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« La fin du secteur de la sidérurgie en Tunisie ! »
19/04/2017 | 19:59
5 min
« La fin du secteur de la sidérurgie en Tunisie ! »

 

Le projet de loi prévoyant la réduction de la taxe appliquée sur l’exportation des déchets ferreux vient d’être adopté par le Parlement. Il suscite toutefois les interrogations de députés craignant « la fin du secteur de la sidérurgie en Tunisie », mais aussi accusant l’Etat de vouloir « se désengager du secteur stratégique de la ferraille ». Des accusations qui viennent à l’heure où l’Etat décide de la privatisation partielle de la société El Fouladh, détenant le monopole dans le secteur économique stratégique de la sidérurgie, au profit d’un groupe italien. Une cession qui se trouve, elle aussi, fortement critiquée.

 

L’assemblée a adopté lors de la plénière du mercredi 12 avril la loi n°50 /2016 prévoyant la réduction de la taxe appliquée sur l’exportation des déchets ferreux. 95 députés ont voté pour alors que 19 ont voté contre. Les 14 autres présents à la plénière se sont abstenus. Cette loi prévoit la réduction de la taxe sur l’exportation de la ferraille (connue sous le nom de Khorda) de 270DT à 90DT par tonne, exception faite des déchets en inox. Elle prévoit également la réalisation d’une opération d’exportation d’une valeur de 125 mille tonnes de déchets ferreux qui sera placée sous la supervision du ministère de l’Industrie et du Commerce, dirigé par Zied Lâadhari. La loi permet, en outre, à la Société tunisienne de sidérurgie El Fouladh (Société Tunisienne de sidérurgie) d’exporter, en 2017, 75.000 tonnes de déchets ferreux contre 50.000 tonnes pour les collecteurs privés de ferraille [ndlr. Barbacha].

Si cette loi est passée inaperçue dans les cercles de débats, elle a suscité l’indignation de plusieurs députés qui ont vite fait de réagir pointant du doigt « les mafias de la ferraille » et les « lobbies de la corruption ». Parmi eux, le député Al Horra, Sahbi ben Fredj s’est particulièrement intéressé à ce sujet. Sur sa page Facebook,  il a écrit, hier, une lettre ouverte à la présidence du gouvernement l’exhortant à « sauver la société El Fouladh » proposant des solutions afin de sauvegarder ses 1200 emplois et d’en recruter 300 autres.

Dans une autre publication, il a dénoncé « une renonciation de l’Etat à son stock de ferraille, qui est considéré comme la matière première à la fabrication de l’acier […] et ce à des prix dérisoires, pour ensuite le racheter plus cher », notamment à l’heure où l’Etat s’apprête à créer un nouveau pôle de sidérurgie. Il soutient, dans ce sens, que cette décision d’exporter 50.000 tonnes pour les collecteurs privés de ferraille vient contre les intérêts de la société qui devrait, selon ses dires, « en être l’unique bénéficiaire ». Une solution qui, selon le député, permettra de redresser une société étatique en difficulté et de lui assurer une entrée de devises dont elle a fort besoin aujourd’hui.

 

Les mêmes craintes sont formulées également par le député indépendant, Ali Belakhoua qui a estimé, dans une déclaration rapportée par la TAP, que « l’exportation à répétition de la ferraille marquera la fin du secteur de la sidérurgie en Tunisie ». Cependant, il estime que la décision de permettre aux sociétés privées de collecte d’exporter environ 50.000 tonnes de déchets de métaux ferreux pourrait présenter des avantages pour les régions et certaines sociétés.

 

Si les avis divergent sur cette décision d’export au profit des collecteurs de ferraille, les détracteurs de cette loi y voient une tentative d’affaiblir l’entreprise nationale de sidérurgie afin de faciliter sa cession à moindre prix à un groupe étranger.

La société Al Fouladh, qui détient aujourd’hui le monopole de la sidérurgie en Tunisie et fournit 75% des besoins du pays en fer, fait aujourd’hui face à des difficultés financières indéniables. Difficultés causées, entre autres, par une mauvaise gestion financière et administrative, une pression syndicale, etc.

 

De son côté, le ministre de l’Industrie et du Commerce, Zied Laâdhari, a défendu cette opération arguant, dans une déclaration rapportée par la TAP, que « l’opération d’exportation de la ferraille offrira une solution pour le stock de fer entassé par la société El Fouladh et réalisera des recettes estimées à 60 millions de dinars (MDT) ». Selon lui, les accusations portées par les députés détracteurs de cette opération seraient du pur « populisme ».

Le ministre précise que la société se retrouve dans l’incapacité d’honorer ses engagements auprès des collecteurs de ferrailles. Par ailleurs, selon les chiffres avancés par le ministère pour justifier cette décision, la capacité de transformation d’El Fouladh ne dépasse pas 130.000 tonnes par an contre une capacité de transformation pour les privés estimée à 30.000 tonnes de ferraille. Les quantités des déchets de métaux ferreux disponibles en Tunisie sont estimées à 300 mille tonnes annuellement alors que le stock de déchets de métaux ferreux détenus par El Fouladh a atteint environ 250.000 tonnes.

 

Des chiffres jugés « erronés » selon certains députés et qui feraient la lumière sur « la volonté de l’Etat de se désengager du secteur stratégique de la ferraille », d’autant plus que l’Etat a fait part de son intention de privatiser la société en cédant 49% de ses parts à un investisseur italien, le groupe sidérurgique Alfa Acciai. Une cession justifiée par une volonté de « restructuration [de la société El Fouladh], en vue d’améliorer sa compétitivité et attirer l’investissement étranger ».

Si cette opération de cession d’une valeur de 50 millions de dinars tunisiens est aujourd’hui tombée à l’eau, selon les déclarations aux médias de Zied Laâdhari, elle met l’accent sur la volonté de l’Etat d’opérer  une privatisation partielle de la société. Une privatisation qui a pour but d’apporter l’expertise étrangère et les ressources nécessaires à une entreprise en difficulté afin qu’elle puisse retrouver son prestige perdu.

 

Malgré les arguments brandis, les détracteurs de cette cession ainsi que du projet de loi fraichement voté, restent sceptiques. Ils pointent du doigt une certaine opacité motivée par « d’éventuelles pressions politiques » mais aussi une volonté de priver une société étatique de ressources dont elle a plus que jamais besoin aujourd’hui.

 

19/04/2017 | 19:59
5 min
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Commentaires (10)

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Darsalem
| 23-04-2017 12:48
Ce cancer que vous nommez elfouled en tant qu écologiste est le plus grand malheur pour Ferryville n oublions pas.que cette sinistre usine à été implantée sur la plus belle plage de Tunisie et sur le lac de Bizerte a Ferryville le petit dictateur à ramené 90 % des salariés de sa région du sahel en leur donnant les maisons des Français la populations de Ferryville n as rien gagné de cette horreur à part la pollution et les maladies fermé nous ce criminel écologique dont les dégâts sont estimés à 700 millions d euros payé par l Europe pour dépolluer le lac de Bizerte dans la protection de la Méditerranée dure des travaux 10 ans je vous propose de l installer sur une plage de Monastir c est bien.pour l emplois et retour à l envoyeur nous a Ferryville on a une culture de l environnement. On s en fout de l emplois s il doit détruire notre environnement. Si vous.aimez Ferryville déplacez le à Monastir on leur offre

Walid
| 20-04-2017 18:54
Les députés du front populaire ont appelé le chef de gouvernement à 'uvrer pour un plan de sauvetage cette société de fouladh au lieu de continuer de la ruiner pour la vendre...

observator
| 20-04-2017 15:45
IL y a quelques semaines, j'avais proposé, sur les colonnes BN, un débat sur le secteur du fer.
Il fallait inviter les cadres de la société Elfouledh pour qu'ils exposent leur point de vue.
Parce que ce secteur stratégique est important pour les Tunisiens.
Donc au lieu de travailler dans la transparence pour expliquer le bien fondé de cette loi, le pouvoir a préféré l'omerta et il semblerait que le lobby affairiste de la ferraille a eu encore raison au détriment de l'intérêt général.
Qui sont ces députés qui ont voté cette loi ?
Chut la Tunisie est à brader.

Vous remarquerez le silence "complice" du maître-chanteur Hammami de son mouvement et de l'UGTT.
Bien-sure en aval, ils vont essayer de tenter quelque chose histoire de duper encore et encore les Tunisiens.

el manchou
| 20-04-2017 12:59
Et vive la révolution de la brouette.

TATA
| 20-04-2017 10:17
Ce n'est pas parce que l'on gère mal nos sociétés publiques qu'il faut les vendre à des prix dérisoires!

Mr. Zied Lâadhari est peut-être un bon juriste mais il ne comprend absolument rien à l'industrie. C'est irresponsable de nommer Mr. Zied Lâadhari ministre de l'industrie et du commerce! Je n'ai rien contre le parti politique Ennahdha, mais il faut être objectif et dire la vérité quand elle s'impose!

Très Cordialement


TMT
| 20-04-2017 09:46
Vous savez,c'est bien loin le moment où un certain A.Chaker annonça aux tunisiens le démarrage d'Elfouled tout en montrant fièrement le haut fourneau dégager une belle flemme...
Peut être étions nous attirés par le choix de l'industrie lourde comme option,heureusement que nos voisins algériens ont vite passé à l'action de manière à nous dissuader et nous pousser à opter pour l'industrie légère et on a bien fait.
Le secteur de la sidérurgie a connu un tel bouleversement que notre usine ,supposée sans griffes, a pu vivoter àcoup de subventions,car lorsqu'on aime,on est moins regardants sur les dépenses.
Mais pas pour l'éternité,car il arrive un moment où il faut dire basta,et réfléchir avec la raison pour chercher des solutions à hémorragie et je trouve que les arguments avancés par le Ministre sont acceptables et tous ceux qui ne sont pas d'accord n'ont qu'à nous convaincre du contraire.
Cette affaire a déjà durée assez longtemps...que l'on passe à l'action dans un cadre légal et transparent!

mjr
| 20-04-2017 09:41
La Tunisie a démarré en 1966 la première usine sidérurgique en Afrique du Nord.Malheureusement l'étroitesse du marché,l'absence d'accord avec les partenaires maghrébins et notamment avec l'Algérie , l'absence d'une politique à long terme pour l'industrie a fait que le pays s'est détourné des secteurs "difficiles" mais stratégiques comme la sidérurgie .
Le paradoxe qui attire l'attention c'est que des pays comme le Quatar ou l'Arabie Saoudite grâce à leur industrie gazière ont développé une industrie sidérurgique créatrice de valeur ajoutée , d'emplois qualifiés et de technologies innovantes . Mais le paradoxe qui attire l'attention est qu'ils proposent à notre pays des "projets immobiliers de luxe",des "cités d'affaires" ou des "complexes de service" qui ne serviront à rien pour le moment ; sauf à pomper ce qui reste de financements bancaires et qui ne laisseront rien de durable pour le pays en termes de développement.
Du point de vue politique ils nous aident à développer l'islamisme politique et nous faire revenir en arrière.
Pendant ce temps la classe politique médiocre continue à se chamailler pour les postes sans tenir compte des intérêts du pays.

DHEJ
| 20-04-2017 08:29
C'est une réplique à la tribune de Mahdi TAJE du fameux ITES!!!


Un ITES qui ne voit pas d'inconvénients à ce que le dinar soit aussi solide que L'ACIER!!!

AMIRAL
| 20-04-2017 08:10
Est ce que les plaques d'égouts et les grilles de caniveaux volées le long des routes font partie de cette exonération ?

citoyenne
| 20-04-2017 06:24
ce serait pas uniquement la fin de la sidérurgie, plusieurs autres secteurs seraient touchés comme le bâtiment,les fonderies....l'exportation d'elkhorda était d'ailleurs interdite.