Imed Hammami ramène un lobbyiste en marketing, neveu de Habib Ellouze
L’image du ministre de la Santé Imed Hammami a été sérieusement écorchée ces derniers temps avec les différents problèmes que rencontre son département. Entre la pénurie des médicaments, les plafonds qui tombent dans les hôpitaux, les blocages répétés avec les jeunes médecins et ses sorties hasardeuses dans les médias, Imed Hammami ne sait plus vraiment quoi faire pour redorer son blason.
Comme solution, il a opté pour une personne qui se dit spécialiste en marketing et communication et qui se trouve être le neveu du dirigeant d’Ennahdha et ancien député Habib Ellouze.
Le « spécialiste » en question s’appelle Walid Sahnoun et il vient d’être nommé chargé de mission au cabinet du ministre de la Santé. Il est diplômé de la Haute école de la province de Liège (Belgique) et se présente comme directeur général de la société Carthago Negoce et c’est ça qui interpelle.
Quelle valeur ajoutée peut donner un tel profit au sein du ministère de la Santé ? On suppose que cela soit uniquement pour le lobbying du ministère ou du ministre, mais ce candidat est-il vraiment la bonne personne pour occuper une mission au sein du cabinet du ministre de la Santé ? Car à regarder de près, il y a lieu d’émettre de sérieux doutes sur l’expertise réelle de M. Sahnoun.
Walid Sahnoun se présente comme directeur général, alors qu’il n’est que le gérant de Carthago Négoce, puisqu’il s’agit d’une SARL. Il dit avoir étudié au Lycée Pères Blancs, alors que le lycée en question s’appelle Imem Moslem depuis belle lurette. Des détails ? Le diable s’y cache justement et quand on se présente comme expert en marketing et communication, ce genre de détails sont de la plus grande importance.
Carthago Négoce est une vitrine qui propose tout et n’importe quoi, comme on peut le constater sur leur page Facebook. Cela va de l’exportation des tomates, du henné et des produits d’artisanat (produits artisanales selon leur plaquette) à la conception et fabrication d’emballages en carton, bâches et revêtement de façades.
Quant à la page personnelle de Walid Sahnoun, on y reconnait une page classique d’un sympathisant nahdhaoui qui soutient la Turquie, attaque les Emirats, critique le rapport de la Colibe, réduit la femme, discrédite Hassen Zargouni et glorifie Mohamed Zouari. Ceux qui ne partagent pas ses convictions sont naturellement injuriés comme les journalistes ou encore Maya Ksouri, Fadhel Jaïbi et les « thaqafout » [pseudo-intellectuels] Souvent, comme beaucoup d’islamistes, il aime publier des « douâa » personnels et des textes religieux pour montrer à son public qu’il est très pieux. Les prêches de son oncle maternel Habib Ellouze ont, naturellement, une place sur sa page.
Walid Sahnoun publie également des tribunes d’opinion dans le Manager, donne des interviews en sa qualité de cadre régional de l’Utica à Sfax (alors qu’il réside à El Manar à Tunis) et montre ses photos un peu partout dans le monde entre Barcelone, Monaco, San Remo et Liège ou encore avec Wided Bouchamaoui, Samir Majoul et plusieurs ministres. Il adore d’ailleurs montrer ses photos en djean, en costume, en jebba, en tout et partout.
A lire sa carte de visite, M. Sahnoun se présente comme stratège et lobbyiste. Or à voir sa page Facebook et la page de sa société, tout ce qu’il fait est contraire au b.a.-ba de la spécialité de lobbying où la grande discrétion est une véritable devise. Pire, c’est une adresse Yahoo qu’il met sur sa carte de visite et prend donc le risque de s’exposer, et d’exposer ses clients, à tous types d’infiltration.
Dans la manière avec laquelle il gère sa vie privée et professionnelle, Walid Sahnoun est libre. Mais qu’il intègre la fonction publique en qualité de chargé de mission et occupe un poste au cabinet d’un ministre avec tous les secrets d’Etat qui peuvent s’y trouver, on peut s'interroger sur les motivations qu'a Imed Hammami en recrutant le neveu de Habib Ellouze.
Mise à jour : Suite à notre article, Walid Sahnoun a supprimé de sa page Facebook toutes les publications citées par notre journaliste.
Raouf Ben Hédi