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Chroniques
La rupture Gouvernement-UGTT serait-elle déjà consommée ?
12/04/2018 | 15:59
4 min

Par Houcine Ben Achour 

 

Fallait-il être sorti de la cuisse de Jupiter pour deviner les réels tenants de la Conférence nationale sur les grandes réformes organisée, mercredi 11 avril 2018, par la Présidence du gouvernement ? Elle était prévisible compte tenu de la campagne médiatique lancée récemment par le gouvernement sous le slogan « Nehb Nkadem » en mode texto ou « Je veux avancer » pour emprunter un langage plus châtié. Or, ce n’est pas tant la démarche qui importe que ses visées politiques.

 

Ainsi, au moment où les signataires de l’Accord de Carthage ont engagé un processus d’évaluation du rendement du gouvernement et surtout d’élaboration d’une nouvelle feuille de route, voilà que Youssef Chahed anticipe et présente sa propre feuille de route qui n’est autre que celle qu’il a défendu récemment devant l’Assemblée des représentants du peuple (ARP).

Certes, « la Conférence nationale sur les grandes réformes n’est pas une alternative au processus de dialogue entre les parties signataires de l’Accord de Carthage », a indiqué le Chef du gouvernement. Elle n’en est pas le prolongement, non plus. Ni le complément, d’ailleurs, même si Youssef Chahed défend ce point de vue. Elle n’est en fait qu’une réappropriation par le gouvernement des thèmes sur lesquels planche la commission créée par les signataires de l’Accord de Carthage pour établir la fameuse nouvelle feuille de route : les Caisses sociales, la fonction publique, les entreprises publiques et le financement de l’économie.

Or, l’UGTT a refusé de s’associer à la discussion sur les sujets de la réforme de la fonction publique, des Caisses sociales et des entreprises publiques arguant du fait que ces sujets sont du ressort exclusif du gouvernement et de l’UGTT et non des signataires de l’Accord de Carthage.

En revanche, la centrale des salariés a participé à la discussion sur le financement de l’économie. Mais seulement pour annoncer qu’il serait hors de question d’envisager une quelconque privatisation comme cela semble se profiler pour la Banque de l’habitat (BH).

 

La Conférence constituait-elle le moyen le plus subtile pour ramener l’UGTT à de meilleurs sentiments ? Visiblement, le gouvernement l’espérait. A moins qu’il chercherait à jauger les prédispositions de la centrale syndicale à son égard. Il en fut vite fixé dans la mesure où  l’UGTT a décidé de boycotter la Conférence. En toute logique dès lors  qu’elle aborderait les problématiques  des Caisses sociales, de la fonction publique et des entreprises publiques. En toute logique politique dès lors que raison invoquée par l’organisation syndicale d’avoir été invitée au dernier moment n’est en réalité qu’un faux semblant, un puéril prétexte qui cache mal son objectif de se débarrasser de ce gouvernement qui ose toucher à ses intérêts quand bien même ils contreviendraient à l’intérêt général.

Youssef Chahed n’a d’ailleurs pas hésité à répliquer lors de l’ouverture de la rencontre. « Je voudrais être clair. Autant nous avons foi dans les vertus du dialogue, autant nous considérons que l’intérêt du pays ne peut s’accommoder du moindre retard. En conséquence, l’Exécutif assumera ses responsabilités au cours des semaines et mois à venir pour progresser dans la voie des réformes car les défis auxquels nous faisons face et le sauvetage des finances publiques auquel nous sommes confrontés sont tributaires de mise en œuvre de ces réformes dans les plus brefs délais, sachant que nous ne pouvons satisfaire tout le monde, sur tous les sujets. Aujourd’hui, je ne vais mettre en avant que l’intérêt de la Tunisie. C’est ma mission et je m’en acquitterais », a indiqué en substance le Chef du gouvernement. Il persistera encore en fin de discours en soulignant que « si nous respectons le choix de l’UGTT de ne pas participer à cette rencontre, nous en sommes aussi navrés ; navrés car nous demeurons toujours attachés au principe du dialogue comme voie idoine aux réformes et considérons que l’UGTT reste un partenaire  avec lequel nous poursuivrons les concertations, sur la base de la responsabilité et de l’intérêt national, avant toute chose ». 

 

La rupture serait-elle consommée ? En tout cas, les canaux de communication entre le gouvernement et l’UGTT marquent un rétrécissement conséquent sans que, pour autant, il faille envisager l’épreuve de force. En tout cas, le gouvernement semble avoir marqué un point en ayant pris à témoin, à travers les travaux de la Conférence, les principaux acteurs politiques, économiques et de la société civile, quant à la volonté des responsables de la centrale syndicale d’imposer leurs seuls choix. Une manière, somme toute, pour le gouvernement de signifier que si une épreuve de force est engagée, elle ne serait le fait que de la seule UGTT. Sombres perspectives qui rappellent un sombre passé, il y a de cela quatre décennies. L’histoire ne serait-elle qu’un perpétuel recommencement ?

 

 

 

   

12/04/2018 | 15:59
4 min
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Commentaires (4)

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Nestor
| 13-04-2018 12:59
Ce syndicalisme politisé destructeur sans limite est un grand Mal de notre pays.Il est temps de l'iradiquer à jamais.On encourage leur sale Besogne : les grèves interminables par le fait que journées de grève chômées et PAY'?ES, qui dit mieux . D'?DUIRE du SALAIRE toute journée de grève est une nécessité absolue.On ne peut pas avoir le beurre et l'argent du beurre.on évitera l'encouragement des salariés à l'oisiveté créé par ces pseudo syndicalistes qui seraient manipulés par des partis politiques ?

Nephentes
| 12-04-2018 17:34
Apres avoir été la locomotive de l"émancipation du peuple tunisien et de ses revendications; cette institution semble éroder sans cesse sa légitimité historique

Il ne se passe pas une semaine sans que l'actualité politico-syndicale ne nous pousse à nous interroger sur le rôle de l'UGTT dans la Tunisie d'après la 'révolution'?' du 14 janvier 2011.

La régression effarante de la productivité par habitant est directement imputable à l"UGTT, La dégradation de l"attrait de la destination Tunisie pour les investisseurs aussi,Le blocage des réformes macroéconomiques vitales pour l"avenir du Pays, aussi

Nous sommes passé d'une tutelle de l'?tat sur l'UGTT,dans le passé, à une tutelle de l'UGTT sur l'?tat, après 2011.Ce n'est pas parce que la conjoncture actuelle lui accorde une position de force l'autorisant à accorder sa baraka à des alliances partisanes ou à un gouvernement, qu'elle doit s'instaurer en gestionnaire et arbitre du jeu politique national.

Il y a actuellement une véritable perversion dans le fonctionnement interne de l'organisation syndicale.

Certains syndicalistes et dirigeants de fédérations ou régions qui ont des sympathies pour un parti d'opposition - le FP - ne vont pas hésiter à mobiliser leurs troupes, non pas pour la satisfaction des revendications de leurs mandants, mais en vue de contester et le Pacte de Carthage et le Bureau Exécutif de l'UGTT.

Les dérives telles que le clientélisme, l'opportunisme et le népotisme devraient faire partie de l'histoire passée de l'UGTT pour qu'elle ne devienne pas ainsi une proie facile pour tous ceux qui rêvent de la bâillonner et de la domestiquer.

Rationnel
| 12-04-2018 17:31
"...une épreuve de force est engagée, elle ne serait le fait que de la seule UGTT. Sombres perspectives qui rappellent un sombre passé, il y a de cela quatre décennies. "

L'UGTT a perdu les confrontations de 1978 et va perdre les prochaines confrontations encore plus dramatiquement, ça sera un coût fatal pour cette organisation. En 1978 était le seul syndicat, maintenant on a des alternatives. En 1978 les sociétés publiques n'étaient pas déficitaires et fournissaient encore des services et produits utiles pour l'économie, l'enseignement était de qualité. Toutes les sociétés publiques sont déficitaires et représentent un frein pour l'économie, la STAM coute plus de 1,6% du PIB et dont les agents recoivent des compensations les 8 milles dinars par mois (65 millions de dinars pour 800 agents) . Le revendications de syndiques n'ont rien de syndical et sont devenus des chantages pour l'obtention de plus d'avantages qui ne sont pas offerts au reste de la population. Les professeurs de mandement la retraire a 50 ans, les instituteurs exigeants des bourses universitaires pour leurs enfants, c'est ridicule. L'enseignement public est devenu inutile, un grand nombre d'élèves abandonnent l'école (100 mille /an), 65% de ceux qui finissent leur scolarité ne maîtrisent pas les notions de bases, et la majorité des diplômés d'université n'arrivent a trouver des emplois et sont mal adaptes au marche du travail.
L'UGTT a 750 milles membres, la population active est de 3,4 million, et le nombre de chômeurs est au moins 500 milles. L'UGTT ne représente que les intérêts syndicaux de 6,8% de la population. L'UGTT n'a pas un droit de veto sur les reformes.