'est l'avenir du journalisme citoyen !

 

Pionnier du journalisme mobile en Tunisie, Adnen Chaouachi, 34 ans, est l’homme du renouveau des médias en Tunisie. Sportif de haut niveau, il est animé par le challenge continuel et l’amour de la patrie. Un véritable électron libre qui a toujours refusé de profiter de la notoriété de son père, musicien et artiste reconnu.

 

 

Adnen Chaouachi, c’est un esprit sain dans un corps sain ! Il a des mensurations de bodybuilders et est doté d’une générosité hors norme. Durant l’entretien, il est revenu sur son parcours d’enfant de célébrité tunisienne et ses débuts ardus dans le journalisme. Un homme aux ondes positives qui s’est construit lui-même en aiguisant son intelligence au fur et à mesure de ses expériences.

 

Le parcours d’un meneur né  

Benjamin d’une fratrie de 4 frères et sœurs, Adnen Chaouachi est né dans une famille d’artiste au milieu des livres et des instruments de musique. Il a débuté ses études à l’école de la Cité Olympique à Tunis puis au lycée de la Cité El Khadra. Il passera par la suite son baccalauréat session Mathématiques au lycée Menzah 6. Durant une période, il deviendra athlète de haut niveau en taekwondo et en haltérophilie, puis intègrera l’équipe de basketball du Club africain. En 2003, le bac en poche et parfaitement bilingue, Adnen Chaouachi décide de s’inscrire au sein d’une université américaine aux Emirats, l‘American University of Sharjah, pour mener des études de management. Après un passage éclair au sein de cette université, il décide à l’âge de 19 ans de rentrer en Tunisie et se consacre alors à l’une de ses multiples passions : l’entrainement sportif personnalisé des lycéens du Bac Sport.

 

Une vie professionnelle avant l’heure au grand dam de son paternel

Pour coacher les jeunes dans de bonnes conditions, Adnen Chaouachi décide d’acheter le matériel nécessaire pour dispenser ses cours en plein air à côté du stade sportif d’El Menzah. Malgré des moyens sommaires, il obtient un succès fou et les jeunes et moins jeunes ne cessent de le solliciter. « Ce n’était pas seulement du sport, ces cours étaient l’occasion de véhiculer des ondes positives dont avaient besoin les jeunes pour passer leur bac. La première année, les adhérents à mon club ne m’ont pas tous payé mais à mes yeux cela n’était pas très grave » a-t-il expliqué. La seconde année, il reçoit plus de 150 demandes et décide d’appliquer des frais fixes. Grâce au bouche à oreille, son succès est retentissant et il décide alors de louer une salle de sport. Ses adhérents exigeaient cependant d’être entrainés en plein air. Une ambiance unisexe bon enfant qui a créé des générations entières de jeunes sportifs devenus plus tard ingénieurs, avocats et même médecins. « A 20 ans, je gagnais très bien ma vie et j’ai même réussi à me marier grâce à l’argent amassé. Cela ne plaisait pas à mon père mais j’ai quand même continué » a-t-il expliqué avec le sourire.

Des clients divers et variés commencent à l’aborder pour perdre du poids, c’est là que l’un d’entre eux lui propose de travailler pour le compte d’une ONG basée à Dubaï en tant qu’interprètes traducteurs bilingue Français/Anglais. Adnen Chaouachi qui n’avait pas encore de diplômes universitaires à ce moment-là, accepte le poste et commence à exercer au sein de l’ONG de façon ponctuelle. Parallèlement à ses activités sportives et d’interprètes, Adnen Chaouachi s’inscrit en 2003 à l’Institut Bourguiba School des Langues vivantes et se spécialise en Langue et Littérature Anglaise puis, en 2005, il épouse son amie de lycée rencontrée à l’âge de 17 ans. En 2007, il obtient son master avec brio et décide de s’installer pendant deux ans aux Emirats avec sa femme et son fils Rayan pour exercer exclusivement le métier d’interprète traducteur. Rappelé par son amour de la patrie, il revient en Tunisie avec sa famille.

 

Les débuts dans les médias

En 2009, le journalisme l’emporte sur la littérature anglaise et Adnen Chaouachi décide de rédiger un mémoire en langue anglaise sur l’économie politique des médias aux Etats-Unis à l’Institut Bourguiba School. Son étude intitulée « Les forces anti-démocratiques et les challenges de la démocratie aux Etats-Unis» lui ouvre davantage les yeux sur ce monde qu’il côtoyait déjà, vu qu’il se déplaçait avec son père, artiste, dans les plateaux de télévision quand il était tout jeune. Il décide par la suite de s’installer aux Etats-Unis avec sa famille pour étudier à l’Université Georgetown University à Washington. Le 17 décembre 2010, à l’aune de la révolution tunisienne, Adnen Chaouachi commence à douter de sa présence aux Etats-Unis et se dit qu’il doit rentrer au pays. Il travaillait alors en freelance avec l’agence de presse de renommé,  Reuters et décida de rentrer en Tunisie en février 2011. Reparti de zéro, Adnen Chaouachi, challenger, commence alors à enseigner l’anglais à Bourguiba School. Il y fera une rencontre qui constituera un tournant dans sa vie.

 

La rencontre avec Hayet Toukabri

Adnen Chaouachi rencontre la présentatrice des programmes en langue anglaise sur RTCI, Hayet Toukabri, alors qu’il enseignait à Bourguiba School. Elle l’invite au bureau de RTCI et le recrute pour faire de l’animation en langue anglaise. Donia Chaouch, animatrice en langue française sur les mêmes ondes l’accueillera à bras ouverts au sein de l’équipe. Il y instaurera un vent de renouveau en invitant des artistes tels que l’acteur Dhafer Abidine pour des interviews en langue anglaise. « Hayet Toukabri m’a fait confiance, elle m’a laissé inviter des membres de la société civile pour parler de l’actualité. C’était un vrai challenge de produire des news en anglais » a-t-il déclaré.

Déjà, en 2002, Adnen Chaouachi avait exprimé son ambition de faire un stage de journalisme à RTCI mais son père, qui baigne dans le milieu des medias et de la musique, avait refusé de l’aider. « If you want something, Go Get it ! » lui répondait le paternel, Adnène Chaouachi. Aujourd’hui Adnen Chaouachi, le fils, s’est rendu compte que son père avait raison.

A côté de son travail à RTCI, Adnen Chaouachi commence à produire des reportages-news pour d’autres médias comme Reuters. Il fallait alors acquérir du matériel couteux pour travailler. Le journaliste décide alors d’opter pour la location auprès de la société de production audiovisuelle SVP Tunisia. Adnen Chaouachi cumulait des emplois de freelancer à Reuters, pigiste à RTCI et enseignait également des cours en communication à la Faculté des Sciences humaines et sociales de Tunis.

 

La ténacité de Adnen Chaouachi malgré les débuts journalistiques difficiles

En 2013, Adnen Chaouachi se rend compte qu’il a besoin d’un capital pour travailler correctement mais les banques refusent de lui faire confiance et le prennent de haut. Il décide d’emprunter 54 mille dinars auprès d’un ami pour acheter le matériel dont il a besoin. « Cet ami me voyait travailler et il m’a fait confiance » a-t-il mentionné. Avec cette somme, il acheta la caméra dont il avait besoin mais, lors d’une manifestation, Adnen Chaouachi est agressé et son matériel détruit par les Ligues de protection de la révolution (LPR).  « Je suis devenu fou de colère car j’ai acheté cette caméra en empruntant de l’argent » raconte Adnen Chaouachi.

Le succès hors frontière dont commence à jouir le journaliste faisait qu’il recevait de multiples commandes de reportages de la part d’agences de presse internationale. « Ces commandes allaient du reportage social, en passant par la couverture de Jazz à Carthage, au documentaire sur la consommation de lait. J’étais journaliste, producteur, traducteur… Je faisais tout car je n’avais pas encore de quoi recruter et parce que j’avais des dettes. J’étais en plus père de famille avec la naissance, en 2013, de mon second fils Youssef » a-t-il avancé. Petit à petit, il commence à gagner convenablement sa vie et paye ses dettes en un rien de temps.

En 2015, il produit le film documentaire « Rahil » relatant les combats des Tunisiens et surtout des Tunisiennes lors de la révolution. Ce documentaire contenait également une interview prophétique du martyr Mohamed Brahmi réalisée quelques semaines avant son assassinat. Avant Mohamed Brahmi, Adnen Chaouachi avait également couvert les funérailles du martyr Chokri Belaid. « Il y avait des affrontements, des agressions, des jets de pierre et des voitures brûlés, nous étions au point culminant du cimetière Djellaz et des voyous ont tenté de nous voler la caméra » a conté Adnen Chaouachi. C’est là, qu’il commence à réfléchir au format journalistique Mojo.

 

Le renouveau journalistique : le format Mojo ou « Mobile Journalisme »

En prenant en compte toutes ces précédentes expériences journalistiques, Adnen Chaouachi s’aperçoit que le format du journalisme mobile « Mojo » est avantageux. « Les caméras sont couteuses et leur format fait qu’elles sont repérables et peuvent faire du journaliste une cible » a-t-il expliqué. En devenant pionnier de journalisme mobile en Tunisie, Adnen Chaouachi reçoit un prix lors des premières rencontres francophones de la vidéo mobile à Paris le 2 février 2017.  

Journaliste et producteur, Adnen Chaouachi est une usine à idée. C’est ainsi, qu’en 2015, il obtient le prix Thomson fondation lors de la conférence internationale de journalisme mobile en Irlande sur le reportage qu’il a réalisé via son smartphone autour du sujet d’une jeune femme diplômée qui, pour ne pas rester au chômage, a décidé de vendre du pain traditionnel. Aujourd’hui, il travaille sur un reportage à propos des ramasseurs de bouteilles en plastiques en Tunisie. « Il ne s’agit pas de tomber dans le misérabilisme ! Ce que je veux montrer c’est la dignité de ces personnes. J’aime ce genre d’exemple qui est bénéfique pour la Tunisie « a-t-il expliqué.

Passionné par la transmission de savoir, Adnen Chaouachi devient aussi formateur en journalisme mobile. En 2016, il propose de former les journalistes de la Radio nationale aux nouvelles pratiques de la vidéo mobile. S’en sont suivies des formations dispensées à plusieurs journalistes de médias tunisiens, mais aussi algériens comme ceux de la chaîne Ennahar TV et la radio Tipaza. Il a également formé les journalistes de l’agence Tunis Afrique Presse (TAP), de la Télévision nationale tunisienne, de Mosaïque FM et de la BBC Média Action. L’Union de Radiodiffusion des Etats Arabes (Arab States Broadcasting Union ou ASBU) a également fait appel à Adnen Chaouachi pour former des journalistes soudanais, égyptiens, libanais, palestiniens et du monde entier au format journalistique Mojo.

 

Un succès important mais une humilité à toute épreuve

Malgré les diverses offres de travail reçues des Etats-Unis, d’Europe ou des Emirats, le journaliste n’a qu’une ambition : être en Tunisie. « Je suis comme mon père, quand je voyage je n’ai qu’une seule envie c’est rentrer en terre natale » a-t-il expliqué.

Aujourd’hui, Adnen Chaouachi dispose de sa propre boite de production : Independent production et travaille avec une équipe de 5 personnes. Il est également devenu le partenaire principal du réseau de télévision China Global Television Network (CGTN). Fidèle à sa nature sportive, il occupe son temps en jouant de la boxe « pour se défouler » et en faisant de la natation « pour garder son souffle ». Il a également exprimé une pleine reconnaissance vis-à-vis vis de sa femme à qui il dit devoir sa réussite.

 

Khawla Hamed

02/07/2017 | 15:59
10 min
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Commentaires (4)

Commenter

happy 'star
| 04-07-2017 21:41
Très beau portrait. Ceci dépend et de la qualité du sujet portraituré et de l'adresse de la plume de l'auteur. Bravo

citoyenne
| 03-07-2017 08:02
C'est avec un grand plaisir que j'ai lu cet article qui relate l'itinéraire original suivi par Adnéne Chaouachi, fils du grand artiste Adnéne pére, bravo et bonne continuation.

KATO
| 02-07-2017 18:06
La rencontre d'Adnène CHAOUACHI avec Hayet TOUKABRI rappelle les 2 villages voisins de CHAOUACH et TOUKABER (gouvernorat de BEJA), quel beau clin d''il.

Ameur l
| 02-07-2017 17:59
Bravo pour cette vitalite et ced ondes positives transmises au lecteur...
Bon courage et bon vent citoyen du monde