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Chroniques
Néji Jalloul, le cadeau du 1er mai offert à Noureddine Taboubi
01/05/2017 | 15:59
7 min

 

Actualité bien chaude cette semaine où l’odeur de la manipulation politique se ressent dans chacun des événements qui en ont fait la une. « Tous coupables, tous pourris, tous incapables », pourrait se dire le citoyen lambda préoccupé, qu’il est, par les examens de fin d’année et les préparatifs des budgétivores mois de ramadan et des vacances d’été.

 

A Tataouine, à l’extrême sud du pays des centaines de personnes « en colère » se sont déplacées au fin fond du Sahara au lieu-dit « El Kamour » pour bloquer toute circulation de camion pétrolier. L’idée est que les sociétés pétrolières étrangères seraient en train de piller nos richesses naturelles. Une des principales revendications est de donner à la région 20% de ses recettes pétrolières. A elle de gérer ensuite son propre développement et sa propre infrastructure.

 

La revendication en a fait rire plusieurs et chacun est allé dans son registre pour ridiculiser les manifestants. Telle région veut avoir ses parts dans les recettes de l’eau, l’autre dans les recettes de l’alcool, l’autre dans les recettes du tourisme… On faisait remarquer dans la foulée que les manifestants de Tataouine et d’El Kamour semblaient matériellement aisés au vu des moyens logistiques mis à leur disposition. Et, pour enfoncer le clou, on s’interroge s’ils sont en train de s’acquitter de leurs devoirs fiscaux, sachant pertinemment à l’avance que la réponse penche vers le négatif.  A entendre certains, parce que ces gens sont aisés (ou supposés l’être), et parce qu’ils seraient en train de vivre de contrebande,  ils ne devraient donc plus rien revendiquer.

Tentant de désamorcer le conflit et de calmer les ardeurs, Youssef Chahed est allé jeudi sur place, à la tête d’une imposante délégation ministérielle et médiatique. Il n’a cependant pas réussi à désamorcer grand-chose. A un moment, on était plutôt proches du dialogue des sourds.

 

On a beau penser que les revendications des Tataouiniens sont farfelues, bloquantes et mues de mauvaise foi et de calculs politiques (et tout cela peut ne pas être faux), elles ont le mérite d’être claires avec, pour source, la Constitution de la IIème République. Ce que les critiques ont tendance à oublier. Dès son préambule, la Constitution a parlé du devoir d’équité entre régions. Dans son article 12, on parle d’équilibre entre régions. L’article 136 stipule qu’une « part des revenus provenant de l’exploitation des ressources naturelles peut être consacrée, à l’échelle nationale, en vue de la promotion du développement régional ». Les articles 137 à 142 parlent tous des collectivités locales et de leur gestion libre des ressources. Ce n’est ni l’opposition, ni les manifestants de Tataouine qui parlent de ça, c’est la Constitution ! Maintenant, on peut gloser autant qu’on veut sur les revendications des Tataouiniens, sur l’implication de l’opposition, de Marzouki, des Abbou et des islamistes, le fait est que leurs revendications sont légitimes et basées sur la Constitution. La Constitution est mauvaise ? Ça on le sait, ce n’est pas nouveau, mais ce n’est pas parce que la Constitution est mauvaise qu’on doit l’ignorer !

Reste la forme et c’est là où les Tataouiniens ont fauté. La région d’El Kamour est une zone militaire interdite d’accès et nous sommes en Etat d’urgence. Que les manifestants et « sitinneurs » aillent là-bas est un acte de défi à l’Etat et un mépris des lois. Les lois sont mauvaises ? Peut-être, mais ce n’est pas parce que les lois sont mauvaises qu’on doit les ignorer. L’autre faute des Tataouiniens est dans l’accueil odieux qu’ils ont réservé au chef du gouvernement et la délégation qui l’accompagne. Tout comme leur comportement odieux à l’encontre de certains médias jugés trop indépendants ou proches de la gauche. Il peut y avoir des causes nobles et justes qui échouent, juste à cause de problèmes de forme.

 

Samedi 29 avril, le collectif « manich msameh » (je ne pardonnerai pas) a organisé une manifestation qui se voulait être grosse et imposante. Ce collectif est une créature de l’organisation I Watch, dont les mensonges et les manipulations grotesques se suivent et se ressemblent. Le fait est que ce collectif et cette organisation trouvent du répondant chez une partie de la population qui continue à prendre pour de l’argent comptant tout ce que peut raconter cette organisation, dont certains membres touchent des milliers de dinars par mois pour leur « militantisme » et leur « activisme ». Au menu de ce samedi, le projet de Loi de réconciliation nationale dans sa troisième version, présentée cette semaine par la présidence de la République à l’Assemblée.

 

Parmi les mensonges proférés, on note que la Loi en question va passer l’éponge sur les méfaits de la famille de l’ancien président Ben Ali, va pardonner à ceux qui ont volé de l’argent public et se sont enrichis indûment, va blanchir les corrompus et les corrupteurs… Le collectif et les manifestants du samedi refusent donc tous ces élargissements et ils le crient haut et fort. Le hic est que la loi en question ne prévoit rien de tout cela, il suffit de la lire ! Paradoxalement, c’est la Loi de la Justice transitionnelle qui prévoit ces élargissements à travers l’Instance Vérité et Dignité que préside Sihem Ben Sedrine. Sur le fond, pourquoi ces manifestants refusent un principe de pardon aux uns et l’accordent aux autres ? Sur la forme, il y a tout simplement une méprise puisque, je le redis, la loi en question ne prévoit pas de pardonner aux corrompus leurs méfaits d’enrichissement personnel !

N’empêche, la manipulation des masses qu’entreprend I Watch est du beau travail, ses dirigeants ont bien été coachés…

 

La manifestation du samedi a pris pour point de départ la Place Mohamed Ali. Une place symbolique, très symbolique car elle « appartient » à l’UGTT. Le collectif « Manich msameh »  voulait impliquer la centrale syndicale dans son action, mais il se trouve qu’on n’apprend pas à un vieux singe à faire la grimace. Ce ne sont donc pas des activistes gominés payés en dollars qui vont apprendre la manipulation politique aux valeureux syndicalistes de l’UGTT. Les agendas des manifestations, c’est l’UGTT qui les fixe à Tunis et non Transparency qui les fixe à Washington. Du souverainisme ? Oui et je ne remercierai jamais assez l’UGTT pour cette indépendance par rapport aux organisations étrangères et ce nationalisme-patriotisme. Ceci pour la forme, car pour le fond c’est une autre paire de manches.

Entre l’UGTT et le pouvoir, il y a un autre calcul et un autre bras de fer. La centrale syndicale a juré la peau de Néji Jalloul, ministre de l’Education, et elle l’a fait savoir. Un dead-line a été publiquement fixé et c’était le 15 avril. Noureddine Taboubi, SG de l’UGTT, a besoin de gagner cette manche pour asseoir sa légitimité. C’était vital pour lui. Il pouvait manipuler la carte « I Watch » et ses manifestants (manipulables à souhait) pour fragiliser encore davantage le pouvoir et BCE, mais il ne l’a pas fait. Et s’il ne l’a pas fait, c’est parce qu’il avait reçu la promesse ferme que Jalloul allait être limogé avant la fin du mois d’avril. La date n’est pas fortuite, car le 1er mai coïncide avec la Fête du Travail et Taboubi se devait de présenter à ses syndicats une victoire. A-t-il proposé en contrepartie des garanties de quelques trêves pour satisfaire les engagements gouvernementaux vis-à-vis du FMI ? Probablement. Le fait est que Youssef Chahed (ou BCE plutôt) ait cédé la veille du 1er mai.

C’est du jamais vu ! On limoge un ministre, un dimanche soir sans même lui prévoir un successeur !

Pour asseoir sa légitimité, Youssef Chahed se devait de garder Néji Jalloul. C’est une question de vie ou de mort politique pour lui. Il aurait mieux valu que Chahed démissionne plutôt qu’il limoge Jalloul ! Il en était intimement convaincu et il a résisté jusqu’au bout. Le dead-line du 30 avril est arrivé, il fallait honorer l’engagement donné. Un dimanche soir, il a offert le cadeau exigé par Noureddine Taboubi. Le SG de l’UGTT peut se pavaner avec beaucoup de fierté devant ses syndiqués, il a réussi le bras de fer. Maintenant, il peut leur demander ce qu’il veut.

Reste maintenant à savoir si Béji Caïd Essebsi et Youssef Chahed peuvent également demander ce qu’ils veulent à Noureddine Taboubi… Pas sûr que la réponse soit positive !

 

 

Mohamed Talbi est décédé. Avec lui, un grand pan de l’Histoire, du Savoir et de la Science part. Une page se tourne. Des Talbi, en Tunisie, on n’en a plus beaucoup, voire on n’en a plus ! Paix à son âme, ce 1er mai est triste pour le pays.

 

01/05/2017 | 15:59
7 min
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Commentaires (28)

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pseudo
| 06-05-2017 04:45
Notre futur President et mabrouk à BCE son petit fils Belkhoja a été embauché par ATTIAS;le mari de Cecilia ex sarkosy dans Events réjouissez vous un chomeur de moins;bien sur il doit cette embauche à son seul talent méconnuu jusquelà talent ;c 'est Maghrebconfidentiel qui nous a annoncé cette réjouissante nouvelle;le vote a été utile

pappou
| 03-05-2017 14:41
Le préjugé favorable dont a bénéficié Y.Chahed s'effrite de jour en jour.Céder après avoir crier haut et fort qu'il refuse de limoger un ministre à la demande syndicale,confirme bien que notre Chef de gouvernement ne gouverne pas et qu'à l'instar de beaucoup d'autres le jour passé au poste est un jour de gagné.L'UGTT a raison de dire que ce gouvernement fonctionne sans stratégie,qu'il n'a pas de plan de travail et qu'il fait plutot un travail de pompier que la direction des affaires du pays.Et c'est pour cela que la Centrale Syndicale presse le Gouvernement et impose ses conditions.Chahed a limogé le seul ministre-hormis ceux de la défense et de l'intérieur-qui travaille sur un projet.Son projet:mettre à niveau l'enseignement,combattre l'absenteisme du personnel enseignant(qui touche plus de vingt pour cent de l'effectif),museler les barons des cours particuliers qui font saigner parents et élèves...Voila Jalloul et voila son projet.Bien sur que cela n'arrange pas beaucoup en premier le syndicat de l'enseignement, gardien de l'immobilisme et de l'acquis fusse-t-il aux dépens du pays ,des intérets des générations futures ;des Islamistes qui revent de revenir au"bon temps"de l'enseignement religieux.Depuis le gouvernement de H.Essid s'est on demandé pourquoi la pression ne s'exerce que sur les modernistes et jamais sur les ministres de Nahdha?à qui profite le crime et qui est le commanditaire de tout cela ?
Continuer de céder Mr le Chef du gouvernement.

Léon
| 02-05-2017 17:10
Mon envoi précédent concerne bien sûr "Observateur".
Léon.

Léon
| 02-05-2017 15:24
Je ne sais plus quoi dire quand on a à faire à autant d'hypocrisie. Je ne défends personne et certainement pas un ministre placé par la Tunisie occupée; celle de la merdolution que tu n'a eu de cesse d'applaudir comme la plupart des moutons de Panurge qui se croient plus intelligents que les autres.
Les seules personnes sensées sont celles qui n'avaient pas applaudi la révolution et l'avaient même condamnée. Ceux qui n'étaient ni ministres, ni proches mais avaient en tête que le seul intérêt de leur pays.
Pas ces enfants gâtés, que les sionistes sont arrivés à manipuler, et cerise sur le gâteau, en utilisant leur propre religion.
Je tire mon chapeau pour les sionistes que je commence presque à admirer. Mettre des musulmans pour aller tuer les petits syriens à leur place; c'est l'apothéose de la finesse et en même temps l'apothéose de la bêtise de mon peuple.
C'est la même chose pour la révolution en Tunisie. Quelle belle manip!!!!!! je n'en reviens pas!
Revenons à notre ami Jelloul.
S'en prendre aux cours particuliers, au 20% du bac, à la quiétude des fonctionnaires pour lesquels le lycée n'est qu'un complément de salaire, est certes très difficile.
Les gueux ne laisseront pas faire.
Pour la petite histoire: Ben Ali avait essayé et même congédié quelques fonctionnaires (j'en connais même un) mais la volonté des gueux a vite pris le dessus et il a lâché prise.
Car changer la tête des 99% de ce peuple qui a trahi son pays et qui continue à appeler "Dictature" le système dans lequel ils se sont épanoui, ont de beaux métiers, et un ordinateur pour débiter leur Haine, n'est pas du tout facile.
Ben Ali reviendra. Ce sera une autre version appelée Moi. Ce jour-là, gare aux traitres!
Tous ces gros diplômés, dont l'instruction est proportionnelle à la fécalité de leurs cerveaux.

Léon, Min Joundi Tounis Al Awfiya;

VERSET 112 de la SOURATE des ABEILLES (qu'en penses-tu, au fait!)

Aymen
| 02-05-2017 14:38
Un bon débarras. Le gars pensait qu'il est le centre de la terre avec des décisions prises à la légère et une envie tuante de vouloir faire le héros.

Parent d eleve
| 02-05-2017 13:30
Une fois n'est pas coutume. Je suis d'accord avec l'ugtt : basta avec Mr Jellouli. Politique, calcul ou tout ce que vous voulez, le resultat est là : cette annee scolaire etait la pire de toutes à cause ses soi-disant reformes. Tenez-vous bien : il donne plus de vacances et en contre partie il garde le meme nombre d'heures et le meme programme ! En d'autres mots, travailler plus d'heures et bosser aussi pendant les vacances, sans compter que les examens restaient pareils en nombre donc concentrees dans les semaines bossees. Du n'importe quoi ! Que du blabla et du populisme.

OPS-CONTROL
| 02-05-2017 11:43
BIENTOT CHAHED immediatement ensuite

sassi
| 02-05-2017 11:41
normal puisque ce chef de gouvernement suit les consignes de ce voyou laissez lui la place

sassi
| 02-05-2017 11:38
qui gouverne? on comprend plus rien plus d'ethique plus d'audace plus de fermeté laisser faire laisser aller l'essentiel le trone que les incapables qui réusissent

Moi
| 02-05-2017 10:43
Les Tunisiens ne méritent pas d'être commandés par un gouvernement "pâte à modeler" !....Qu' avons nous fait pour mériter toutes ces petitesses...Que tous les politiciens tunisiens soient envoyés aux enfers et qu'on n'entende plus parler d'eux !