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Tribunes
La destitution de Marzouki : Une urgence nationale !
24/06/2014 | 10:31
12 min
Par Omar S’habou

Après avoir traité les Tunisiens - y compris ceux qui le dépassent en savoir, en art de vivre et en moralité - d’ignorants ; après sa prise de position erronée en faveur de ce qu’il a considéré comme pouvoir légitime en Lybie  et après sa décision cafouilleuse et en rupture avec la culture d’Etat au sujet de l’élection de Abdelfatah Sissi, il devient humainement impossible de patienter davantage  face aux désastres que  fait toujours endurer Marzouki aux Tunisiens  depuis qu’il est entré au Palais de Carthage en tant que président (fut-ce provisoire) de la  République ! 

J’ai eu l’occasion, quelques temps après sa laborieuse élection en tant que député dans la circonscription  de Grombalia, de lui proposer de mettre fin aux rumeurs concernant son état  mental et nerveux en publiant  un bilan de santé dument certifié. Ceci m’avait  alors valu, de la part de la grande militante Om Zied,  les très amicales épithètes de « haineux et jaloux ! »

Je me demande aujourd’hui  sincèrement – et le plus objectivement possible – ce qu’il faut encore produire comme preuves quant aux sérieux symptômes de détraquage de Marzouki. Que faut-il de plus que ce torrent continu de turpitudes, de grossiers mensonges, d’indignités, de facéties et de populisme autant anachronique que  primaire  qu’il  continue de déverser devant les Tunisiens, les voisins et les terriens ?
 
« Droit-de-l’hommiste » ?

Marzouki a construit son aura et sa légitimité politiques sur son militantisme tous azimuts en faveur des droits de l’homme. Une légitimité  consacrée en quelque sorte par son accession dans des circonstances houleuses (n’est-ce pas Chammari ?) à la présidence de la Ligue Tunisienne des Droits de l’Homme. Il s’est finalement avéré que ce n’était qu’un instrument de travail aux fins de  réaliser un rêve d’enfance quasi obsessionnel : la présidence de la république. Les agissements  dont il aura été l’auteur depuis qu’il est devenu président n’ont fait que vider progressivement cette légitimité de toute substance. La livraison  à la place publique du livre dit « noir » aura été le fait le plus parlant en la matière.  Dans ce livre, il a violé avec préméditation des données personnelles que la loi lui  interdit et il a exploité les archives de l’Etat sans qu’il y soit autorisé. Un délit innommable pour un chantre des droits de l’homme et président de république de surcroit ! Je ne sais toujours pas ce qu’attend la justice pour lui délivrer un mandat d’amener afin de répondre aux six recours déposés contre lui par des plaignants victimes de sa forfaiture ? Il  encourt un emprisonnement d’un an – ne  bénéficiant d’aucune immunité, selon la loi organisant les pourvois publics ! Quant à l’extradition du malheureux ancien premier ministre libyen, Baghdâdi Mahmoudi, elle restera l’autre forfaiture vidant la légitimité « droit-de-l’hommiste » de Marzouki de toute consistance. Le « Maghreb » du 29 mars 2014 a produit des documents prouvant que Marzouki était au fait de l’opération de chantage dont le Libyen était victime par des Tunisiens haut placés qui en voulaient à son trésor de guerre protégé par le secret bancaire  comme  condition à sa non-extradition ! Devant les caméras de l’émission fétiche de Samir El Wafi  qui nous avait fait visiter les chambres et les couloirs, aujourd’hui sans âme, du palais de Carthage, il avait clamé haut et fort qu’il « ne signera jamais en tant que défenseur de droits de l’homme la décision d’extradition de Mahmoudi ! ». Sans commentaire !

Ne parlons pas du ridicule de la justification d’un certain Adnène Manser, un des ministres-conseillers,  qui n’a pas trouvé mieux qu’une difficulté  technique entravant la communication téléphonique avec Marzouki, en visite de travail dans l’extrême sud, pour expliquer la non-opposition de son maître à l’extradition du Libyen. Cette explication est non seulement risible mais elle prend les Tunisiens pour des imbéciles ! En effet, les choses sont organisées de telle sorte que Marzouki en tant que  (hélas !) chef suprême des armées est joignable instantanément dans n’importe quel recoin du globe.

En la circonstance, nous ne pouvons encore une fois que rendre un vibrant hommage posthume à Bourguiba !  Il avait refusé en son temps d’extrader le colonel Tahar Zbiri auteur d’un coup d’état avorté contre le président algérien feu Haouari Boumediene !
Et que penser d’un défenseur des droits de l’homme devenu président  qui reçoit au sein du palais de la République civile tunisienne le plus extrémiste des « takfiris »,   Khamis El Mejri,  connu entre autres pour sa théorie « humaniste » selon laquelle « tout bon musulman se doit d’être un supporter d’Al Qaïda » ? Ou de la conviviale causerie qu’il accorde, toujours dans le palais de l’Etat civil tunisien,  aux  dirigeants « des ligues de la protection de la révolution »  et en présence de l’illustre « Recoba ». Tous, fiers de leurs historiques exploits tel que le lynchage de feu Lotfi Nagdh, l’attaque contre le siège de l’UGTT ainsi que  les innombrables agressions verbales et physiques contre toutes sortes d’acteurs de la société civile ? (1)

Tromperies


Ce qui nous conduit à évoquer l’autre versant annulant non seulement toute légitimité politique de Marzouki mais aussi toute légitimité moral. Je veux parler de sa propension réfléchie au mensonge en tant qu’outil de communication avec l’opinion publique, oublieuse de nature. Il sait pertinemment qu’une stupidité d’un jour est effacée par une autre commise le lendemain. D’incessants  mensonges de cafés, semblent faire partie intégrante de sa structure mentale. En voici quelques uns à titre de rappel : il annonce  la vente des palais présidentiels avant qu’il ne soit démenti. En réalité, il n’y a aucun palais à vendre !  Un autre jour, c’est la vente de l’avion présidentiel qui est annoncée avant qu’il ne soit confondu par ceux qui ont en droit. Le plus grave c’est qu’il a parfois tendance à croire en la réalité de ses mensonges : n’a-t-il pas affirmé qu’il a exigé et obtenu que Sakhr El Materi soit expulsé du Qatar  comme condition à sa visite dans ce pays ? Un détail dont même les autorités Qataries n’étaient pas au courant !  Sa méthodologie mensongère aura connu cependant son apogée avec la fuite de son célèbre Livre noir.  Il a prétendu tout simplement que sa diffusion au public était due  à l’inconduite des ouvriers de l’Imprimerie officielle lesquels ont vite fait de révéler que l’impression du livre a été réalisée sous la stricte surveillance de la garde présidentielle ! …

Que n’aura-t-il pas mis à exécution sa fameuse galéjade qui lui a fait promettre de démissionner six mois après son entrée à Carthage s’il  manquait à ses engagements, on se serait passé de biens d’humiliations !

Fanfaronnades et hâbleries

Quand il s’agit d’énumérer un tant soit peu ses danseries diplomatiques,  sa légitimité, fut-elle virtuelle, est totalement dissoute. Souvenons-nous des critiques grossières qu’il a adressées aussi bien aux Marocains qu’aux Algériens. Les premiers pour être gouvernés par une monarchie dont il a pris soin d’inventorier les méfaits – ignorant que  les Marocains dans leur écrasante majorité considèrent la royauté comme le régime idoine pour leurs réalités spécifiques. Les seconds, pour avoir trahi le vote des électeurs algériens en 1990 ! Il a fait ainsi fi d’une règle universelle selon laquelle un chef d’état en exercice n’a pas à juger des affaires intérieures d’un autre Etat ! Ce ne sera pas tout, loin s’en faut ! Sans crier gare, il se proposera à nos deux voisins comme médiateur pour résoudre le conflit du Sahara  avant de décréter unilatéralement l’espace géographique maghrébin espace de libre circulation des biens et des personnes, faisant ainsi le bonheur des terroristes de tout acabit ! Enfin il décidera, souverainement, d’un sommet maghrébin dont il fixera lui-même la date (9 février 2014) croyant avoir suffisamment de prestige pour soumettre  Bouteflika et  Mohamed VI  à ses désidératas ! L’ensemble de ces agitations d’adolescent politique  lui ont valu des réactions d’apparence diplomatiques mais au fond méprisantes. Et dire qu’en matière de diplomatie, notre pays servait d’école pour l’ensemble des états arabes ! Sait-on par la même occasion qu’un des chefs d’états maghrébins actuellement en exercice ne cite Marzouki que par le sobriquet  devenu international  de « Tartour» ? « Le Tartour tunisien » a-t-il l’habitude dire quand il est amené  à parler du président de la République tunisienne!  

La plus savoureuse de ses danseries restant toutefois sa décision, typiquement marzoukienne, de renvoyer ce qu’il pensait être un ambassadeur en activité de la Syrie en Tunisie ! La Syrie n’en avait pas un à ce moment là ! Terrible farce qui a fait les choux gras de la presse mondiale ! Sans parler des sérieux dommages collatéraux qu’elle  a engendrés pour nos nationaux installés en Syrie ! Enfin pour clore ce chapitre des clowneries, rappelons qu’au moment où le pays vivait une gravissime tragédie nationale avec l’assassinat de Mohamed Brahmi, il n’avait pas trouvé mieux que d’envoyer un télégramme de protestation aux…dirigeants nord-coréens contre leur nouveau essai nucléaire !!!  J’aurais bien aimé voir la tête des dirigeants coréens quand ils  ont reçu et lu la prose d’un certain Marzouki…

Névrose ?


De jolies réminiscences donc qui posent très objectivement la question de la présence d’un Marzouki aux équilibres nerveux et mentaux douteux à la présidence de la république, en ce temps crucial de notre histoire. Je n’ai pas été le seul à avoir parlé de ces possibles déséquilibres. Le distingué député Tahar Hmila aura été plus explicite  et a plus d’une fois demandé à lui faire subir des examens médicaux. Il est tout récemment rejoint par le courageux journaliste Zied El Hèni qui vient de présenter  au procureur de la République un recours, signé par des dizaines de militants,  demandant la même requête. La militante – ancienne compagne de route de Marzouki –   Om Zied  s’en est mêlée de son coté de sa crédible plume en écrivant tout récemment sur sa page Facebook que Marzouki aura été  «  un fardeau à toutes les phases de cette étape transitoire ».  Sans parler de la diatribe assassine du rédacteur en chef de radio Mosaïque, le brillant Néji Zaîri,  qui, après avoir accompagné Marzouki durant sa visite officielle au Qatar en 2012,  rendit « grâce à Dieu de ce que Marzouki  ne soit qu’un président provisoire ! », sur les pages du « Maghreb ». Peut être serait-il utile à ce propos de passer en revue quelques faits assez symptomatiques  des tendances qui ont tout l’air d’être névrotiques chez le chef suprême de nos armées. Sans doute la plus parlante de ces tendances est relative  aux potences et guillotines qu’il a promises  aux « contrerévolutionnaires » (selon lui)  parmi ses compatriotes ! Le moins qu’on puisse en dire est qu’il ne s’agit nullement d’un lapsus mais d’une conviction ! Autre fait parlant : un chantage comme on en fait dans nos « houma arbi »  proposé à la veuve de Chokri Belaïd. Il lui garantit une  protection personnelle par  la garde présidentielle contre la simple permission de présenter ses condoléances à la famille du martyr ! N’est-ce pas ahurissant !  Les services de l’Etat assujettis à un caprice de gâté ! Quant à la  théorie des « chaussures et des chaussettes » qu’il  développa devant la foule de Sidi Bouzid, médusée et humiliée, elle parlerait plutôt  d’une brisure schizophrénique  qui peut être commune à plus d’un humain certes mais certainement malvenue chez un président !

Résultat : le coefficient de rejet et de répulsion qu’il inspire aux Bouzidiens semble s’être stabilisé  à un  niveau élevé  si on étudie au détail près les sondages d’opinion de Sigma ! De même que sa tendance à projeter son narcissisme surdéveloppé sur l’institution présidentielle interpelle davantage  la réflexion. Ne s’est-il  pas entouré d’une pléthore de ministres-conseillers, aux attributions vagues ou vaines,  uniquement pour s’offrir le ravissement d’un président, non pas  virtuel, mai réel, et qui en impose si ce n’est par ses attributions, ce sera par l’importance de son équipe !

Malheureusement pour lui, le destin est parfois cruellement juste. De ces dizaines de conseillers il n’en reste qu’un quarteron, et il ne se trouve aujourd’hui aucune Tunisienne ni aucun Tunisien qui serait prêt ou prête à  se faire Ministre-conseiller auprès du « Président » Marzouki. Jusqu’à ce jour, tous ceux et toutes celles qui ont été approchés pour remplacer Aziz  Krichèn ont sèchement refusé. Et pas toujours poliment. L’offre paraissant pour certains d’entre  eux comme une insulte à leur prestige !

Interpellation !

Il ne me reste plus pour conclure qu’à m’adresser directement à celui qui l’a fait roi,  Rached Ghanouchi en l’occurrence. C’est bien de par sa volonté à lui et non celle du peule tunisien  que Marzouki est entré au palais de Carthage ! S’il avait choisi un autre candidat à la présidence au lieu de Marzouki, le groupe nahdhaoui à la Constituante aurait voté pour lui !  J’ai bien envie de lui demander de nous citer une seule action, une seule décision, une seule initiative de son protégé qui ait servi de quelque façon que ce soit notre pays depuis 30 mois qu’il est à Carthage ! 

N’avez-vous pas encore pris conscience si Ghanouchi des dommages irréparables que votre  pari sur Marzouki  – dont vous saviez le caractère risqué – a fait subir à la République, à l’Etat, à la révolution, à la démocratie et au pays ?  Que vous ne vous ressaisissez donc pas tant qu’il est temps ! Il suffit que les députés nahdhaouis ne s’opposent pas à une nouvelle motion de défiance à son encontre. Et la Tunisie  ainsi que son palais présidentiel seront libérés d’un « délinquant politique » (pour reprendre la définition d’Arnaud Montebourg parlant de Jacques Chirac) dont il ne restera que la somme incroyable de turpitudes dont il nous a gavés et qui  n’auront finalement servi qu’à enrichir le patrimoine national en matière de désastres ! Et n’ayez crainte quant à l’identité de celui qui le remplacera. Comme pour le cas de Mehdi  Jomâa, il sortira lui aussi de la matrice du dialogue national !  La Tunisie sera ainsi épargnée pour les mois restant avant les élections des agitations marzoukiennes  qui  risquent de monter en puissance au fur et à mesure que nous nous approchons du jour J ! Nous pourrions  ainsi nous offrir un président réellement provisoire  qui ne se servira pas de la puissante institution présidentielle et de ses dizaines de milliards pour conduire une campagne électorale  prématurée, arrogante, insolente et, surtout, vaine et sans issue !  Parce que les Tunisiens,  quoi qu’il fasse, et à défaut d’être éconduit dès maintenant par les constituants,  se chargeront de le faire eux mêmes le jour des élections ! Un vrai président provisoire donc qui saura imprimer à la campagne électorale la hauteur, la neutralité et le sens de l’état qui en feront une phase exemplaire de notre histoire !  D’ailleurs, la toute récente  initiative de votre parti  (fut-elle utopique)   appelant, avant terme, à un prochain président consensuel n’est-elle pas  implicitement un cinglant désaveu et un définitif rejet de Marzouki ?

Dans Son Livre Saint (sourat el Forkan) Allah a dit qu’il  peut transformer le péché en acte gracieux pour tout repenti qui se serait rédimé dans les bonnes actions. Dépêche-toi alors y a cheikh de destituer ton dévoué serviteur comme tu t’es dépêché de nous l’imposer comme Président. Dieu pourrait ainsi  transformer un de tes méfaits en bienfait !


(1) Dans son excellent livre "Bonté Divine", Nizar Bahloul a énuméré l'ensemble de ces agressions.
24/06/2014 | 10:31
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