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Et si c'était ça, la véritable révolution ?
26/01/2017 | 11:28
5 min
Et si c'était ça, la véritable révolution ?

Par Hédi BEN ABBES 


Tout observateur attentif pourra constater à loisir que l’écrasante majorité de la classe politique tunisienne actuelle est très décevante tant elle est gangrénée par l’opportunisme, l’obsession du gain facile et immédiat, le manque de patriotisme et de générosité envers son pays. La déception des Tunisiens est à la hauteur de la médiocrité de l’offre politique et de cette écrasante majorité de personnel politique obnubilé par leurs petites personnes, se disputant ce qui reste d’une Tunisie exsangue et fatiguée.

Et quand on tire le niveau vers le bas, on élargit inévitablement l’assiette des prétendants au « maigre festin ». Certains se considèrent alors plus à même que les autres pour prendre en main les affaires publiques. Parmi tous ces prétendants, parfois cupides, incompétents ou avides de reconnaissance, certains n’y voient que les avantages immédiats qu’ils peuvent retirer de pareille situation. Or, si ceux-là même qui déshonorent la fonction politique avaient la moindre conscience du poids de la responsabilité que l’exercice de la fonction engendre, on aurait en réalité bien peu de candidats. N’ayant aucun sens du devoir, tous ces prétendants convoiteux comptent sur leurs combines et des alliances de circonstance pour parvenir à leurs fins, tout en étant coupés des véritables préoccupations de la population tunisienne.

 

Parallèlement à ce constat accablant, une lueur d’espoir et d’optimisme m’a cependant été offerte cette semaine par de jeunes étudiants et étudiantes, lors d’une rencontre prise sous la forme d’un entretien professionnel. En effet, ne dit-on pas que la maturité d’un peuple se mesure à sa capacité à se prendre en charge, à assumer sa part de responsabilité et à sa prise de conscience de ce que recouvre comme sens le concept de « citoyenneté » ?

Ces jeunes gens m’ont agréablement surpris, tant par leur maturité que par leur capacité à se prendre en charge. Ils ont compris qu’il était temps d’opérer une véritable rupture paradigmatique par rapport à leurs ainés en comptant sur eux-mêmes et en assumant, du moins en partie, leur part de responsabilité. L’objectif consiste pour eux à ne plus croire en un Etat providence pour subvenir à leur besoin ou pour fournir des emplois, mais qu’il s’agit plutôt de se donner les moyens de créer son propre avenir professionnel par l’acquisition de compétences techniques et culturelles.

 

Représentants d’une association (Junior Entreprises of Tunisia) qui regroupe 1500 adhérents, ces apprentis ingénieurs m’ont donné la preuve que la Tunisie restera toujours debout et qu’elle ne pourra être sauvée que par sa jeunesse et par ses femmes. Une jeunesse fière, digne et sensible à ce qui passe ailleurs dans le monde et qui possède la distance nécessaire pour mieux appréhender l’avenir. Quelle grandeur d’esprit et quelle belle leçon de vie ! Leur démarche consiste à acquérir les techniques de création de startups et à se constituer un « networking » susceptible de faciliter leur insertion dans le monde du travail.

Par désespoir de cause ou par prise de conscience du véritable rôle de l’Etat, ces jeunes ont compris que l’initiative personnelle alliée à la volonté de s’en sortir, en mettant à profit tout ce que l’Etat peut fournir comme encadrement et comme structures, sont les conditions de la réussite personnelle et collective. Cette nouvelle mentalité est en rupture totale avec l’esprit d’assistanat qui sévit depuis 60 ans en Tunisie. Et si c’était ça, la véritable révolution en Tunisie, celle qui a lieu dans les têtes ?

 

Depuis le soulèvement de 2011 jusqu’à ce jour, les différentes réponses des gouvernements successifs à la forte pression sociale, consistaient à chercher des solutions de facilités en recrutant massivement dans la fonction publique. Par lâcheté ou par opportunisme politique, ou les deux à la fois, cette politique est devenue une véritable bombe à retardement car elle alourdit les charges de l’Etat, paralyse les services publics, abaisse le niveau, renforce l’esprit d’assistanat et sape les conditions du véritable développement. Un tel constat n’a pas échappé à ces jeunes qui n’attendent plus rien de l’Etat, ou du moins, ont compris que nous sommes arrivés à la fin d’un système et que, dans leur cas, l’entreprenariat est la seule voie possible pour mettre à profit les compétences acquises.

La véritable citoyenneté réside dans l’égale prise de conscience de ses devoirs et de ses droits. Ces jeunes issus d’une école d’ingénieurs publique, donc d’une structure étatique, ont compris que le rôle de l’Etat consiste à fournir les structures nécessaires à l’épanouissement personnel et doit permettre l’acquisition de compétences. Il leur incombe ensuite, à cette jeunesse motivée et moderniste, de se prendre en charge et d’assumer sa part de responsabilité pour contribuer à son développement personnel et à celui de son pays. C’est dans cet équilibre entre rôle de l’Etat et rôle du citoyen que réside le secret d’un développement sain et durable.

 

En l’absence de courage politique pour dire la vérité, entreprendre les réformes nécessaires et en assumer les conséquences, des jeunes se sont mis au travail et commencent à redessiner les contours d’un autre rapport à l’Etat. Quand les politiques se défilent et évitent de mettre des mots sur les véritables maux qui rongent la société et l’économie, le seul espoir qui demeure provient de cette jeunesse ambitieuse et patriotique. C’est elle qui fixera la marche à suivre pour contourner tous les lobbies et neutraliser tous les opportunistes. C’est elle qui dictera aux politiques les conditions de leur accès au pouvoir. C’est elle qui redéfinira les principes fondateurs de la valeur travail.

Si les nouveaux barons de la mauvaise gouvernance ne se mettent pas au diapason de cette jeunesse désireuse de changements, ou s’ils continuent à s’enferrer dans leur aveuglement, ils auront à rendre des comptes devant cette jeunesse et devant la cour suprême de l’Histoire. Celle-là même qui a jeté aux orties leurs prédécesseurs, cupides et arrivistes.

 

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Commentaires (11)

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Bob
| 27-01-2017 18:29
Je m'attendais à découvrir des arguments qui nous feraient apprécier Mr Ben Abbes et je suis resté sur ma faim. Le fait de démissionner 5 fois dans la même année est effectivement un record mondial. Ce record étrange n'est certainement pas une preuve d'indépendance. Les citoyens qui n'ont pas eu votre chance de le connaitre personnellement, ne peuvent pas deviner les causes de ses multiples démissions. Il aurait été pertinent d'expliquer les raisons qui l'ont poussé à "claquer" autant de portes, c'est un objectif pédagogique et surtout un principe de transparence. Nous sommes donc réduits à suspecter la présence d'un courant d'air tourbillonnant qui claque toutes les portes ouvertes. Ceci dit, l'honnêteté de l'homme n'est mise en cause. Du politique, on attend plus de transparence et des analyses pertinentes et instructives.

Rina
| 27-01-2017 16:25
Cher monsieur, je comprends parfaitement votre réaction qui est vraiment classique dès qu'il s'agit de Mr Abès même si de moins en moins de personnes ne ressassent justement les mêmes arguments du genre où étiez-vous pendant la Troïka, etc...
Encore une fois je vais prendre la défense de ce Mr Abès car je le connais d'abord par ses écrits en suite j'ai eu l'occasion de parler avec lui et avec d'autres personnes qui le connaissent. Tout ça pour vous dire qu'il était un des rares à résister de l'intérieur de la Troïka et à avoir des positions différentes jusqu'au jour où il lui était difficile de continuer à travailler avec ces gens-là. La meilleure réponse était des démissions en cascade: de l'ANC, du gouvernement, du CPR et de la présidence tout cela sans faire de bruit ni chercher à polémiquer. les faits sont les faits en juin 2013 il avait déjà claqué toutes les portes pour préserver sa conscience non sans avoir délivré toutes les batailles contre la mauvaise graine de la Troïka.
Donc Mr Ben un peu d'objectivité et donne moi un seul cas depuis l'indépendance d'un homme politique qui dans la même année a démissionné à 5 reprises de tous les postes qu'il a occupé après avoir tout fait pour aider son pays ????
Il se trouve qu'en Tunisie dès qu'une personne sort de l'ordinaire et se comporte de manière exemplaire, elle est forcément suspecte. On a tellement vu des opportunistes des calculateurs, des voyous qu'on croit que tout le monde est pareil on ne veut même croire qu'il peut y avoir des gens biens malgré tout. L'idée du tous pourris arrange les mafieux qui veulent continuer à s'accaparer le pouvoir en chassant les personnes dignes de respect comme Mr Abès. Alors il ne faut pas jouer le jeu des voyous qui font tout pour que la politique soit synonyme de "saleté" pour que le peuple ne croit plus en la politique et dans le projet démocratique et ainsi les voyous restent maîtres du jeu. Attention à cela!

Ben
| 27-01-2017 15:36
Quel était la position de M.Ben Abbes quand la troika recrutait à coup de milliers de fonctionnaires, parmi ses troupes, au sein de l'administration, qu'elle les dédommageait à coup de millions de dinars vidant les caisses de l'État?
Où était relégué son patriotisme et son sens de la responsabilité? Croit-il nous émouvoir avec des idées qu'il ne fait que ressasser comme un disque rayé? qu'il sache que parler de cupidité de l'ancien régime n'est plus d'actualité parce que les tunisiens, toutes classes confondues, ont souffert de votre passage au pouvoir laissant des marques indélibiles da

hamid
| 26-01-2017 17:34
ce monsieur qui vient a chaque fois nous casser les oreilles par ces reflexions ne peut nous induire en erreur ni nous emouvoir sur sa fibre patriotique.qu il fasse d abord son mea culpa pour avoir parraine une certaine troika qui a failli nous conduire a un vrai desastre.

Bob
| 26-01-2017 16:58
L'auteur verse dans le jeunisme et le féminisme qui cachent un désarroi devant sa jeunesse qui n'est plus. Il y a des bons et des mauvais dans toutes les couches d'âge et dans tous les sexes. En vérité, un pays ne peut être sauvé que par sa population, hommes, femmes jeunes et moins jeunes, actifs et moins actifs. Un pays est un tout! C'est ainsi que l'Histoire des nations est faite. Le reste est démagogie, regrets, et phraséologie stérile. Allons au fond des choses et laissons la littérature aux littérateurs.

Rationnel
| 26-01-2017 15:26
Les articles de BN confirme la thèse de Mr. Hedi Ben Abbes. L'intervention de la secrétaire d'Etat à la Jeunesse, Faten Kallel, est encourageante, elle comprend le problème et propose des solutions pour changer la culture d'une jeunesse qui ne voit de projet futur que la sinécure publique (c-a-d fonction publique). Les propositions de Mongi Marzouk ancien ministre des technologies de l'information sur la nécessité d'investir dans les énergies renouvelables une autre preuve que les jeunes parmi nos dirigeants comprennent le monde et les défis de la tunisie et du 21eme siecle.

Malheureusement l'élite qui tient le pouvoir est dépassée par les événements et croit toujours au système de la rente et l'état providentiel. Les interventions à répétition de Ghannouchi et Chebbi nous rappelle que ceux qui ont mené le pays a la ruine se prennent toujours pour ses sauveurs. Le système des listes électorales permet à ces pseudo leaders de maintenir le pouvoir avec une main de fer. Comment expliquer que dans un pays de 270 000 de chômeurs avec diplômes universitaires, le niveau d'éducation de 85% des députés ne dépasse pas le bac. Les chefs de partis sélectionnent les moins éduqués pour que les députés une fois élus n'auront ni les capacités intellectuelles ou l'indépendance financière pour voter contre les voeux de leurs partis.

RODIN
| 26-01-2017 15:14
Donc il y a des gens qui n'ont bénéficié de rien,ni école publique ni de bourse ni des services de l'état.C'est à se demander comment ils ont fait pour réussir.Surement grâce à papa qui a fait beaucoup de sacrifices en se passant de l'état Tunisien et refusant l'assistanat,bravo!
Il faut avoir le courage de dénoncer les envahisseurs,opportunistes qui ont fait main-basse sur la Patrie,sans compétence et sans aucune légitimité!Oui sans légitimité.Sauf la carte blanche offerte par qui on sait.Une autorisation qui leur permet de se remplir les poches non pas pour s'enrichir seulement,mais se gaver jusqu'à la ruine de notre pays!C'est à ces faux tunisiens qu'il faut s'adresser et non stigmatiser le peuple avec "votre"assistanat et autres démagogie et Tartufferie!
Je reste cool,c'est mieux....

Esperanto
| 26-01-2017 13:31
Les new technologies offre des chances inouies to young people if only ils pouvait get rid des old ways of thinking.
Néanmoins, je pense que they need support au début pour démarre leurs projects. L'état tunisian doit s'inspirer de le china. Le young entrepreneurs peut ensuite se devenir independent et agrandi sa business petite a petite.

Pourquoi?
| 26-01-2017 13:18
l'article ci-dessus se résume en une seule phrase, Mr. Hedi Ben Bbbes est agréablement surpris par certains jeunes gens, tant par leur maturité que par leur capacité à se prendre en charge. Sinon, on apprend absolument rien sur ces jeunes gens: Qu'est-ce qu'ils ont fait de grand ou de spéciales et comment ont-ils réussit?