Les établissements tunisiens à l'épreuve des citoyens vandales
La violence ne cesse de s’accroître dans notre société. Le plus grave encore, c’est lorsque cette violence touche les établissements publics. Des hôpitaux et des écoles saccagés, des médecins, des paramédicaux, des enseignants et des éducateurs agressés. Retour sur des faits malheureux, mais bien réels.
Le ministre de la Santé, Slim Chaker avait lancé, le dimanche dernier, un véritable cri d’alarme dans le secteur de la santé. Et pour cause, deux hôpitaux saccagés par des citoyens en l’espace de même pas 24 heures. Le service des urgences au Centre hospitalo-universitaire de Sahloul à Sousse a, effectivement, été saccagé par des délinquants en état d’ivresse. Des équipements détruits, un personnel agressé et blessé, tel fût le bilan de cet incident qui a engendré une atmosphère de terreur dans le milieu hospitalier. Le même scénario a été vécu par le staff médical à l’hôpital de Bouhajla à Kairouan, où l’établissement fût vandalisé et le personnel agressé.
Sommé par le chef du gouvernement pour agir dans l’immédiat, le ministre a eu une réaction instantanée empreinte de détermination, mais aussi de colère et d’impuissance. Il s’est rendu au CHU de Sahloul où il a affirmé que le ministère de la Santé et l’Etat ne peuvent plus remplacer les équipements détruits par les citoyens, ainsi que les médecins et le personnel qui quittent à cause des agressions.
« On ne doit plus s’interroger sur les causes du manque d’équipements et sur les motifs pour lesquels de jeunes médecins quittent la Tunisie, pour s’installer dans d’autres pays où ils sont, de loin, mieux valorisés. Il est inadmissible que des gens en état d’ivresse saccagent le matériel et agressent les médecins et les infirmiers », a-t-il indiqué.
C’est aux ministères de l’Intérieur et de la Justice qu’il s’est adressé pour prendre les mesures nécessaires afin de faire face à ces actes de vandalisme et de collaborer avec le ministère de la Santé qui ne peut agir seul dans certaines circonstances. « Tous ceux qui saccagent les hôpitaux, leur unique place est en prison ! », a-t-il signalé.
Cette visite a été suivie d’une série de mesures annoncées dans la même soirée, pour examiner les décisions capables de défendre les établissements publics contre les multiples agressions. On a ainsi décidé l’élaboration d’une loi pour protéger les agents et les cadres de la santé au cours de l’exercice de leurs fonctions, ou encore le renforcement et la consolidation de la sécurité dans les hôpitaux. Il est, également, question de la restructuration des espaces des services des urgences et de la séparation entre les espaces réservés à l’accueil de ceux consacrés aux soins, outre la réhabilitation et la formation des agents d’accueil, pour une meilleure communication avec les patients et leurs accompagnateurs, notamment, dans les situations critiques.
Cela dit, la violence ne touche pas uniquement les hôpitaux. Elle concerne, aussi, les établissements scolaires. Lieux solennels, devant être fortement respectés, nos écoles sont devenues un espace de heurts et de beaucoup d’agressivité. L’affaire de l’enseignante Faïza Souissi, et ce qu’elle a vécu, en dit long sur la situation. Même, s’il s’agit d’un cas médiatisé, il demeure un échantillon représentatif du degré de la brutalité qu’on observe dans les établissements publics.
Faïza Souissi a été malmenée et maltraitée par des parents d’élèves qui l’ont accusée d’athéisme, et l’ont appelée à dégager. L’histoire a même pris une tournure juridique, et les parents d’élèves ont été condamnés à 5 mois de prison ferme.
D’autres crimes sont enregistrés dans les écoles, comme les agressions entre les élèves, la destruction du matériel, les vols des équipements, etc.
Ces établissements et matériel saccagés appartiennent pourtant à ces mêmes citoyens qui les vandalisent. Les dégâts causés seront donc, forcément, réparés avec l’argent du contribuable.
Il est impératif de trouver une solution à ce phénomène qui s’amplifie sans cesse. Des mesures de rafistolage sont souvent prises à la suite de chaque incident, ce qui est loin d’être une solution efficace à long terme. Il s’avère urgent, donc, de mener une enquête sociale permettant de déterminer les origines profondes de ces agissements qui dénotent de contradictions socio-économiques chez une large frange des jeunes Tunisiens.
Certains diront que cette criminalité et cette violence ont toujours existé dans notre société, sauf qu’elles n’étaient assez médiatisées. D’autres estiment, que la faute incombe au sentiment d’impunité qui règne depuis la révolution, réclamant l’application stricte de la loi. En tout état de cause, la violence est un fait incontestable dans notre société qu’il faut décortiquer et auquel il faut trouver les remèdes nécessaires et efficaces.