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Chroniques
Rendez-nous fiers !
Par Synda Tajine
18/06/2019 | 15:59
4 min
Rendez-nous fiers !

 

 

Plus important encore que le nom du futur président de la République, le sort des générations futures est une question sur laquelle il faudrait se pencher d’urgence.

Il importe peu – ou presque – que Nabil Karoui, Kaïs Saïed ou Abir Moussi accèdent au palais de Carthage, si nous n’avons pas des générations futures suffisamment solides pour assurer la relève. Tous devront faire des acrobaties politiques et stratégiques à faire tordre le coup à Jet Li (et à toute logique) pour survivre sur la scène politique et s’y acclimater. Mais nous serons rassurés si les générations futures ont assez de « stamina » (pour emprunter les mots de Donald Trump) pour tenir le lourd flambeau.

Depuis le 12 juin et jusqu’à demain, les jeunes de 18 ans ou presque passent leur bac. Des photos ont fusé sur la toile de parents à la fois fiers et inquiets qui attendent que leurs enfants décrochent – de préférence avec brio – le fameux sésame. Sésame pour lequel ces parents ont beaucoup investi et dans lequel ils placent de grandes espérances. « Rendez-nous fiers ! », disent-ils en chœur.

 

Ecoles et établissements privés, internationaux et à la pointe en matière de techniques et de méthodes d’enseignement poussent comme des champignons, au plus grand bonheur (mais aussi malheur) des parents. Certains parents – ceux qui peuvent se le permettre - iraient même jusqu’à s’endetter, se priver de beaucoup de choses et envisageraient même - dans leurs rêves les plus sordides – de vendre un organe sur internet pour payer les écoles de leurs enfants. Compétitivité reléguant aux oubliettes un enseignement public dans lequel on ne croit plus et qu’on pousse, ainsi, à mourir à petit feu. Mais le sort de ces élèves d’aujourd’hui n’est pas seulement la préoccupation de leurs parents, elle est celle d’une nation toute entière.

Que valent les jeunes générations aujourd’hui ? Un constat, certes subjectif, nous montre la détérioration du niveau général.            Sur les bancs des universités et dans les entreprises, étudiants et employés affichent parfois – souvent – un niveau des plus déplorables. Paresse, manque de maitrise des langues de travail, quasi-absence de culture générale…autant d’indicateurs d’une jeunesse loin d’être « au point ». Des élèves médiocres ou des premiers de la classe qui ne valent rien « dans le vrai monde ». Mais est-ce seulement la faute à l’enseignement ? Rien n’est moins sûr.

 

Au concours de la sixième année de base, la moyenne générale des 51 mille élèves n’a pas dépassé les 3,2/20 en mathématiques et les 6,5 en sciences expérimentales, selon les chiffres communiqués par le ministre de l’Enseignement Hatem Ben Salem cette année. « C’est la faute au système » dénoncent les enseignants, dont les plus téméraires se retrouvent aujourd’hui obligés de se plier à un programme qui se base sur le bourrage de crânes et laisse très peu de place à la réflexion. Méthode de lecture globale, journées de classe interminables, tonnes de devoirs à la maison et un rythme insupportable pour les plus jeunes leur laissant peu de place aux activités extrascolaires. Des activités qui peuvent parfois s’avérer plus enrichissantes que l’enseignement que leur prodigue l’école. Ajouter à cela, des basiques qui n’ont plus autant la cote. La lecture par exemple.

Dans un univers de technologie, de jeux en ligne, de consoles, de tablettes et de smartphones, lire un livre n’est pas ce qu’il y a de plus branché pour un jeune d’aujourd’hui. Cette activité « rébarbative » et « ennuyeuse » est en effet en dégringolade chez des Tunisiens en général qui ne sont certes pas connus pour leur amour démesuré pour les livres. Selon les chiffres d’un récent sondage Emrhod, 82% des Tunisiens n’ont lu aucun livre cette année, 73% n’ont aucun livre chez eux et 4% seulement lisent régulièrement. Des chiffres effroyables.

 

Les jeunes sont de plus en plus diplômés aujourd’hui, mais tous ne se retrouvent pas dans le monde de l’entreprise et leurs diplômes ne valent parfois pas grand-chose.

Ceux qui font du recrutement savent certainement à quel point, il est difficile de trouver des personnes compétentes. Bonne maitrise des outils de travail, des langues parlées et écrites, ponctualité, rigueur, discipline, esprit d’équipe, sens de l’innovation et force de proposition d’idées nouvelles... Des denrées rares que les recruteurs désespèrent de trouver chez leurs futurs employés et qui font qu’on est, parfois, obligés de se rabattre sur « le moins pire ». 

Une fois leur diplôme en poche, la plupart d’entre eux devront faire face à un monde sclérosé par le laisser-aller, par le manque d’initiative et par la paresse générale.  

Culture de la médiocrité, népotisme, favoritisme, ascension de candidats populistes à des postes prestigieux, dégradation du service et de l’enseignement public sont autant d’écueils auxquels les générations futures devront faire face et autant de défis à relever. Seront-ils à la hauteur ?

 

Par Synda Tajine
18/06/2019 | 15:59
4 min
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Commentaires (5)

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Noir
| 19-06-2019 10:12
Dans un pays atteint de médiocrité à tous niveaux : inculture, saleté, non respect etc..la scolarité enseignée ne peut qu'etre nulle et fabriquer des chômeurs sans motivation.
Bravo pour votre article, il est tellement vrai.

observator
| 19-06-2019 10:11
Le rêve est permis comme on dit.
Mais au moins qu'on sache ce qu,'il faut faire.
Le gouvernement est en train de dépenser des milliards dans la formation par exemple.
Mais qui dispensent cette formation ?
Par des personnes formées ici, donc par des médiocres en général. On tourne en rend, ou c est le serpent qui se mord la queue.
Conséquences, la valeur ajoutée est minime.
Dans bien de domaines, il fallait faire appel à du sang nouveau avec un esprit nouveau, une mentalité nouvelle..
Hier lors de l'épreuve du bac physique, section technique, , des candidats ont trouvé des difficultés par exemple, à comprendre un texte sur la chimie car ils ne maitrisaient pas le français pourtant ils avaient les connaissances techniques pour répondre
Dans ce pays "sauve qui peut" , le sentiment général est que l '?tat s'en fout .
On aurait pu espérer quelque chose pour les prochaines élections mais les nouveautés sont encore pire que l'existant.
Entre cette Moussi une jeria de l emir Zeyed et un Karoui, un profiteur des misères des autres , le pays ne peut que s'enfoncer davantage .

Professeur de droit
| 19-06-2019 03:36
@Observator : I have a dream...Si ce que vous dites pouvait etre possible!
@Mme Tajine : " Sorry, but you just don't have stamina" la phrase assassine, qui a scellé le sort de Hillary Clinton. Madame, vous au moins, vous avez de la culture générale (contrairement à nos jeunes diplomés..).

mansour
| 18-06-2019 21:25
aucuns programmes engagé ni initiative pour renforcer l'aptitude de nos jeunes à faire face avec résilience à la faillite du pouvoir politique des islamistes freres musulmans salafistes d'Ennahdha aux rênes du pouvoir depuis 2011

observator
| 18-06-2019 20:18
A qui le dites vous

La seule solution est d'injecter des dizaines et des dizaines de milliers de tunisiens qu ils faut rapatrier de l étranger ( surtout les jeunes diplômés nés ou ayant vécus longtemps là-bas et ayant biensure des compétences prouvées ) dans toutes les organisations publiques ou privées , enseignement surtout, administration au sens large , hôpitaux, entreprises publiques et privées , brefs dans tous les domaines, .
Ils doivent disposer de larges pouvoirs pour agir en toute liberté charge à eux de diriger de réformer et d inculquer une nouvelle mentalité basée sur la maîtrise du travail bien , rigueur, serieux, discipline..... et toutes les valeurs que vous avez cités à nos enfants qui prendront la relève.
Vous verrez que le pays va enfin avancer.
C est la seule solution .Mais encore faut il pouvoir la retenir avec un système aussi corrompu jusqu'à l'os ou seuls les médiocres et les corrompus tiennent le haut du pavé prariquement dans le pays.