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Chroniques
Que ceux qui ont un meilleur choix que Béji se manifestent et s'imposent !
04/01/2016 | 15:59
8 min

 

Une année 2015 s’achève, une année 2016 commence et la vie continue. On s’accorde à dire que l’année passée était dramatique aussi bien en Tunisie qu’à l’étranger. Celle-ci le serait-elle moins ? Meilleurs vœux à tous mes lecteurs quels qu’ils soient, il faut garder l’espoir, il est vital ! Sur les réseaux sociaux, une photo tente d’insuffler cet espoir en montrant que l’année 2016 reflète la joie (cliquer ici). Vu d’où l’on venait, ça ne devrait aller que vers le mieux… Et, tout compte fait, l’année 2015 n’était pas pire que les trois années qui l’ont précédée. Nous avons juste une mémoire un peu trop courte.

Il y a un an, Béji Caïd Essebsi faisait son entrée au palais de Carthage après son éclatante victoire à la première élection présidentielle post-révolution. Une élection réellement démocratique avec un résultat incontesté et ceci est déjà une avancée majeure pour le pays. On ne remerciera jamais assez Chafik Sarsar, son équipe et tous ceux qui ont participé à ce succès de la démocratie tunisienne.

 

Je lis, ici et là et y compris à Business News, le bilan d’un an de Béji Caïd Essebsi à Carthage et, pour beaucoup, ce bilan est négatif. On étale les chiffres au rouge, on rappelle sa coalition avec les islamistes, on relève la détérioration de la situation sécuritaire et, inévitablement, on n’oublie pas de mentionner la guerre fratricide au sein de son parti Nidaa.   

Ceux qui ont soutenu Béji Caïd Essebsi sont montrés du doigt et « accusés » d’avoir fait monter un « vieux de 90 ans » pour diriger une jeune démocratie. Entre eux, les fans de Béji parlent de regret et de déception et s’interrogent s’ils n’avaient pas fait un mauvais choix. Surtout quand ils voient le « fils de » prendre position, comme s’il s’apprêtait à récupérer un héritage.

Béji, un mauvais choix ?  Peut-être. Son bilan est-il négatif ? Oui sans aucun doute, tout à fait objectivement. Et si c’était à refaire, pour qui ceux qui ont voté pour lui voteraient ? Marzouki peut-être ? Tunisiens, n’oublions pas d’où l’on venait, ni ce que nous sommes ! Flash back.

 

Il y a six ans, en janvier 2010, on était, en écrasante majorité, des poltrons incapables d’avoir une discussion politique dans un café.

A quelques exceptions près, les leaders politiques d’aujourd’hui étaient soit cachés sous le lit, soit confortablement installés à l’étranger. Pour les rares exceptions qui osaient chuchoter la vérité, ils étaient soit résignés, soit prêts à composer avec le régime despotique, question de lutter de l’intérieur du système afin que le régime mette de l’eau dans son vin. Pour tout le reste, il n’y avait que des opportunistes qui ambitionnaient d’obtenir un poste dans le système ou qui avaient une rente de l’étranger pour jouer le rôle de l’opposant. Sans parler de ceux au double visage (notamment parmi les islamistes) qui rédigeaient les rapports de délation contre leur propre camp.

 

Il y a cinq ans, en janvier 2011, juste après la révolution, il a été décidé de récompenser tous ceux qui étaient « brimés » par l’ancien régime. Anciens terroristes, militants sincères, exilés, taupes, délateurs, rentiers de l’étranger et fuyards dans des affaires de droit commun, ils ont tous été logés à la même enseigne et estampillés « militants contre la dictature ». A des degrés divers, et à quelques exceptions près, ils ont tous obtenu une récompense sous forme de poste ministériel ou à l’administration, siège à l’ANC ou l’IVD ou indemnisation matérielle.  

 

Il y a quatre ans, en janvier 2012, un régime parlementaire est décidé dans l’antichambre islamique et Moncef Marzouki venait de faire son entrée au palais de Carthage après des années passées dans le confort parisien. Avec lui, il y avait à Carthage Imed Daïmi (il était fuyard à Paris), Adnène Mansar (il était sous le lit), Tarek Kahlaoui (il était étudiant aux Etats-Unis), Samir Ben Amor (accusé d'avoir été délateur) etc.

Au même moment, Hamadi Jebali venait de faire son entrée à la Kasbah pour diriger le gouvernement en récompense à ses quinze années de prison. Il était bien accusé de terrorisme, lui ? Non, il était militant victime de la tyrannie, a-t-on décidé.

Ali Laârayedh faisait son entrée au ministère de l’Intérieur. Il était bien accusé de terrorisme, lui ? Non, il était militant victime de la tyrannie, a-t-on décidé.

Abdellatif Mekki faisait son entrée au ministère de la Santé. Exactement le même pedigree.

Abdelkrim Harouni faisait son entrée au ministère du Transport. C’est bien lui qui avouait l’attentat de Bab Souika et qui voulait libérer les terroristes de l’attentat de Soliman ? Oui, il est devenu ministre, lui.

Moncef Ben Salem faisait son entrée au ministère de l’Enseignement supérieur où il a profité pour se donner à lui-même une ancienneté de deux décennies en tant que professeur, avec les avantages et les indemnités qui vont avec.

 Abdelwaheb Maâtar faisait son entrée au ministère de l’Emploi après avoir été impliqué dans une affaire de mœurs ;

Sihem Badi faisait son entrée au ministère de la Femme après avoir fui à l’étranger dans une affaire de droit commun et la liste est longue, longue, longue.

 

En cette année 2012, à sa première sortie médiatique, Moncef Marzouki annonce la concrétisation de la vente des avions présidentiels (en donnant les prix svp !) et sa décision de mise en vente des palais présidentiels. Ce n’était que le préambule à des milliers d’annonces mensongères et décisions abjectes où l’on a vu le « Livre noir», un ouvrage de règlement de comptes destiné à faire taire les médias et un jeune mis sept ans en prison pour « sa sécurité  ».

En cette année 2012, nous avons vu la « ghazoua de la mongala » (cliquer ici), le tabassage policier du 9 avril, l’invasion de l’ambassade US (cliquer ici), la chevrotine de Siliana (cliquer ici), les agressions de nos intellectuels (cliquer ici), les attaques de nos centres culturels (cliquer ici), le sit-in d’intimidation devant la Télévision tunisienne (cliquer ici), « Ekbess » (cliquer ici) et la liste est longue, longue, longue.

En cette année 2012, les « penseurs » s’appelaient Wajdi Ghenim (spécialité excision des filles), Adel Almi (vendeur de légumes), Khamis Mejri (refoulé de France) et Béchir Ben Hassen (recherché par Interpol). Au même moment, Abou Iyadh (terroriste libéré) faisait ses meetings et Noureddine Khadmi (agent double devenu ministre) donnait ses prêches.

Et toujours en cette même année, le chef du gouvernement extradait des réfugiés vers l’enfer pendant que le président de la République passait son week-end en hélico au Sahara.

 

Il y a trois ans, janvier 2013, Chokri Belaïd était encore parmi nous, tout comme Mohamed Brahmi, et Socrate Cherni et ils croyaient, tous les trois, avoir déjà atteint le pire avec ce qu’ils ont vu en 2012. Mais le pire, ils le connaitront en cette année 2013. La Tunisie était sur une autoroute à cinq voies pour se somaliser. Encore un peu, et il n’y aurait plus eu d’Etat. On ne parlait plus économie, on parlait de survie du pays trois fois millénaire. Il suffisait d’aller à l’avenue Habib Bourguiba, où l’on grillait le merguez sous les fenêtres de l’Africa, pour se rendre compte que la Tunisie était déjà aux abîmes.

Les conditions étaient réunies pour qu’il y ait un long et inoubliable sit-in au Bardo afin de délivrer la Tunisie de l’ANC, de Marzouki et des islamistes.

Le pouvoir était à ramasser, il fallait juste trouver un homme ayant le mode d’emploi capable de le faire. Les hommes politiques étaient tous là, dans la course, et on ne leur demandait qu’une chose : nous débarrasser de ceux qui ont conduit la Tunisie à l’abîme.

Dans cette course, c’est le « vieux » qui a gagné. Les Tunisiens l’ont élu. Les « jeunes » qui étaient assis derrière leur écran en train de cliquer « j’aime » sur Facebook n’ont pas fait mieux. Au mieux, ils sortaient gueuler. Où étaient les « militants intègres, patriotes, compétents et blancs comme neige » ? Ils ressassaient leur passé sans être capables d’unir 500.000 personnes autour de leur projet d’avenir.

C’est connu, il est plus facile de devenir premier que de le rester. Les différents hommes politiques de l’opposition ont été, trois ans durant, incapables du facile. Que dire alors du difficile ?

 

Ceux qui sont aujourd’hui en train de parler du bilan négatif de ceux qui sont au pouvoir ne semblent pas avoir une meilleure alternative à proposer. On présente 2015 comme dramatique, pire que 2012 et 2013. Allons donc !  Pourquoi sommes-nous acculés à choisir entre « le vieux » et le pire ? Parce que c’est ce que nous méritons ! Tout comme nos médias, nos policiers et nos magistrats, nos politiques sont comme les autres citoyens. Ils reflètent tous la société que l’on est. Une société qui veut augmenter son salaire sans produire, qui demande à l’Etat davantage de budget sans payer ses impôts, qui demande des crédits aux étrangers tout en leur interdisant l’ingérence, qui demande aux autres d’être des pros alors qu’elle est, elle-même, fainéante.

Il est temps aujourd’hui de se regarder dans le miroir avec du courage et d’accepter son image réelle pour pouvoir évoluer vers le mieux. Vous voulez que BCE ait un bilan positif et que les médias, les magistrats et les policiers  ressemblent à leurs homologues des pays industrialisés ? Soyez-le vous-même d’abord et vous leur donnerez à eux les moyens de le devenir !

 

 

04/01/2016 | 15:59
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Commentaires (51)

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MMA
| 05-01-2017 16:11
Bonjour Monsieur NIZAR. Merci pour cet article qui mérite d'être lu par beaucoup d'Écervelés qui ne savent que critiquer.
je souhaite toutefois rappeler à ceux qui critiquent BCE que toute analyse Sociopolitique et ou économique, doit tenir compte de l'environnement National et International ainsi que des composantes et de la mentalité des autochtones et des capacités "administratives" du pays.
Il est facile de critiquer BCE et ou de considéré qu'il a associé R.Ghannouchi et ou Ennahdha alors que c'est le peuple tunisien qui les a imposé. BCE avait effectivement un choix, imposer Nidaa Touness et cohabiter avec Ennahdha tout en essayant de l'affaiblir et minimisant au maximum le rôle de cette dernière ou céder le pouvoir à Ennahdha et allié.
Je crois pour ma part qu'on ne peut que se féliciter du travail fait par BCE et le remercier pour les efforts et décisions qui ont permis d'améliorer la sécurité et d'éviter la partition du pays.
Quand à son fils, il faut arrêter de spéculer et ou de se laisser manipuler, car il n'occupe aucun poste gouvernemental et ou officiel.
il occupe, il est vrai, un poste de commandement au sein de Nidaa, laissons aux adhérents de Nidaa le soin de le maintenir, révoquer et ou l'élire à un poste plus important.

alain P.
| 11-01-2016 09:54
J'apprécie votre texte Nizar Bahloul, je le trouve salutaire, lucide et réaliste. Bonne année à tous

IDIR
| 11-01-2016 02:22
Votre Discours,très logique du reste,vous aurez dû le souffler à BCE pour qu'il l'adresse lui-même au peuple tunisien,en l'accompagnant bien sûr,de ses propres engagements à se réveiller de sa léthargie consciente et à agir un tant soit peu en songeant à l'image qu'il laissera dans l'Histoire du pays!...

cool_4_ever
| 09-01-2016 09:14
La tunisie a des compétences beaucoup mieux que Sebsi , on mérite -nous tunisiens- mieu q'un viellard sans qualités.
On a fait la même chose avec bourguiba puis ben ali, mais on se rend compte trop tard à chaque fois.
Comparer la tunise avec des pays qui ont eu leur independances pendant la même période.

gogot
| 08-01-2016 16:00
To Nizar,to come forward for what. Your man was in hibernation since he has entered his palace.So who would awake him by a kiss as in Sleeping beauty.I think you would be the perfect candidate or the perfect prince to come forward,.You will have my full support.

Taieb SOUISSI
| 05-01-2016 22:41
Un dernier sondage montre que 73% des Tunisiens sont pour la séparation de la religion et de la politique.
Ne vous pensez pas si NB que BCE par son alliance avec RG et delà de son NIDA avec ENNAHDHA a agit par le contraire? Ne pensez pas que par sa tendresse à son fils a signé la fin de son NIDA?
Mr BCE a l'air de nous dire : oui je suis ami du Gourou,soutien de Hafedh mon chouchou et de vous Tunisiens je m'en fou.
OUI je suis d'accord avec les amis disant que Mr BCE est dépassé et à coté de la plaque;OUI les belles paroles et le CAS BEJI est entrain d'amplifier la GABEGIE et infecter de plus en plus le paysage politique. Non Mr NB la Tunisie peut bien être dirigée par une compétence jeune et de tète bien faite et de notre temps et il y en plein, Le monde change mon ami,OBAMA,CAMERON,TRUDEAU,POUTINE bientôt MACRON LE fRANCAIS et j'en passe,ne sont ils pas tous des jeunes présidents non? et leurs pays ne sont ils pas plusieurs fois plus grands que le notre en surface et population?.

RachidBarnat
| 05-01-2016 22:15
Il est un fait avéré : la Tunisie manque cruellement d'hommes politiques pour cause de dictature depuis son indépendance. Mais est-ce une raison pour taire les trahisons d'un BCE qui a été plébiscité par tant de tunisiens pour mettre un terme à l'islamisation de leur société en leur servant avec Nidaa Tounes de rempart contre les Frères musulmans, alors qu'ils voient de jour en jour l'islamisme gagner du terrain dans la société jusqu'au sein des rouages de l'Etat ?
Il est utile de rappeler aux tunisiens leur récente histoire, mais il est encore plus utile de rappeler à BCE et à Nidaa ce pourquoi ils ont été portés au pouvoir !

Harrar dorra
| 05-01-2016 18:12
on tire sur les compétences dans tous les domaines dans ce pays,on donne tous les avantages aux mêmes on dénigre tous ce qui n'appartient au "cercle" celui ci est plein de gens médiocres qui sans imagination... ensuite on dit qu'on n'a le choix pas le choix et on se demande pourquoi nous avons tant de jihadistes etc

Mm
| 05-01-2016 16:15
Je suis tout à fait d'accord avec votre analyse.
je crois s'il faut aussi rappeler que BCE et Nidaa n'ont à aucun moment fait alliance avec Ennahda.
Ils ont par contre été obligé de leur permettre de cohabiter au sein du gouvernement du fait du caractère parlementaire du système politique et des résultats des élections.

Bravo d'avoir rappeler - à ceux qui n'arrêtent pas de critiquer BCE - que le choix est limité et que à bien regarder la Tunisie, grâce à BCE est en train de retrouver sa place dans le concert des nations.

Quand au gouvernement, faut il rappeler qu'il a fait face aux pires conditions possible :
-une désorganisation totale des structures de l'état.
-Une administration en vacance.
-Un ministère de l'intérieur complètement infiltré.
-Un ministère de la justice aux mains des Nahdaouis...
-des mouvements sociaux à n'en plus finir.
-Un effondrement du Tourisme.
-Des exportations en baisse du double fait de la diminution de la production industrielle et de la situation économique internationale.
-Une très mauvaise année agricole (exception faite des productions de dattes et d'huile. Mais ces derniers ne représentent que 2% de nos exportations)..............

Et des tunisiens qui ne veulent plus travailler

DIEHK
| 05-01-2016 14:30
Seule, la soumission aux intérêts qui vous permettent d'exister vous poussent à censurer ce qui ne va pas dans le sens de vos donneurs d'ordre.
Vous démarrez bien l'année 2016!!!!
Mais attention au FUTUR, vous risquerez de tout perdre à cause de votre soumission à la mafia de Nida et Islamiste.




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