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Chroniques
Le paradoxe tunisien : Un pays sans majorité effective ni opposition réelle
22/02/2015 | 18:21
3 min

Les événements de cette semaine ont mis à nu un paradoxe typiquement tunisien : le pays ne dispose ni d’une majorité effective, ni d’une opposition réelle. C’est la conséquence d’un système politique hybride mis en place et dit système parlementaire aménagé qui repose sur une loi électorale et un mode de scrutin trop compliqués pour traduire fidèlement la volonté des citoyens votants.

 

 La marche contre le terrorisme organisée dans la capitale samedi fut un exemple de l’échec de l’alliance contre nature entre le Nidaa et Ennahdha. Cette marche organisée par Nidaa a vu la participation des militants d’Ennahdha. Du coup, elle n’a pu rassembler les milliers de Tunisiens eux aussi farouchement opposés au terrorisme mais qui ne se voient pas marcher derrière Ennahdha et Nidaa réunis, du moins pas encore. Jusqu’à quelques mois encore,  ils avaient pris l’habitude de descendre dans la rue pour dénoncer le terrorisme et stigmatiser Ennahdha pour son laxisme envers ce phénomène. Leur demander aujourd’hui de descendre pour dénoncer le même phénomène à coté des militants d’Ennahdha n’est pas mobilisateur ni encourageant. Ils se sont contentés alors de regarder passer la marche, nonchalants et indifférents comme ils l’étaient jadis envers les manifestations organisées par le parti au pouvoir.

 

Les militants du Nidaa étaient de leur côté aussi mal à l’aise et  indisposés lors de cette marche de se retrouver à coté des militants nahdhaouis. C’est que sur le terrain, ils sont trop différents les uns des autres. Les accords politiques savamment conclus entre les dirigeants des deux partis ne changeront rien à cette réalité du terrain. Ce ne sont que des accords politiques pour permettre au nouveau gouvernement de coalition d’avoir une majorité confortable au sein du parlement sans plus. Sur le terrain, les événements du sud ont montré que cette alliance n’est pas effective. Les dirigeants d’Ennahdha étaient sur place, pas pour défendre le gouvernement mais pour faire cavaliers seuls. L’avenir nous dira si cette coalition est avantageuse pour la paix et la stabilité du pays ou si elle n’a fait que servir les intérêts des politiques et retarder les échéances.

 

Du côté de l’opposition, les choses ne vont guère mieux. On savait qu’à l’issue des élections législatives l’opposition au sein du nouveau parlement serait faible. On sait maintenant à l’issue des élections des commissions, surtout celle des finances, au sein de l’ARP que l’opposition ne sera pas effective. En effet, un bloc parlementaire opposant s’est constitué à la hâte pour devenir le groupe  parlementaire principal de l’opposition. Visiblement, sa constitution avait pour principal objectif de barrer la route au Front populaire et l’empêcher de décrocher la présidence de la commission des finances. 

 

Bien sûr que dans le jeu politique, cette manœuvre est légitime et de bonne guerre. Bien sûr aussi que les dirigeants du Front ont très mal manœuvré depuis quelques mois, donnant l’impression d’un groupe politique désuni cherchant à préserver sa cohésion interne par la prise de positions excessives, radicales et improductives. Mais il est clair aussi que ce premier groupe parlementaire de l’opposition, nouvellement constitué a été soutenu et encouragé par Nidaa et Ennahdha pour  le récompenser et punir le Front pour ses positions antérieures notamment lors des négociations autour de la composition du gouvernement.

 

Le résultat, c’est que les représentants de l’opposition au sein de l’ARP ne représentent pas réellement l’opposition. Le résultat aussi que l’opposition parlementaire qui représente à peine moins de dix pour cent des sièges sera incapable de jouer son rôle ce qui est préjudiciable au projet démocratique mais surtout à la stabilité du pays. Tout porte à croire en effet que l’expression de l’opposition ne se fera pas malheureusement sous l’hémicycle mais ailleurs sur la scène publique et sociale. Ceci est loin des objectifs des dernières élections. Mais c’est un autre paradoxe tunisien.         

22/02/2015 | 18:21
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Commentaires (21) Commenter
Vous ferez mieux d'aller voir ce lien
DIEHK
| 26-02-2015 15:22
Avant de philosopher sur le sexe des anges M !!!
Les Tunisiens ont une très bonne opinion de vous,alors ne les décevez pas.


http://www.tunisie-secret.com/Abdelhakim-Belhadj-chef-de-Daech-en-Libye-democrate-musulman-en-Tunisie_a1347.html
Pauvre Tunisie
Bahr
| 25-02-2015 10:10
C'est malheureusement tout le pays qui en miettes et totalement désuni. La Tunisie d'aujourd'hui ressemble à un puzzle géant de 11 millions de pièces. Chaque pièce a une taille et une rondeur propre à elle. Onze millions de pièces qu'aucune main habile n'a su rassembler ses fragments découpés pour reproduire un sujet complet ou même une partie d'image claire.
Mais le pire n'est pas le puzzle que nous sommes, ni nos partis en lambeaux, c'est surtout, le seul contre parti disposant de la plus grande force sur le terrain politique, non pas par sa démocratie ou sa bonne gouvernance mais par son système interne de gestion, un système purement dictateur et qui, sur terrain, se ressource cette déchirure sociale et de la violence encaissée au fond des citoyens suite à de longues années de frustration. Le partie Nahdha sera, hélas, le seul bénéficiaire de cette déchirure sociale et politique.
Pour combien de temps cette alliance tiendra?
ta-nit
| 24-02-2015 19:42
Une analyse complète de la situation, surtout la fin. L'état de l'opposition, si on peut l'appeler comme ça, est inquiétant.
Plein dans le mil
barka
| 24-02-2015 11:42
belle analyse et belle photo.
bonne continuation
Premier test de popularité pour l'alliance contre nature
Rachid Barnat
| 24-02-2015 09:34
LE FLOP DE LA MARCHE CONTRE LE TERRORISME : Une occasion pour les tunisiens pour contester l'alliance contre nature de Nidaa avec les Frères musulmans !

Et si le Front Populaire se voit de plus en plus marginalisé, il le doit à sa radicalisation.
Ce qui conforte le régime bâtard voulu par les Frères musulmans, qui se met en place par petite touches !
Enfin revoilà le fameux chrotumeur de la presse tunisienne
Fethi
| 23-02-2015 20:26
Depuis la formation du gouvernement , le fameux chroniqueur n'a pas sifflé un mot . Certes surpris de voir Nidaa appeler a la coalition avec Ennahdha. Finalement , il retrouve l'écriture pour parler d'Ennahdha. Voilà un chroniqueur prisonnier d'une " tumeur" au nom d'Ennahda qu'il cherche à éradiquer a coup de stylo mais en vain. Les mots sont pour décrire ou commente la réalité mais jamais pour faire partager avec le lecteur ses phobies et maladies.
la déception de l'opposition
Zied
| 23-02-2015 20:14
le FP aurait pu jouer un grand rôle dans le gouvernement mais il a préféré rester dans l'opposition. maintenant il n'est ni dans le gouvernement ni dans l'opposition et sera bientôt oublié comme les partis qui ont fait de mauvais calculs.
Effets pervers de la Combinazione à l'italienne
kameleon78
| 23-02-2015 16:44
A mon avis cela ne pourrait pas durer longtemps cette situation ambiguë avec une majorité artificielle et une opposition introuvable. Suite à ce constat peu reluisant, cela finira par de élections anticipées car le peuple veut qu'on gouverne selon ses désirs et non de ceux qui ont été élus par son bulletin de vote. On assistera auparavant à des phases de crise successives où les gouvernements vont se composer et se décomposer selon l'humeur des dirigeants de parti, bref les effets les plus pervers de la Combinazione à l'italienne. Il ne manquerait plus que Silvio Berlusconi demande la nationalité tunisienne et vienne siéger à l'assemblée du peuple, il sera le bienvenu.
@DHEJ
tounsia2
| 23-02-2015 13:48
Bonjour DHEJ,
Je vous remercie pour le tuyau, je n'aurais jamais trouvé toute seule ; Ceci étant, je trouve que le bon sens du "GÉNIE du PARADOXE", comme vous l'avez qualifié, n'est pas toujours accessible aux communs du mortelles, alors je me console en me disant "qu'il sait ce que nous ne savons pas", histoire d'éviter les ennuis avec "Lui". . .
LE PARADOXE EST COURANT
bouglagem
| 23-02-2015 13:30
Le paradoxe n'est pas un deni de quoique
se soit.Ca fait partie de la nature
humaine.Il en est de même pour la
contadiction.Nous sommes souvent
en contradiction avec nous même avec nos idées,nos relations avec les autres
nos idées politiques etc etc
Dernièrement la loi Macron en France
n'a pas obtenu l'accord de tous les députés socialistes ce qui a obligé Valls a utilisé le fameux 49/3
pour la faire passer
Les journalistes en contradiction
permanente sans que que personne ne s'en émeuve.Et puis comme vous le savez la "vérité" d'aujourd'hui n'est forcément celle de demain