Salah Zeghidi, l’une des figures emblématiques de la Gauche tunisienne n’est plus. Telle fût la nouvelle qui a affecté les milieux politiques, syndicaux et médiatiques ainsi que les nombreuses personnes qui l’ont connu de près ou de loin. Farouche défenseur de la laïcité et des droits de l’Homme, Salah Zeghidi nous a quittés en ce lundi 2 avril 2018, laissant derrière lui un parcours digne des plus grands militants.

« Papa s'en est allé, entouré et aimé des siens mais aussi de vous toutes et tous. Gardez en mémoire son beau sourire et sa passion pour la vie ». C’est en ces termes que l’annonce du décès a été faite par sa fille Meriem Zeghidi Adda. Ces propos pleins de vie, d’espoir et de générosité, ne peuvent être qu’à l’image de Salah Zeghidi.

Ce militant de la Gauche depuis les années 60, a passé toute vie à défendre les nobles causes d’ordre social et humanitaire jusqu’à ses derniers jours. Il a été emprisonné en 1968 à cause de ses actions militantes dans le cadre du mouvement Perspectives, puis libéré en 1970 à la suite de l’échec de l'expérience coopérative en Tunisie ayant poussé le président Bourguiba à une autocritique et une remise en cause du régime qui s’est traduite par une certaine ouverture.

Il fût, également, un syndicaliste hors pair à l’UGTT, où il a contribué à la fondation de la Fédération générale des banques et des établissements financiers. Les agents du secteur bancaire et financier ont réussi à obtenir plusieurs avantages professionnels pendant qu’il était secrétaire général de la Fédération.

Hormis ses activités politiques et syndicales, le défunt était un fervent défenseur des droits de l’Homme. Il faisait partie du comité directeur de la Ligue tunisienne pour la défense des droits de l’Homme (LTDH). Il combattait, bec et ongles, les libertés et les droits de l’Homme  ainsi que les valeurs de la République et de la laïcité. Il menait sa lutte au quotidien et contribuait de manière significative au sein de la société civile.

Il aspirait à une société laïque, moderniste et progressiste loin de l’obscurantisme, de l’extrémisme et  du terrorisme. A cet effet, il fût le fondateur de l’Association pour la défense de la neutralité de l’administration et des mosquées et secrétaire général de l’association SOS terrorisme. Des associations à travers lesquelles il a tenté de véhiculer les notions et les bases d’une société moderne et tolérante ainsi que sa perception d’un Etat indépendant de tous les tiraillements idéologiques.

A vrai dire le défunt ne ratait aucune occasion pour se positionner au premier plan des militants des causes qui lui semblaient justes. Ainsi, on a pu le voir parmi les manifestants lors de la marche nationale pour l’égalité de l’héritage qui a eu lieu le 10 mars 2018. Une position qui ne lui est pas étrange, vu son parcours et ses penchants politiques et idéologiques.

Quelques jours plus tard, plus précisément le 22 mars 2018,  il fût victime d’une attaque vasculo-cérébrale qui avait nécessité son transfert vers une clinique de la place. Un élan de solidarité a vu le jour, depuis, sur les réseaux sociaux et plusieurs internautes se sont associés à la famille pour le soutenir dans l’épreuve qu’il traversait. Mais la mort a été plus rapide, et Salah Zeghidi nous quitte à l’âge de 77 ans.

Sitôt annoncée, la nouvelle du décès a envahi les réseaux sociaux avec la multiplication des statuts et des posts pour rendre hommage au défunt et présenter les condoléances aux membres de sa famille, plus particulièrement à ses enfants, Meriem et notre confrère, Mourad Zeghidi.

La tristesse et la compassion se mêlaient dans des propos imprégnés de regrets et de mise en relief des qualités du disparu dans sa longue lutte pour les libertés individuelles et celles d’opinion auxquelles il croyait dur comme fer.

Les hommages ont été nombreux, tout le long de la journée dont celui rendu public sous forme de tribune par Hend Belhajali (Hend Yahia Yahia) et édité sur le site de l’Institut tunisien des relations internationales, (ITRI) où elle retrace les différentes étapes du parcours militant du disparu.

L’auteure de ce bref récapitulatif indique, à la fin de sa tribune, que « le travail de mémoire ne fait que commencer, maintenant, j’ai promis à Salah de le faire et je vais continuer inchallah… ».

Le syndicat national des journalistes tunisiens (SNJT), dans un communiqué rendu public, aussitôt la triste nouvelle annoncée, l’a qualifié de « militant, défenseur des droits de l’Homme et syndicaliste » et présente les condoléances à toutes les forces civiles et progressistes en Tunisie.

« Am Salah était un militant infatigable qui n’a cessé de défendre les droits et les libertés ainsi que le projet de l’Etat de la citoyenneté. Et avec son départ définitif, le SNJT perd un ami qui a participé à toutes les étapes de militantisme pour faire prévaloir les droits, l’indépendance et la liberté de la presse parce qu’il croyait fermement en la capacité du quatrième pouvoir dont il était l’un des principaux symboles », lit-on en substance dans ledit communiqué signé par le président de syndicat, Néji Bghouri. L’UGTT, la LTDH, les partis de gauche, les acteurs de la société civile, jeunes et compagnons de route, ont tous rendu un poignant hommage à l’homme et au fervent militant.

Le défunt contribuait par sa plume sur les colonnes de Business News. Parmi ses tribunes, on citera :

-M. Chahed, c’est de crédibilité qu’il s’agit !

-Il y a 8 ans, Ennahdha ouvrait la brèche !

-J'accuse...

Autant d’hommages et de témoignages exprimés à Salah Zeghidi, défenseur acharné des libertés malgré les injustices subies tout le long de sa vie démontrant qu’il ne recule pas face à la répression, ce qui lui a permis de vivre libre et de mourir libre en menant un combat sans répit pour ses idéaux, devenus, en partie, réalité.

Sarra HLAOUI