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Chroniques
Élection présidentielle : la course à l'indécence
12/11/2014 | 1
min
Élection présidentielle : la course à l'indécence
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Par Marouen Achouri

La campagne présidentielle bat son plein. Les candidats et leurs supporters s’accordent tous sur une caractéristique : l’indécence et la médiocrité. Bien sûr, certains sont moins mauvais que d’autres, certains deviennent même dangereux à l’instar de l’actuel président de la République, mais que ceux qui cherchent le débat d’idées et la confrontation des programmes passent leur chemin ! Ce n’est pas l’élection présidentielle tunisienne qui les contentera !
Quand on évoque l’indécence d’une campagne, on ne peut s’empêcher de remémorer l’image de Moncef Marzouki sur une tribune à M’saken aux côtés de Béchir Ben Hassen. Ce dernier est un imam extrémiste qui a, par ailleurs, été condamné et emprisonné. Ce personnage avait également été invité à donner une conférence au palais de Carthage, en lieu et place de Youssef Seddik à qui le président avait promis la primauté. Bref, le président de la République ne s’interdit pas de s’afficher avec un extrémiste. Toutefois, on pourra admirer la cohérence de Moncef Marzouki puisque ses autres soutiens se nomment Imed Deghij, Recoba, Abderrahman Souguir ou Yassine Ayari. A la limite, Béchir Ben Hassen devient fréquentable en comparaison de ceux là.
Par ailleurs, Moncef Marzouki n’a pas hésité, dans l’un de ses discours, à utiliser le mot « taghout ». C’est un mot emprunté au vocabulaire des terroristes qu’ils utilisent pour désigner leurs ennemis, les membres des forces de l’ordre tunisiennes. Passons sur le fait que Moncef Marzouki ait utilisé ce terme pour désigner une frange de Tunisiens qu’il estime être hostile au pays. Il est indécent d’employer ce terme contre des Tunisiens ou de puiser dans le vocabulaire des terroristes pour faire passer ces messages pleins de haine. Passons également sur le fait qu’il s’agisse là d’un président de la République car Moncef Marzouki a arrêté de l’être depuis longtemps, si tant est qu’il y soit parvenu un jour.

Malheureusement, l’indécence n’est pas exclusive à la campagne de Moncef Marzouki. Les supporters et supportrices de Béji Caïd Essebsi n’en manquent pas non plus. Pour eux, Béji Caïd Essebsi est le seul et unique sauveur de la Tunisie, c’est celui qui a réussi là où tous les autres politiciens ont failli, il est magique, magnifique, extraordinaire. Jusque là, rien d’anormal. Mais si l’on s’avise de critiquer Béji Caïd Essebsi, on se retrouve sous le feu de ses aficionados. On se retrouve taxé d’ingratitude envers celui qui a sauvé la Tunisie du chaos, ou encore accusé de ne rien comprendre à l’intérêt national et on devient carrément un traitre à la nation parce qu’on critique Béji Caïd Essebsi. Le tout se fait dans un langage ordurier indigne des quinquagénaires qui le profèrent.
Le niveau de la campagne présidentielle est aussi tiré vers le bas par celui des différents candidats. Ceci remet sur la table la question des conditions, fixées par la loi, pour pouvoir prétendre à la magistrature suprême. On a vu des candidats comme Yassine Chennoufi incapables d’expliquer une idée, de proposer un raisonnement ou de traiter un problème. Lors de son interview sur Wataniya 1 on devait d’abord s’assurer qu’il avait bien compris la question ! On a également Hechmi Hamdi qui chante sur les plateaux télé et fait du populisme le plus vil son fond de commerce. On a également vu plusieurs candidats se précipiter chez le marabout du coin pour s’attirer ses bonnes grâces, espérant qu’il les aide ainsi à briguer la présidence de la République.

Face à cette situation, les citoyens sont amenés à faire un choix du cœur en mettant de côté les programmes et les idées neuves. Il suffit d’écouter les expressions directes de certains candidats. Ils lisent leurs feuilles et se contentent d’énoncer des généralités du genre : « Je vais combattre le chômage et la situation sécuritaire sera l’un de mes principaux soucis. Je vais également attirer les investissements et redonner vie à la roue économique tunisienne ». Comment ? Par quels mécanismes ? Avec quel financement ? Nul ne peut le savoir aujourd’hui, il faudra élire d’abord ! Quand on pense qu’un candidat comme Larbi Nasra faisait hier l’éloge du projet chimérique de Tunisia Economic City, on est en droit de s’inquiéter.
Quel que soit le gagnant de cette élection présidentielle, le plus grand perdant sera le débat d’idées. Le niveau est décidément extrêmement bas dans cette campagne, d’une part par la teneur des discours et d’autre part à cause de la nature même des candidats.
Le citoyen n’est pas dupe et les politiciens devraient s’en méfier. Les discours haineux ou réducteurs ne séduisent pas les électeurs. Cela risque de se faire sentir dans les taux de participation à la présidentielle.

12/11/2014 | 1
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