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Tribunes
Il est désormais mal vu d'être compétent en Tunisie
Par Imed Derouiche
09/01/2017 | 11:21
4 min
Il est désormais  mal vu d'être compétent en Tunisie

 Par Imed Derouiche *



Alors que le pays s’apprête à célébrer politiquement l’anniversaire du 14-Janvier, il convient de faire le bilan social et économique de ces 6 années. Années marquées, certes, par un souffle libertaire mais aussi par un recul dans le domaine de l’entrepreneuriat, une paupérisation rampante, une flambée des prix, une surenchère revendicative, un populisme nauséabond, une marée d’immigration clandestine et une fuite inexorable de nos cerveaux et de notre intelligence.

 

 

L’heure n’est plus aux célébrations tapageuses et, encore moins, aux discours pompeux vantant les acquis de la Révolution mais à l’inventaire politique de ce qu’il est advenu de ce pays. Il est aujourd’hui vidé d’une jeunesse laissée-pour-compte qui le fuit par la mer en rêvant d’une vie meilleure en Europe et dépeuplé par une élite qui prend les airs pour échapper à cette diabolisation et cette stigmatisation de l’intelligence et de la réussite.

 

 

A l’immigration clandestine pour des raisons économiques s’est conjuguée une immigration clandestine pour des raisons éthiques qui va dessécher la Tunisie de son trésor humain et la priver de son unique ressource.

 

 

Le comble c’est que ce véritable fléau a lieu dans une indifférence inexplicable et une prise d’otage flagrante de l’avenir de nos futures générations. Ceci n’émeut ni nos politiques aguerris ni nos apprentis politiciens plus prompts à s’accrocher à leurs postes, pour les uns, et se faire une place au soleil dans un ciel gris et nuageux, pour les autres.

 

 

Aux milliers de jeunes désœuvrés qui prennent la mer au péril de leurs vies pour rejoindre les côtes italiennes,  se sont donc ajoutés ces milliers de jeunes médecins, ingénieurs, entrepreneurs et hommes d’affaires qui font le choix de monnayer leurs talents dans des pays qui reconnaissent le génie, qui sont décomplexés de la réussite et qui reconnaissent le mérite.

 

 

Ils sont lassés de cette vendetta populiste de bas étage, empreinte d’une once de régionalisme qui diabolise la réussite professionnelle, la richesse et l’esprit entrepreneurial au pays de la révolution de la dignité.

 

 

Quitte à fâcher les irréductibles nostalgiques de la révolution du 14-Janvier, il convient, 6 années après, de dire la vérité qui fait mal et qui dérange : La Tunisie a dilapidé un unique trésor inestimable et l’intronisation d’un quadragénaire à la primature n’a pas réconcilié la jeunesse avec la politique car elle s’est limitée au sérail avec des critères de choix aux antipodes de la compétence et du mérite.

 

 

Désormais, nos jeunes ministres sont choisis en fonction de leur appartenance clanique, de leur région, de leur ascendance familiale, de la couleur de leurs yeux et de la teinte de leur peau.

 

 

A l’ascenseur social balisé par le bourguibisme fondé sur la méritocratie  qui a vu éclore des bâtisseurs de la Tunisie moderne et au  technocratisme  de Ben Ali qui s’est entouré de compétences pour réaliser un taux de croissance de 6%,  s’est substitué l’ascenseur familial et politique post-révolution qui sacre uniquement l’allégeance au chef, en dépit de tous les critères de compétences et d’égalité des chances.

 

 

Et si les démarches méritocratique et technocratique récompensent l’humilité, le travail et l’effort, la démarche clanique récompense l’arrogance, la médiocrité et l’incompétence.

 

 

Est-il encore permis d’inverser cette tendance et de redonner espoir à tous nos jeunes ? C’est tout ce que je souhaite à mon pays. Cependant, témoin averti de la scène politique et victime de cette vendetta contre les jeunes qui réussissent par la force du travail et le mérite, je reste sceptique et dubitatif face à tant d’approximations et surtout d’amateurisme managérial politique.

 

* Président directeur général de Petrofac

Par Imed Derouiche
09/01/2017 | 11:21
4 min
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Commentaires (50)

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Hounga
| 12-07-2019 17:54
Tous nous adorons notre pays et au détriment d'un salaire plus bas qu'en Europe, nous y restons. Mais dans ce pays, on ne vous laisse ni travailler ni évoluer. Tout ce que vous avez appris et toutes vos capacités tombent à l'eau. On vous dégoûte de travailler, on vous fais subir des pressions et intimidations, du harcèlement, on vous détruit votre carrière au détriment de personnes qui ne valent rien tout simplement parce qu'ils sont recommandés ou ont un lien de parenté avec quelqu'un d'influent qui au final n'est qu'un déchet sans niveau qui a réussi par des moyens peu recommandables. Bref, un cercle vicieux dans une société qui etrenise dans le pourrissement .Après on se dit pourquoi les gens sont agressifs et violents au point de devenir mauvais alors que leur passé est tout à fait le contraire. Oui les responsabilité est celle des politiciens aussi pourris aussi. Au final, vivre avec cette sale ***est devenu difficile, avec une promiscuité invivable, et dans ce cas on émigre.

aziz
| 15-01-2017 10:35
"A l'immigration clandestine pour des raisons économiques s'est conjuguée une immigration clandestine() pour des raisons éthiques qui va dessécher la Tunisie de son trésor humain et la priver de son unique ressource."
Très juste!! mais c'est aussi un signe de faiblesse et d'égoïsme "non national" que d'aller en France pour corriger leur "numérus closus médical" dans des villages perdus très souvent.

Ing Pet
| 14-01-2017 14:30
Eh oui c ca la Tunisie, ils aiment le nivellement par le bas, comme ça tout le monde est satisfait.
Malheureusement ca ne va pas durer, la crise totale est en train d'arriver a la vitesse Grand V.
Elle emportera en premier lieu les gens qui poussent l'élite a abondonner...

hakim
| 11-01-2017 16:35
un proverbe dit:" Si tu ne connais pas la destination oû tu vas alors ne prends pas le chemin que tu connais"
c pour dire que tant qu'on n'a pas la maturité intellectuelle et civique pour arrêter nos objectifs clairement ( la destination) alors on va commencer par éliminer les chemins connus( s'appuyer sur les compétences).
Pourqoui on n'arrive pas à arrêter nos objectifs c tout simplement à cause d'un errement entre le politique l'idéologique et l'économique...bien observer les prises de position des deux grands partis et vous allez comprendre.
Contrairement, avant cette nouvelle ére, les choses sont claire et la regle de jeu est claire: faire avancer l'économique et le social sans oublier de faire" la part des choses" et en tachant à faire "la part des êtres"
Effectivement tant que le systéme de jeu a été bouleversé et en attendant le rétablissement, les compétents risquent toujours par leur attitude indépendiste de bouziller le jeu qui est en recherche de stabilisation de regles...

TMT
| 11-01-2017 12:28
Monsieur Derwiche doit savoir qu'on peut un excellent gestionnaire sous d'autres cieux ,mais puisqu'il n'a pas se faire accepter dans l'environnement de son entreprise,il ne peut qu'admettre son échec.
La gestion du dossier a été mal traité parce que les solutions d'économie de bouts de chandelles ne peuvent perdurer..
Il fallait chercher les voies et moyens de faire accepter cet intrus par une population qui vit une rupture entre une entité illuminé de mille lustres et une population qui ne cherche qu'à profiter tant soit peu de cette manne ,mais avec dignité.

abougharib
| 11-01-2017 08:08
Face à cette tentative de destruction massive de la Nation, il faut RESISTER et j'appelle les jeunes médecins, ingénieurs, informaticiens ect à s'accrocher à leur reve d'une Tunisie ouverte et prospère

Dali 76
| 11-01-2017 02:26
tout a fait d accord
l administration et les sociétés
l education et la santé tout part en l air. les piliers de ce pays sont cassés un a un entre amateurisme politique et des sanctions fiscales pour combler leur connerie d embauche. l afghanisation qui viendra remplir le verre. c est mal barré pour le futur

Tunisienne
| 10-01-2017 17:10


Bonsoir cher TeTeM,


Je te remercie et salue la pertinence de tes arguments !


Bonne soirée !


Tunisienne
| 10-01-2017 17:03


Pourquoi ?


Eh bien, parce que le populisme, joint à la mauvaise foi et à l'arrogance (et possiblement à certaines difficultés cognitives et/ ou un certain strabisme) sont manifestement des maux qui traversent le temps et les ères politiques (depuis la zabatocratie jusqu'à la fascislamocratie, en passant par la toc-révolutionnairocratie)...


Mais comme vous dites, heureusement qu'il y a «vous» !



Herr
| 10-01-2017 10:24
"la fuite des cerveaux est majoritairement lié à l'appât du gain" : Avez-vous des statistiques pour étayer votre affirmation ?
Sinon arrêtez de dire des sottises spv !