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Rupture FENATEX-UTICA, l'accord de trop !
14/03/2017 | 19:59
5 min
Rupture FENATEX-UTICA,  l'accord de trop !

  

Samedi 11 mars 2017, la Fédération nationale du Textile (FENATEX), tenait une réunion à Hammamet pour envisager la scission avec l’UTICA. Plus tard dans la journée, le couperet tombe. A l’unanimité, les représentants des professionnels du textile décident le retrait de l’UTICA. Un coup dur pour la centrale patronale, qui se retrouve ainsi amputée d’un de ses principaux organes.

 

La décision de sortie de l’UTICA, précise la FENATEX, a été prise à la suite de l’accord conclu entre l’UGTT et l’UTICA, le 10 mars, concernant l’augmentation des salaires dans le secteur privé ; augmentation « qui ne peut être supportée par le secteur qui traverse actuellement une crise ».

 

La FENATEX affirme que l’accord en question ne l’engage pas, pour la simple raison que les industriels du textile sont incapables d’en exécuter les clauses, compte tenu de la gravité de ses répercussions. Une commission provisoire de suivi du bureau exécutif a été mise en place pour la gestion des affaires courantes de la fédération.

 

L’accord en question, fruit d’une réunion qui a eu lieu le 5 mars dernier entre les responsables de l’UTICA et de l’UGTT, prévoit une augmentation salariale de l’ordre de 6% pour l’année en cours en plus de primes fixes. Un accord inadmissible, juge la FENATEX.

Belhassen Gherab, le président de la fédération, a précisé que cette scission avec l’organisation patronale est la conséquence d’accumulation de problèmes constatés depuis des années, ajoutant que l’accord d’augmentation des salaires dans le secteur privé n’est que « la goutte qui a fait déborder le vase » dans la mesure où cet accord aurait été conclu entre Wided Bouchamaoui et Noureddine Taboubi, sans tenir compte des avis et positions de la fédération.

« Lors du démarrage des négociations, nous avons mis une ligne rouge à ne pas dépasser mais celle-ci a été largement surpassée… Même le président de la commission des affaires économiques au sein de l'UTICA qui est également vice-président de la Fenatex, Nefâa Ennaifar, n’était pas au courant de cet accord. Nous avons appris la nouvelle à travers les médias » a précisé Belhassen Gherab.

 

Le président de la FENATEX a expliqué que l’accord signé avec l’UGTT est lourd de conséquences et risque de détruire le secteur de l’industrie textile. « Cet accord va se traduire par une augmentation de la masse salariale de 12,36%, à partir de mai 2017, après celle de 6% devant être servie avec un effet rétroactif à partir du mois d’août 2016. Ceci va faire perdre au secteur du textile 100.000 emplois et causer la faillite de plusieurs entreprises », a-t-il affirmé.

« Un désastre pour l’économie tunisienne qui souffre d’une inflation persistante, d’une productivité en régression et d’une perte de compétitivité » voilà ce que pense la FENATEX de cet accord.

Selon Belhassen Gherab, « l’UTICA est devenue le porte-drapeau des importateurs, des commerçants et du business » ; le secteur industriel ne faisant plus partie de ses préoccupations. Un avis qui serait d’ailleurs partagé par nombreux industriels et non pas seulement ceux du textile et de l’habillement.

 

Pourtant, le secteur des industries du textile et habillement est considéré comme secteur stratégique pour l’économie nationale. Il est même le principal secteur de l’industrie manufacturière en termes d’exportation, d’emploi et de valeur ajoutée, précise un rapport de l’API publié en 2014.

Le secteur compte, en effet, plus de 1850 entreprises employant 10 personnes et plus et emploie près de 180.000 personnes, soit 34% de l’ensemble des emplois des industries manufacturières. Parmi les 1850 unités du secteur, environ 1550 entreprises produisent totalement pour l’exportation, soit 84% du secteur et 70% du total des entreprises exportatrices installées en Tunisie. 820 entreprises sont en partenariat, dont 550 unités sont à capitaux 100% étrangers. Durant la période 2008-2012, la production du secteur est passée d’environ 6189 MD à 6337 MD, enregistrant une évolution annuelle moyenne de 1%.  La valeur ajoutée du secteur, précise le rapport, représente  près de  30% de la valeur de la production et environ 20% de la valeur ajoutée des industries manufacturières. Certes, les exportations du secteur ont régressé de 5183 MD en 2008 à 4916 MD en 2012. Néanmoins, le secteur demeure l’un des rares à afficher un taux de couverture positif de sa balance commerciale.

Plus encore, il continue à être de loin le premier employeur du secteur industriel du pays. La part des entreprises exportatrices a représenté 91% des emplois du secteur des ITH, peut-on relever dans le rapport de l’API. Aucune surprise à vrai dire. Le secteur du textile a été des années durant le fer de lance  de l’économie tunisienne,  au point où on le surnommait, il y a de cela quelques années,  « le secteur 50% », contribuant à hauteur de 50% des emplois, 50% de la valeur ajoutée et 50% des exportations des industries manufacturières du pays.  La situation s’est néanmoins détériorée, la rude concurrence à laquelle a dû faire face le secteur du textile à la suite du démantèlement de l’Accord multifibres (AMF) en 2005. Le développement tous azimuts de la franchise, surtout ces dernières années,  n’a fait qu’exacerber le phénomène. Le récent accord entre les deux centrales, syndicale et patronale, sur les augmentations salariales dans le secteur privé risque, selon la FENATEX,  de faire sombrer le secteur dans une crise profonde et durable.

 

Quoi qu’il en soit, le divorce entre la FENATEX et l’UTICA semble bien  consommé. Dans son intervention dans l’émission Expresso de Wessim Ben Larbi, sur Express FM,  Belhassen Gherab  a laissé entendre qu’il n’y a pas lieu de négocier un retour au bercail. La FENATEX est indépendante, a-t-il martelé, et les rapports avec l’UGTT « sont amicaux ». Nul besoin donc de l’UTICA pour défendre les intérêts du secteur, la fédération saura négocier seule avec la centrale syndicale « des accords qui arrangent les salariés, que l’UGTT ne voudrait surement pas voir au chômage, qui arrangent les industriels,  et qui, avant toute autre chose, arrangent les intérêts du pays ».

Avec une FENATEX qui vole dorénavant de ses propres ailes, l’UTICA se retrouve amputée d’une structure forte et,  disons le, d’un « membre »  indispensable.  Cette « perte de poids » touchera nécessairement à sa position en tant qu’acteur de la scène publique et politique et impactera ses orientations stratégiques en matière socioéconomique.  Un handicap dont se serait bien passé la centrale patronale surtout que son meilleur ennemi, l’UGTT,  risque très vite de saisir cette occasion et d’inverser l’équilibre des forces.  On peut aussi craindre que le retrait de la FENATEX  puisse créer  un périlleux précédant et engendrer une vague de retraits sur son sillage. Un scénario catastrophe mais malheureusement pas si improbable…

 

 

Myriam Ben Zineb

14/03/2017 | 19:59
5 min
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Commentaires (4)

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al mahdi
| 16-03-2017 15:25
certe la mode decline de sa jeunesse folle et le nord continent a une moyenne d'age plus grande et plus calme, je ne pense pas que le vetment se decline nous ne somme pas au paradis et l'hiver et la pluie sont bien reel, les chinois ont beaucoup pour eux même avec 1.5 milliards d'habitants et l'inde presque aussi... alors reste juste a dire le besoin de faire des economies sur ce secteur mais il est incontournable tot ou tard, ça doit être un secteur de juste à temps et non de stockage de masse

amaricano
| 16-03-2017 13:06
Maintenant l'utica peut changer sa lettre i d'industriels en importateurs..

Mehdi
| 15-03-2017 14:43
La Fédération du textile Fenatex est une structure sectorielle intégrante de l'UTICA, comment peut elle être extraite pour tomber aux mains des putschistes? Ou sont les dirigeants de L'UTICA ?

Zen
| 15-03-2017 07:53
De toute façon l'industrie textile ou autre va disparaître d'ici peu..Les raisons sont très simples :
- Les rendements sont toujours décroissants depuis quelques années ce qui implique la hausse des coûts de production.
- Les augmentations salariales d'une manière continue et sans rapport avec la conjoncture économique.
- La concurrence étrangère très rude et sauvage ( en termes d'importation illégale de marchandises et le trafic illicite ).
- Le comportement irresponsable de l'ugtt qui ne soucie pas des intérêts de l'économie du pays ( grèves et sit in ).
- Enfin, le monde évolue et l'économie se mondialisé et par voie de conséquence l'industrie tunisienne est appelée à disparaître du fait que les pays pauvres et émergents comme Le Bangladesh ou La Chine ....prennent la relève et les dividendes avec.