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Chroniques
Limogeage, et après ?
08/02/2018 | 18:40
4 min

Chedly Ayari, futur ex-gouverneur de la Banque centrale de Tunisie (BCT), s’attendait-il à une mise à l’écart aussi peu chevaleresque ? Quand bien même aurait-il admis l’idée d’un inéluctable départ, il espérait que cela n’interviendrait pas avant la fin de son mandat, en juillet 2018. Pour cela, il comptait sur un soutien de taille qui, cette fois, lui a fait défaut : le président Béji Caïd Essebsi. Il y a moins d’un an, lors du limogeage de Lamia Zribi, ministre des Finances à ce moment là, pour ses propos sur la dégradation du taux de change du dinar, le gouverneur de la BCT fut également mis sur la sellette. On chuchotait même que le président de la République allait annoncer sa mise à l’écart lors de son discours à la nation le 10 mai 2017. Mais cela ne s’est pas produit. On a tenté d’expliquer, à l’époque, que le chef de l’Etat n’aurait pas pu se résoudre à une telle décision. En effet, les deux hommes se connaissent depuis des décennies. Ils sont de la même génération. Ils ont milité au sein du même parti, le parti du Néo-Destour qui est devenu le Parti socialiste destourien (PSD), puis le Rassemblement constitutionnel et démocratique (RCD). Ils ont fait partie d’un même gouvernement à la fin des années 1960 du président Bourguiba. L’un était alors ministre de la Défense et l’autre ministre du Plan.

 

La pression serait-elle devenue trop lourde à supporter pour que le président Béji Caïed Essebsi lâche « son ami » à seulement quelques mois de la fin de son mandat ? Car, les raisons qui ont conduit le Chef du gouvernement, Youssef Chahed, à proposer la mise à l’écart de l’actuel gouverneur de la BCT, ne sont pas nouvelles. Et le récent vote du Parlement européen d’inscrire la Tunisie dans la liste des pays « non coopératifs » dans la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme n’en est que le prétexte. Car, la gestion de ce dossier est similaire à celui qui a valu au pays d’être inscrit sur la liste des paradis fiscaux de l’Union européenne. Elle s’est caractérisée par une inadmissible désinvolture et un choix argumentaire aberrant. Désinvolture parce qu’on savait que le Parlement européen allait voter le classement de la Tunisie parmi les pays « non coopératifs » sans qu’on ait prévu une quelconque opération de lobbying auprès des parlementaires européens. L’aberration argumentaire réside dans le fait qu’on a sciemment omis, de mettre en avant la décision du GAFI (Groupe d’Action Financière) , de classer la Tunisie non pas parmi les pays à « hauts risques » mais parmi les pays « sous surveillance » jusqu’à la prochaine réunion plénière du Groupe prévu pour la fin de l’année 2018, laissant ainsi à la Tunisie le soin de parachever la mise en place d’un plan d’action qui satisfasse les 40 recommandations et les 10 objectifs prioritaires à atteindre émises par le GAFI. Or, ce plan d’action n’est pas du seul ressort de la BCT. Il fait également intervenir les ministères des Affaires étrangères, de la Justice, de la Défense, des Finances et du Commerce. Aurait-il fallu, dans ces conditions, limoger tous les ministres concernés ?

 

En tout cas, s’il y aurait une raison solide à la mise à l’écart de Chedly Ayari, elle résiderait probablement dans les choix de politique de change de l’institut d’émission. Il y a un peu plus d’une semaine, l’Institut tunisien d’études stratégiques (ITES) a organisé une rencontre sur le thème : « la dépréciation du dinar : causes et conséquences », au cours de laquelle la majorité des intervenants présents, experts et universitaires, ont estimé que l’autorité monétaire aurait dû freiner la dégradation du taux de change par une réduction de son stock de réserve en devises à moins de 90 jours d’importations, sinon le prix à payer serait exorbitant en termes d’impact sur les déficits jumeaux, budgétaire et de paiements courants. La BCT s’y semblerait d’ailleurs résolue puisque les réserves en devises s’établissent actuellement à l’équivalent de 85 jours d’importations et que le taux de change du dinar affiche une relative stabilité vis-à-vis du dollar et de l’euro. La sortie prochaine de la Tunisie sur les marchés internationaux  pour lever un milliard de dollars viendra conforter le stock de devises du pays en attendant que les exportations reprennent des couleurs et que le secteur du tourisme confirme sa reprise.

 

Cela étant, certains estiment pourtant que le limogeage de Chedly Ayari n’est que la résultante d’un marchandage politique. Pour faire plaisir à l’UGTT qui exige son départ parce qu’il a maintenu dans le Mémorandum de politique économique, envoyé au FMI dans le cadre du crédit élargi accordé à la Tunisie, le gel des salaires dans la fonction publique durant l’année 2018. Pour faire plaisir à l’UTICA qui n’a pas accepté la fin de non-recevoir du gouverneur de sa demande d’être associée dans la conduite de la politique monétaire du pays.

 

Pour tout cela, il faudra attendre l’intervention de Chedly Ayari devant les représentants de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP) qui devront, en définitive, décider de son sort. Sera-t-elle aussi brillante que celle de Mustapha Kamel Nabli, son prédecesseur, à travers laquelle il avait mis à nu tous les travers de la politique économique de la Troïka ? Wait, see and listen.

 

 

 

 

08/02/2018 | 18:40
4 min
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Commentaires (6)

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Abidou
| 13-02-2018 04:26
Vous etes Hors Sujet ya Forza ! Vous voulez la politique de l' Autruche . Tout va bien ca va bien, je cache ma tete . C'est tres bien et tres courageux d' avoir demande' a la Gafi de nous Auditer . En effet ca permet de faire ressortir et mettre a NU nos defauts et faiblesses afin de les CORRIGER ET NOUS METTRE AUX STANDARDS DE PAYS EVOLUES . Il faut toujours se mettre en cause pour CORRIGER ET AMELIORER nos actions . Moi JE FELICITE LA GOFI POUR NOUS AVOIR. FOUETTER POUR NOUS REVEILLER DE NOTRE TORPEUR ET SOMMEIL PROFOND DE CERTAINS DE NOS DIRIGEANTS IMMOBILES ET PEUT ETRE INCOMPETENTS . Drole de reaction . Aulieu d' ANNONCER DES DECISIONS COURAGEUSES POUR NOUS CORRIGER , QU'EST QU' ON A FAIT ? On crie au scandale et a la trahison de l' UE . C'est ridicule . C' est VRAIMENT RIDICULE POUR DES POLITIENS DE CIRQUE . A moins qu ' on souhaite maintenir le Systeme pour CONTINUER A EN PROFITER SUR LE DOS DU PAUVRE PEUPLE TUNISIEN . Dans ce cas ARRETER VOTRE CIRQUE ET FERMER LA GEULE DES CLAWOUNS . Continuez votre trajectoire infernale jusqu'a la faillite totale du Pays et cachez votre tete pour , peut etre , une nouvelle Revolution qui mettra tout par terre .

HatemC
| 09-02-2018 19:20
Tu as raison de le remettre à sa petite place ... Le Groupe d’action financière sur le blanchiment des capitaux (GAFI) a pour responsabilité d’établir des normes mondiales de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme... La communauté internationale a fait de la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement terroriste une priorité ... SI on suit le raisonnement de cet imbécile ... la Tunisie doit rester en dehors du monde et de ses règles ... le monde devient un grand village et on doit aussi suivre certaine règles de bonne conduite ... mais c'est connu les islamistes sont tj en dehors des clous .. tu as bien cerné la chose @ ces abrutis ... HC

HatemC
| 09-02-2018 19:02
ce forza est un pro Harak de marzouki il est sur ce site pour dédouaner les harkis de son espèce ... HC

kameleon78
| 08-02-2018 22:57
Tu me rappelles un match de football, où le joueur qui a commis une faute va demander à l'arbitre s'il a vraiment commis cette faute et il s"avère par visionnage vidéo qu'il a vraiment commis une faute et reçoit un carton rouge. Donc ta morale : "Pas vu, pas pris". Dans cette affaire la BCT est fautive, si on ne dit rien, elle continuera à commettre des malversations, donc d'après toi, on ferme les yeux même si Chedly Ayari et la BCT sont hors la loi. Tu as une drôle de conception de la morale politique.

kameleon78
| 08-02-2018 22:43
Toutes ces malversations de la BCT sont d'ordre politique et non économique. Le politique régit l'économique et non l'inverse, c'est le mal profond de la Tunisie : les politiciens doivent s'occuper de politique et non d'économie mais depuis 2011, à cause de ce régime des partis, toute décision au niveau économique ou financier doit être approuvée par une ARP idéologisée, politisée, voire parfois hystérique. A ce stade cela ne marche pas.

Forza
| 08-02-2018 20:53
La faute principale est d'avoir demandé à la Gafi de faire notre audit et je viens de regarder l'interview du ministre des affaires étrangères dans le journal de 20: 00, il s'en sort 1- C'est la Tunisie qui a demandé en 2014 à la Gafi d'analyser nos lois. 2- L'union européenne automatiquement suit les rapports de la Gafi 3- cette demande d'audit par la Gafi est volontaire. Donc la Tunisie se trouve aujourd'hui sur cette maudite liste car elle voulait demontrer la transparence. Les pays qui n'ont pas demandé à la Gafi de les auditer sont laissés tranquilles. La faute de notre gouvernement était de demander cet audit sans être préparés et sans etre sur du résultat. Le gouvernement a mis la réputation du pays et son économie en risque par manque de preparation et par trop d'idéalisme. Il faut cesser de croire que les autres sont des amis. Il faut être plus prudents et cessez de donner de la munition à la commission européenne pour nous attaquer.