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Tribunes
Encore un effort, camarades !
21/09/2016 | 11:46
5 min
Encore un effort, camarades !

Par Nabil Ben Azouz*

  

Peut-on être de Gauche sans pour autant être progressiste ? A priori oui, puisque dans ce grand-petit pays qui est le notre, les miracles sont possibles. Non seulement on a inauguré le XXIème siècle par une Révolution inédite, mais on a également foutu un bazar pas possible dans tout le monde arabe. Bazar sans doute créateur, mais cela on ne peut pas encore le confirmer.

 

Sauf que dans ce capharnaüm a éclot un truc hybride qu’on n’a pas vu venir puisque tout le monde, à cette époque pas très lointaine, ne faisait que s’opposer et non proposer. Facile ! Cet objet volage non identifié, compliqué qu’il est, s’appelle la « Gauche la plus bête du monde ». Oui, nos propos s’adressent aux phacochères des « beni non-non ». On va encore nous en vouloir de taper sur la Gauche ! Eh bien oui, mais on s’en contrebalance, car nous sommes de Gauche et, ne dit-on pas «qui aime bien châtie bien ». Tant qu’ils continueront à nous raconter des sornettes, pour ne pas dire des mensonges, on ne cessera jamais de leur dire leurs vérités. Toutes choses relatives, bien sûr.

  

Venons-en à l’essentiel. Etre de Gauche, c’est bien sûr défendre le couffin de « khalti Mbarka », cher à certains. Etre de Gauche, c’est aussi avoir une vision sur l’économie, et donc sur le pouvoir d’achat de la veuve et de l’orphelin ainsi que les bas salaires. C’est avoir également une idée claire sur les enjeux de la lutte des classes entre riches et pauvres. C’est aussi lutter contre l’impérialisme comprador et pouvoir détricoter les affres des grands argentiers de la finance et de la mondialisation. On sait que vous adorez ces mots pompeux qui ne font plaisir qu’à votre ego. Etre de Gauche, c’est aussi avoir une vision géostratégique des conflits régionaux et des relations internationales de plus en plus compliquées et bien sûr, ne jamais cesser de lutter pour les causes légitimes, surtout dans le monde arabe. Sans oublier quand même camarades, les Mandings de la Guinée-Bissau, les Haoussas du Nigeria, les Kouchites de l’Afar Djiboutien, les touaregs du Niger ainsi que les tribus d’Amérique Latine qu’on ne peut toutes citer. Non ! Vous ne les connaissez-pas ? On en était sûr. N’a-t-on pas appris, camarades, que « tous les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits » partout là où ils sont et quelle que soit leur origine, leur couleur, leur sexe ou leur religion ? Encore un effort, camarades !

  

Au final et en abrégeant, peut-on donc être de Gauche et progressiste si on ne s’intéresse guère aux causes qui, à priori, vous semblent secondaires et d’arrière garde ? Où en êtes-vous des combats pour les minorités dans notre pays ? Pour vous donner bonne conscience, vous vous limitez souvent à des communiqués creux, insipides et qui ne font rien bouger. On ne vous a guère entendus souffler mot, ni mener de réelles campagnes pour les droits des homosexuels et des lesbiennes et des jeunes qui fument des joints. On ne vous demande pas de promouvoir cela, mais tout simplement de les défendre. Bref, de défendre les véritables droits de l’Homme. Oui camarades, ces droits ne se limitent pas uniquement à la liberté d’expression et aux droit politiques et sociaux.

 

Quelle est aussi votre position sur les minorités religieuses telles que les juifs et les chrétiens tunisiens (oui, camarades, ils existent !) dont les droits sont bafoués, et on ne cite que leur droit de vouloir passer leur service militaire dans leur propre armée tunisienne ? Pourquoi vous ne pipez mot sur les noirs tunisiens totalement exclus des premières charges politiques de leur propre pays ? Où en êtes-vous de l’égalité totale hommes et femmes dans l’héritage ? Votre pachyderme caractériel, député et dépité du sud, a dit que ce n’était pas le moment ! Honte à vous. Il a fallu qu’un ex-islamiste bon teint, devenu ministre en fasse une proposition de loi pour que vous sortiez du guet. Mais hélas, pour dire encore et encore « non et non » ! Où en êtes-vous du combat pour la laïcité qu’à priori vous ne comprenez guère, en laissant, comble d’amateurisme, le gourou de ceux qui n’ont de Tunisien que la nationalité, de dire les pires choses et des plus inexactes sur cette notion des plus fondamentales pour tout progressiste qui se respecte. Vous restez hagards, dubitatifs et donc in fine, complices.

  

Peut-on se dire démocrate et de Gauche en Tunisie, tout en vouant un culte sans fin, voire même maladif, à des dictateurs venus d’Orient ou même ayant vécu à nos frontières ? Où en êtes-vous du droit des handicapés à une vie décente, du droit des réfugiés et des immigrés d’ici et de là-bas ? Vous êtes strictement aphones sur ces sujets. Où en êtes-vous également, du combat plus que révolutionnaire aujourd’hui, à savoir, la lutte pour un environnement sain et agréable pour tous les Tunisiens inquiets et fatigués ? C’est pourtant toutes ces minorités que vous négligez qui feront demain votre force. Ne dit-on pas chez nous « flayess m3a flayess ywalliou kdayess » ? On entend déjà des voix vénéneuses et acrimonieuses qui s’élèvent pour déverser des laves de mépris sur ce que vous prétendez être des idées petites bourgeoises et d’arrière garde ! Vous n’y êtes pas.

 

Notre impression, c’est que vous êtes restés bloqués dans les années 80 du temps certes glorieux du Front Farabundo Marti de Libération Nationale ou du Front Sandiniste de Libération Nationale. Que dis-je, du temps de Mao, de Staline et d’Enver Hoxha (Anouar Khoudja, pour les intimes). Timorés que vous êtes sur tous ces sujets, vous glissez insidieusement hélas, vers une Gauche populiste et des plus dogmatiques. Eh, oh du bateau, réveillez-vous ! Les combats ont changé… Le monde a changé.

 

Conclusion donc, tant que vous ne changerez pas : oui vous êtes de Gauche, mais hélas, nullement progressistes. Finalement vous n’êtes que des Rouges conservateurs.

  

*Militant indépendant     

21/09/2016 | 11:46
5 min
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Commentaires (7)

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Ksahly
| 24-09-2016 07:34
La gauche des années 70 des universités tunisiennes

Canalou
| 22-09-2016 08:46
La social democrastie est le le regime qui s adapte au 21 em siecle pour les pays en voie de developpement .nous sommes perdus entre conservatisme liberal sauvage et gauche stalinienne .ces 2 extremes sont depasses et tous nos problemes aujourdhui derivent du manque de culture politique et economique et l amalgame entre islam foi et islam politique qui veut appliquer le liberalisme .la majorite des electeurs de la nakba ne comprennent rien a l economie et pensent qu un ctoyant veut la justice sociale alors que c est l enrichissement prive qu ils veulent .pourquoi les politiques ne disent rien a ce sujet ?pourquoi les incultes vont pour les elections ? Dans les mosquees ils sont remontes contre la gauche et quand ils vont voter des representants de partis leur imposent des choix et dans certaines delegations, ils leur donnent des fiches deja cochees.

Moha Le Fou
| 21-09-2016 16:57
La gauche tunisienne n'a jamais pu se dépasser tant elle est versée dans le purement théorique et phraséologique_pour utiliser une terme marxien_, ce qui l'a figée en une chorale chantant un refrain sempiternel de l'histoire désolante des zawalis...La gauche est appelée à transformer son discours et son action politique_sinon qu'elle s'éclipse et continue sa vie de réclusion dans les cavernes pour relire ses manifestes...J'appelle les progressistes à un grand parti que j'appellerai 'Rassemblement Démocratique de Tunisie'. Ce sera un rassemblement plus rassembleur que le Front Populaire. Juste méditez l'idée.

Wednesday
| 21-09-2016 16:19
trop sérieux la chronique, on vous veut reprendre votre style du 1er article, style tahar Faza3.

Laissez nous vous lire en gardant le sourire.

Merçi.

BABA SAnfour
| 21-09-2016 14:28
Vous pensez vraiment que révolution il y a eue?
Pourquoi ce ton presque méprisant à l'envers d'Enver Hodja,si j'ose dire?Oui ce grand homme!
Et vous n'évoquez point la Papouasie et encore moins ses Papous!Je suis réellement déçu!
Salutations quand même !

kameleon78
| 21-09-2016 14:01
Excellent article qui nous détaille toutes les aspirations de la Gauche, qu'elle soit archaïque ou moderne. La Gauche tunisienne n'est pas archaïque mais ringarde avec des combats qui ressemblent plus à celles du Parti Communiste que celle de Jaurès. La Gauche tunisienne n'a aucune vision du futur, elle n'a aucune réflexion sur les débats de notre temps, sur l'égalité des sexes, sur le racisme, sur la redistribution équitable des richesses, cette Gauche tunisienne n'est restée que sur des débats terre à terre d'épiciers, sur les salaires alors que le pays croule sous les dettes, voir cet exemple de la grève des hôteliers alors que les touristes sont inexistants. En Tunisie la Gauche ne veut plus rien dire, les tunisiens sont foncièrement conservateurs en majorité qu'ils soient laïques ou islamistes, c'est un mot qui ne veut plus rien dire chez nous sauf pour quelques nostalgiques.

A4
| 21-09-2016 12:31
LA CLASSE POLITIQUE
Ecrit par A4 - Tunis, le 16 Avril 2016

Et voilà la classe politique
Elle est là tout à fait au fond
Ils sont malades et nostalgiques
Plongés dans un sommeil profond
Allez savoir ce qu'ils fabriquent
Moi je déteste ce qu'ils font

Les nostalgiques en millénaires
Sont à droite, à l'extrême
Ils ont des rêves qui dégénèrent
En califat d'ordre sixième
En morbides instincts sanguinaires
Qui leur donnent ce vil teint blême

Ces nostalgiques du désert
N'ont qu'une seule vocation
Qui les ronge tel un cancer
Les poussant à la destruction
De toute oeuvre ou espace vert
Laissant ruine et désolation

Les nostalgiques en centenaires
Occupent la rangée de gauche
Ils radotent à bout de nerfs
Et ils trouvent que tout est moche
Tout leur monde est en binaire
Tous leurs beaux rêves s'effilochent

Ces nostalgiques des glaciers
Des murailles et des rocheuses
Ont des programmes populaciers
Pour fainéants et pleureuses
Qui veulent vider le couscoussier
Des bosseurs et des bosseuses

Les nostalgiques en décennies
Suffoquent et ont besoin d'air
Se chamaillent, sont à l'agonie
A la recherche d'un leader
Les guidant au chemin béni
Aboutissant au belvédère

Ces nostalgiques des tropiques
Des jeux et des enfantillages
Sont des modernes archaïques
Qui ont raté leur aiguillage
Ils ont l'allure pragmatique
Mais la cervelle est d'un autre âge

Tout ce beau monde me dégoûte
Tous ces nostalgiques m'indiffèrent
Leur seul cri "en arrière toute"
Ne peut nous mener qu'en enfer
C'est bientôt la banqueroute
Pour ceux regardant en arrière