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Chroniques
Les curieuses hésitations de la BCT
27/04/2017 | 15:59
4 min

Enfin, la Banque Centrale vient de décider d’augmenter de 50 point de base son taux directeur, de 4,25% à 4,75% et de relever le taux de l’épargne dans la même proportion le portant ainsi à 4%. Enfin, car, cette mesure de bon sens aurait du être adoptée voilà au moins deux mois. Les indicateurs économiques et financiers du début d’année alertaient déjà l’institut d’émission sur la nécessité de serrer la vis sur le marché monétaire et implicitement sur celui des changes. Le déficit de la balance commerciale durant les deux premiers mois de l’année annonçait l’inéluctable pression sur le taux de change compte tenu du niveau des réserves en devises du pays. Le choix de la Banque Centrale de privilégier l’option d’une dépréciation du dinar au lieu d’un relèvement du taux  directeur  procédait d’une analyse qui à l’épreuve des faits ne s’est pas vérifiée. En maintenant inchangé son taux directeur, la BCT espérait encore que cela favoriserait l’investissement, garant fondamental d’une croissance durable. Dans le même temps, l’autorité monétaire n’a pas hésité à satisfaire à tour de bras les besoins de liquidités du secteur bancaire pour peu que ces besoins traduisent un appétit d’investissement des entreprises et des promoteurs.

 

Or, la réalité est tout autre. Les crédits octroyés par le secteur bancaire durant l’année 2016 étaient plus destinés à la consommation qu’à l’investissement. Les crédits de consommation accordés aux particuliers par le système bancaire ont augmenté d’environ 300%, passant de 340 MD en 2015 à plus d’un milliard de dinars. Quant aux crédits accordés aux professionnels, ils ont concerné plus les crédits de court terme essentiellement destinés à l’exploitation que les crédits de moyen et long terme qui traduisent l’acte d’investissement. Exemple : le volume des crédits de court terme accordés au secteur industriel a plus que doublé, passant de 0,6 milliard de dinars en 2015 à 1,4 milliards dinars en 2016, alors que les crédits de moyen et long terme ont chuté de moitié, passant de 256 MD à seulement 117 MD d’une année à l’autre. Et ce n’est pas tout. Les crédits de court terme accordés au secteur des services sont demeurés stables durant ces trois dernières années oscillant autour d’un milliard de dinars, crédits dont une bonne partie a servi à gonfler les importations en produits de consommation. Ainsi, l’investissement n’a pas décollé et la consommation n’a pas donné de signe de fléchissement, particulièrement la consommation d’importation. C’est là le résultat de la politique « accommodante » de la BCT. Plus, elle a implicitement favorisé, à tout le moins fait preuve d’indifférence, face à la périlleuse détérioration de la balance commerciale et donc à la dégradation du solde des paiements extérieurs du pays, estimant à tort qu’une dépréciation du taux du change allait freiner le phénomène.

 

Aujourd’hui, la BCT s’est rendue à l’évidence qu’une hausse du taux directeur s’impose. Elle s’impose « pour stimuler l’épargne et renforcer la liquidité », indique le communiqué issu de la dernière réunion du Conseil de la Banque pour expliquer la décision d’un relèvement du taux directeur. Ainsi, l’autorité monétaire change son fusil d’épaule. La décision constitue une invitation aux  banques à booster leur politique de collecte de l’épargne pour satisfaire leurs besoins de liquidités, la BCT n’étant plus en mesure de combler, systématiquement, ces besoins, particulièrement les besoins de crédits de consommation de biens importés. Certes, cette décision va enchérir le crédit, particulièrement le crédit destiné à l’investissement. Cependant, cette tendance peut être tempérée par l’arsenal des incitations et des avantages contenus dans le nouveau code de l’investissement, alors que le crédit à la consommation n’est tempéré par aucun garde-fou, pas même la dépréciation du taux de change et de son effet prix.

 

Imaginons que le relèvement du taux directeur de la BCT soit intervenu un mois plus tôt. Aurait-on vécu la panique ayant saisit le marché de change à la suite des déclarations ou supposées telles de la ministre des Finances sur une valeur de l’euro à trois dinars en fin 2017 ? Car, en fin, si telle serait la situation, la responsabilité n’incombe nullement à Lamia Zribi, ni au ministère des Finances. En revanche, elle doit être assumée au premier chef par Chedly Ayari, gouverneur de la Banque Centrale et Zied Laâdhari, ministre du Commerce et de l’Industrie, compte tenu de leur périmètre de compétence respective.

27/04/2017 | 15:59
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Commentaires (8)

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HN
| 28-04-2017 16:13
Quelle est la relation entre le taux directeur de la BCT et le déficit commercial ?

observator
| 28-04-2017 10:49
ou rien ne pourra être entrepris sans leur accord.

Donc ne pas parler de la corruption et de ses corollaires fait que cet article n'a aucun intérêt concret pour le cas tunisien mais une leçon théorique générale pour ceux qui veulent s'initier à l'économie.
Donc s'en prendre à Ayari et non à ceux qui détiennent les clés c'est à dire ceux qui le contrôle est un non-sens caractérisé pour ne pas dire une duperie.
Ayari participe et exécute, bien-sure, mais n'est pas la cause première.

Il faut arracher l'emprise du système corrompu sur les moyens de l'Etat.
Et cela ne se fera que si tous ces parrains de la corruption sont mis hors d'état de nuire.
Sans cela, le Dinar continue à chuter, la misère à grimper et Tataouine à s'agiter.

observator
| 28-04-2017 10:36
Il parle comme si l'économie tunisienne
est une économie qui évolue normalement
dans un environnement moderne avec ses aélas certes mais une économie qui fonctionne normalement.

Or l'économie tunisienne est une économie essentiellement corrompue où le respect des régles est une exception.
Des bandes organisées ont mis la main sue celle-ci ou rien ne pourra etre entrepris sa% .
Le rer t

Abidou
| 28-04-2017 06:49
Merci ya si Ben Achour pour la qualite' de votre texte . Peut etre il faut d' abord combattre L' IMMOBILISME ET LA ROUTINE pour faire redemarrer le systeme , je ne suis pas economiste ou financier , mais je constate que l' hesitation et le manque de prises de decision sont de plus en plus flagrants . Pourquoi ? Probablement que les hauts responsables ne se sentent pas bien couverts pour prendre des decisions fortes . En effet , la GOUVERNANCE du pays semble SOUMISE A DEUX AUTORITES OU VECTEURS QUI TIRENT CHACUN DE SON COTE' abstention faite de L' INTERET SUPERIEUR DU PAYS . Cet immobilisme destructeur semble s' installer durablement tant qu'il y a 2 Vecteurs sournois qui menent a leurs gres la barque et qui risquent a terme de detruire la baraque .

Alexandre Dumas
| 27-04-2017 19:19
il fallait attendre que le gouverneur termine sa sieste!! On pensait qu'avec une aussi grosse pointure que Chedli Ayari le pays traverserait les tempêtes tant anticipées sans dégâts majeurs alors que la réalité est des plus choquante !! De toute évidence, l'anticipation/proactivité n'est pas son point fort car il nous fait subir les conséquences de sa nonchalance et immobilisme !

N.Burma
| 27-04-2017 19:03
A la satisfaction de HBA, la Banque Centrale a augmenté son taux directeur d'un demi-point et non pas de cinquante points, on l'a compris que les banques doivent payer un taux d'intérêt d'un demi-point de plus pour obtenir les crédits qu'elles demandent au quotidien à la BCT.
Parallèlement à l'augmentation du taux directeur, la rémunération de l'épargne passe à 4 % quand l'inflation officielle est autour de 5 % cela signifie que les épargnants sont grugés d'au moins 1 % sur leurs propres réserves légales et déposées dans les banques. Est-ce que les épargnants vont accepter de se faire plumer, quand ils peuvent se passer du circuit bancaire pour prêter leur épargne par d'autres réseaux et obtenir une rémunération nettement supérieur aux malheureux 4 % que la BCT recommande.
Mais le problème ne serait-il pas de secouer le cocotier tunisien pour réveiller cette majorité de décideurs tunisiens qui somnolent par les facilités de l'importation, par l'ouverture des vannes à destination non pas de l'exportation mais de l'importation et de la consommation aveugle, en particulier de quantités de marchandises importées, marchandises qui peuvent parfaitement être produites sur le sol national à qualité égale et à prix inférieur ?
La politique de la facilité, celle qui consiste à autoriser toutes sortes d'importations, comme si la Tunisie était une grande puissance capable d'absorber et de produire l'équivalent de ses importations est un leurre, doublé d'un faute politique impardonnable parce qu'elle conduit tout droit à la cessation de paiement, à la faillite d'un Etat, à la vénézualition du pays, à la catastrophe annoncée qui plongera le pays dans le désordre et l'anarchie, comme le vivent les Vénézuéliens, c'est ce qui attend les Tunisiens et les Tunisiennes, quoiqu'ils disent et quoiqu'ils fassent, parce que la voie empruntée est à sens unique, elle conduit droit dans le mur.
Aurait-on pu éviter ce désastre ? Assurément oui, en s'attaquant à toutes les formes de la corruption et en livrant une guerre résolue et déterminée contre toutes les formes du marché parallèle qui est un Etat dans l'Etat.
Assurément dis-je, la majorité des Tunisiens du pays, ne veulent nullement en découdre avec le système de corruption qui ravage le pays tout entier.
Tout se passe comme si, l'homme tunisien (et la femme dans les mêmes dispositions) tombe d'un immeuble de trente étages et dans sa chute, jusqu'au cinquième étage, l'homme tunisien se dit que jusque-là tout va bien. Il n'a pas encore réalisé que la chute l'explorera en mille débris.

DHEJ
| 27-04-2017 17:49
Mais c'est quoi cette action sujet de l'hésitation de Chedly AYARI supposé être le GOUVERNEUR?


Ah un GOUVERNEUR sans connaissance de la RÉGULATION!


Il ne faut pas lui en vouloir, il est formaté en mode constitution 59


Mais pour la GAMINE Zribi, alors elle s'enfonce en profondeur pour les fameuses réformes qui datent de 1883 et ne monteront jamais à la pression normale!

vbgdj
| 27-04-2017 17:34
le remède à la maladie économique du pays est simple. Aucune intevention de caractère économique ne pourra avoir un effet sur l'investissement privé donc l'emploi. Cette théorie économique est connue mais elle ne donnera aucun effet parce que le problème de l'économie tunisienne n'est pas technique mais social et politique.La confiance des investisseurs nationaux et étrangers et des bailleurs de fond ne se rétablira que si nous revenons à un Etat laïque,avec des ministres compétents, un régime présidentiel avec un président nationaliste,la réduction des dépenses publiques,la vrai lutte contre les pôts de vin et la contrebande,la récompense du travail et de l'innovation, la fermeté avec les fauteurs de trouble et la mise en oeuvre d'une décentralisation raisonnée et non généralisée.