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Tribunes
Quand un pays perd sa mémoire !
04/03/2019 | 18:19
3 min
Quand un pays perd sa mémoire !

 

Par Taoufik Baccar *

 

Manifestement, l’accord avec le FMI a été mal négocié. Je ne parle pas du contenu de l’accord car pour moi, il était inéluctable au vu du mauvais démarrage de la prise en charge, dès l’année 2011, des questions économiques et financières et de la marginalisation de celles-ci depuis la période de la troïka, mais de son échéancier et de ses conditions d’application. Cet accord dois-je le rappeler, fait d’abord l’objet de discussions avec l’Administration et le gouvernement pour être par la suite adopté par l’ARP.

 

Encore une fois, le problème provient de cette rupture avec le passé. En 1986, la situation économique et financière du pays a rendu nécessaire la conclusion d’un accord similaire avec cette institution sur fond de crise politique aiguë ; mais la Tunisie d’alors a su prendre les devants, exiger et obtenu un étalement des réformes notamment au niveau de la libéralisation des prix et mettre en place contre l’avis du FMI, un programme d’accompagnement social, le « PNAFN », programme encore en cours aujourd’hui, qui a dû être couvert par un effort national à travers une ponction sur les ressources des caisses de sécurité sociale devant le refus des institutions financières internationales d’en assurer le financement.

La Tunisie a su également mettre en œuvre la plus grande réforme fiscale de son histoire avec le Code de la TVA, le Code de l’IRPP, le Code des droits d’enregistrement et le Code des droits et des obligations fiscaux. Le pays a pu également mettre en place en 1993 un Code unique des investissements, déclarer la convertibilité courante du dinar et accéder en 1994 au marché financier international. En moins de huit ans (1986-2003), le paysage fiscal, financier et de change a complètement été transformé et dès 1991, le pays s’est départi de l’accord avec le FMI en remboursant par anticipation le crédit stand-by.


A ceux qui excipent de l’argument politique, je dois rappeler que la Tunisie a connu entre 1985 et 1987, (période de négociation et de mise en œuvre de l’accord avec le FMI), une course effrénée au pouvoir et des tiraillements politiques dont l’ampleur n’a rien à envier à la situation actuelle.
On ne l’a jamais assez dit : l’option délibérée de rompre avec le passé a été catastrophique sur la situation du pays autant que la mise au pas de l’Administration et les tentatives récurrentes de sa dénaturation. Les missions du FMI n’ont-elles pas déploré, par-delà les mots de remerciements et de courtoisie usuels, le fait qu’elles n’avaient pas en face d’elles des vis-à-vis crédibles, situation qui n’a rien à voir avec celle qui a prévalu en 1985/86 avec une Administration qui tenait bien la route et en particulier des ministères du Plan et des Finances et une Banque Centrale efficaces avec des staffs compétents et patriotes.

 

Malheureusement la négociation avec les institutions Financières internationales n’est pas le seul domaine dans lequel le facteur compétence a fait défaut depuis 2011. Des règles pourtant simples ont été sacrifiées : on ne finance pas des dépenses budgétaires récurrentes ( augmentation des salaires , recrutements, etc.) en utilisant des ressources non renouvelables telles celles provenant des privatisations (Tunisie Télécom); on ne libéralise pas le taux de change sans s’entourer des garanties nécessaires pour défendre le dinar (réserves importantes en devises, appareil d’exportation efficient, soutien financier extérieur de taille, etc.); on ne fait pas de sortie d’un milliard de dollars sur la marché financier international sans savoir que la marge au titre de cette sortie deviendra une référence pour toute sortie future; on ne laisse pas rétrograder une notation souveraine à 6 reprises sans réagir; on ne supprime pas une agence de notation et encore moins S and P de la liste des agences qui notent la Tunisie sans en évaluer les conséquences sur la perception du marché du risque tunisien, etc. On peut multiplier les cas de défaillances et des erreurs d’appréciation commises, alors que le pays a acquis dans tous ces domaines une expertise confirmée et internationalement reconnue. On ne l’aura jamais assez dit : le pays paie aujourd’hui le prix de cette option délibérée pour la rupture.

 

Ferdinand Foch aura tout résumé en écrivant ceci : « parce qu’un homme sans mémoire est un homme sans vie, un peuple sans mémoire est un peuple sans avenir » !

 

*Taoufik Baccar est ancien gouverneur de la BCT et actuel président du Ciped

04/03/2019 | 18:19
3 min
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Commentaires (12)

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ben lili Ezzedinne
| 16-03-2019 15:02
L'auteur de cette tribune Taoufik Baccar, ne sait pas à quel point il est un critique partial et aigri. Aigri de s'être fait éjecter des postes qu'il a occupés n'étant pas suffisamment au niveau requis. Il palabre, paroles paroles'?'?'. Hamadi Annabi Bey

mohamed said boussaadia
| 14-03-2019 13:11
il est la preuve que le ridicule n a jamais assez tue[ IL FAUT LIRE TUAIT/mon ordi a un probleme avec les accents]

sarra
| 13-03-2019 11:42
Mr Taoufik Baccar a omis de nous dire comment ils ont donné les entreprises publiques comme cadeaux à la famille de ben ali.
c'est vrai qu'il y a eu des compétences mais que ces compétences ont servi la mafia en élaborant des lois sur mesure et en accélérant la déroute et la faillite des entreprises publiques pour les vendre au dinar symbolique aux familles trabelsi, matri, mabrouk,...

Maher
| 12-03-2019 10:13
Par la réponse du CIPED, TB montre bien qu'il est fidèle à son école,(celle de ZABA) il sous-estime le monde.
Monsieur lorsqu'on prospose son point de vu au public (puisque vous avez accepté sa publication) il faut s'attendre à des remarques, des réactions et des critiques.......
Malheureusement vous avez prouvé encore une fois que vous n'avez pas l'esprit scientifique, tout ce que vous avez dit ou presque est vrai (scientifiquement parlant) mais vous négligez que d'une part vous avez bénéficié de l'appui d'un "état fort" à l'époque (ce qui n'est pas le cas aujourd'hui) et puis qu'avez vous fait lorsque le FMI vous a demandé de supprimer le financement par la BCT du Trésor au titre du décalage entre ses recettes et ses dépenses? vous avez bien accépté cette "recommandation" pratique pourtant répandue aux USA et au Japon (CF réaction de Jamal plus bas),
Il est vrai que les gouvernants d'après le 14 janvier 2011 ont péché par ignorance et très mal négocié avec le FMI, ils ont été nuls (je vous l'accorde), mais vous-même vous n'avez pas fait mieux et pourtant vous étiez dans une situation relativement plus confortable que ceux là même que vous critiquez aujourd'hui......
Vous me faites penser aux présidents américains, tous sont d'accord pour que les palestiniens aient droit à un état viable, mais ils ne font jamais rien dans ce sens lorsqu'ils sont au pouvoir et le disent -tous- après avoir quitté le poste.....

CIPED
| 07-03-2019 16:50
D'abord vous faites des commentaires sur un article qui ne vous est pas destiné .c'est businessnew.com qui de sa propre volonté a repris ce statut du Président du CIPED sans que l'auteur le demande. Maintenant pour ceux qui se posent la question suivante « qu'a fait Taoufik Baccara actuel Président du CIPED lorsqu'il était à la BCT ?» Il est signalé que durant son passage à la BCT, entre 2003 et 2010, la dette extérieure a baissé de 55 à 37% du PNB, les réserves en devises ont augmenté de 90 jours à 157 jours, l'allocation touristique de 1000 D à 6000 D et l'inflation a été momentané stable autour de 3.5% et le dinar baissait légèrement et de façon réfléchie ce qui a améliorer le niveau des exportations. Concernant l'interdiction à la BCT de faire des avances à l'Etat c'est une décision prise par la Tunisie souveraine qui n'était pas alors sous programme du FMI, et qui prend ses décisions à Carthage, la Kasbah ou à la rue Hedi Nouira et nulle part ailleurs. De plus cette décision est en cohérence avec le changement du mandat de la BCT ,devenu depuis 2006 la stabilité des prix et qui exigeait une neutralité budgétaire ,condition nécessaire de l'efficacité de la politique monétaire .Maintenant Dieu merci cette mesure a été prise avant 2011 sinon les autorités auraient abusé de ce système d'avances de la BCT et vous voyez ce qui s'est passé malgré cette mesure d'interdiction avec ce recours massif aux BTA qui a fait sombrer tour à tour les finances publiques du pays ,augmenté l'inflation et mis à terre le dinar. Alors de grâce ne parlez pas de choses que vous ne connaissez pas sinon vous serez aussi incompétents que ceux que vous avez traités d'incompétents .Le président du CIPED a simplement parlé de perte de mémoire.

Jamal
| 05-03-2019 19:08
Monsieur, dénigre les autres à la moindre occasion mais oublie que lui-même a mal négocié avec le FMI lorsque ils ont concevu en 2006 de supprimer toute possibilité que la BCT finance le Trésor au titre du décalage temporel entre ses recettes et ses dépenses, une pratique que l'on retrouve au Japon, aux USA etc. Mais la, il devient "amnistique".

Jugurtha
| 05-03-2019 17:10
14 siecles de matraquage arabo-islamique et d'efforts deliberes pour eradiquer notre identite, voila bien le grand drame illustre par la citatiion de Foch! Ces affaires de dependance economique et financiere ne sont que de pauvres corollaires accessoires ... Le mal est bien plus profond. Il releve de notre ancrage suicidaire a un orient malade et retrograde.

Rationnel
| 05-03-2019 16:57
Tous les articles de Taoufik Baccar visent un même objectif, la défense de la réputation définitivement ternie d'un homme qui a servit Ben Ali pour plus de 20 ans. T.B. est considéré comme un des facilitateurs de l'enrichissement des familles alliées a Ben Ali, il était l'accessoire a leurs vols. Taoufik Baccar veut nous faire croire qu'avant la révolution tout fonctionnait a merveille, que les devisions et choix politiques et économique dont il était un des principaux responsables étaient parfaits. Si c'était vrais la révolution n'aurait pas éclaté. La politique monétaire et la gestion économique sous T. Baccar et ses collègues était un désastre, plusieurs rapports de la banque mondiale (un organisme dot il est un grand admirateur) nous montre le degré de cette gestion désastreuse. Sous Taoufik Baccar, les sociétés contrôlées par les Trabelsi et les familles allies a Ben Ali accaparait la majorité des profits dans l'économie. Sous ses ordres l'économie Tunisienne a stagne et a été fragilisée, si l'économie stagne aujourd'hui et recule c'est qu'on avait une économie avec des bases très fragiles, la stratégie de la main d'oeuvre a bas coût et les produits et services bas de gamme s'est épuisé. Cette économie ne pouvait plus offris des emplois au centaines de milliers de diplômés depuis 2004 déjà, 7 ans avant la révolution.

La stratégie défendue par Taoufik Baccar et inaugure par Hedi Nouira auquel il voue une grande admiration a conduit le pays l'état ou il est.

Il accuse ses successeurs d'incompétence et ne réalise pas qu'il est pire qu'eux.

Le FMI de 2019, n'est pas le FMI de 1986 donc une expérience avec le FMI de 1986 ne va être utile pour traiter avec le FMI de 2019. Avant 2003, la seule recette du FMI était l'austérité et la restructuration mais après les échecs dans la majorité des pays auxquels on a applique cette recette, le FMI a adopte des stratégies qui tiennent compte des réalités économiques, sociales et politiques de chaque. Contrairement a ce qu'on prétend le FMI n'a pas demande a la Tunisie de privatiser les sociétés publiques (étatiques) puisque ceci va conduire a l'émergence d'une couche d'oligarques encore plus puissante qui vont déstabiliser le pays. Vu l'absence de capital dans le pays, le privatisation ne va injecter de nouveaux capitaux dans l'économie mais va épuiser le capital des banques locales. Le FMI est compréhensif avec la Jordanie qui a eu annuler les augmentations du carburants et plusieurs denrées essentielles après un soulèvement populaire.

Le monde a change, la dette au niveau mondial est de 600 mille milliards, donc les 30 milliards de dollars dette de la Tunisie sont une goutte dans un océan. Le seul problème est l'inflation. L'inflation en Tunisie n'est pas du a l'endettement mais est le résultat de la politique économique prônée par T. Baccar (il était aussi ministre du plan) est ses collègues qui ont négligé l'agriculture et les réseaux de distribution et ont signe des accords de libres échanges mal négociés qui favorisaient l'enrichissement des commerçants importateurs et les corrompus au lieu de favoriser les secteurs qui vont garantir plus d'autonomie au pays.

Bab ezzira
| 05-03-2019 14:00
Un grand bravo à Si Taoufik, un résumé majestueux de ce qu'il y avait et de ce qu'il devrait y avoir.
Un homme qui n'a pas encore perdu les pédales au pays des ânes parlants et dormants.
Depuis 2011, je ne cessais de dire qu'il ne fallait pas tout détruire et recommencer à zéro, mais plutôt partir sur la base d'un vrai diagnostic pour évaluer ce qui avait marché de ce qui ne l'est pas et construire en évitant les erreurs du passé. Dommage en 2011, il y avait trop de traîtres d'anarchistes,d'islamistes terroristes, de manigances étrangères de la manipulation islamiste-atlantiste-sionistes et des complots de tous genres pour détruire ce beau pays qui est la Tunisie.
Les ânes parlants ont tendance à écarter les compétences de ce pays pour pouvoir réaliser leurs crapuleux rêves islamo-anarchiste par la destruction des fondements de la république Tunisienne.
Seul bémol Si Taoufik , la situation actuelle a dépassé de loin celle de 1986 et nous rappelle malheureusement la situation pré-coloniale de 1881 .

Tunisino
| 05-03-2019 12:01
Ce n'est pas un problème de mémoire mais plutôt d'incompétence. Tout au long de l'article, TB a tourné autour de l'incompétence des nouveaux dirigeants qui se sont présentés et se présentent toujours comme des sauveurs de la Tunisie sous différents masques, il a juste divergé lors de sa conclusion, pour adoucir sa position peut être. Nous attendons maintenant une autocritique de TB concernant son expérience dans l'ancien régime, ce qui a marché et ce qui n'a pas marché, une leçon pour les dirigeants futurs, ceux qui se voient pour mission non seulement de développer ce pays mais aussi de le faire rayonner!