L'UGTT : parlons-en sans prendre de gants !
Par Karim Baklouti Barketallah
Dans un communiqué, la centrale syndicale se félicite du discours de Youssef Chahed et en même temps se dit contre toute politique d'assainissement des entreprises publiques. L'UGTT qui dit ne pas vouloir participer au gouvernement de Chahed, y place tout de même deux parmi ses principaux leaders mais annonce qu'ils y sont de manière indépendante et qu'ils n'ont rien à voir avec L'UGTT pendant qu'ils sont au gouvernement. Sic!
Depuis 5 ans, toute la classe politique caresse la centrale dans le sens du poil. S'il y en a qui osent l'affronter, comme ce fut le cas pour Said Aïdi, ils se verront sanctionner. Eh oui, l'UGTT est en mesure de faire et défaire les ministres.
Je ne suis pas contre le rôle que joue l'UGTT, mais cette dualité dans le discours et l'action de la centrale syndicale est en train de signer l'acte de décès d'un pays déjà agonisant. Les réformes sont nécessaires, le dégraissement dans la fonction publique comme leur assainissement et leur privatisation, ne serait-ce que partielle, sont indispensables. Le pays n'a plus de ressources. Le peu dont il disposait est en train de se dépérir petit à petit. Usines qui ferment, investisseurs étrangers qui s'en vont chercher ailleurs, phosphate à l'arrêt, ressources naturelles bloquées...
Non, les revendications ne sont pas toutes injustifiées. Bien au contraire ! Mais le pays est en train de payer cher "l'héroïsme" interne des différents responsables régionaux et ceux de la direction de l'organisation. L'UGTT a joué des rôles importants durant toutes les phases essentielles de la construction du pays, y compris pour stopper l'hégémonisme de la troïka et en particulier pour éviter que le modèle sociétal tunisien ne disparaisse par la volonté haineuse de cette société de la part d'Ennahdha. Mais cela ne doit être en aucun cas le prix que le pays aura à payer.
Le bilan de Youssef Chahed a certes donné des éléments de l'ampleur de la crise, mais il est loin d'avoir tout dit. La situation est presque désespérante. Chahed a utilisé le ferme "takachouf" qu'aujourd'hui la centrale condamne. L'austérité, ce n'est pas demain qu'il faudra la mettre en place. Elle aurait dû l'être depuis longtemps.
Aussi, et encore une fois comme l'a dit le nouveau chef du gouvernement, le FMI n'est pas venu vers nous, c'est nous qui l'avons sollicité. Ne nous bandons pas les yeux. La situation est explosive. Le discours de Chahed et, en particulier la manière, ont redonné un brin d'espoir tellement ceux qui l'ont précédé donnaient plus l'air de croque-morts que de gens dynamiques. Mais ce discours et cette équipe gouvernementale inédite sont loin de pouvoir faire face, seuls, à la monstruosité de la mission.
Alors, un peu plus de responsabilité et un peu plus de pitié pour ce pays à genoux.
W ta7ya Tounes ! [ndlr : vive la Tunisie]