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La Tunisie organise une élection présidentielle paisible et bien gérée, et consolide davantage sa transition démocratique
26/11/2014 | 09:10
7 min
La Tunisie organise une élection présidentielle paisible et bien gérée, et consolide davantage sa transition démocratique
Ce 23 novembre, les Tunisiens ont participé à des élections honnêtes et compétitives lors du premier tour de l’élection présidentielle tenue dans le cadre de la nouvelle Constitution. Cette élection consolide davantage la transition démocratique de la Tunisie après une période transitoire longue et parfois controversée. La Tunisie reste unique dans le monde arabe de par sa transition politique poursuivie par des moyens démocratiques après la révolution de 2011, et elle vient maintenant d’organiser deux élections réussies et bien gérées en l’espace d’un mois.

« Je félicite le peuple tunisien pour sa participation enthousiaste à cette étape importante dans sa transition vers un Etat démocratique. Il a renouvelé notre croyance qu’il est possible de tourner la page sur la dictature et d’organiser une élection démocratique vibrante lorsque les citoyens et tous les acteurs politiques travaillent de concert, » a déclaré Mary Ann Peters, directrice du Centre Carter et ambassadeur à la retraite.

Dans une déclaration préliminaire publiée aujourd’hui par le Centre Carter, les observateurs électoraux ont signalé que, bien que les préoccupations sécuritaires aient signifié une augmentation des forces de sécurité à travers le pays le jour du scrutin, l’élection s’est déroulée dans une atmosphère calme et paisible. Le vote et le dépouillement ont été qualifiés de très positifs par les observateurs du Centre Carter, qui n’ont constaté que quelques irrégularités techniques mineures, relatives à l’absence d’explications adéquates aux électeurs et à celle de procès-verbaux pour l’ouverture des bureaux de vote.

Le processus de compilation des résultats ne s’est déroulé de manière ni uniforme ni transparente dans aucun des centres de compilation observés, et dans certains d’entre eux les équipes du Centre Carter n’ont pas pu observer de manière satisfaisante le processus du fait de la configuration du centre qui les éloignait des opérations. Le Centre Carter encourage l’ISIE à prendre des mesures pour améliorer cet accès dans les prochaines élections, y compris lors d’un éventuel deuxième tour, afin que les observateurs puissent évaluer de manière efficace ces aspects essentiels du processus.


Parmi les principales conclusions de la mission d’observation du Centre Carter on trouve les éléments suivants :

• L’administration des élections : L’Instance supérieure indépendante pour les élections (ISIE) doit être félicitée pour avoir tiré les enseignements des élections législatives avec les acteurs concernés, afin de corriger les insuffisances et répondre aux préoccupations des parties prenantes. En raison du délai très court entre les deux élections, la plupart des étapes procédurales prévues par le cadre juridique et réglementaire ont été retardées, et certains candidats à l’élection présidentielle se sont plaints du fait que l’ISIE n’a pas exercé sa pleine autorité pour appliquer les règlements de la campagne ou prévenir les violations.
• L’inscription des électeurs : L’inscription des électeurs, qui a eu lieu avant les élections législatives et présidentielle, a offert aux citoyens intéressés la possibilité de s’inscrire pour voter. Après les élections législatives, l’ISIE a donné pendant une semaine l’opportunité aux électeurs inscrits qui n’avaient pas trouvé leurs noms sur les listes électorales pendant les élections législatives, de les réinsérer pour l’élection présidentielle. Seuls les électeurs qui s’étaient inscrits activement pour les élections législatives ont été autorisés à demander à être réinsérés.
• Le cadre juridique : Bien que le cadre juridique applicable à l’élection présidentielle tunisienne soit disséminé dans plusieurs documents, il est généralement conforme aux normes internationales relatives à des élections démocratiques. Néanmoins, un certain nombre de dispositions gagneraient à être améliorées ; il s’agit en particulier des limites au droit de vote des militaires et des forces de sécurité, ainsi que des personnes se trouvant dans des établissements médicaux ou pénitentiaires, et dans des centres de détention, de l’établissement de calendriers adéquats pour les différentes étapes du processus électoral, ainsi que des restrictions sur la campagne et le plafond des dépenses.
• La participation des observateurs et des représentants des candidats : Les organisations tunisiennes de la société civile et les partis politiques sont activement participé dans l’observation du processus électoral et ont déployé plus de 90000 observateurs le jour du scrutin. Certains partis politiques se sont plaints du fait que l’ISIE aurait tardé pour livrer les accréditations aux représentants des candidats à l’étranger, empêchant leur déploiement à temps. Les représentants des candidats étaient présents dans 94% des bureaux de vote observés, et les observateurs domestiques dans 64% d’entre eux.
• Le processus d’enregistrement des candidats : D’une manière générale, le processus d’enregistrement a été inclusif, et a permis l’enregistrement d’un ensemble éclectique de candidats. Vingt-sept d’entre eux ont été confirmés par l’ISIE. Quarante-et-un ont été rejetés pour non-conformité aux conditions légales de l’enregistrement des candidats.
• La campagne : Pour la première fois, le processus électoral tunisien a offert aux citoyens un choix réel parmi un groupe diversifié de candidats. La liberté d’expression et le droit de réunion et d’association ont été respectés durant toute la période de la campagne électorale. Les résultats des élections législatives ont eu un impact sur les stratégies de campagne de nombreux candidats, menant au retrait de la course présidentielle de cinq d’entre eux. Plusieurs candidats n’ont vraiment commencé à faire campagne que pendant les dix derniers jours de la période officielle de campagne.
• L’éducation civique et l’information des électeurs : L’ISIE a mis en place un programme d’information des électeurs pour les élections présidentielles dans le prolongement de la campagne pour les élections législatives. Malheureusement, elle ne s’est pas tournée vers d’autres acteurs pour organiser des activités de sensibilisation à plus grande échelle. Cela aurait pu donner lieu à une campagne d’éducation électorale plus efficace.
• La participation des femmes : Alors qu’il n’y avait qu’une seule femme parmi les 27 candidats à l’élection présidentielle, les représentants du Centre Carter ont noté qu’il y avait un bon équilibre des genres parmi les assesseurs et les électeurs au sein des bureaux de vote observés, et que les femmes représentaient 56% des observateurs domestiques. En revanche, seul un président de centre de vote sur quatre était une femme.
• Le contentieux électoral : Malgré les courtes périodes affectées aux recours et aux appels pour l’enregistrement des candidats à l’élection présidentielle, le tribunal administratif a réussi à traiter les plaintes électorales dans les délais prévus par la loi. Le tribunal administratif a adopté une approche consistante dans l’examen des faits et l’interprétation de la loi et a fait preuve d’impartialité et de respect quant à l’application de la procédure équitable dans ses décisions.
• Les requêtes en premier et dernier ressort : La loi électorale prévoit des mécanismes efficaces qui garantissent le droit de recours. Toutefois, contrairement aux normes et principes internationaux, la loi ne permet pas aux électeurs de déposer des recours pour d’éventuelles fautes professionnelles ou des irrégularités au sein des bureaux de vote, ni de contester les résultats des élections auprès des tribunaux.
• La sécurité : Le ministère tunisien de l’Intérieur avait mis en garde contre la menace potentielle de terrorisme dans le but de perturber l’élection présidentielle. Le scrutin a eu lieu sans incidents majeurs. Bien que la présence des forces de sécurité ait été renforcée pour les élections présidentielles, elle n’a pas été perçuepar les observateurs du Centre Carter comme intimidante ou comme un élément perturbateur dans le processus de vote.

Contexte : Le Centre Carter était accrédité par l’ISIE afin d’observer les élections et a déployé, à cet effet, 85 observateurs qui ont visité 380 bureaux de vote et centres de compilation des résultats dans l’ensemble des 27 circonscriptions de Tunisie. La mission a été dirigée conjointement par Hina Jilani, avocate auprès de la Cour Suprême et militante des droits de l’homme pakistanaise, Audrey Glover, avocate des droits de l’homme et ambassadeur britannique, et l’ambassadeur Mary Ann Peters. Plus de 26 nationalités différentes étaient représentées dans la délégation. L’observation des élections présidentielles en Tunisie était la 99èmemission internationale d’observation du Centre Carter.

Le Centre est présent en Tunisie depuis 2011, et a observé les élections de l’Assemblée nationale constituante en 2011, ainsi que le processus d’élaboration de la constitution qui a abouti à l’adoption de cette dernière en janvier 2014. La mission d’observation électorale a été lancée en juin 2014 avec le déploiement de dix observateurs de longue durée à travers le pays ainsi qu’une équipe d’experts basée à Tunis. Le Centre demeurera en Tunisie pour observer le processus final de compilation des résultats ainsi que la phase de contentieux électoral. Une mission d’observation sera également envoyée pour un éventuel deuxième tour à la fin de décembre.

La mission d’observation du Centre Carter en Tunisie a pour objectif de fournir une évaluation impartiale de la qualité du processus électoral, de promouvoir un processus inclusif pour tous les Tunisiens et de manifester son appui à la transition démocratique. L’évaluation du processus électoral se fait sur la base du cadre juridique national ainsi que des obligations internationales de la Tunisie relatives à la tenue d’élections démocratiques réelles.

La mission d’observation du Centre Carter est menée conformément à la Déclaration des principes pour l’observation internationale électorale ainsi que le Code de Conduite adopté par l’ONU en 2005 et entériné actuellement par 49 organisations.

26/11/2014 | 09:10
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