Coup de massue cette semaine. Les Tunisiens ne se remettent pas du décès des bébés au centre de maternité de Tunis. Les Tunisiens n’en reviennent pas qu’on ait remis aux parents leurs enfants dans des boites en carton. Les Tunisiens sont choqués de voir ces témoignages et ces photos partagés par de jeunes médecins décidés à tout balancer. Nous sommes tous sonnés. Comment ne pouvons-nous pas l’être au vu de l’ampleur de la catastrophe ? Comment ne pas déprimer, ne pas ressentir cette colère monter contre un Etat qui laisse mourir ses enfants, un Etat qui ne fait rien, depuis de longues années, contre le déclin annoncé d’un secteur vital ?
La santé des Tunisiens est menacée, hormis une petite poignée qui peut se permettre de casquer des millions pour se soigner dans les cliniques privées. Faudrait-il se ruiner pour vivre en bonne santé dans ce pays ? Le constat est sans appel, il y a péril en la demeure. Il ne s’agit pas de jouer la carte de l’alarmisme, cette étape est bien dépassée et de loin. La déliquescence du service public est bien en marche et ce depuis des décennies.
Combien de fois, des médecins, des journalistes ou de simples citoyens ont tiré la sonnette d’alarme ? Combien de fois des enfants en manque de soins ont perdu la vie et ont été rendus à leurs parents dans des boites en carton. Parce que ce n’est pas la première fois, parce que des cas pareils, il y en a eu, et personne parmi nos chers politiciens n’a bougé pour changer les choses. Le naufrage était prévisible et s’est inexorablement accéléré après la sacrosainte révolution. Gouvernements et ministres de la Santé se succèdent sans pour autant arriver un tant soit peu à colmater les brèches d’un navire à la dérive.
Nos chers politiciens ont accouru sur les réseaux sociaux et dans les médias pour dénoncer le décès des pauvres bébés, victimes d’un système qui prend l’eau. Eux aussi étaient choqués, eux aussi voulaient en découdre avec le système, eux aussi feignaient d’ignorer ce qui se passait dans nos hôpitaux, ce que malades et personnel médical subissaient.
C’est cette hypocrisie qui est la plus étonnante dans ce drame. En tant que responsables, n’avaient-ils pas connaissance que l’hygiène est défaillante dans tous les hôpitaux tunisiens, que de gros chats bouffent les placentas dans les services de maternité, que des ordures jonchent les couloirs des établissements, que plusieurs patients dorment dans le même lit faute de moyens (etc.) ? Où peut-être n’avaient-ils jamais mis les pieds dans un établissement public de santé ! Le cumul des dysfonctionnements est tel qu’il fallait bien, un jour ou l’autre, que ça nous éclate en plein visage et de la pire des façons imaginables.
Il fallait qu'une catastrophe arrive pour que certains responsables ouvrent enfin les yeux. Ça bouge de partout pour calmer la colère de l’opinion publique. Mais quand cette colère se serait tarie avec le temps, combien vous pariez que tout redevienne comme avant ? Parce que les maux du secteur sont systémiques, comme tous les autres d’ailleurs. Parce qu’au manque de moyens et aux restrictions budgétaires, s’ajoute une corruption qui a pris racine et semble indélogeable.
Oui, il y a péril en la demeure. La mort des nouveau-nés n’est que la première salve de ce qui pourrait arriver, si l’hémorragie n’était pas contenue à temps. Pour cela il faudrait une réelle volonté politique qui met l’intérêt de ce pays et de ses citoyens au-dessus de toute considération. Mais ça, c’est une autre paire de manches…
Commentaires (4)
CommenterOn radote.
Une honte totale
Quelle société !! Ce n'est pas possible et acceptable. Deux mondes différents en Tunisie : les incultes et les realistes.
Ils ne sont pas des responsables mais des comédiens
Votre article dit la vérité !
Des règles d'hygiene devraient passer en boucle à la télévision afin d'eviter la prolifération de microbes. '?duquer, prévenir, montrer des photos de rues envahies de saleté et des rues propres.
Il y a des agences de communication en Tunisie, à elles de proposer le projet au ministère de l'environnement.