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Chroniques
En Tunisie, un délinquant a plus de chances d’être président qu’un patriote
21/05/2018 | 15:59
5 min

 

Maya Jeribi est partie et, même pour son décès, elle ne nous a pas surpris. Elle nous a préparés depuis plus d’un an à ce départ, à ce triste sort. C’était un certain 3 février au Palais des Congrès où nous étions tous là pour elle ! Il y avait de l’émotion, beaucoup d’émotion ce jour-là, on la savait malade, on la savait partante et elle savait qu’on savait. Pourtant, elle a été la plus forte de nous tous. Comme d’habitude.

La chétive a toujours été forte, a toujours été grande, très grande. Sous la dictature et sous la troïka, le courage de Maya Jeribi a été supérieur à celui de 99,99% des « mâles » tunisiens. Repose en paix chère, très chère, Maya. On ne t’oubliera pas de sitôt, on essaiera de te préparer des héritières ! 

« Maya Jeribi est morte, préparez vos filles pour la vie ! A chaque fois où une grande figure féminine disparaît, passez le témoin à vos filles pour qu’elles la remplacent ! Apprenez-leur à se battre pour les libertés, pour le droit des femmes, pour le droit à la culture. Si Maya est morte, transmettez un peu de sa flamme à vos filles et aussi à vos garçons ! ». On ne peut mieux dire que ce message plein de vie et d’espoir donné par le journaliste Moncef Ben Mrad au lendemain du décès de Maya Jeribi. Repose en paix Maya !

 

Quinze jours après les municipales, la guéguerre continue encore à la tête de l’Etat. A l’avant-dernier épisode, on a laissé Youssef Chahed sur un siège éjectable. Sa tête est réclamée par les ingrats de Nidaa Tounes, les suiveurs d’Ennahdha, les néo-soviétiques de l’UGTT et les serviteurs de l’Utica.

A Nidaa, Youssef Chahed est celui qui empêche de tourner en rond et de nommer les amis. A Ennahdha, c’est la politique du « faites ce que vous voulez, tant que vous ne vous occupez pas de nous, de notre financement et de nos terroristes ». A l’UGTT, Youssef Chahed est une menace contre la quiétude et le farniente bureaucratiques, alors qu’à l’Utica, certains voudraient ouvrir la voie à l’ancien chef du gouvernement Mehdi Jomâa, selon des bruits de couloirs. Mehdi Jomâa qui n'en rate plus une pour tacler son successeur à la Kasbah. Une fois à la Résidence de France, une fois dans une salle d’embarquement, une fois avec un diplomate, une fois avec un ambassadeur, toute occasion est propice pour dire du mal de Youssef Chahed. Le seul à battre Mehdi Jomâa dans son nouveau sport favori de non-respect du devoir de réserve est Moncef Marzouki. C’est quand même triste pour quelqu’un comme Mehdi Jomâa d’être comparé à un tel saugrenu. Et c’est assez médiocre de dénigrer ses compatriotes, surtout quand ils sont vos successeurs, quand on est à l’étranger, car ce n’est pas ce successeur que vous fragilisez, mais l’Etat, son image et sa capacité de gouverner.

 

Dans la suite du feuilleton « qui veut prendre la place de Youssef Chahed », et vu que Béji Caïd Essebsi ne s’est pas encore résigné comme le veulent Nidaa, l’UGTT et l’Utica, on a trouvé un nouveau filon emprunté à Rached Ghannouchi et déjà testé avec succès aux dépens de Mehdi Jomâa « Oui, Youssef Chahed peut rester, mais à condition qu’il s’engage à ne pas se présenter aux élections ».

De quel droit et avec quel culot peut-on priver un chef de gouvernement en exercice d’un droit garanti par la constitution ? Réponse toute prête des champions du monde tunisiens de la politique : « Oui, nous sommes une démocratie naissante et il faudrait la préserver ! ». Une réponse identique à celle de Zine El Abidine Ben Ali quand il disait que la démocratie venait par étapes et non d’un coup. Ou cette variante : « Il ne faudrait pas utiliser les moyens de l’Etat pour réaliser ses ambitions personnelles. » Imaginez la tête d’Angela Merkel si on lui disait ça ! La chancelière allemande est à ce poste depuis 2005 et a été reconduite trois fois dans ses fonctions, sans que jamais personne n’ait eu l’idée de lui demander de quitter le gouvernement avant de se présenter aux élections !

 

A 18 mois des élections, et en plein milieu du très dur chantier des réformes, remplacer maintenant un chef du gouvernement est le pire signal d’instabilité qu’on puisse envoyer à nos partenaires étrangers. Quel que soit le nom de son éventuel successeur, il ne pourra pas être meilleur, car il n’a pas le temps matériel d’entreprendre quoi que ce soit. La Tunisie a besoin d’une grosse opération chirurgicale et celle-ci a déjà été entamée, on ne peut pas changer de chirurgien en plein acte !

Le gros souci est que ceux qui demandent la tête de Youssef Chahed ont peu d’arguments crédibles à faire valoir. Ils jugent son bilan, alors que l’heure du jugement n’a pas encore sonné. Il n’a pas fini son travail et les fruits de ce travail ne peuvent, en aucun cas, être obtenus maintenant.

Ils veulent le remplacer, sans dire par qui et, surtout, sans présenter une feuille de route claire pour le successeur. Mais quelle que soit la feuille de route qu’on va lui donner, elle ne peut pas être trop différente de celle fournie par le FMI et le Parlement européen et sur laquelle Youssef Chahed travaille déjà. Non seulement il y travaille, mais il le fait à un rythme assez lent aux yeux de nos partenaires étrangers. Ce que nos partenaires demandent c’est un État austère et fort capable de résister aux syndicats et aux calculs mesquins des politiciens et c’est exactement ce dont ne veulent pas les bourreaux de Youssef Chahed.

Puisque Nidaa, l’UGTT et l’Utica ne peuvent pas parler de programmes d’avenir et puisqu’on se limite à regarder le bout de son nez et à privilégier ses propres intérêts (partisans et institutionnels) aux intérêts de l’Etat, on n’a pas trouvé mieux que de s’asseoir sur la constitution et d’exiger au chef du gouvernement de ne plus avoir d’ambitions !

Si on veut vraiment sauver la démocratie naissante et si on pense sincèrement à l’avenir de ce pays, commençons d’abord et avant tout par respecter la Constitution !

Dans sa forme actuelle déjà, cette constitution est boiteuse et pleine de contradictions. Elle permet à ceux qui ont juré la loyauté à des pays étrangers pour obtenir leur nationalité de se présenter à la présidentielle, alors que les juifs tunisiens en sont privés ! Ne parlons pas du code électoral qui autorise les délinquants de se présenter à toutes formes d’élections au point que l’on a aujourd’hui des repris de justice siégeant à l’Assemblée nationale et, bientôt, dans les conseils municipaux. N’en rajoutons pas une couche en incluant dans la liste des « interdits de devenir président » les patriotes qui ont bien servi l’Etat et le pays !

21/05/2018 | 15:59
5 min
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Commentaires (19)

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Pro Chahed
| 22-05-2018 15:45
De quel droit ennahdha impose son diktat à Chahed? Qu'il se présente en 2019 aux élections présidentielles avec la promesse d'éradiquer les obscurantistes nahdhaouis, et qui sera tenue contrairement à la traîtrise de BCE.
Go Josef. Courage, On est avec toi.

kameleon78
| 22-05-2018 15:27
Il fallait lire "imaginaire" et non "imagination".

kameleon78
| 22-05-2018 13:23
Dans n'importe quel pays un Chef de Gouvernement (ou Premier Ministre) peut être candidat à la présidentielle en même temps. Je vous rappelle en France : Georges Pompidou en 1969 (élu). Jacques Chirac en 1986 (non élu). Balladur en 1995 (non élu). Lionel Jospin en 2002 (non élu). Je ne vois pas d'incompatibilité d'être à la fois candidat et Premier ministre. C'est une invention des islamistes afin de barrer la route à Youssef Chaed et c'est écrit nulle part qu'un Chef de Gouvernement n'a pas le droit de se présenter à la présidentielle sauf dans l'imagination des islamistes.

Pan
| 22-05-2018 08:18
La ville de Chongqing, dans le sud-ouest chinois, est une municipalité de 31 442 300 habitants, leur religion est la méditation, leur ethnie le travail et leur patrie la Chine.
La Tunisie, environ 12 000 000 d'habitants, leur religion le dinar, leur ethnie l'arrogance et l'ignorance, leur patrie les ambassades étrangères. Pour les reconnaître, il suffit de les observer dans leur quotidien, ils sont des fous de dieu, ils sont nerveux, ils peuvent vendre leur pays pour 1 dollar, ils sont racistes entre eux, ils divisent leur petit territoire en Nordiste, en Sahli, en Sfaxi, en Janoubi, en Jebali, en baldi, en goor (gougeât).
Bref, ils sont près à tout, le mari peut vendre sa femme pour un dollar, sa femme peut le vendre pour un euro, le garçon et la fille une fois mariés peuvent renvoyer leur père et leur mère dans une maison de retraite ou la démence pour une affaire de cu et de cul'?'Quant à leur histoire, elle est pleine d'évènements bizarres. Exemple: leur grand général Hannibal avait déclaré la guerre à Rome, il était sur le point de changer le destin de Carthage et rendre sont territoire le plus grand empire de l'histoire, devant ses éléphants et ses soldats Rome était sur le point de tomber. A Carthage, et, au même moment, les Hannonides (les baldiya de Carthage) étaient en train je négocier le prix de sa capture, la trahison de leur général, élu par eux avait un prix. Hannibal a préféré fuir pour se suicider en Asie Mineure.
Mais avant de quitter son pays, il avait dit : « le pays où le singe emprisonne et la souris libère n'est plus mon pays »

takilas
| 21-05-2018 22:46
Ci-après un paragraphe très significatif de cet article :

- ,A Ennahdha, c'est la politique du « faites ce que vous voulez, tant que vous ne vous occupez pas de nous, de notre financement et de nos terroristes ».

déja-vu
| 21-05-2018 21:28
Quel plaisir de voir naitre des p'tits déja-vus qui s'approprient ses idées, les uns timidement et en y apportant moults manoeuvres. les autres sans vergogne. C'est tout le but des efforts déployés.
C'est rare que j'emploie "je".
Je n'ai pas de moi surdimensionné.
L'important, c'est l'objectif que JE rate rarement. La diffusion de l'idée que JE ne pique jamais chez les autres sans les mentionner. Par honnêteté... Par galanterie.
Héhéhé...Kaskaslou...

LAM
| 21-05-2018 21:25
serait de le maintenir en poste Y Chahed A CONDITION qu'il ne se présente pas aux prochaines élections, ce qui est entièrement anticonstitutionnel. Si Nizar est un des rares journalistes à l'avoir souligné, d'où le titre de son article... Si tel était le cas, et à mon humble avis,Y. Chahed devrait refuser le poste... Cette manière de se défaire d'un concurrent potentiellement dangereux est machiavélique.

Forza
| 21-05-2018 20:59
Un jour tu attaques Siliana, le jour d'après les tribus du centre-ouest et puis les bédouins et maintenant tu fais des conclusions bêtes que l'essentiel est sur le littoral. Tu connais toi Sbitla, Dougga où les ksour de Tataouine, tu sais qui a libéré ce pays, tu peux citer trois noms de poètes et d'écrivains tunisiens .Tu viens commenter hors sujet un article politique et tu commences avec ton ton hautain qui cache en faites un complexe d'infériorité, Je peux te donner des cours en histoire et en Geo a longueur du jour. Ton tafyish d'un petit arrière-petit-fils d'un soldat d'Anatolie ou d'un mamlouk, je te l'enlève.

kameleon78
| 21-05-2018 20:38
Une chose est claire, on sait que Youssef Chaed est très populaire donc on veut l'empêcher de devenir candidat et tous les acteurs ont des raisons objectives de lui en vouloir sauf l'UTICA au contraire qui le soutient.

Les autres ont des raisons objectives de lui en vouloir. (objectives dans leur sens à eux).

1. BCE ne veut pas de YC comme candidat car c'est son rival dans le camp moderniste, un concurrent dangereux pour le président qui rêve de briguer un second mandat à 93 ans et voilà qu'un blanc-bec vient lui "casser" son rêve et de surcroît il est jeune et populaire. Pouah. Remarquez que Nidaa Tounès ne fait rien pour le soutenir.

2. Ghannouchi voit en YC un homme capable de fédérer tous les électeurs contre lui (ce qui est vrai au second tour de la présidentielle) et son parti islamiste, voilà un homme dangereux qu'il faut abattre à tout prix. YC a cette qualité de pondération, d'ouverture à la modernité, de rassembleur qui gêne le projet diabolique d'islamisation de la Tunisie donc il faut lui mettre des bâtons dans les roues même si ce n'est pas réglementaire, le Gourou ne reculera devant rien pour le "briser".

3. L'UGTT voudrait voir partir l'homme qui s'oppose à leurs demandes ponctuées par des grèves successives, l'ancien chef de gouvernement Habib Essid est passé par là, YC le sait mais il veut continuer ses réformes et c'est tout en son honneur. Taboubi et Cie veulent sa peau pour des raisons différentes, qu'importe, il faut qu'il parte.

Nephentes
| 21-05-2018 20:29
Comme je te l'ai déjà indiqué quand on est ignare on ne se la ramène pas.

Les faits resteront toujours des faits. Pas des fantasmes;

Renseigne toi sur l'histoire de ce pays et cesse tes clowneries puériles.

Je t'invite à méditer sur ce proverbe turc "L'ignorance est un état d'enfance perpétuelle."