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Chroniques
L'UGTT ou le café du commerce
12/10/2017 | 19:00
5 min

 

A lire le communiqué publié à l’issue de la réunion de la Commission administrative (CA) de l’UGTT, tenue, mercredi 11 octobre 2017, cela revient à s’interroger sur la validité du concept selon lequel il est nécessaire d’avoir des syndicats ouvriers solides tout autant que peuvent l’être les organisations patronales. Ensemble, ils devront garantir un équilibre efficace entre impératifs économiques et attentes sociales. 

Un communiqué qui ressemble à s’y méprendre à un quelconque tract issue d’une assemblée générale d’étudiants tel qu’il s’en faisait au siècle dernier.

 

C’est en 7 points que l’instance de décision de l’organisation historique des salariés a résumé la situation générale du pays : les Caisses sociales, le pouvoir d’achat, la Loi de finances 2018, l’école publique, les salaires, les privatisations et, en raison de l’actualité, l’émigration clandestine. Visiblement, il n’y a rien à redire sur les préoccupations de la centrale syndicale. Logiques et légitimes. Toutefois, elle en est loin sinon totalement à rebours quand il s’agit d’en dégager les tenants.

Ce ne sont pas  les choix économiques « erronés », ni « les mesures dites réformes structurelles », ni les politiques de « précarisation » de l’emploi qui sont les seules raisons, si tant est que l’on puisse être d’accord sur ces raisons, des déficits abyssaux des Caisses sociales. Le problème des Caisses sociales est plus profond dans la mesure où il tient au système de gestion des régimes sociaux gérés par ces Caisses. L’UGTT ne semble pas avoir compris que le système de gestion par répartition qui régit le fonctionnement de ces régimes a atteint ses limites, que les mesures telles que l’augmentation des cotisations ou l’allongement de l’âge de la retraite ne suffise plus à pérenniser le système, au mieux à retarder l’échéance d’un nouveau déficit. Or, c’est sur ce terrain qu’on était en droit d’espérer une quelconque proposition de la centrale syndicale. Il n'en est malheureusement rien.

 

Aucune logique

S’agissant du pouvoir d’achat, l’UGTT « désavoue l’incapacité du gouvernement à stopper l’érosion du pouvoir d’achat et s’interroge sur son silence face la flambée démentielle des prix ». De quelle érosion du pouvoir d’achat parle-t-on ? L’organisation syndicale ne semble pas avoir constaté que, depuis 2011, l’enveloppe des rémunérations du budget général de l’Etat a augmenté au rythme de 10% en moyenne annuelle alors que l’inflation n’a crû qu’au rythme de 5,5%. Elle ne semble pas avoir observé que, depuis 2011, les salaires dans le secteur privé ont augmenté en moyenne annuelle de 4% environ alors que le taux de croissance réel de l’économie tunisienne n’a augmenté que 1% en moyenne annuelle. On était en droit d’espérer que la représentante historique des salariés ne fasse pas siens ces faux-semblants et qu’elle fournisse de solides propositions pour résoudre le grave déficit des finances publiques et la dramatique détérioration de la productivité. 

La position de la Commission administrative de l’UGTT sur le projet de Loi de finances 2018 est claire. Elle refuse tout accroissement de la pression fiscale. Soit. En revanche, elle ne semble pas effectuer une analyse fine de la contribution fiscale des salariés et des entreprises. Certes, il est vrai que le fardeau fiscal des impôts directs est de plus en plus supporté par les salariés ces dernières années. L’UGTT a fait sienne l’analyse de l’Observatoire tunisien de l’économie qui indique que, depuis 2011, « la contribution des salariés n’a cessé d’augmenter tandis que celle des sociétés pétrolières et non pétrolières n’a plus augmenté ». 

Plus encore, depuis 2014, « la contribution de ces dernières a fortement chuté à des niveaux historiquement bas ». L’UGTT ne semble avoir tiré de ce constat qu’un seul enseignement : on presse les salariés comme des citrons pendant que les entreprises s’en donnent à cœur joie en matière de fraude par sous-déclaration. Quelle courte vue ! La centrale syndicale ne semble pas avoir fait le lien implicite entre les augmentations salariales de ces dernières années et l’augmentation du volume de la contribution fiscale des salaires dans le budget de l’Etat. Elle ne semble pas également avoir fait le lien entre le ralentissement de la croissance économique de ces dernières années et son corollaire sur les bénéfices et donc sur la charge fiscale annuelle directe des entreprises durant cette période. 

 

Soyons sérieux !

La transition est naturellement faite pour aborder un  autre point de la déclaration de la Commission administrative de l’UGTT : les salaires. Est-il raisonnable aujourd’hui de revendiquer des augmentations de salaires en 2018 alors que l’Etat est dans l’obligation de réduire la masse salariale du budget de l’Etat ? Une masse salariale qui atteint des sommets, engloutissant annuellement 40% du budget de l’Etat ou encore 15% des richesses produites annuellement par le pays.  Est-il raisonnable d’alourdir encore la charge des entreprises alors qu’elles sont dangereusement en perte de compétitivité ? Soyons sérieux !

Il convient de l’être d’autant plus lorsqu’il s’agit de l’école et des structures sanitaires publiques. Oui, il faut sauver l’école publique. Oui, il faut stopper la déliquescence qui frappe nos dispensaires et hôpitaux. Mais l’UGTT demeure muette sur les initiatives à engager. L’éducation et la santé n’ont pas de prix. Mais elles ont  un coût que l’Etat, seul, ne peut supporter. L’Etat en tant qu’agent économique consacre 25% de ses dépenses à l’éducation alors que les ménages n’en consacrent que 2,5%. Il n’est nullement question ici d’une quelconque privatisation, mais de constater ce curieux déséquilibre et de tenter de le résoudre. Il en est de même des structures sanitaires publiques. Sur ce plan, on était en droit d’espérer que l’organisation syndicale fasse œuvre de propositions comme par exemple la révision du système d’éligibilité à l’Assistance médicale gratuite (AMG1) et à l’Assistance médicale à tarif réduit (AMG2). Malheureusement, du côté de la Place Mohamed Ali, on ne sembla pas y penser.

 

Sur le dossier des privatisations, le refus de l’UGTT semble total, « une ligne rouge » à ne pas dépasser. Pourquoi ? Au nom de la souveraineté nationale et parce que ces entreprises publiques sont au fondement de l’économie du pays, explique-t-on entre autres. Il semble que la centrale syndicale n’est pas tirée, là aussi, les enseignements de l’expérience des privatisations en Tunisie, ni des déboires actuels de la STIP, afin de savoir raison garder.

L’imagination semble avoir fui les couloirs du siège de la centrale syndicale. La perspicacité intellectuelle aussi. On est réellement en présence de déclarations de café du commerce.

12/10/2017 | 19:00
5 min
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Commentaires (12)

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khaloucha
| 15-10-2017 09:58
Certes il y a beaucoup de choses à reprocher à l UGTT; mais il y a critiques et critiques.Je m explique:nous assistons aujourd hui à une attaque en règle contre l UGTT pratiquée par deux parties différentes à savoir les kwhangias et le patronat:les premiers parcequ ils ont compris que la centrale syndicale est la seule vraie force qui les empèche de réaliser leur sinistre et néfaste projet politique:les seconds parçeque la centrale syndicale se range du coté des travailleurs que les patrons veulent presser comme des citrons et puis les jeter.Et ce qui est marrant dans tout ça c est qu en apparence ces deux parties semblent antagoniques mais en réalités elles sont des alliées objectives;et l article ci-dessus se comprend dans ce sens!!!!!

DHEJ
| 14-10-2017 11:17
Que le GAMIN préconise que son gouvernement est UN GOUVERNEMENT DE GUERRE et non celui de la croissance!

DHEJ
| 14-10-2017 11:12
Merci pour le feedback!

A quoi bon de détailler et d'élaborer les idées sur ce site?


Cetes, que c'est une lieu d'une certaine liberté d'expression mais est-il CONSULTE PAR LE POUVOIR pour s'en inspirer?!

Un pouvoir tenu par les dernies du pays sous l'emprise de quelques familles d'affaires.

Je peux aussi faire le parallèle avec la Chine et son DENG XIAPING, ZHU RONGJI et WU YI... et dont l'actuel président est XI JINGPING! Un Xi ingénieur de formation diplomé de l'université TSINGHUA comme ses prédécesseurs mais à l'avantage qu'il est le fils Xi ZHONGXUN.


Pour revenir à notre croissance dont les moteurs sont:


- La consommation des ménages: Produit local ou produit importé

- L'investissement national et etranger;

- l'exportation ON-SHORE et OFF-SHORE!


Delà j'essaie de classifier les divers ministères en les associant à un des moteurs de de la croissance!


C'est un plan de travail A0 mais qui nécessite un prestigieux bureau méthode et d'ordonnancement pour pouvoir mesurer qui fait quoi.


La croissance ça se travaille!

Cordialement!

CONQUERANT
| 14-10-2017 07:29
Bonjour M. DHEJ
Tout d'abord, merci de vous donner la peine de lire mes commentaires.
Voilà pour la forme.
Au fond, je dirais que vous avez bien raison de dire que mon point de vue est notoirement insuffisant. Cela dit, je n'ai jamais affirmé avoir la science infuse ou prétendre être exhaustif en tous domaines. Loin s'en faut.
Mais, Il n'y a pas de lieu interdit ou de géographie réservée, on peut commenter et discuter pour faire avancer les choses. Dans, cet ordre d'idées la recherche de l'équilibre des comptes publics ou le cantonnement de la dérive budgétaire dans des proportions raisonnables ne doit pas faire perdre de vue la lutte contre la fraude, les procédés mafieux et toutes sortes d'injustices qui, s'ils perduraient nuiraient profondément à toute velléité réformatrice ou thérapeutique économiquement s'entend.

En faisant le parallèle avec l'Argentine, je me suis fait l'écho de ce qui s'écrivait à l'époque à propos de ce pays qui a su inverser la tendance et se redresser. Et, c'est un couple d'avocats "Nestor-qui n'est plus de ce monde-et son épouse Cristina Kirchner qui lui a succédé à la présidence de l'État de 2007 à 2015." Vous savez qu'après ce plan drastique l'Argentine a connu une période faste pendant 10 ans avec un taux de croissance de 8% l'an. Si l'on appliquait les mêmes consignes avec -soyons modestes- un taux de croissance de 4% seulement, dans dix ans le nombre de chômeurs aura sensiblement diminué en Tunisie. Attention il y aura toujours un chômage structurel ou résiduel comme disent les économistes. Comme le risque Zéro le Zéro chômage n'existe pas'Ce sera, toutefois, dans des proportions moindres, je ne dis pas acceptables, car personne n'acceptera une situation de chômeur ad vitam aeternam.
Comment calcule-t-on le taux de croissance à partir duquel l'économie crée des emplois ?
Ce taux de croissance minimum dépend de la productivité de l'économie (NOTRE PROBLÈME EN TUNISIE) : si les salariés d'une entreprise se mettent à produire plus dans le même laps de temps parce qu'ils sont plus efficaces, leur employeur aura besoin d'embaucher d'autant plus si son carnet de commandes se remplit. A l'échelle de l'économie toute entière, une productivité en hausse de 1% sur un an nécessite ainsi une croissance du PIB au moins égale à 1% pour que l'économie crée des emplois. Mais créer des emplois ne signifie pas encore faire baisser le chômage. Une autre variable entre en effet en ligne de compte : la population active. Chaque année, de nouveaux salariés font leur entrée sur le marché du travail et recherchent un emploi.
Il faut donc créer sans cesse des emplois. « En additionnant la hausse de la population active avec celle de la productivité, on obtient le taux de croissance minimum à partir duquel le chômage peut baisser. Quel est le taux de croissance idéal ? La plupart des économistes répondent qu'il doit au moins être égal aux taux d'intérêts.
Voilà, ce que-modestement et sans aucune prétention-je puis avancer.
Et, vous M. DHEJ que proposez-vous en dehors des critiques acerbes, des phrases extrêmement courtes, parfois même décontextualisées ou des points d'interrogation et autres interjections ?

Développez ! Développez ! Faites-nous profiter de votre science; même si, je vous le concède bien volontiers, l'économie n'est pas une science exacte au sens mathématique du terme.
Il faut de la densité pour que le débat propère Monsieur DHEJ.
J'attends votre analyse avec des exemples étayés en 20 lignes minimum.
Dans 30 minutes je ramasse les copies.
Au boulot !

Abel
| 13-10-2017 19:10
Pourquoi la privatisation est considérée comme une ligne rouge par l'UGTT? C'est tout simplement parceque les entreprises publiques constituent une mine d'or pour les syndicalistes en terme de salaires hyper élevés sans le moindre effort (tous sont mis à la disposition du syndicat et n'exercent plus jusqu'à la fin du mandat), en terme de missions à l'étranger pour soit disant en formation ou en réception de matériel, en terme de promotion et d'évolution de carrière souvent non règlementaires,en terme de recrutement de leurs progénitures hors concours...Une fois ces entreprises seront privatisées même en partie, tous ces avantages illicites partiront en fumée !

Salem
| 13-10-2017 12:50
Rien du nouveau tous ça est du cinéma, les syndicalistes étaient en accord avec le principe de l'age de 65 ans de la retraite depuis l'ère de Houcine Abassi
Une réunion dans un hôtel de luxe un porte parole, un PV,du bla bla

DHEJ
| 13-10-2017 11:14
Entre le statique et le dynamique c'est de l'espace à conquérir dans le temps!

Hélas les 3 propositions ne sont pas suffisantes pour sortir le pays de la "crise"!


Hier seulement il a été dit que la balance commerciale avec la Russie est déficitaire!!!


Alors qui sont les importateurs tunisiens??? Idem pour la Turquie ainsi que pour la Chine!!!


Une mauvaise trame est-elle sous l'emprise de nos familles d'affaires???





CONQUERANT
| 13-10-2017 10:34
Je comprends de moins en moins la position de la centrale syndicale qui n'arrête pas de revendiquer des hausses salariales et de poser des lignes Maginot erratiques alors que la situation du pays, ses finances essentiellement, sont dramatiques.
Bien sûr qu'un syndicat est là pour défendre les intérêts de ses protégés lesquels ne sont pas les mêmes que ceux du patronat ou du gouvernement. C'est un lieu commun, un truisme ; voire même une banalité que de le dire. Mais la situation de crise que vit le pays commande que l'on sursoie aux revendications salariales opportunistes et irraisonnées. Non, franchement je ne comprends pas qu'un "partenaire" qui assiste-en sa qualité de signataire de la charte de Carthage aux réunions d'information organisées par le chef de gouvernement, qui connaît de surcroît, l'état des finances publiques mais aussi de la monnaie nationale - soit aussi retors et derechef obtus.
La Tunisie est en quasi faillite déclarée mais l'UGTTT n'en a cure, elle réclame toujours plus. Le spectre de l'Argentine de 2001 (à la suite d'une longue récession (3 ans), d'un fort déficit budgétaire, de la parité peso-dollar et de programmes d'ajustements absurdes, une d'une dette c(K)olossale contractée durant la dictature des généraux 1976-1983 pour l'achat d'armes sophistiquées et de la Grèce de 2015) frappe aux portes de la maison Tunisie.
Grave, très Grave!
Je ne suis pas économiste mais Avocat en droit des affaires sachant lire un bilan comptable. En foi de quoi, il me semble loisible de dire que le sauvetage de la Tunisie doit pouvoir allier trois facteurs déterminants.
1) Il faut solliciter un moratoire d'au moins trois ans pour le règlement de la dette titanesque contractée auprès des bailleurs de fonds. Le chef du gouvernement, s'il le désire naturellement, pourra faire sienne cette magnifique phrase prononcée par l'Argentin Nestor Kirchner, président élu en 2003, à la Tribune de l'ONU « Jamais personne n'a réussi à faire payer une dette à un homme mort ». Une métaphore résumant assez bien la situation de son pays. Nous n'en sommes pas loin. C'était une posture audacieuse face aux créanciers. Qu'il repose en paix.
-2) Une suspension des hausses salariales dans les secteurs public et privé pour trois ans.
-3) Une relance forte et énergique de l'exportation via des incitations fiscales (sous forme de crédit d'impôt) ; notamment de nos produits agricoles très prisés, ici, en Europe. Je viens d'apprendre au hasard d'une lecture médiane que le Maroc est devenu en 2016 l'un des principaux fournisseurs d'agrumes et de tomates pour la Russie, après l'embargo imposé à Moscou par les États-Unis et l'Union européenne. "Conséquence, les échanges commerciaux entre le Maroc et la Russie ont enregistré une hausse de près de 30 % et dépassé, fin 2016, la barre des 2,5 milliards de dollars (2,3 milliards d'euros)."
Lisez « Jeune Afrique » en ligne d'hier et vous constaterez que le premier ministre Russe Dimitri Medvedev qui s'y trouve fait, je cite « le plein de conventions au Maroc »
Dites-moi, si je délire ! Mais nous ne serions pas capables de conclure de telles conventions en lui vendant des oranges, des dattes, de l'huile d'olive, en un mot comme en mille de faire aussi bien que nos amis Marocains ?
Je prétends que nous avons les moyens de faire mieux. Pardon aux susceptibilités que j'effleure involontairement.
YEZZINA MILBHAMA W SOHOT ERRAS !
Basta !

Khneji
| 13-10-2017 10:01
Je ne pense pas que Taboubi et son equipe sont capables d etre les hommes de cette etape tres difficile..., Taboubi et ceux qui l entoure sont habitue's a la politique revendicative soutenue par la pression et le recours aux greves!Ils manquent d imagination et ils sont implique's dans les querelles ideologiques jusqu au cou ! On peut se demander qu est ce que l ugtt a fait au sujet des caisses depuis le 14 janvier? Rien .Au contraire il a participe' a la destruction de l economie par des milliers de greves! Enfin on ne doit pas cacher que le comportement des syndicalistesde l ugtt (Yacoubi,Mastouri,ceux du CHU de Sfax et autres)poussent les gens de fuir de l ecole etatique et de l hopital vers le prive'!Je souhaite que Si Noureddine avoue ces erreursfatales et ne se limite pas a jeter le ballon aux autres.

DHEJ
| 13-10-2017 08:53
Ah quelle formule pour interpréter la conservation de l'énergie???


L'UGTT du café du commerce au TUBE DE L'UGTT!