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Pourquoi le discours de victime de Moncef Marzouki ne marchera pas
12/12/2014 | 19:59
12 min
Pourquoi le discours de victime de Moncef Marzouki ne marchera pas

Les discours des deux candidats à la présidentielle se démarquent l’un de l’autre par leur ton et leurs thèmes centraux. Moncef Marzouki tente d’alerter contre le retour de l’ancien régime matérialisé par l’autre candidat, Béji Caïd Essebsi. Ce dernier se pose en sauveur de l’Etat et de son prestige et s’indigne de la violence incarnée par son concurrent. Toutefois, le discours de Moncef Marzouki et de sa campagne se distingue par la volonté systématique de se poser en victime.

 

« L’Etat profond active ses réseaux pour entraver notre campagne », « Le chef de la bande [NDLR : Béji Caïd Essebsi] lâche ses milices pour perturber nos réunions et nos meetings », « L’ISIE se montre dure avec nous et ferme les yeux sur les agissements de notre concurrent »…Voilà un florilège des phrases écrites ou dites dans les médias par les membres de la campagne de Moncef Marzouki. Ces membres comptent d’anciens élus comme Samir Ben Amor ou des personnes occupant des postes à responsabilité comme Tarek Kahlaoui. Le CPR et Moncef Marzouki se sont toujours dits « victimes des circonstances ». Quand le candidat prononce le mot « taghout » pour qualifier ses adversaires : c’est un mot sorti de son contexte et il existe une cabale contre le président sortant. Quand on lui crie « dégage », ce sont des milices payées par Béji Caïd Essebsi pour perturber les meetings du candidat. Quand des révélations sont faites dans les médias, ce sont les médias de la honte qui sont à la solde de l’ancien régime, et donc de Béji Caïd Essebsi.

Bref, les membres de la campagne de Moncef Marzouki, et le candidat lui-même, sont toujours des victimes. Un positionnement intelligent dans une certaine mesure. Quoi de plus efficace pour apeurer les électeurs du retour de l’ancien régime que de se poser en tant que sa première victime ? Ainsi, Moncef Marzouki devient la matérialisation réelle de son propre discours : « Je vous préviens contre le retour de l’ancien régime, voyez vous-mêmes ce qu’ils me font subir ! ».

 

Toutefois, cette tactique a ses limites. L’une de celles-ci est que les allégations de Moncef Marzouki et de son équipe se heurtent assez vite à la réalité. Deux exemples illustrent cela : Dans une vidéo parue sur les réseaux sociaux, Moncef Marzouki affirme que son adversaire ne peut gagner qu’en falsifiant les résultats. Voilà qui affirme, encore, son positionnement de victime par rapport à BCE. Toutefois, cette déclaration a soulevé un tollé par rapport à l’empoisonnement de l’atmosphère électorale qu’elle implique. Par la suite, l’avertissement de l’ISIE par rapport à ce type de déclaration ne s’est pas fait attendre. Le deuxième exemple est celui des factures de la présidence fuitées récemment. Moncef Marzouki et son équipe ont tenté de profiter de ces factures pour témoigner de leur transparence. Par la suite, Adnène Mansar a accusé, presque nommément, Noureddine Ben Ticha, cadre de Nidaa, d’être derrière ces révélations. C’est toujours la victime qui est la cible d’une machine puissante. Toutefois, jusqu’à ce jour, aucune explication n’a été apportée au paiement du séjour en Tunisie de deux amis personnels de Moncef Marzouki que sont  Antoine Lazarus et Bernard Elghozzi.

 

Les médias sont l’un des principaux vecteurs utilisés par la campagne de Moncef Marzouki dans cette stratégie de victimisation. Les représentants de la campagne de Moncef Marzouki ne s’embarrassent pas de dire sur les plateaux télé et dans les radios que les médias boycottent la campagne de leur candidat, ce qui semble paradoxal puisqu’ils sont justement invités !

Depuis le jour de son accession à la présidence de la République, Moncef Marzouki a une relation compliquée avec les médias tunisiens. Plusieurs déclarations du candidat, mais aussi du président de la République, ont directement visé les médias tunisiens. La dernière en date a eu lieu au cours d’un discours prononcé devant les représentants régionaux de sa campagne où il disait : « ça fait trente ans que je supporte leur télévision et je la supporte encore. Je continue à supporter ce secteur de l’information corrompu, mensonger et qui n’a aucun titre pour parler au nom des Tunisiens ». Il ne faut pas oublier également les membres de sa campagne et de son parti qui ont, tant de fois, insulté les médias tunisiens (voir des exemples ici). Toutefois, conscient de l’impact des médias et de leur importance pour les élections, Moncef Marzouki ne se produit que sur des plateaux « amis ». On ne l’aura vu que sur les plateaux de Samir El Wafi sur Al Hiwar Ettounsi et sur celui de TNN, une chaîne dont la ligne est proche des CPR et des islamistes. Les autres médias tunisiens sont boycottés par le président de la République.

Durant sa campagne présidentielle, Moncef Marzouki a largement consacré ses interviews et interventions aux médias étrangers à l’instar de Russia Today, Mediapart, l’agence presse turque Anadolu, France 24 et bien sur Al Jazeera à qui il avait consacré sa première interview en tant que candidat à la présidence. Sans le dire ouvertement, Moncef Marzouki et son équipe estiment que les médias tunisiens n’ont pas le professionnalisme et la compétence nécessaires pour traiter avec le président de la République. C’est en cela que revient la logique de la victime puisque « les médias appartiennent à des lobbys qui veulent nuire à Moncef Marzouki ».  C’est en tout cas le discours de ses partisans et des membres de sa campagne. Pourtant, c’est bien la présidence de la République qui avait édité le « Livre noir » listant, de manière diffamatoire des fois, les journalistes supposés avoir collaboré avec l’ancien régime. Ce livre est aujourd’hui présenté par le président de la République comme étant une initiative qui a permis d’accélérer le processus de la justice transitionnelle…

 

Le positionnement de Moncef Marzouki et la victimisation dont il use à outrance lui permettent, ainsi qu’aux membres de sa campagne, de classer toutes les critiques dans la case des « attaques ciblées » qui le visent. Evoquer son bilan revient aujourd’hui à devenir un suppôt de l’ancien régime qui cherche à torpiller le « symbole de l’honnêteté et de l’intégrité ». Même si cela relève plus du fantasme que de la réalité, son bilan catastrophique à la présidence de la République est, quant à lui, bien réel.

12/12/2014 | 19:59
12 min
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Commentaires (17) Commenter
Quand on manque d'arguments!!!
Belfou
| 14-12-2014 15:48
Un candidat qui manque d'arguments quand il s'adresse au public ne peut que faire la victime tout en diabolisant son adversaire, ce qui est en soit une tactique qui a fait son temps et qui malheureusement (ou heureusement....) ne porte plus ses fruits!!!! Il faut dire qu'au bout du compte trois années de désastres sont difficiles à justifier/argumenter, car qu'on le veuille ou pas, ça s'est passé....HIER pardi !!!!!!!
s'est simple
dr bmn
| 14-12-2014 11:29
c'est simple parce que vous êtes un anti marzouki
Zouki n'est pas la personne adéquate malgré le vote "étriqué"
rzouga
| 13-12-2014 18:27
L'histoire a voulu que zouki sera au 2° tour: malheureusement il n'est pas la personne qu'il faut pour le pays en ce moment car le peuple est convaincu désormais qu'il n'est pas la personne adéquate. Une autre personnalité à sa place (qui n'existe pas pour le moment) la scène politique serait peut être différente.
un président enfant
drmohamesellam
| 13-12-2014 16:53
Un président -enfant
Marzouki,en venant au pouvoir,n'a pas commis d'erreur..L'erreur incombe avant tout à ses électeurs..ce sont eux qui doivent en assumer la responsabilité..Marzouki n'est pas fait pour être président..On ne peut pas être président sans passer par des étapes primordiales..Il a voulu être président.. et pour lui donner ce plaisir,on l'a bombardé président ,comme si l'on avait affaire à un enfant capricieux,auquel on est astreint de donner ce qu'il désire pour qu'il nous laisse en paix'
drmohamedsellam
@BN: Merci de votre prise en compte de mes notes ci-dessos!
Chakchouka
| 13-12-2014 13:07
Danke.
Analyse d'un Psy
Psychologue
| 13-12-2014 12:46
Je suis nidaiste mais il faut affirmer que Moncef Marzouki c'est comme Amina Fakhet, le peuple l'aime en dépit de tout ses actes critiquables.
eternelle victime
k-desuet
| 13-12-2014 10:36
victime et leader sont antinomiques. Ce type a construit sa vie autour de la victimisation, un toubib victime de la non reconnaissance de ces patrons et collègues. Un citoyen victime de la dictature de Bourguiba puis de Ben Ali, parce que ce petit Iznogood (je veux être Calife à la place du Calife) ne prétendait qu'à prendre la place du Président (rien que ça!!!) , alors qu'il n'en a ni l'étoffe ni l'envergure, ni la vocation, encore moins la prestance. Un petit filou caché derrière ses mensonges de droits de "l'hommiste" intellectuellement pervers, bonimenteur, manipulateur et incontrôlable. Attention DANGER à écarter ABSOLUMENT de la scène politique. Une place lui est déjà réservée pour une retraite "paisible" à l'asile et on lui demandera de restituer gentiment tous ses abus et sa lahfa...., et celle de ces compagnons de route
J A L O U S I E !
alassad
| 13-12-2014 06:11
c'est toujours le langages des personnes ( J A L O U S E S ) et même plus !
Marzouki sera très largement battu
tun2020
| 13-12-2014 01:00
Pour la prochaine étape qui s'annonce difficile à bien des égards, il n'est pas de l'intérêt de la Tunisie d'élire un président dont le parti est minoritaire au parlement, car il n'aura aucun ou très peu de levier d'action et les CPR istes le savent avec pertinence mais continuent à fanfaronner tout en jouant les victimes en dépit d'un bilan pour le moins catastrophique, de Bentichous et des casseroles du palais de Carthage qu'ils traînent depuis 3 ans.

Ont-ils d'autres choix ?

Le jeu des alliances semble largement en faveur de Mr Essebsi qui a plus de degrés de man'uvre et peut parler de programme. C'est d'ailleurs l'argument avancé par ce dernier pour refuser à raison le duel télévisuel face à un candidat controversé qui ne pourra pas tenir ses engagements quoi qu'il fasse.
J'espère que le bon sens des tunisiens va finir par l'emporter pour commencer une nouvelle page de notre histoire.
La Belle Brochette De Paranos !
james-tk
| 13-12-2014 00:22
Rien moins que ça, une cabale contre nous ?
A-t-on besoin de cabale face à des paranoïaques, mythomanes, et, d'un cynisme, cyniquement, cynique; un pléonasme que je dédie à l'inepte personnage, marzouki, vraie erreur de la nature, comme il y en a rarement, dans ce bas monde !