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Chroniques
Quand tu habites à Kasserine…
31/08/2016 | 16:00
3 min

Aujourd’hui, Kasserine (le gouvernorat) fait la une des journaux, mais comme d’habitude, pas pour les meilleures raisons. Mort, terrorisme, précarité…

 

Il faut dire que, quand tu habites à Kasserine, tu es en confrontation directe avec le terrorisme. Pour de rares occasions, le terrain des opérations se déplace en ville et tu peux te réveiller le matin sur le bruit d’échanges de tirs comme ce fût le cas aujourd’hui. Tu peux aussi avoir l’occasion de voir de tes yeux les actes terroristes, comme par exemple lors de l’attaque de la maison du ministre de l’Intérieur de l’époque, Ben Jeddou. Mais de manière quotidienne, le terrorisme influencera ta vie. Si tu as la malchance de vivre grâce à la montagne en y faisant paitre tes animaux ou pour y chercher du bois, tu pourras faire une croix sur ta source de revenus puisque la montagne est une zone militaire fermée. Tu auras également l’occasion de te délecter des tirs d’artillerie de l’armée qui peuvent être enclenchés à n’importe quelle heure du jour ou de la nuit. Et cerise sur le gâteau, les personnes qui vivent ailleurs en Tunisie te considèrent comme un terroriste…

 

Quand tu habites à Kasserine, tu peux voir débouler sur toi un camion qui n’a plus de freins. Pour ceux qui connaissent Khemouda et la géographie de la zone, on ne peut qu’imaginer le pire en pensant à un camion sans freins. Certes, il s’agit d’un accident, mais le sort semble s’acharner sur cette partie du territoire tunisien. Quand tu habites à Kasserine, tu auras l’impression d’appartenir au territoire mais pas à la République, et tu feras tienne la désormais célèbre maxime : « La patrie on ne la connait que sur la carte d’identité ».

 

Quand tu habites à Kasserine, il vaudrait mieux pour toi être résistant à la soif. Les coupures d’eau sont certes générales à tout le pays et la pénurie menace. Mais il est clair que couper l’eau à Kasserine fera sûrement moins de bruit que de le couper à La Marsa.

 

Quand tu habites à Kasserine il vaudrait mieux pour toi ne pas garder cette adresse sur ta carte d’identité. Les contrôles de police peuvent devenir assez « mouvementés » si le policier n’est pas très ouvert d’esprit. Il pourra même te demander « qu’est ce que tu fais ici ? » si jamais tu te fais contrôler à Sousse ou à Tunis ou à Sfax. Il te faudra baisser la tête, accepter et t’en remettre à l’humeur de l’agent pour savoir si tu rentres chez toi ou pas.

 

Quand tu habites à Kasserine, il vaut mieux ne pas y être très attaché. Parce que si tu es attaché à ta région au point que tu ne veuilles pas vivre ailleurs, il faudra t’armer de beaucoup de courage et de patience pour trouver du travail, si jamais tu en trouves. Mais puisqu’il te faudra faire quelque chose pour vivre, tu tomberas, tôt ou tard, dans la contrebande. Tu pourras faire le passeur avec l’Algérie voisine, tu pourras au bout de quelque temps conduire ton propre camion pour ramener des biens de là bas pour les revendre en Tunisie. Tu pourras éventuellement te faire tirer dessus par les forces de l’ordre, mais bon, il faut bien vivre non ?

 

Quand tu habites à Kasserine, tu ne te soucies pas de politique. Tu n’en as que faire des ors de la République, des grands discours et des déclarations d’intention. Tu sais qu’on parle, entre autres, de ta région quand on évoque les régions « défavorisées », mais en même temps tu sais qu’on parle de ta région depuis longtemps, mais que jamais rien n’a été fait. Donc, tu perds confiance et tu sens qu’ils vivent dans un autre pays que le tien, que vous n’appartenez pas au même monde et que, finalement, ils n’en ont pas grand-chose à faire de toi…et ce ne sera pas totalement faux.

31/08/2016 | 16:00
3 min
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Commentaires (65)

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Simple observateur
| 11-09-2016 13:55
La principale cause des malheurs de cette région est la pauvreté.

Savez-vous que les pommes de Sbiba, qui se vendent très cher sont produites dans le gouvernerait de Kasserine!

Savez-vous qu'un hectare de cactus inerme peut rapporter autant qu'un hectar de pommier !

Dans certaines régions du monde, les sous-produits du cactus ont fait des milliardaires

Ce qui manque c'est la communication efficiente entre les agriculteurs , les instituts de recherche et les vulgarisateurs. Je parle de vulgarisateurs à l'aise dans leur peau, dont les connaissances sont régulièrement mises à jour par des formateurs motivés, des vulgarisateurs qui disposent de moyens de travail et de déplacement adéquats

Un autre facteur qui manque encore, les coopératives de service, qui, sous d'autre cieux ont permis aux agriculteurs de doubler leur marge bénéficiaire

alpha
| 09-09-2016 10:27
sauf que le phosphate l'eau et les olivives vont tous a la meme région

alpha1
| 09-09-2016 10:25
Ce que vous appeler betise s'appelle ignorance , due a une non intervention de l'état dans le développement de ressources humaines dans la région dans l'optique d'une gestion coloniale .

consulte un peu les résultats de , l'analphabétisme , le nombre municipalité ,le nombre de centre de formation professionnelle et comparer au gouvernerat à 150 km à l'EST .

Avec la connaissace on juge certainement mieux

( Note:le colonialisme intérieur existe ) Google peut bien aider

Gg
| 08-09-2016 20:38
La misère, l'absence d'espoir, le sentiment d'abandon... oui.
Mais non, pas toujours. La misère est parfois due à la bêtise.
Je parle d'exemples concrets.
Quand on paye des études a des jeunes, qui ne foutent rien ou abandonnent un an avant la fin pour se marier. Quand on donne 10.000 euros, et même plus, pour acheter un commerce, monter une petite affaire, et que deux mois plus tard rien n'a été fait, mais l'argent est parti, évaporé.
Il faut aussi comprendre que travailler n'est pas une insulte, que la bêtise tue aussi sûrement que la malchance.
Au risque de choquer, c'est une triste réalité...

el ouafu avec Y à la fin
| 05-09-2016 18:05
Quand tu habites à Kasrine vous pouvez témoigner que le début de désobéissance c'est à coté à Sidi Bouzid quand un jeune était brûlé par lui même par le feux et les manifestations tragiques débutes 0

Kairouan
| 03-09-2016 14:45

... Voila qui est bien dit, loin des offuscations deplacees des uns et des accusations ideologiques ou partisanes des autres.

Gafsi
| 03-09-2016 02:11
Bravo Marouen, l'autre fois vous avez rendu hommage à un simple berger sans histoire, il était pas mort dans une voiture lui, mais vous avez quand même pris la peine d'exposer l'hypocrisie sociale qui fait semblant de sympathiser avec les gens des tréfonds pour quelques secondes dans les moments tragiques pour les mépriser et les tabasser quelques minutes après.

Ici, la plupart ont raté l'essentiel de l'article, il ne s'agit pas de concours de souffrance mais juste une exposition vu les circonstances des plaies d'une région qui vit une catastrophe humanitaire, ça ne veut pas dire que les autres régions se portent mieux, bien au contraire sauf que la couverture médiatique n'est pas la même et peut varier carrément d'un quartier à un autre; une coupure d'eau à sidi hssine n'aura pas le même écho qu'une panne Internet aux berges du Lac.

L'article ici essaie de stimuler l'intelligence du lecteur pour qu'il se mette à la place d'autrui et d'imaginer l'adversité que l'on pourrait rencontrer en étant dans sa peau, si on y arrive, on pourra reconnaitre certains problèmes de façon honnête et y remédier de manière efficace.

Je ne vois aucune tentative de division ou de manoeuvres pour attiser une quelconque haine, je pense que malheureusement on est devenu susceptible à force de contourner la vérité par des pirouettes d'hypocrisie et ce qui nous sépare réellement des autres nations c'est tout simplement l'honnêteté et la transparence.

Les faits relatés ici sont totalement vrais, faut pas s'offusquer d'un article qui refuse de saupoudrer de sucre une réalité amère.

Les évènements de Kasserine prouvent un point; L'ombre du terrorisme plane toujours là où les gens vivent et meurent délaissés par la république, là où l'individu perd tout repère, toute notion de dignité humaine et ne se sent plus rattaché à un état mais à un climat de guerre et à un avenir incertain.

SAMIA
| 01-09-2016 22:34
J'ai Parlé des oliviers et de la MER !!
Que valent le phosphate et le pétrole sans mer ?Je pense que
tous les Tunisiens profitent du trafic maritime ..la mer est la propriété de l'état et les saheliens ne l'ont jamais confisqué!!votre discourt me rappelle celui du Marzouki qui a voulu brûler le sud!Je commence à donner raison à l'ancien
président!!

nazou
| 01-09-2016 22:08
Ce sont les partisans de Bourguiba (surtout de son idéologie) qui sont à l'origine du renversement de ben ali. (Aidé par un pays ami)
Beaucoup de flicaille infiltrés dans le système benaliste.
Sont ici avec nous !
Vous comprenez leur rage ?
Ils ont trahi ben ali, sans pour autant gagné le pouvoir !

SAMIA
| 01-09-2016 22:03
Les bourgoies Saheliens Sfaxiens djerbiens Et
tunisois ont bossé pour constituer leurs fortunes ,celui qui les accuse de profiter et s'enrichir de manières non légales le temps de Bourguiba il n'a qu'à chercher leurs parcours!
Par contre je veux bien savoir la source de la fortune du Gourou qui n'était qu"un simple prof secondaire de philosophie!!!!