Faire l'éloge de la "révolution kémaliste", aujourd'hui, nonobsant le caractère dictatorial du kalifat ottoman, revient, sans oser l'avouer, à faire l'éloge des dérives totalitaires de l'Etat kémaliste, et auparavant, de 1915 à 1923, le massacre des Arméniens ( 1 million et 1/2 de morts) par les Jeunes turcs, dont fait partie Kemal Atataturk. Quand J. Wayne semble dénoncer l'impérialisme, il ne songe évidemment pas à la tentative de colonisation, à l'issue de la 1ère guerre mondiale, par "la révolution kémaliste" de Mossoul et Kirkouk, régions pétrolières d'Irak. Aux yeux de J. Wayne, il ne peut s'agir d'impérialisme...mais d'action civilisatrice envers des Arabes barbares, tout comme les massacres des populations kurdes dans les années 30 par Atataturk...
Manifestement, cette politique de la canonnière et du massacre organisé semble emporter l'adhésion de notre flic de ben ali...probablement et surtout pour raison de laïcité du régime kémaliste, chose qui sied fort bien au successeur de kémal, erdogan, toujours kémaliste...mais paradoxalement islamo-fasciste, expert en massacres de Kurdes...et grand ami de ghannouchi. Nonisme de la conscience et de la réflexion politique... Ce qui est le plus drôle chez J.W., c'est qu'il a tiré son pseudo argumentation d'un journal colonial, "Tunis-socialiste" de 1923, peu de temps après le coup de force de Kémal. Ce journal est d'obédience SFIO,( ancêtre du P.S français), celui de Guy Mollet qui a imposé les pouvoirs spéciaux aux généraux d'Alger en 1956, celui d'un certain François Mittérand, son ministre, qui propose à exécuter tous les détenus politiques algériens...Alors, serait-il probable que la lutte de libération, pour l'indépendance, n'a pas la même valeur quand elle est dirigée par d'obscurs non tunisiens que par le demi-dieu de J. Wayne, un certain Bourguiba? Ainsi, le colonialisme, selon celui qui le combat, n'a pas le même esprit et la lutte pour le contrer, la même saveur...C'est comme ça, selon les théoriciens de l'esbroufe et de la manipulation, "universalisme" réussit à rimer avec "nombrilisme". En somme, aux yeux de J.W. l'occupation ottomane de la Tunisie, comme du reste de l'empire, semble échapper à la qualification de colonialisme, d'impérialisme...insultant au passage son mentor Bourguiba, qui, en déposant le bey de Tunis en juillet 1957, déclare accomplir la dernière phase de l'indépendance strictement "tunisienne". Mais la cécité politique, bien que confrontée aux lumières vives de l'Histoire, peut continuer à produire des évaluations noircies et des discours obscurcies : l'éloge du journal "Tunis-socialiste" de 1923 à propos de la " révolution kémaliste" visait seulement le voeu que la société tunisienne, comme dans la Turquie de l'époque, "se laïcise", rejette ses superstitions archaïques et se modernise. Même si le journal, connaissant des problèmes de la part du résident général de l'époque...et avec la centrale SFIO de paris, donnant même la parole à certains nationalistes tunisiens balbutiants, ne souffle pas un mot relatif à l'indépendance. Et cerise sur le gâteau, à aucun moment, Kémal Ataturk, après sa prise du pouvoir, n'a remis en cause la colonisation étrangère des marges de l'empire ottoman ( en aurait-il les moyens?). De quoi mériter l'éloge d'un journal colonial de Tunis...et la reconnaissance et l'attention à ce dernier d'un ex flic du "combattant suprême". Allez comprendre!...