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Législatives - Le volet socio économique, une priorité sous-estimée
17/09/2019 | 22:00
12 min
Législatives - Le volet socio économique, une priorité sous-estimée

 

Deux jours à peine après le choc des résultats du premier tour de la présidentielle, les partis politiques ont été rattrapés par la réalité : la campagne législative bat son plein. Si certains partis prennent cette campagne très au sérieux, pour d’autres rien n'est moins sûr. Supposés présenter leurs programmes lors d’une rencontre débat, plusieurs partis ont brillé par leur absence. Exactement 7 sur 12 des partis invités se sont désistés, comme si tout était fini avec la présidentielle. De quoi se poser des questions.

 

Présenter leurs programmes socio-économiques était l’objectif de la rencontre organisée, ce mardi 17 septembre 2019 à l’hôtel Sheraton, par le Centre des jeunes dirigeants d’entreprises (CJD) et la Konrad Adenauer Stiftung (KAS). 12 partis politiques ont été donc conviés pour mettre en avant leur positionnement vis-à-vis de problématiques relatives aux aspects socio-économiques en présentant leurs visions et leurs propositions de réformes. Seulement cinq partis ont répondu présents : Al Badil Tounsi, Attayar (Courant démocratique), 9alb Tounes, Afek Tounes (représenté par son président) et Ennahdha (représenté par son SG). Si 3ich Tounsi, Amel Tounes, le Front populaire et le Mouvement Chaab se sont désistés dès le départ, c’est face aux pupitres vides de Nidaa Tounes, Tahya Tounes et le Parti libre destourien que l’assistance s’est retrouvée, malgré la confirmation de présence de ces derniers ! Des absences qui peuvent être comprises comme des programmes pauvres et une appréhension d’être face à un parterre de connaisseurs qu’on ne peut pas duper.

 

Dix questions ont été posées aux représentants des partis qui ont fait le déplacement et chacun a eu 2 minutes pour y répondre, et qui concernent le modèle économique, la digitalisation, la réforme administrative, les exigences du FMI et des partenaires sociaux, l’inflation et le glissement du dinar, les secteurs prometteurs, l’économie parallèle, le développement régional ainsi que le développement durable.

 

Afek Tounes

Pour Afek Tounes, le modèle économique est dépassé. L’Etat est en train de dépenser sur le social mais sans résultat. Le parti propose, ainsi, une meilleure efficacité de l’Etat dans les services sociaux : il veut remplacer la compensation par un revenu universelle de base pour les familles nécessiteuses.

Le parti estime que la digitalisation est la clé de la réussite pour lutter contre la corruption. Il préconise de déployer la fibre optique dans toutes les administrations et en baissant les taxes pour que les familles t entreprises tunisiennes puissent en bénéficier. Pour financer cette digitalisation, Afek propose d’utiliser les actifs non-utilisés de l’Etat sans préciser comment.

En ce qui concerne la masse salarial, Afek considère que le problème est le nombre de fonctionnaire et non pas les salaires. Le parti estime qu’il y a un manque d’efficacité et qu’il faut un leadership et que la fonction publique est devenue un réceptacle de chômage. Il soulève aussi le problème des entreprises publiques et des pertes importantes que l’Etat doit absorber en injectant ponctuellement de nouveaux fonds.

Autre volet, Afek Tounes estime que les recommandations du FMI ne correspondent pas aux besoins de la Tunisie et que la Loi de finances 2018 avec ce qu’elle a décrété comme hausse des droits et taxes a été catastrophique, notamment sur la cherté de la vie et la baisse des investissements. Il préconise une baisse des taxes l’élargissement de la base fiscale.

En outre, le parti estime que tous les tunisiens ont le droit d’avoir un compte en devise, éventuellement plafonné, ce qui permettrait aux artisans de commercialiser leurs produits. Il estime que l’inflation est importée et qu’en renforçant le dinar et les réserves en devise, elle sera résorbée.

S’agissant des secteurs prometteurs, Afek mise sur le tourisme avec le développement du tourisme culturel, la mise en place de l’open Sky ainsi que le développement d’un hub offshore. L’éducation et les énergies renouvelables sont des axes à développer, selon le parti.

En ce qui concerne le marché parallèle, pour le parti, l’Etat peut tolérer certains dépassements de petits commerces mais ne pourra tolérer la concurrence déloyale de l’informel au secteur formel. Il faudra être ferme et appliquer la loi. Il faudra surtout baisser les taxes et impôts pour encourager le secteur parallèle au circuit formel.

Les points saillants du programme socio-économiques d’Afek Tounes est l’éducation et la mise en place d’un ministère qui prend en charge l’enfant dès ses trois ans, la baisse d’impôt et l’équité social avec son revenu universel.

 

Attayar

Pour le Courant démocratique, le modèle économique a atteint ses limites. Le parti prône de développer 5 axes : la Tunisie intelligente (éducation/formation), la Tunisie propre (énergies propres et renouvelables), la Tunisie équitable, la Tunisie créative et la Tunisie forte à travers le respect de la constitution et la primauté de la loi. Le parti ambitionne le passage d’une économie de rente à une économie numérique. Il propose la création d’un guichet unique virtuel et lutte contre la corruption.

Sur un autre volet, le parti considère que le problème n’est pas la masse salariale, mais la faiblesse du PIB. Donc, il faudra augmenter le PIB et mettre fin à la complexité administrative.

S’agissant du volet dépense versus ressources publiques, Attayar se dit contre une politique d’austérité. Il veut miser sur une nouvelle gouvernance des ressources de l’Etat notamment en récupérant les 4 milliards estimés d’évasion fiscal et en intégrant l’économie parallèle dans l’économie formelle.

Pour contrôler l’inflation et le glissement du dinar, le parti estime qu’on doit maitriser le déficit de la balance commerciale, notamment en évitant l’importation arbitraire.

Attayar ambitionne que la Tunisie devient un pôle touristique mondial, avec un modèle qui couvre tout le territoire. Les industries mécaniques, pharmaceutiques, robotiques, technologiques sont des secteurs prometteurs.

Pour lutter contre le marché parallèle, le parti préconise de réserver 20% des appels d’offres publics aux jeunes, une baisse de l’impôt à un taux inférieur à 20% et estime qu’il faudra changer les billets de banque.

Les points saillants du programme socio-économiques sont la transition économique, une transition énergétique et une transition écologique.

 

Al Badil Tounsi

Pour Al Badil Tounsi, le modèle économique s’est essoufflé depuis les années 70 d’où une croissance basse et la productivité médiocre. Il faut retrouver la confiance des citoyens et entreprises ainsi que revoir le rôle de l’Etat notamment dans les politiques sociales, de développement et sectorielles. Une attention particulière doit être accordée à la réhabilitation de l’éducation et une révision des politiques industrielles, de la santé et des services publics.

S’agissant de la digitalisation, le parti prône la simplification des procédures, la décentralisation et la collaboration avec le secteur privé, le tout dans un délai ne dépassant pas une année.

Concernant le volet de la masse salariale, Al Badil veut accélérer la croissance économique, mais admet que l’année prochaine sera compliquée. Il mise sur la mise en place d’un programme de réhabilitation.

Equité fiscale et transparence, avec un système d’information fiable qui traite l’évasion est ce que préconise le parti pour augmenter les ressources, le tout en bien gréant les dépenses. Le parti évoque des préalables et certaines réformes à entreprendre avant d’autres.

Tout en partageant la vision des autres partis présents sur l’inflation et le glissement du dinar, pour Al Badil, il faut que la reprise de la production de phosphate et la chaine chimique associée, qui permettra de récupérer 2 milliards de dinars, le tout en insistant sur la nécessité d’appliquer la loi. Le parti souligne l’importance de renouveler les permis de pétrole et de rappeler que 30% du déficit est énergétique, ce qui permettrait un gain de 1 milliard de dinars. Egalement, le contrôle des marchés pour empêcher la spéculation et le monopole.

Al Badil mise sur une économie de savoir avec la réhabilitation de l’enseignement et la formation, sur le tourisme et sur l’open sky. L’agriculture est un secteur à développer, en misant sur l’irrigation et le doublement de la productivité, ce qui permettra d’augmenter la production et baisser l’inflation.

S’agissant de l’économie informelle, le parti différencie entre petit commerce et informel criminel. S’il prône de la souplesse pour le premier cas, il appelle à l’application de la loi fermement pour le second. Le parti préconise aussi la baisse des impôts et taxes pour encourager le secteur parallèle à intégrer le formelle.

Les points saillants du programme socio-économiques d’Al Badil sont rendre le pouvoir d’achat au citoyen, mettre en place d’une économie de savoir permettant de créer de l’emploi et changer le modèle de développement.

 

Ennahdha

Pour Ennahdha, le modèle s’est essoufflé et il faut le transformer d’un modèle low-cost à un modèle basé sur la valeur ajoutée, l’excellence, l’intelligence et le contenu technologique. L’Etat est épuisé à cause des charges qui pèsent sur lui (masse salariale, entreprises publiques, etc.). Le prochain gouvernement doit miser sur les grands projets notamment un hub aérien plateforme entre l’Europe et l’Afrique ainsi que sur les PME en leur réservant 1 milliard de dinars, l’objectif étant que chacune créé une centaine d’emplois sur les 5 ans à venir pour résorber le chômage. Une attention spécifique doit être réservée aux startups.

La réforme administrative est la première réforme à entreprendre. Le parti prône la mise ne place d’un système d’information intégrée ainsi qu’une commission de digitalisation présidée par le chef du gouvernement. Le financement pourra être fourni par des programmes d’agences de coopération internationales ou par des dons.

S’agissant de la masse salariale et pour la mise en place des réformes nécessaires, Ennahdha propose la mise en place d’un pacte social national de réformes et d’un plan de transformation de l’Etat avec une vision sur 5 ans. Au menu plan de départ et redéploiement de l’effectif selon les besoins des régions.

Ennahdha veut orienter la compensation à ses vrais bénéficiaires, pour une meilleure équité sociale. Intégrer l'informel dans l’économie formelle et faire régner la loi.

Le parti veut miser sur un modèle misant sur l’investissement et l’export pour renforcer le dinar et baisser l’inflation importée. Il faudra aussi renforcer les sources de devises, améliorer le climat des affaires, développer les énergies renouvelables et mieux répartir la compensation.

Pour le parti, la Tunisie doit devenir un hub aérien et un hub de services. Le pays devra construire en PPP un grand aéroport d’une capacité de 20.000 passagers et qui dessert l’Afrique. Ceci passera par la restructuration de Tunisair. Ennahdha prône aussi la mise en place d’un cadre juridique et fiscal adéquat pour faire de la Tunisie un pôle d’excellence comme Singapour ou la Suisse.

Le parti estime qu’il faut mettre en place un plan d’intégration du marché parallèle dans le circuit formel, ceci passera aussi par l’application de la loi et la multiplication des contrôles.

Les points saillants du programme socio-économique d’Ennahdha consistent dans la mise en place d’un contrat gouvernement et d’un système de supervision delivery, captation de compétences et changement du mode de réalisation.

 

Au cœur de la Tunisie

Pour Au cœur de la Tunisie, le modèle doit devenir business ready, prêt à l’investissement et au développement d’affaires. Le parti propose de réviser le système d’investissement avec ses lois et ses procédures, d’orienter les financements vers les entreprises, de réviser la fiscalité en mettant en place une flat tax (impôt à taux unique) en élargissant la base et baissant les taux pour rendre la Tunisie compétitive et de restructurer la compensation et l’orienter vers ses véritables destinataires.

Le parti prône une rupture avec l’état actuel, avec une digitalisation active et complète ainsi qu’une réduction de la bureaucratie. Au menu, identifiant unique et base de données unifiée. Le financement sera fourni par le budget de l’Etat avec une coopération du privé à travers les PPP.

S’agissant de la masse salariale, le parti veut mettre en place un plan de départ volontaire avec des contreparties encourageantes. Il préconise un dialogue économique et de concertation avec la mise en place d’une stratégie dans les 6 mois.

Au cœur de la Tunisie veut revenir à un déficit budgétaire de 3%. Il prône la baisse de la fiscalité et le renforcement de la croissance

La maitrise de l’inflation et du glissement du dinar passe par la mise en place d’une économie d’offre et de demande, avec une montée de l’exportation et du produit national qui mise sur la valeur ajoutée. Le parti propose de réviser le Code du change, de permettre aux Tunisiens l’ouverture de comptes en devise et de supprimer les autorisations et permis.

Le parti recense plusieurs secteurs prometteurs (finetch, composants, logistique, pharmaceutique, biologie, etc.) qu’il faudra encourager avec des taux d’impôt préférentiel et un cadre d’investissement attractif.

Pour Au cœur de la Tunisie, le taux tolérable de l’informel est 15%. Il pense que réformer le Code du change, donner plus de liberté d’entreprendre et la mise en place de formule spécifique pour les zones frontalières peuvent endiguer l’économie informelle.

Les points saillants du programme socio-économiques du parti sont la baisse de la fiscalisation et sa simplification, la suppression des entraves à l’investissement ainsi que la mise en place d’un pacte social, d’une politique contre la pauvreté, le tout en développent l’éducation et la santé.

 

On notera la frustration des jeunes dirigeants estimant que les partis ne sont pas entrés dans le vif du sujet et n’ont pas donné plus de détails, plus de chiffres et plus de données concrètes. Melik Guellaty a martelé pour sa part que les financements et les lignes de financement existent mais ne sont pas accessibles et que le vrai problème c’est les garantie réelle que demandent les banques et qui rendent ces financements inaccessibles. Chafik El Béhi a relevé le problème du manque de productivité pendant 3 mois à cause de la séance unique et du mois de ramadan et appelé les partis à prendre une décision courageuse en supprimant cette mesure archaïque qui date d’une autre époque. Il a également évoqué l’Aleca et ce que cet accord peut apporter à la Tunisie étant bien négocié.

 

La Tunisie fait face à de grands défis. Il est primordial de bien choisir nos élus pour le prochain quinquennat. Ainsi comprendre leurs propositions et leurs programmes devient nécessaire pour définir le visage qu’on veut pour la Tunisie de demain.

 

Imen NOUIRA

17/09/2019 | 22:00
12 min
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Commentaires (6)

Commenter

yasmina
| 22-09-2019 00:39
Merci Imen NOUIRA pour ce resume.
Pour ceux qui ont ont des programmes si semblables au moins sur le principe et grandes lignes (d'ailleurs il n'ont que ca a date) pquoi ils ne depasseraient-ils pas leurs egos et se ne se mettraient-ils pas ensembles au travail pour de vrais et nous presenter quelq chose de plus concret et un gpe uni a elir

DHEJ
| 18-09-2019 10:01
Ils ont les pieds bloqués dans 6 cm d'eau mais les tetes pleines d'autres choses!

DHEJ
| 18-09-2019 09:52
Une Tunisie qui se bloque sous la pluie!!!

Tous de nullards... alors tous comme ceux de la CONRAD!

DHEJ
| 18-09-2019 09:32
Une seule question: Pluies et inondations!

TEB
| 18-09-2019 07:29
Que des généralités qu'on retrouve chez tout le monde... Aucun programme chiffré... La palme de l'hypocrisie revient au président d'Afek: il pointe un problème sur le nombre de fonctionnaire alors en tant que ministre de transport, il a plombé Tunisaire en augmentant considérablement les effectifs sans aucune valeur ajoutée...