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Chroniques
Jeunes blouses blanches voient rouge
16/02/2018 | 17:00
4 min

Par Ikhlas Latif

 

Désespérés, épuisés, indignés, faisant face à des conditions de travail difficiles, voire pénibles, à une situation qui se détériore à vue d’œil, nos jeunes blouses blanches sont au bout du rouleau. Durant ces dernières années, pas moins de six ministres se sont succédé à la tête du département de la Santé freinant les réformes revendiquées par les jeunes médecins à juste titre. Avec l’avènement d’un certain Imed Hammami, ministre très critiqué par la profession, la situation s’est encore envenimée, les jeunes médecins montent au créneau, c’est la confrontation. Février est décrété mois de colère, grèves et sit-in se multiplient.

 

Mais qu’en est-il réellement ? Pourquoi ce bras de fer qu’entament nos internes et résidents avec les autorités de tutelle ? De jeunes médecins reconnus pourtant pour leur solide formation et leur compétence à l’échelle internationale. Une fierté tunisienne. De jeunes médecins qui peuvent aisément tout laisser tomber et partir exercer sous d’autres cieux beaucoup plus cléments, où tout est mis en place pour qu’ils évoluent dans les meilleures conditions possibles. En Tunisie, on parle carrément de fuite des médecins. Certains se sont résignés et ont pris leurs jambes à leur cou sans demander leur reste, d’autre ont choisi de se battre pour leur avenir, pour celui de la santé publique en Tunisie.

 

C’est en premier lieu, pour la mise en exécution du Statut des internes et résidents. Un cadre légal, en attente de validation depuis 2012 (rien que ça !), qui devrait organiser et définir clairement les bases sur lesquelles ils sont censés exercer. Parce qu’en Tunisie, un médecin interne ou résident exerce malheureusement sans statut légal, aucun texte officiel n’encadre leurs droits ni même leurs devoirs encore moins leur responsabilité. Les gouvernements et les ministres se succédant, nos jeunes blouses blanches se sont retrouvés menés en bateau, de qui signe, de qui tergiverse, de qui se rétracte. En sept ans rien n’a changé et ces médecins continuent à être pratiquement contraints à travailler dans le noir. Surréaliste !

 

Mais encore, ce qui a motivé ce mouvement de contestation, ce sont les modalités du service civil obligeant les jeunes médecins spécialistes à travailler une année supplémentaire dans les régions avec une rémunération s’élevant à 750 dinars. Uniquement 750 dinars après pas moins de 11 ans d’études. A savoir qu’ils ne peuvent bénéficier de critères d’exemption ou espérer être recrutés. Après de longues années d’études, un jeune médecin trentenaire est acculé à exercer dans les conditions qu’on connait tous dans les régions intérieures, sans statut légal et avec une rémunération inadéquate. A savoir aussi, que le département de la Santé avait déjà signé un accord pour que le salaire soit fixé à 1250 dinars, mais qu’il s’est finalement rétracté. Après tout, pourquoi s’encombrer d’honorer ses engagements ?

 

Pis encore, le ministre de la Santé a décidé, sans consulter les premiers concernés, de mettre en place une réforme des études médicales. Réforme qui consiste entre autre à ne délivrer qu’un seul diplôme au jeune médecin après la spécialisation et après qu’il ait passé l’année de service civil. Du coup, le diplôme de docteur en médecine sera tout bonnement jeté aux oubliettes. Un diplôme qui est normalement délivré au jeune médecin après les sept années d’internat et d’externat et la soutenance d’une thèse de doctorat. Que signifierait donc cette suppression et quelles seraient ses répercussions ?

Internes et résidents, après de longues années de dur labeur, après des années à effectuer jusqu’à 80 heures de travail par semaine, se retrouvent face à un avenir incertain. C’est aussi l’avenir de tout le système de santé, en pleine chute libre, qui se retrouve menacé.

 

D’ailleurs, ces mouvements de protestation ont trouvé un écho positif au sein de la profession. Des messages de médecins seniors ont été largement partagés sur les réseaux sociaux en signe de soutien, à l’instar de celui du gynécologue obstétricien Aref Driss qui encourage les jeunes résidents, internes et externes en ces termes : « Je les soutiens officiellement dans leur combat pour la dignité et leurs revendications pour de vraies solutions aux problèmes de la santé dans notre pays et non à travers des solutions provisoires et aléatoires prises par les ministres successifs de la santé depuis 2011. Je pense à ceux qui sont déjà partis et surtout à ceux qui comptent partir.
Je pense à ceux qui veillent sur nos patients de jour comme de nuit, qui ne connaissent ni repos ni répit. Je suis fiers d''eux et amer de les voir autant dédaignés
 ».

16/02/2018 | 17:00
4 min
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Commentaires (5)

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takilas
| 17-02-2018 19:47
Puisqu'on leur désigne un "ftairi" : marchand de beignets, comme chargé de diriger le ministère de la santé, qui est d'abord médiocre, et puis placé dans un domemaine dont il n'y connaît rien ; même avec la formation hâtive de lui expliquer l'État grippal. Toutefois un ministre de la santé doit connaître les maladies, leurs symptômes et leurs thérapies, mais de même les rouages, les administrations et les pronoms îles fondamentaux de la médecine et son évolution. Donc on est.loin, très loin de ces définitions préliminaires. Mais avec les mafieux et les incompétents de nahdha, rien n'est étonnant. Pauvres jeunes médecins et étudiants en médecine !

Jilani
| 17-02-2018 13:09
Les compétents n'ont pas de chance avec le renard BCE et son fidèle YC qui le pousse à se présenter en 2019. Saïd Aidi qui a diagnostiqué les vrais problèmes de ce ministère a été poussé à la sortie.kamal ennabli un grand connaisseur de la monétique à été renvoyé de la bct et personne n'a besoin de sa rigueur. Depuis 2011 plus de 100 000 ingénieurs ont quitté le pays et la même chose pour les médecins. Bientôt on trouvera que des vieux dans le pays.

DHEJ
| 17-02-2018 08:59
Mais qui est capable "MANAGER" un médecin de la santé publique? Qui est capable de garantir les bonnes conditions de travail du médecin? Et ils RÉCLAMENT un STATUT!!!

LES AIGUILLES
| 16-02-2018 19:16
La Tunisie n'est plus au bort du précipice elle est ensevelie dans ses entrailles. Elle ne se relèvera de son agonie que si une voix forte et tranchante dégage les islamistes du pouvoir. Vat elle subir cette insupportable situation jusqu'à l'infini?. La soit disant constitution unique au monde est le responsable de tous les maux du pays, le régime parlementaire à la proportionnelle est un régime établi par R. GHANNOUCHI pour imposer aux Tunisiens l'idiologie des frères musulmans avec tous ses aspects inconvenants .

lechef
| 16-02-2018 18:52
Si Hammami voudrait avancer à pas rapide pour instaurer la numérisation de la médecine. Il semble que ceci est un problème qu'il pourrait maîtriser techniquement en rapport avec sa qualité d'ingénieur, mais cet essai d'accélérer sans dépoussiérer son bureau des projets en instance et laissés par ses prédécesseurs. Et ceci est grave de conséquence pour deux raisons : 1 - La numérisation nécessité des acquis au préalable et notamment des stocks suffisants de médicaments, des outils, des appareillages , des instruments et des cadres médicaux et para médicaux. En absence de ces disponibilités et ces nombreuses défaillances pour limiter les délais de rendez-vous et assurer un traitement adéquat, la numérisation n'aura aucun sens. 2- Résoudre les problèmes des externes, internes et residents est une priorité absolue et dans la négative , la santé se détériorera davantage. Donc, Si Hammami devrait travailler durement à l'instar de ces jeunes - 72 heures par semaine jours et nuits - pour améliorer le secteur qu'il dirige.