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L’égalité dans l’héritage à l’épreuve des élections
03/06/2019 | 17:59
5 min
L’égalité dans l’héritage à l’épreuve des élections

Photo : Marche pour l'égalité de l'héritage, Bardo, 10 mars 2018



Présenté comme la grande prouesse législative qui ferait pâlir d’envie les pays voisins, le projet de loi sur l’égalité successorale ne semble plus susciter grand intérêt. Il est même perçu aujourd’hui comme le boulet dont nombreux politiques voudraient se débarrasser à l’approche des grandes échéances électorales.

 

« La loi sur l’égalité successorale a peu de chances de passer avant les élections », avait déclaré la députée et présidente de la Colibe, Bochra Belhaj Hamida. La députée avait annoncé, la semaine dernière, son retrait de la vie politique. Serait-ce un aveu d’échec face à une initiative législative qui n’a pas bougé d’un pouce depuis son annonce ?

La Colibe, commission des libertés individuelles et de l’égalité, avait été chargée par le président de la République depuis août 2017, de préparer un projet de loi consacrant l’égalité successorale entre les deux sexes ainsi qu’un code des libertés individuelles. Cette annonce avait été faite à l’occasion de la journée nationale de la femme le 13 août à Carthage. Le président de la République avait présenté cette loi comme une évidence absolue pour instaurer l’égalité, déjà consacrée par la constitution.

A l’occasion Béji Caïd Essebsi avait invité près de 1000 femmes de tous bords, afin de faire sa grande annonce devant une audience féminine qui a été en grande partie derrière son investiture. Deux ans après, il n’en est toujours rien.

 

L’année dernière, le même Béji Caïd Essebsi avait refilé la patate chaude à ses adversaires d’Ennahdha leur laissant la lourde mission de voter ce projet de loi au Parlement. BCE avait déclaré ce jour-là que « le projet de l’égalité successorale sera soumis à l’Assemblée des représentants du peuple » et qu’il sortait donc de son champ d’action. « Le parti Ennahdha m’a remis une lettre contenant sa position. Le parti approuve certains points et émet des réserves sur d’autres. C’est évident, nul ne peut contester son référentiel religieux malgré tout. Nous avons traité avec ce parti durant près de 3 ans et nous avons réussi à maintenir une stabilité relative grâce au consensus. En tout cas, je ne parlerai pas du contenu de la lettre et je laisse le choix à Ennahdha s’il veut la rendre publique », avait-il dit.

Le parti de Rached Ghannouchi avait, en effet, longtemps hésité avant d’exprimer une position franche et tranchée à ce sujet, se contentant au départ de dire que le parti s’opposera à tout ce qui est contraire à la religion, évoquant des « ajustements à apporter au projet de loi ».

Aujourd’hui, c’est une position sans équivoque qu’exprime le parti islamiste qui rejette désormais publiquement le projet de loi et le qualifie de « injustifié, inutile et n'ayant pas sa place dans la société tunisienne ». Noureddine Bhiri, président du bloc parlementaire d’Ennahdha, avait déclaré hier sur Express fm que ce projet de loi « ne passera pas » ajoutant « qu'aucun député tunisien ne peut accepter d'approuver une loi contraire aux préceptes de la religion ».

 

A l’approche des échéances électorales, les discours changent, deviennent plus tranchés ou, au contraire, empreints de prudence, afin de coller aux désidératas des masses électorales. Si le président de la République avait misé sur la mobilisation de la gente féminine pour que ce projet de loi soit accepté par les masses, on estime aujourd’hui que le morceau reste trop gros à faire avaler et on n’hésite pas à faire marche arrière ou à adopter des positions plus timorées.

« Aucun parti politique n’a pris une position franche en faveur des libertés individuelles ni n’a réellement milité pour, en dehors du parti Al Massar », a déclaré Bochra Behaj Hamida il y a quelques jours.

En plus d’Al Massar, des formations politiques comme le Front populaire et le Courant démocratique ont, eux-aussi, aussi exprimé des positions en faveur de cette égalité. Cependant, rien ne garantit à l’heure actuelle qu’ils voteront pour au moment du passage par l’ARP. Hamma Hammami avait annoncé hier que l'égalité successorale n'est pas liée à la religion vu que c'est une question « historique et sociale », sans pour autant parler ouvertement de vote. En effet, si ce projet de loi a suscité beaucoup d’intérêt au moment où il a été présenté, les parties politiques qui l’avaient soutenu à l’époque n’osent plus trop en parler aujourd’hui.

 

De son côté, Bochra Belhaj Hmida est catégorique, se disant « malheureusement convaincue que le projet de loi concernant l’égalité successorale ne passerait pas pendant ce mandat » et ajoutant que certains font tout pour le retarder. Un projet de loi pourtant prioritaire et bénéficiant d’une demande d’examen d’urgence, mais qui traine encore depuis des mois.

A l’heure actuelle, « une seule audition a été faite et beaucoup d’autres sont prévues. C’est une tactique pour en retarder l’examen », explique la députée qui préfère ne pas baisser les bras. « Ce projet de loi n’a pas été enterré et ne le sera pas », a-t-elle dit.

 

Force est de constater que ce sera aux prochaines élections législatives de décider du sort de cette loi, très attendue pour certains. Pour l’instant, Ennahdha estime que lors du prochain mandat parlementaire, le nombre des opposants à ce projet de loi aura doublé affirmant « qu'aucun député tunisien ne peut accepter d'approuver une loi contraire aux préceptes de la religion ». Le jour où ce projet de loi viendra à être voté au Parlement, de nombreux masques tomberont. Mais ceci devra attendre…

 

 

 

Synda Tajine

 

03/06/2019 | 17:59
5 min
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Commentaires (10)

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ameur k
| 04-06-2019 13:37
cet essai pour faire evoluer le pays révele 4 points :
1-la roublardise du président BCE,qui ne donne jamais de suites à ses annonces tonutruantes et fait de la propagande à sa personne.ça ne passe plus...tout le monde s 'accorde à ce que son élection est le plus grand DESASTRE qu à subit ce pays
2-ennahdha , le parti islamique conservateur type freres musulmans ne reconnait jamais la CITOYENNETE mais "arriia : les sujets de sa majeste" et de ce fait elle n aide en rien à l evolution citoyenne.Elle regarde tjrs en arriére vers "essalaf" du 6é siecle et donc le pays n integrera jamais la modernité
3-les autres partis , soit dit modernistes ,resteront à jamais des opportunistes ,calculateurs , ss références et n iront jamais loin puisqu ils ne défendent pas la citoyenneté dans ses fondements universels : la parfaite EGALITE des devoirs et des droits des etres humains indépendement des religions
4- bravo Mme BOCHRA pour votre effort louable ainsi que l equipe de militants qui vous a accompagnée. L histoire retiendra ceux qui veulent faire evoluer ce pays au 21 é siecle et les autres qui seront jetés à la pobelle de l histoire ( essebssia , el khouanjia , el intihezia ....)

HatemC
| 04-06-2019 10:20
L'axe que tu cites t'emmerde le consanguin... Eux ont réussi le loser, ta haine vient de tes échecs tout comme tes semblables issus de l'exode rural. HC

EL OUAFFY Y
| 04-06-2019 10:10
Dommage et je suis très étonné de lire ce genre de texte qui ce contradicte avec le livret sacré le coran
Il me semble que la méthode de partage de l'héritage est déjà tranché aucun modification n'est admise ;faut que le sexe féminin se contente de ce que Dieux nous insisté et surtout pour ceux qui pratiquent la religieux Islamique pour les autres ils ne sont pas obliger d'appliqués .
En entende la Tunisie la Verte La Zewtouna .

Analyste stagiaire
| 03-06-2019 23:43
Preuve qu a part la bourgeoisie francisee du triangle Carthage-la marsa -Gammarth et autres filiales mineures du grand Tunis, qui se prennent pour le peuple tunisien, l ecrasante majorite n en veut pas de cette attaque contre sa religion et son identite arabo-musulmane. Si les partis politiques font la sourde oreille c est parcequ ils tiennent a ne pas perdre leur electeurs, et leur silence est une confirmation que le peuple refuse et refusera ce projet de lui. Est ce si difficile a comprendre? On n attaque pas la religion d un peuple croyant, meme si dans son sein il y a un grand nombre de croyants non coherents.

Monder Chadi
| 03-06-2019 22:54
Avec tout ces retards accumulés et les absences injustifiées des Députés , J'avais des doutes sur son passage devant l' Assemblée , maintenant je suis certain qu'elle ne passera pas tant que ces islamerdeux et conservateurs auront une tête de mule

L'astronaute
| 03-06-2019 22:09
BCE a toujours été un gros réactionnaire tendance "musclée" (cf son passé politique, ses positions sur l'article 230 du code pénal - Mohamed Salah Ben Aïssa s'en souvient encore - ou sur les peines concernant l'usage du cannabis, etc.). Son histoire de Colibe est un gros enfumage a l'intention de son électorat féminin. Il a toujours su qu'avec Ennahdha en tant que force principale à l'ARP, et l'état décomposé des "forces progressistes et centristes" (lol) son projet de loi ne rassemblerait jamais suffisamment de voix pour passer.
En revanche, pour se lustrer le plumage à Genève, Paris, New York ou Riyad, alors là, oui, il est vrai que cela peut s'avérer utile. Pour le reste, c'est zéro. C'est pas à un vieux grigou qu'on apprend à raconter des salades (ou quelque chose comme ça).

Jamal
| 03-06-2019 22:07
https://al-mawarith.com/le-coran-revisite-a-travers-le-projet-tunisien-de-suppression-des-discriminations-en-matiere-de-droit-des-successions/

Alya
| 03-06-2019 20:39
Honnêtement c est histoire d égalité dans l héritage est j'y faux problème! ET LES PARENTS QUI VEULENT PRATIQUER L EGALITE N ONT PAS BESOIN DE L AVAL DE BEJI CAID ESSEBSI MOI JE LE FERAI

DHEJ
| 03-06-2019 18:55
Comme l'égalité entre la citoyenne de Bouzid et la citoyenne de la Marsa...

'?galité parlons-en aux femmes victimes de l'accident de ce jour!


Il faut que l'état commence par être juste et égalise la répartition de la richesse entre la citoyenne de la Marsa et celle de Bouzid: infrastructures, environnement et qualité de vie!

DHEJ
| 03-06-2019 17:30
Que l'état s'occupe de ses biens et n'a pas o s'immiscer dans les biens des gens


L'inviolabilité des biens des gens porte atteinte à la propriété individuelle!