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Tunisie – Le machiavélisme d'Ennahdha pour imposer ses options
01/10/2013 | 1
min
Tunisie – Le machiavélisme d'Ennahdha pour imposer ses options
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Manœuvres… Tergiversations… Contradictions… Double langage… Flou…, sont autant de termes pour qualifier, voire dénoncer l’attitude d’Ennahdha vis-à-vis de l’initiative de l’UGTT, soutenue par l’UTICA, la LTDH et le Conseil de l’Ordre des avocats prônant le dialogue pour sortir le pays du marasme dans lequel il se débat depuis l’assassinat de l’élu et militant Mohamed Brahmi.
Le parti islamiste a beau sortir un communiqué, à chaque fois qu’il se sent trop accusé, pour annoncer qu’il accepte ladite initiative. Et à chaque fois, il réussit à faire tomber tout le monde dans le panneau, puisqu’à chaque fois, aussi, les lieutenants de Rached Ghannouchi et autres membres du gouvernement de la Troïka remettent les choses à leur place. En fait, la position d’Ennahdha n’a pas changé d’un seul iota !

L’opposition parle d’impasse et de blocage qui nuisent considérablement au vécu quotidien des citoyens tout en pointant Ennahdha du doigt. Le parti du Guide Ghannouchi s’en défend tout en semblant se plaire dans cette situation.
En effet, la Troïka continue à gouverner comme si de rien n’était. L’Assemblée nationale constituante a repris ses travaux sans les élus retirés, Ali Laârayedh se maintient à la Kasbah et continue à s’afficher, notamment, lors des actions protocolaires, histoire de montrer qu’il demeure serein et indéboulonnable.

Plus de deux mois après l’assassinat de Brahmi, il y a eu une succession de drames et de faits graves et accablants pour le régime qui fait le dos rond et réussit à faire passer sa caravane en dépit de l’ampleur des protestations du Front de salut national dont notamment le sit-in du Bardo et les manifestations gigantesques du 6 et du 13 août et celles du 7 septembre 2013.
Il y eut, ainsi, la recrudescence des incidents, voire affrontements à Jebel Chaâmbi où pas moins de huit soldats ont été égorgés de sang froid par les terroristes. Il y eut les révélations quant à l’implication d’Ansar Al Chariâa dans la planification d’attentats terroristes et dans d’autres éventuels assassinats de personnalités politiques médiatiques et culturelles.
Il y eut cette terrible révélation quant à l’existence d’une fameuse correspondance adressée par les services de renseignements américains (CIA) mettant en garde contre un plan pour assassiner, justement, Mohamed Brahmi, sans que les services compétents du ministère de l’Intérieur ne daignent prendre les mesures qui s’imposent.

Taïeb Laâguili, président de l'Initiative pour la Recherche de la Vérité sur l'Assassinat de Chokri Belaïd (IRVA), qui a fait des révélations sur cette affaire, en promet d’autres plus fracassantes pour demain. Et dans un autre pays démocratique, ce genre de révélations et doutes pesant sur le gouvernement sont suffisantes et nécessaires pour qu’il s’en aille.
Mais pas pour Ennahdha et compagnie qui s’arcboutent tellement à leurs chaises et se comportent comme s’ils restent éternellement au pouvoir. On continue à voter les projets de loi, on continue à parler de programmes et de stratégies de longue haleine alors qu’ils sons censés en phase finale de la période transitoire et qu’ils doivent, par conséquent, se limiter à liquider les affaires courant tout en concentrant les efforts sur le processus électoral.

Pis encore ! Ennahdha continue à procéder à des dizaines et dizaines de nominations dans des postes clés de l’administration tunisienne, alors que toutes les voix démocratiques l’appelle, non pas à stopper les désignations, mais à en réviser les milliers déjà faites.
En tous les cas, les Sahbi Atig, Abdelkrim Harouni, Yamina Zoghlami, Houcine Jaziri, Abdelwahab Maâter et Sihem Badi, pour ne citer que ceux-là, crient haut et fort avec plein d’arrogance, que le gouvernement d’Ali Laârayedh ne partira pas avant l’achèvement de la phase transitoire. Autrement dit, pas avant la fin de la rédaction de la Constitution, le vote de la loi électorale et la mise sur pied de l’Instance supérieure indépendante des élections.
Et, bien entendu, pas avant de tomber d’accord sur les personnalités devant composer l’éventuel prochain gouvernement, plus précisément celle qui devrait le présider. Ce qui revient à dire qu’on en aura pour plusieurs mois encore.

Les représentants d’Ennahdha semblent avoir bien appris leur leçon dans le sens où ils font du « copié collé » pour débiter les mêmes argumentations : la peur du vide, l’impossibilité pour les prérogatives de l’ANC, l’obligation de poursuivre la gestion des affaires conformément aux dispositions stipulées par ce qu’on appelle la « petite constitution » et cette fameuse trouvaille qu’est un gouvernement d’élections !
Si un cabinet de technocrates est incapable de gérer les affaires courantes, comme le prétend la Troïka, comment un gouvernement destiné uniquement à organiser les élections peut-il le faire ? Pourtant, un gouvernement de technocrates dirigé par Béji Caïd Essebsi a, bel et bien, réussi à mener la barque, de mars à octobre 2011, à bon port à savoir assurer la bonne marche du vécu quotidien et organiser un scrutin libre, neutre et démocratique pour la première fois en Tunisie !
Or, Ennahdha ne donne aucune idée concrète de la nature de ce gouvernement qu’elle surnomme « d’élections ». Ce qui confirme les accusations de maintien du flou par le parti islamiste qui reste dans les généralités, dans le théorique et dans l’opacité la plus totale. Ce parti continue à ressasser sa disposition à entamer le dialogue sur la base de l’initiative de l’UGTT, mais sans accepter les différents points de la feuille de route qu’elle contient…

C’est ce qu’on appelle l’art de tergiverser et de prendre ses vis-à-vis pour des gens moins intelligents que soi, pour ne pas dire autre chose. C’est exacerbant comme attitude, que certains observateurs n’hésitent pas à qualifier de « cynique voire machiavélique », dans le sens où les responsables du parti islamiste sont conscients qu’ils vendent du vent et que leurs adversaires n’y peuvent pas grand-chose.
Ils savent qu’ils peuvent rester au pouvoir autant qu’ils le veulent, à moins d’un remake du scénario égyptien ou une peu probable décision de désobéissance civile générale, d’où cette intransigeance doublée d’une arrogance exaspérante. Ce double discours du mouvement islamiste face à la feuille de route proposée par le quartette est à l’origine d’une perte du temps et d’une complication de la situation de crise actuelle.

Alors, qui peut infléchir les positions rigides d’Ennahdha ? C’est peu probable dans la mesure où, à maintes reprises, des dirigeants de ce parti ont laissé entendre qu’ils ne se laisseront pas faire et qu’ils sont prêts à défendre leur « légitimité », pourtant caduque.
Qui peut prendre le risque d’être la cause, même indirectement, d’une mise à feu et à sang du pays ? Les exemples ne manquent pas. En Algérie, il a fallu plus de dix ans et des centaines de milliers de victimes, souvent des civils innocents pour pacifier le pays.
En Libye, les groupuscules islamistes refusent de se soumettre à toute autorité. Ils tiennent à avoir la grosse part du « gâteau », convaincus comme ils sont que si Kadhafi a été liquidé, c’est grâce à eux.
En Syrie, les islamistes du Front d’Al Nosra et d’Al Qaïda n’ont pas hésité à retourner leurs armes contre l’Armée Libre parce qu’ils se croient les seuls détenteurs de la vérité.
Plus récemment encore, on constate que tout en étant au pouvoir, l’ancien président Morsi avait encouragé l’émergence de groupes terroristes armés que ses partisans utilisent actuellement pour terroriser les Egyptiens.

Et en Tunisie ? Les partisans d’Ansar Al Chariâa ont été tolérés voire encouragés à agir en toute impunité tout en fermant les yeux sur la multiplication des caches d’armes au point que tout indique que notre pays n’est pas à l’abri d’attentats et autres assassinats pour le déstabiliser en cas de départ forcé mais motivé ou encore en cas de défaite électorale.
On n’en est pas encore là, mais le dernier scénario cité n’est pas à écarter, d’où la multiplication des déclarations, celle de Béji Caïd Essebsi en tête, précisant que tous les protagonistes sont « condamnés tôt ou tard à opter pour le dialogue et à s’asseoir autour de la même table »…

Noureddine HLAOUI
01/10/2013 | 1
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