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Chroniques
Qu'il est touchant le petit pauvre à la télé !
18/11/2015 | 15:58
3 min

 

Le passage de Nessim Soltani sur le plateau de Nessma a fait sensation. Par sa sincérité, par ses paroles et par l’émotion qu’il a communiquée, il a provoqué des dizaines de réactions sur la toile.

 

Brusquement, on s’est découvert tellement d’empathie, tellement de sympathie et surtout de la pitié pour ce laissé-pour-compte. Et puis on s’est subitement rendu compte qu’il y avait des pauvres dans notre pays et qu’il y avait des gens qui n’avaient absolument aucune perspective. On a vu un jeune homme venant de « derrière les plaques » s’exprimer correctement et parvenir même à nous toucher. 

 

Mais là n’est pas le problème. Le problème c’est que les bienpensants de Facebook, les donneurs de leçons et ceux qui ont des avis sur tout sont les mêmes qui traitent de « jabri » les gars qui ressemblent à Nessim Soltani. Je les imagine en train de pleurnicher devant leurs écrans alors que la petite femme de ménage de douze ans, qui vient probablement du même endroit que Nessim Soltani, est en train de briquer le sol en marbre. Ce sont les mêmes qui insultent la mémoire de Mohamed Bouazizi parce qu’il a provoqué la révolution qui les a quand même dérangés un petit peu.

 

Le petit Nessim Soltani est arrivé à se hisser au niveau nécessaire pour être écouté et entendu. Bon, il est vrai qu’il a fallu que son cousin soit égorgé par des terroristes. Mais ce douloureux événement aura permis de jeter la lumière sur sa zone d’origine. Parce que, soyons honnêtes, personne ne lui aurait accordé la moindre minute d’attention, si ce n’était « grâce à » cet odieux meurtre.

 

On a donc découvert avec effroi qu’il y avait des gens en Tunisie qui avaient faim et froid ! C’est quand même du scoop ! Pourtant il en existe des dizaines de ce genre d’endroits où l’on est coupé du monde, où l’espoir meurt et où les ambitions n’ont plus de sens. Il en existe à une heure à peine de la capitale. Il en existe tellement que ça a aussi participé à l’avènement de la révolution.

 

Alors pourquoi jouer les vierges effarouchées aujourd’hui et faire comme si on découvrait l’existence d’endroits comme celui où a été égorgé ce berger de 16 ans ? Pour la simple raison qu’il est devenu impossible de faire autrement. Avant, on savait que ces endroits existaient, certains n’y accordaient aucune importance, d’autres se félicitaient que ces gens là soient confinés loin de nous, des endroits où on sort ou où on travaille. On était contents de savoir qu’ils ne fréquentent pas les mêmes écoles que nos enfants. Mais Nessim Soltani a réussi à faire éclater cette misère devant nos yeux, à nos visages, de telle sorte qu’il est devenu impossible de s’en détourner, de faire comme si ça n’existait pas. Mais il ne faut pas non plus être trop optimiste, ce soudain regain d’intérêt s’estompera dans quelques jours et on reviendra à nos préoccupations quotidiennes. Nessim aura permis à son village et à sa famille d’avoir une aide et un soutien ponctuels, il a même été reçu par le président de la République. Combien de temps cela va durer ? Certainement pas assez pour régler les problèmes…

Et puis il y a cette pitié malsaine. Cette pitié hautaine et dédaigneuse. Cette pitié qui considère la pauvreté comme une tare, comme une insulte. Ces gens qui se disent : oui on est solidaires, oui on est sensibles, mais de loin quand même, on ne va pas non plus se mélanger.

 

Des Nessim Soltani il y en a des milliers en Tunisie. Certains gardent une certaine lucidité comme lui, d’autres deviennent des délinquants parce qu’ils n’ont pas d’autre choix, d’autres encore deviennent des terroristes. Pourquoi ? Parce que les horizons sont bouchés, parce qu’il n’y a pas d’espoir, « parce qu’on est déjà morts » comme l’a dit Nessim. Lui, grâce aux médias, sortira de la misère ne serait-ce que momentanément, mais que se passera-t-il pour les autres ? Combien de Mabrouk devraient mourir avant qu’une réelle prise de conscience ait lieu ? On ne le sait pas. Donnons-nous rendez-vous à la prochaine horreur pour redire la même chose…

18/11/2015 | 15:58
3 min
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Commentaires (18)

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Gg
| 28-11-2015 22:49
J'ai été stupéfié, ce soir. France 2 a diffusé l'interview que ce jeune homme a donnée à la télé tunisienne. Le reportage montrait comment vit sa famille, leur maison, leur environnement, leurs montagnes.
Des millions de français l'ont vu à l'heure de plus grande écoute. J'étais avec ma mère, j'ai pu lui dire: c'est comme ça que vivait la famille de **** (je mets les étoiles pour ne pas citer le nom de ma petite Femme, ma Princesse) avant qu'on se rencontre.
Ma mère a eu un choc, je l'ai vu, elle ne disait rien, elle écoutait.
Et ce jeune homme a été formidable DE FORCE.
Il a été à la fois sensible et dur, net, raisonné. Il a dit: "Tout le monde veut partir, mais "ils" prendront le village, et après un autre, et un autre. Mais où est notre armée? Pourquoi ne nous défendent-ils pas? On va être obligés de se défendre nous-mêmes..."
Ce reportage aura été un choc pour tous ceux qui, en France, l'auront suivi. Ce soir, des millions de gens, dans mon pays, l'autre pays de ma Femme, savent enfin que les terroristes attaquent tout le monde, les pauvres plus que les riches, les musulmans comme les chrétiens, leurs frères comme leurs ennemis.
Et ils voient la détermination et le désarroi des Tunisiens.

Je ne doute pas que la télé française a diffusé ce reportage pour secouer les Français, pour qu'ils comprennent que cette guerre contre le terrorisme, ne nous concerne pas seulement. C'est sûrement dans un but de légitimité, mais le but est atteint, et je trouve cela salutaire.
Les Français comprendront aussi, je l'espère, qu'il ne faut pas laisser tomber la Tunisie, qu'il faut y aller, plus que jamais.

Merci, jeune homme, tu n'imagines pas ce que tu as fait ce soir.

Un tunisien
| 24-11-2015 22:00
Le monologue de Monsieur Nessim Soltani est une gifle infligée à nous tous.

Ce jeune homme et sa région seraient-ils ce qu'ils sont aujourd'hui si chacun d'entre nous avait fait consciencieusement le travail pour lequel il était payé, si le personnel des différents ministères et institutions, avaient fait bénéficier la population couverte par la structure qui l'emploie, de toutes ses connaissances techniques et administratives, de toutes les possibilités qui, avec un petit effort de sa part, pouvaient devenir disponibles.

S'agissant de zones agricoles, savez-vous qu'il existe des spéculations et des techniques spécifiques à chaque type de sol. A titre d'exemple, en Syrie, le pistachier est planté dans des zones arides et des sols rocheux. Que dire du Nord-Ouest et sa généreuse pluviométrie!!!

Ce qu'il faut, c'est d'une part, un minimum de patriotisme, de l'enthousiasme dans l'accomplissement de son travail et d'autre part l'organisation et la participation de la société civile

Durant ma carrière, j'ai vu plusieurs paysans pauvres, devenir des agriculteurs aisés grâce à la motivation et l'enthousiasme d'un vulgarisateur agricole et de son supérieur

Enfin, n'oublions pas que Mr. Soltani n'a rien fait pour naître dans ce milieu; on aurait pu être à sa place.

Lefghoun
| 19-11-2015 14:19
un tres bon article, d'ailleurs je commence a aimer l'auteur qui revient de loin et commence a enrevoir la verité. c'est gens là existaient du temps de Bourguiba et de Zaba mais personne ne s'est penché sur leurs cas, heureusement que notre auguste journaliste vient d'ouvrir les yeux et decouvrent une partir de la verité.

el Bey'
| 19-11-2015 11:59
Le petit indigène face au Bey Bajbouj

Notre bien aimé Bey se rends soudainement compte que la pauvreté extrême existe dans la régence du Tunistan

slalom
| 19-11-2015 09:24
continuez a vous apitoyer c'est juste pour avoir bonne conscience on ne le sait que trop dans les alentours de Ghardimaou et autres regions frontalieres les paysans"sans terre" livrent leurs compteurs a la steg et gonflent les bidonvilles de la cote les citadins se frottent les mains:voici de la main d'oeuvre corveable a merci les decideurs politiques reproduisent le meme type de developpement base sur un esprit regionaliste irrationel les eminents politiciens font preuve d'une segregation sociale qui surpasse la segregation raciale puisque le seuil de pauvrete chez un citadin depasse 1200dinars alors qu'il depasse apeine 800D pour un rural du coup les guovernorats de Jendouba,Kasserine,Sidi Bouzid,Kairouan et Siliana sont les plus pauvres a cause de leur ruralite voullue par un choix politique n"est ce pas là un calculmachievelique!

Moon
| 19-11-2015 07:47
Excellent!!!

DIEHK le petit poète
| 19-11-2015 01:05
Ah! M Comment ?
M MA ou MMA ou MFA ou tout ce que vous voulez!!
Racisme ordinaire dans les médias!!!May be
Pourquoi qualifier ce M de Petit Pauvre à la Télé?
Alors je t'offre ces paroles de Mano Sola qui l'a chantée et écrite:
Paroles de Pauv' Petit
C'était un pauv' petit
Qui traînait sur le boulevard
Sa mère l'avait la folie
Son père était au placard
C'était un pauv' petit
Qu'a joué au maquisard
Debout avec son fusil
En haut de la rue Rochechouart
La révolution c'était pas pour lui
Il ne comptait plus sur son pétard
Pour lutter contre l'ennui
Les lendemains qui chantent blafards
Quand il a mis son chargeur
Les gens ont pris peur
C'était juste un pauv' petit
Qui traînait sur le boulevard
Alors il a dit mes amis
Nous ne sommes que des cafards
La révolution c'est tout petit
Elle se joue ici ce soir
C'était juste un pauv' petit
Quand il a levé son fusil
Une poussière dans l'histoire
Debout sur le trottoir
C'était un pauv' petit
Un de ces p'tits gars de Paris
Sa pensée s'est arrêtée
Quand sa tête a explosé
Pan !

Lectrice
| 19-11-2015 00:37
Bravo et merci!

amal
| 18-11-2015 23:57
la première !

C'est vrai, arrêtons de nous voiler la face, sur le moment nos coeurs saignent et nos yeux pleurent.
Ouf ! on est encore normaux avec des sentiments et de la compassion.
Nous y pensons le lendemain mais notre quotidien nous rattrape et ce jeune homme de notre mémoire passera aux oubliettes.

Nous sommes ainsi faits car si on avait sur le moment les moyens, nous lui serions venus en aide pour lui trouver une solution et effacer tous ses malheurs.
Mais on a rien.
On a beaucoup de blablabla et on brasse beaucoup de vent !

Par contre nous pouvons faire quelque chose et réclamer à l'Etat de rendre tous ces millimes qui ne nous sont pas rendus quand on achète un billet de transport ( train.. louage..taxi ) sans parler des autres commerçants : boulangers, supérettes...etc...
Les 5/10 et 20 millimes qui sont presque plus dans le circuit mais qui sont gardés par les commerçants.

Si nous faisons un calcul sommaire cela représente des MILLIONS DE DINARS NON RECLAMES ET INDUMENT SOUSTRAITS DE NOS POCHES.
Pour ce qui est du commerçant = dans sa poche à lui.
Mais pour les transports publics = où va ce fric donc cet excédent qui est dans la caisse de l'Etat.
A qui profite le crime ?

RIEN QUE CA c'est des millions de dinars qui peuvent permettre d'aider des familles dans le besoin.

Je prends mon exemple en une semaine, j'ai dû laissé avec ces petites sommes mises bout à bout 2 à 3 dinars dans la nature, imaginons le nombre de millions de gens qui laissent par semaine la même somme : 2 dinars ou même 1 dinar X 5 millions de personnes = 5mdt x 52 semaines = 260mdt par an avec 1 dinar par semaine et 5 millions de personnes.

Je suis convaincue que le montant est plus important si tout le monde joue le jeu et rend cet argent.

TOUT CELA MERITERAIT REFLEXION POUR QUE CET ARGENT REVIENNE DANS UNE CAISSE SPECIALE POUR CES GENS DANS LE BESOIN.

Voilà une idée si certains veulent la concrétiser ça mérite une grande attention qui peut redonner des sourires à certains.
Cet argent nous est volé car pas rendu SI on le réclame ça sera à juste titre et pour le bien de nos frères et soeurs car n'oublions pas que les gens du sud ont migré vers le nord donc nous avons forcément un lien familial avec les sudistes sans qu'on le sache forcément !

DONC SI CERTAINS VEULENT MONTER UNE ASSOCIATION VOILA UNE IDEE QUI PEUT SE CONCRETISER !

j'en appelle aux journalistes pour se pencher sur le sujet et n'attendons pas d'autres MABROUK ( Allah yarahmou ! ).

tounsia2
| 18-11-2015 22:05
Ce jeune homme qui a été obligé d'arrêter l'école à l'âge de 16 ans , a montré qu'on n'a pas besoin de faire partie de l'élite pour être cultivé, savoir réfléchir et livrer des analyses pertinentes; Loin des grands discours philosophiques et des mots savants de ceux qui pensent être des élites et des patriotes et qui le crient sur les toits, Nessim a montré que le patriotisme est surtout une présence sur le terrain et un sens de la responsabilité, et nous n'avons pas besoin de plus que cela pour sauver notre pays, du moins, pour l'instant. Alors, continuons à donner la parole à Nessim Soltani et à ceux qui connaissent la réalité du pays mieux que les théoriciens, et je suis persuadée qu'on gagnera beaucoup de temps. . .