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Chroniques
Et qui protégera les hommes ?
26/07/2016 | 16:51
4 min

L’actualité nationale la plus commentée de la semaine n’est pas la célébration de la fête de la République, ni le feuilleton de la Kasbah, encore moins la situation économique (désastreuse !) du pays. Ce qui a accaparé l’attention ces derniers jours, c’est le récent projet de loi organique censé remédier à la violence pratiquée à l’égard des femmes tunisiennes. Un projet de loi adopté en conseil des ministres et qui passera bientôt au vote des élus de l’ARP. Autant dire que ce projet, bien qu’il suscitera des débats certains, aura toutes les chances d’être adopté. Au premier abord, il semble consacrer les, oh combien grandes, valeurs de protection de la femme, d’intégrité physique etc.

Ce projet de loi prévoit un an d’emprisonnement et 5000 dinars d’amende pour tout auteur de harcèlement envers les femmes dans un lieu public. On est aussitôt tentés d’applaudir. Etant une femme, et pour avoir à maintes reprises (et pendant des années) subi ce genre de harcèlement (comme une grande majorité des femmes tunisiennes) dans la rue, dans les transports publics, dans les cafés et autres, je ne peux être insensible à ce genre de progrès. Mais en est-ce vraiment un ?   

 

Ce genre de loi, s’il se présente comme salvateur, ouvre, bien au contraire, la porte à toutes sortes d’interprétations misogynes selon lesquelles la femme serait un être inférieur qu’il faut protéger. Ceci permettra aux défenseurs d’une société patriarcale et masculine de justifier certains arguments allant dans le sens de l’interdiction à la femme de sortir dans la rue non accompagnée et de participer pleinement à la vie active sous peine d’être « agressée » par les prédateurs qui lui veulent du mal. Même si ceci reste vrai, en partie.

Ce genre de loi est, également, dangereux dans le sens où il permet aux femmes, usant de mauvaise foi, d’exercer une sorte de chantage ou d’ascendant sur les hommes. Lorsque seule sa parole est prise en compte et qu’une loi sert uniquement à la protéger contre les hommes, que vaudrait son témoignage s’il est biaisé ? A l’heure où la Constitution tunisienne stipule que tous les citoyens sont égaux devant la loi, abstraction faite, notamment,  de leur genre, comment faire la différence entre la victime et le bourreau ? Dans ce projet de loi, le harcèlement sexuel est défini comme étant « tout acte, geste ou mots à connotation sexuelle ». Comment faire la différence, donc, entre une véritable agression et une simple drague entre deux adultes, majeurs et consentants ?

Une autre question se pose. Même si une inversion des rôles a été posée, ironiquement, par les critiques de ce projet de loi, il y a tout de même lieu de se demander ce que cette loi prévoit « dans le cas où une femme harcèle sexuellement un homme ? ». Ce cas de figure peut paraitre anecdotique pour certains. Il faut avoir l’honnêteté d’avouer que, dans bien des cas il l’est, mais ceci reste pourtant une possibilité. Par ailleurs, est-ce qu’un homme aura, encore, le droit de draguer, simplement, une fille dans la rue sans risquer de se voir jeté en prison ?

 

La législation tunisienne, encore fortement patriarcale, est souvent sexiste. Elle ne prend pas en compte certaines évolutions de la société. On observe cela dans l’inégalité de l’héritage, l’absence de notion de viol conjugal et bien d’autres lois archaïques. Mais elle peut aussi être injuste envers les hommes en raison de cette « discrimination positive » qu’on nous pousse à pratiquer en faveur des femmes. Discrimination positive qui porte préjudice à l’homme, dans bien des cas, mais qui risque aussi, dans beaucoup d’autres, de se retourner contre celles là même qu’on veut protéger. Tel est le cas des lois sur la garde des enfants lors d’un divorce, de celles relatives à la pension alimentaire, et bien d’autres encore. Des lois qui impactent, négativement, d’autres textes liés aux salaires, à l’égalité des chances dans l’emploi, etc.

 

Je ne peux que tristement remarquer que, dans cette loi, rien n’est prévu contre le (certes tabou mais aussi bien réel et même courant) crime du viol conjugal.  La législation anti-pédophilie souffre, elle aussi, d’un grand vide. En effet, ce projet de loi stipule une peine de six ans (article 227) est encourue pour toute personne ayant une relation sexuelle consentante avec une mineure de moins de seize ans et de cinq ans avec une mineure consentante de plus de seize ans et moins de 18 ans. Mais est-ce suffisant pour considérer la pédophilie comme un véritable crime de société, admettre sa réelle existence et lutter contre ? Permettez-moi d’en douter…

 

L’égalité entre l’homme et la femme, si chèrement revendiquée est loin d’être un acquis. La femme tunisienne, comme dans bien d’autres sociétés fait l’objet, quotidiennement, de harcèlement, d’agressions et d’intimidations. Ceci est un fait. Mais est-ce suffisant de faire des lois qu’on ne peut appliquer en pratique ? Des lois, belles sur le papier, mais qui n’apportent rien dans la vie de celles qu’on veut protéger.  Comment appliquer cette loi si l’intimidation reste monnaie courante dans ce genre de situation ? Comment protéger les femmes dans les lieux publics où elles sont, souvent, rabaissées, humiliées et intimidées et ne sont même pas en mesure de se défendre ?

 

 

Si la loi pour l’égalité des salaires, ou celle qui ne donne plus la possibilité au violeur d’échapper aux poursuites en se mariant avec sa victime, peuvent être de bons pas en avant pour améliorer le quotidien des femmes tunisiennes, celle supposée combattre les agressions sexuelles va-t-elle dans le même sens ? L’on est en droit de se le demander…

26/07/2016 | 16:51
4 min
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Commentaires (37)

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j.trad
| 01-08-2016 10:01
il fallait poser cette question depuis bien longtemps ,l'équation homme femme ,est la plus merveilleuse équation de la nature ,cette merveilleuse équation ,est de plus en plus bousillée par les confrontations de plus en plus conflictuelles ,les hommes excessivement aimables,serviables ,généreux,et presque des anges ,se trouvent par certaines contrariétés ,transformés en bêtes féroces,cruels,et ça peut aller jusqu'au crime ,il n'y a aucun tribunal capable de rendre justice ,il faut tout juste remettre l'équation dans ses dimensions féeriques ,j'admire la poésie quand elle oeuvre dans cette direction philosophique ,il faut que la poésie soit prise en main par des philosophes doués inspirés par des données subtiles qui mettent en exergues la relation pas de sexualité conflictuelle ,mais l'équation où l'attraction physique ne soit que simple socle pour l'alliance des âmes ,9OL ARROUHOU MIN AMRI RABBI ,l'imperceptible ,le spontané,l'involontaire ( les cou-de-foudre ,et tout ce que la philosophie et toutes les sciences étudient minutieusement ,doivent être pris au sérieux et avec plus de mise en application ,le jargon des pénalités et des tribunaux doit être banni ,il n'y a que la MORALE éthique du Saint CORAN ( qui exclut l'odieuse polygamie ,et l'horreur de la jalousie,et son impact cruel sur l'amour propre de l'épouse ,ce problème n'a pas été débattu philosophiquement ,par des vrais sages savants qui savent interpréter les paroles d'ALLAH :ma nazzalna 3aleyka'l CORAANA li tach9a ,par conséquent la polygamie est la chose la plus horrible qui poignarde l'amour propre et cause le degré le plus cruel de CHA9AA ,...c'est très vaste comme débat ,la laïcité est une politique d'autruche ,il faut la bannir ,l'exclure ,lui arracher les micros ,la PAROLE D'ALLAH :wa lan ta3dilou wa law haristom ,ferme le conflit sur le délit des lits .et le débas se poursuit sur l'équation :homme et femmes ( qui réalise la volonté d'ALLAH ...wasta3marakom fiha ...c'est à dire ils a charger les humains de PEUPLER la terre ,voilà l'objectif de la création de la race humaine .ALLAH protège aussi bien les hommes que les femmes ,il les veut en perpétuel relation d'AMOUR ,et d'entraide,alors gare aux femmes qui blessent l'amour prope des hommes par l'expression la plus insupportable ,du plus haut degré de violence ,la VIOLENCE VERBALE:makich ragil ,dont le sadisme féminin ,emploie comme des kalachnikov ...parfois contre une complaisance d'admiration ,qui tourne à des injures ,et des accrochages ,voilà où le hijab peut faire éviter beaucoup de problèmes .

Montygolikely
| 31-07-2016 13:15
Amende et sanctions pénales "pour tout auteur de harcèlement envers les femmes dans un lieu public", et dans les autres lieux, privés notamment, tu y a pensé ?

Abel Chater
| 30-07-2016 08:25
Maintenant, il faut trouver des hommes qui voudraient risquer une vie avec les femmes tunisiennes!!!
Ce n'est pas pour rien que les hommes tunisiens cherchent foyer dans les cafés du matin au soir. Cette phobie entre les hommes et les femmes que nos politiciens arrivistes plagient d'Europe, sans tenir le moindre compte de la différence de nos cultures réciproques, va bientôt cultiver l'homosexualité, qui l'emportera en Tunisie comme c'est le cas en Occident.
Pauvres hommes tunisiens qu'on féminise et qu'on éloigne des femmes à coups de lois semant l'inégalité, l'anxiété, le refus et l'abandon d'un plaisir censé être commun et constructif, non pas animal et destructif.
Ceci est le résultat éclatant de l'éloignement de notre religion musulmane et de nos us et coutumes. Nous cherchons à imiter les autres, mais nous avons perdu toutes les logiques humaines.

Kays
| 29-07-2016 11:04
J'ajoute enfin que lorsque la sexualité sera libre, éclairée et donc civilisée, lorsque les femmes seront considérées par les hommes comme des êtres libres de leur choix et donc responsables alors nous pourrons enfin penser à autre chose et penser à travailler, à agir, à construire un pays, à fonder un foyer basé sur une entente profonde sans toujours se demander si l'autre sera fidèle sexuellement (ce qui est une forme d'ingérence et d'infantilisation de l'autre)...Cette loi est pour le moment un mal nécessaire qui agit sur les conséquences, peut-être un jour agiront nous sur les causes. Cessons d'être bigots. Tahya Chahb tounsi.

Kays
| 29-07-2016 09:51
En vérité cette loi est un simple cache-misère des sociétés arabo-musulmanes et la sexualité. Sexualité hors mariage tabou sociétal(il existe toujours très puissament en occident aussi dans l'inconscient collectif contrairement à ce que l'on croit, il est à l'origine de nombre de déviances en vérité)totalement anachronique car mariage de plus en plus difficile et tardif mais aussi divorce lourd de conséquences donc hésitation au mariage. Pourtant la vie vient de l'acte sexuel, un acte naturel. J'entends tous les moralisateurs nous parler de fahicha, sauf que l'islam ne s'occupe pas et ne doit pas s'occuper de la vie privée des gens(puisque 4 témoins occulaires je le rappelle, autant dire un film porno). Impossible en Tunisie pour un couple non marié de dormir ensemble à l'hôtel en Tunisie(ridicule). Impossible pour une femme d'avoir une relation sexuelle sans être traitée de prostituée ou sans même qu'elle fasse ressentir au garçon qu'il lui est redevable et que si ce dernier met un terme à la relation elle regrettera de toute son âme(ce qui est vrai). Il est temps de réfléchir à une sexualité moderne et civilisée, libre sans être débauché. Une femme vierge n'est pas nécessairement une femme morale et une femme ayant couché une mauvaise femme. La liberté est cruciale mais pas celle des lois, celle des mentalités. Les hommes doivent se libérer de cette hantise et aliénante peur de l'infidélité sexuelle et les femmes des carcans de la réputation. Lorsque l'entente est là, lorsque l'on raisonne, peu importe le passé de l'autre, on s'améliore mutuellement, on s'aime et pour longtemps en refusant tout ingérence dans la vie de l'autre. TAHYA CHAHB TOUNSI.

Hanninal
| 28-07-2016 11:29
Regardez ce lien et vous comprendrez à quel genre harcèlement nous aurons droit...
au pays des cons !
https://youtu.be/-IrRaQeT_jI

MDO
| 28-07-2016 10:51
Ils ont oublié aussi d'exclure du champ d'application de la loi les femmes qui s'entrainent au karaté.

Dr. Jamel Tazarki
| 27-07-2016 22:33
Je suis persuadé que vous exagérez avec votre feedback à mon commentaire. Un Million de Tunisiennes ont voté contre Ennahdha et contre Dr. Moncef Marzouki et vous me dites "la volonté dont vous parlez avec tant de justesse n'existe pas. Elle est étouffée dans l'oeuf."

Non Très Cher Compatriote, les données empiriques sont en contradiction avec ce que vous écrivez ci-dessous!

Je vous conseille de ne jamais mettre les pieds à mon Village Tazarka, en effet avec votre mentalité envers la femme tunisienne vous risquez d'y avoir énormément de problèmes :))))

Les femmes de mon village ont une force surhumaine. Chez nous à Tazarka, il n'y a pas de harcèlement et d'agression sexuelle sur nos champs. En effet, nos femmes savent se servir d'une pioche afin de se défendre!

Très Cordialement

Jamel

Gg
| 27-07-2016 21:43
J'adore que ma Princesse me harcèle ^_^

Le Demystificateur Universel
| 27-07-2016 18:17
Joseph n'a-t-il pas ete harceler sexuellement par une femme,comme il est dit dans la sourate du Coran:"Or celle en la maison de laquelle il vivait,le sollicita de sa personne.Fermant les portes,elle lui dit:je suis a toi".Faut-il une autre loi?Assuremment,les deputés,grassement payés,beaucoup d'entre-eux absentéistes,discutent ,comme les Byzantins,du sexe des anges,alors que le pays va a vau-l'eau.